Rafaâ Ben Achour
Professeur émérite à l’Université de Carthage, faculté des Sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis, Juge à la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples
https://orcid.org/0000-0001-5890-3745
Edition: AHRY Volume 4
Pages: 83 - 98
Citation: R Ben Achour ‘Les Protocoles normatifs à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples’ (2020) 4 Annuaire africain des droits de l’homme 83-98
http://doi.org/10.29053/2523-1367/2020/v4a5
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RÉSUMÉ:
La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples reconnaît un nombre important de droits et libertés. Elle jette les bases du système africain de protection des droits de l’homme. Elle comporte cependant des lacunes. Son article 66 permet de la compléter par des protocoles ou des accords particuliers. D’autres instruments viendront donc consolider les droits proclamés par elle ou en consacrer d’autres. La Charte sera complétée par quatre protocoles. D’abord, un protocole institutionnel, le Protocole relatif à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples portant création d’une Cour africaine des droits de l’homme et des peuples. Ensuite, trois protocoles normatifs à savoir: le Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique; le Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux personnes âgées et le Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des personnes handicapées en Afrique. Dans cet article nous nous intéressons exclusivement aux trois protocoles normatifs à la Charte dans la mesure où ces instruments des droits de l’homme viennent consolider son tissu normatif tout en confiant la tâche de leur mise en œuvre respectivement à la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples et à la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples selon des modalités diverses. En développant les garanties normatives pour la protection des droits des plus vulnérables, ces trois protocoles font, sans nul doute, une contribution significative au cadre normatif de protection des droits de l’homme en Afrique. Leur non ratification révèle, cependant, les réticences récurrentes des États africains de ratifier les traités adoptés dans le cadre de l’OUA/UA.
TITLE AND ABSTRACT IN ENGLISH:
Normative Protocols to the African Charter on Human and Peoples’ Rights
Abstract:
The African Charter on Human and Peoples’ Rights (African Charter) recognises a significant number of rights and freedoms. It lays the foundations for the African system for the protection of human rights. However, it has shortcomings. Its article 66 allows it to be supplemented by protocols or specific agreements. Other instruments therefore are able to consolidate the rights proclaimed by the Charter, or to enshrine others. The Charter has been supplemented by four protocols. The first is an institutional protocol, the Protocol to the African Charter Establishing an African Court on Human and Peoples’ Rights. Three normative protocols followed: the Protocol to the African Charter on the Rights of Women in Africa; the Protocol to the African Charter on the Rights of Older Persons in Africa and the Protocol to the African Charter on the Rights of Persons with Disabilities in Africa. This article focuses on the three normative Protocols to the Charter insofar as these human rights instruments consolidate its normative fabric while entrusting the task of their implementation to the African Commission on Human and Peoples’ Rights and the African Court on Human and Peoples’ Rights. By elaborating the content of the rights of some of the most vulnerable, the three Protocols without doubt make a significant addition to the African human rights framework. However, their non-ratification highlights the recurrent problem of African states’ reluctance to ratify African treaties.
MOTS CLÉS:
Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique, Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux personnes âgées, Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux personnes handicapées, catégories vulnérables, Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, Cour africaine des droits de l’homme et des peuples
SOMMAIRE:
2 La consolidation du tissu normatif de la Charte
3 La mise en œuvre des trois protocoles normatifs à la Charte
1 INTRODUCTION
Le système régional africain de protection des droits de l’homme, n’a vu le jour qu’en 1981 avec l’adoption de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (Charte africaine). En effet, après une assez longue période de maturation, la Charte africaine sera adoptée, le 28 juin 1981, par le 17ème Sommet de l’Organisation de l’Unité africaine (OUA) réuni à Nairobi, Kenya. La Charte africaine qui est entrée en vigueur le 26 octobre 1986 constitue l’instrument central du système régional africain des droits de l’homme. Elle est, d’un côté, le premier texte africain, en matière de droits de l’homme. Elle est, d’un autre côté, ratifiée par tous les Etats membres de l’Union africaine, sauf le Maroc.1
L’Afrique, ou du moins une grande partie du continent, subissait encore le joug colonial jusqu’aux années 70 du siècle dernier.2 La décennie 1960 - 1970 a été celle de la lutte des peuples africains pour l’éradication totale du colonialisme du continent africain sous l’égide de l’OUA, créée à Addis-Abeba (Éthiopie) le 25 mai 1963.3 La décennie suivante (1970 - 1980) a été, quant à elle, dominée par la problématique de la lutte contre le sous-développement économique et social. A cette époque, la question de la protection des droits de l’homme a été reléguée à un second plan et a été perçue comme un luxe coûteux pour les États africains. Certains chefs d’États avaient considéré que les droits de l’homme sont une théorie importée, incompatible avec la réalité des pays africains et contraire aux exigences du développement. Pour eux le citoyen africain a besoin de nourriture, de santé et d’instruction, plutôt que de liberté de conscience ou de liberté associative. Un tel discours a longtemps trouvé un écho très favorable sur le continent africain notamment lorsqu’il était question de critiques de l’autoritarisme.
Il n’est donc pas étonnant de constater que la Charte de l’OUA du 25 mai 1963, n’a donné aucune importance à «l’homme» africain et ce, au profit d’un renforcement du pouvoir politique et de la puissance étatique.
Les références de la Charte de l’OUA aux droits de l’homme sont, en effet, très discrètes, laconiques et ambiguës. Ladite Charte se contente, ainsi, dans son préambule (paragraphe 9), d’affirmer, de manière incidente, l’adhésion des États membres aux principes de la Charte des Nations Unies et de la Déclaration universelle des droits de l’homme qui offrent «une base solide pour une coopération pacifique et fructueuse entre [les] Etats». L’article 2 de la Charte, relatif aux objectifs de l’OUA, ne fait, en revanche, aucune allusion aux droits de l’homme, se contentant d’évoquer les principes de solidarité entre les États africains et d’éradication de la colonisation dans le continent.
Toutefois, et en dépit de cette théorie dominante, une élite africaine avait conscience que la question du développement et de la stabilité en Afrique ne pouvait pas être résolue indépendamment de la garantie des droits de l’homme et des peuples africains. C’est cette prise de conscience qui a été à l’origine de l’adoption en 1981 de la Charte africaine, texte qui constitue le noyau dur du système africain de protection des droits de l’homme.
L’indifférence de la Charte de l’OUA par rapport aux droits de l’homme a été comblée par l’Acte constitutif de l’Union africaine adopté à Lomé (Togo) le 11 juillet 2000, et entré en vigueur le 9 juillet 2001. Ainsi, l’Acte constitutif prévoit-il, dans son préambule, que les chefs d’États et de Gouvernement des États membres sont «[r]ésolus à promouvoir et à protéger les droits de l’homme et des peuples, à consolider les institutions et la culture démocratiques, à promouvoir la bonne gouvernance et l’État de droit». Il n’en demeure pas moins, toutefois, que le rang des droits de l’homme dans l’Union africaine reste secondaire. Ils figurent, en effet, parmi les derniers points du préambule et de l’article 3 du texte fondateur relatif aux objectifs de l’Union (huitième parmi 14 objectifs).4
Pendant plusieurs années, la défense et la protection des droits de l’homme ont constitué un sujet tabou en Afrique. L’Afrique sera le continent oublié des droits de l’homme: l’OUA se gardera toujours d’aborder ce problème au nom de la non immixtion dans les affaires intérieures des Etats membres. La Communauté internationale elle-même, fera preuve de beaucoup d’indulgence et sera très discrète sur les violations flagrantes et scandaleuses des droits de l’homme dans beaucoup d’États africains, si bien que sous le regard complaisant et complice des autres, apparaîtront en Afrique, des régimes sanguinaires (Ouganda, Guinée équatoriale, République centrafricaine). Les pratiques répressives et criminelles de ces régimes seront à l’origine des premières réactions africaines sur la question des droits de l’homme, tant sur le plan gouvernemental que non gouvernemental.
Sur le fond, la Charte reconnaît un nombre important de droits et jette les bases de la protection des droits de l’homme au niveau régional. D’autres instruments viendront, par la suite, consolider les droits proclamés par la Charte ou en consacrer d’autres. Ainsi la Charte africaine sera complétée par quatre protocoles. D’abord, un protocole institutionnel, le «Protocole relatif à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples portant création d’une Cour africaine des droits de l’homme et des peuples» adopté à Ouagadougou (Burkina Faso) le 9 juin 1998 et entré en vigueur le 25 janvier 2004, après avoir été ratifié par plus de 15 États membres de l’OUA/Union africaine.5 Ensuite, trois protocoles normatifs à savoir: le Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique adopté à Maputo (Mozambique) le 12 juillet 2003;6 le Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux personnes âgées adopté par la 30ème session de la Conférence des Chefs d’État et de gouvernement le 31 janvier 20167 et le Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des personnes handicapées, adopté à Addis-Abeba par la 36ème session de la Conférence des Chefs d’Etat et de gouvernement le 31 janvier 2016.8
Par ailleurs, plusieurs autres instruments relatifs aux droits de l’homme ont été adoptés par l’OUA/UA. Ils sont cependant autonomes par rapport à la Charte africaine. On citera à titre d’exemple la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant adoptée lors de la 26ème Conférence des chefs d’État et de gouvernement de l’Organisation de l’unité africaine en juillet 1990 et entrée en vigueur le 29 novembre 1999,9 la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance adoptée le 30 janvier 2007 et entrée en vigueur le 15 février 2012, ou encore la Convention de l’UA sur la protection et l’assistance aux personnes déplacées en Afrique adoptée le 23 octobre 2009 et entrée en vigueur le 6 décembre 2012.10
Dans cette contribution nous nous intéressons exclusivement aux trois protocoles normatifs à la Charte africaine dans la mesure où ces instruments des droits de l’homme viennent consolider le tissu normatif de la Charte de Banjul tout en confiant la tâche de leur mise en œuvre respectivement à la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (Commission africaine) et à la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (Cour africaine) selon des modalités diverses.
2 LA CONSOLIDATION DU TISSU NORMATIF DE LA CHARTE
La Charte africaine est un texte général qui procède le plus souvent par énonciation générale des droits et libertés garantis. En effet, la Charte a adopté une méthode minimaliste. Très souvent, elle se contente d’une proclamation générale du droit ou de la liberté, un peu à la manière d’une déclaration de principes, suivant de la sorte plutôt la méthode de la Déclaration universelle plutôt que celle de la Convention de Rome de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (Convention européenne). Dans le même ordre d’idées, la Charte africaine procède également par voie implicite, ce qui laisse la porte ouverte à toutes les interprétations possibles et imaginables. Pour illustrer le premier cas de figure (proclamation générale) on peut se référer à l’interdiction de l’esclavage. Très paradoxalement, et alors que l’Afrique est le continent ayant le plus subi les affres de l’esclavage, la Charte africaine ne consacre à cette question qu’un article très bref (article 5) en vertu duquel
[t]out individu a droit au respect de la dignité inhérente à la personne humaine et à la reconnaissance de sa personnalité juridique. Toutes formes d’exploitation et d’avilissement de l’homme notamment l’esclavage, la traite des personnes [...]
Nous remarquons que cette méthode est redondante pratiquement au niveau de tous les autres articles et il n’est pas utile de multiplier les illustrations. Quant au deuxième cas de figure (voie implicite), on peut citer le droit des femmes ou l’égalité des genres. Nulle mention claire et explicite de ces droits ne figure dans la Charte. Il faut se référer à l’article 2 relatif à l’égalité de jouir des droits et libertés garantis par la Charte pour trouver une mention de l’interdiction de la distinction «de sexe». Il en est de même pour l’article 3 qui dispose que «toutes les personnes bénéficient d’une totale égalité devant la loi» ou que «toutes les personnes ont droit à une égale protection de la loi». Il en est de même pour les droits des personnes âgées, des personnes handicapées ou des enfants.
L’absence de prolixité de la Charte africaine sur plusieurs droits, explique en grande partie, mais non exclusivement, la nécessité qu’ont éprouvée les Etats membres de l’OUA/UA de renforcer le tissu normatif de la Charte et de le consolider par l’adoption de trois protocoles venus combler les lacunes du texte de base et asseoir une véritable garantie des droits fondamentaux. Et ce, sur la base de l’article 66 de la Charte africaine,11 article visé dans les préambules des trois protocoles.
Les trois protocoles objet de notre étude, concernent des catégories particulièrement vulnérables, à savoir: les femmes, les personnes âgées, les handicapés. Il faut rappeler qu’en plus des trois protocoles à la Charte africaine, d’autres Conventions «autonomes» ont été adoptées pour garantir les droits d’autres catégories vulnérables à savoir: les enfants,12 les personnes déplacées13 ou les réfugiés.14 Il y a lieu donc de présenter, dans un premier temps, les normes générales contenues dans les trois protocoles (2.1), avant de s’attarder dans un deuxième temps sur les normes spécifiques à chaque catégorie protégée (2.2).
2. 1 Les normes générales
Les trois protocoles ont pour but et pour objet de compléter la Charte africaine. Pour cette raison elles commencent par des énonciations générales ou de principe. Tout d’abord, chacun des trois protocoles fait référence dans le préambule, aux dispositions pertinentes de la Charte africaine qu’il entend consolider et préciser. Concernant le Protocole de Maputo, les paragraphes 2 et 3 du préambule se réfèrent à l’article 2 de la Charte africaine relatif à la non-discrimination et à l’article 18 qui demande à tous les États d’éliminer toutes formes de discrimination à l’égard des femmes et d’assurer la protection des droits de la femme, tels que stipulés dans les déclarations et conventions internationales. De son côté, le protocole sur les personnes âgées se réfère également à l’article 2 de la Charte africaine relatif à la non-discrimination, ainsi qu’aux articles 18(4) qui dispose que: «Les personnes âgées ou handicapées ont également droit à des mesures spécifiques de protection en rapport avec leurs besoins physiques ou moraux» et 22 qui prévoit une protection spéciale pour les personnes âgées. Enfin, le Protocole sur les personnes handicapées se contente de se référer au seul article 18(4) ci-dessus cité. Il aurait pu se référer également à l’article 2 qui prohibe la discrimination ayant pour origine «toute autre situation» que la discrimination sur la base du sexe, de la langue, de la religion, etc.
Les préambules des trois protocoles ne se sont pas contentés de ces renvois à la Charte. Ils ont comporté des renvois à des instruments universels tels que les deux Pactes de 1966, ou la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDEF) de 1979, etc,15 ainsi qu’aux «atouts des traditions, des valeurs et des pratiques africaines».
Quant aux normes générales consacrées, les trois protocoles énoncent une obligation générale, diversement libellée, de reconnaître les droits, devoirs et libertés énoncés dans le Protocole et un engagement à adopter des mesures législatives ou autres mesures visant à les mettre en œuvre. Une fois les obligations générales énoncées de manière exhaustive, les trois conventions se consacrent à l’énoncé des normes spécifiques à chaque catégorie protégée.
2.2 Les normes spécifiques
Comme nous l’avons relevé plus haut, les dispositions de la Charte africaine relatives aux droits des femmes, des personnes âgées et des personnes handicapées sont lacunaires, voire inexistantes. Pour cette raison, les trois protocoles ont consacré des articles totalement dédiés à chaque droit de l’homme indispensable pour garantir le respect de l’humanité et de la dignité de ces catégories vulnérables. Ces droits se répartissent en droits spécifiques communs aux trois catégories de personnes protégées et en droits spécifiques propres à chacune des catégories protégées.
2.2.1 Les droits spécifiques communs
Le Protocole relatif au droit des femmes commence précisément par affirmer le droit à la dignité de cette catégorie d’êtres humains en lui garantissant, notamment, l’égalité avec les hommes et en la protégeant contre «toutes formes de violence, notamment la violence sexuelle et verbale», violations des droits des femmes très répandues non seulement en Afrique mais partout dans le monde.
La garantie de la dignité est également proclamée dans le Protocole relatif aux droits des personnes âgées, bien que dans des termes moins explicites que dans le premier Protocole relatif aux droits des femmes. Mais ce qui est remarquable au niveau de l’article 2(2) du Protocole sur les personnes âgées, c’est qu’il transforme ce qui n’est que «droit mou»16 en obligation juridique conventionnelle en mentionnant les «Principes de l’ONU de 1991».17 Ces derniers doivent être «intégrés dans [la] législation nationale et [être] juridiquement contraignants comme base pour assurer leurs droits». Ces principes de 1991, sont ceux-là mêmes mentionnés dans cet article 2(2) à savoir: indépendance, dignité, épanouissement personnel, participation et soins des personnes âgées. La dignité, en vertu des principes de 1991, inclut
[l]a possibilité de vivre dans la dignité et la sécurité sans être exploitées ni soumis à des sévices physiques ou mentaux» et le «[traitement] avec justice quels que soient leur âge, leur sexe, leur race ou leur origine ethnique, leurs handicaps ou autres caractéristiques, et être appréciées indépendamment de leur contribution économique.
Enfin, le Protocole relatif aux droits des personnes handicapées n’est pas en reste puisque son article 2 proclame solennellement que
[l]e présent Protocole a pour objet de promouvoir, protéger et garantir la pleine et égale jouissance de tous les droits de l’homme et de la personne humaine par toutes les personnes handicapées, et de garantir le respect de leur dignité intrinsèque.
Une obligation stricte est même mise à la charge des Etats qui doivent prendre
des mesures appropriées et efficaces, notamment mettre en place des politiques et prendre des mesures législatives, administratives, institutionnelles et budgétaires, pour assurer, respecter, protéger, promouvoir et réaliser les droits et la dignité des personnes handicapées, sans discrimination fondée sur le handicap
Une fois le droit à la dignité affirmé, chacun des trois protocoles va proclamer les droits communs, applicables aussi bien aux femmes, qu’aux personnes âgées et aux handicapés. Il s’agit, sous des formulations différentes, des droits suivants: le droit à la vie; le droit à l’intégrité, à la liberté et à la sécurité; le droit à l’interdiction de la torture, les peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants; la non-discrimination; l’égalité; le droit de participer à la vie politique et publique; la liberté d’expression et d’opinion; le droit d’accès à l’information; l’accès à la justice et l’égale protection devant la loi; la protection contre les abus et les pratiques traditionnels néfastes; le droit à l’éducation; le droit à la santé; le droit à la protection sociale; et le droit au travail.
2.2.2 Les droits spécifiques, propres à chaque catégorie
Chacun des trois protocoles a, bien évidemment, consacré un certain nombre de droits spécifiques à chaque catégorie. Ainsi, le Protocole relatif aux droits des femmes consacre-t-il les droits des femmes suivants: égalité dans le mariage, égalité en cas de séparation de corps, de divorce ou d’annulation du mariage, droit de participation au processus politique et à la prise de décision, protection des femmes dans les conflits armés, droits de la veuve, droit de succession, etc. Quant au protocole relatif aux droits des personnes âgés, il consacre de son côté les droits spécifiques suivants: protection contre la discrimination dans l’accès à l’emploi, soins et prise en charge, soins en établissement, soutien aux personnes âgées s’occupant d’enfants vulnérables, protection des personnes âgées handicapées, protection des personnes âgées dans les situations de conflit et de catastrophe, accès à la formation, participation aux programmes et aux activités de loisirs, accessibilité, sensibilisation au vieillissement et préparation à la vieillesse, etc. Enfin, le Protocole relatif aux droits des personnes handicapées garantit les droits suivants: protection et la sécurité des personnes handicapées dans les situations à risque, notamment les situations de conflit armé, les déplacements forcés, les urgences humanitaires et les catastrophes naturelles, le droit de vie dans la communauté, l’accessibilité, l’adaptation et réadaptation, le droit à un niveau de vie suffisant, le droit à l’autoreprésentation, le droit de participer à des activités sportives, récréatives et culturelles, le droit à la famille, les droits des femmes et filles handicapées, les droits des enfants handicapés, les droits des jeunes handicapés, et les droits des personnes âgées handicapées, etc.
Il y’a lieu à présent de s’interroger sur les modalités pratiques de mise en œuvre de ces trois protocoles à la Charte africaine.
3 LA MISE EN ŒUVRE DES TROIS PROTOCOLES NORMATIFS A LA CHARTE AFRICAINE
Les trois protocoles prévoient des dispositions spéciales pour leur mise en œuvre respective. Ils prévoient en effet, de manières diversifiées, une série de mécanismes de contrôle et répartissent les compétences de l’interprétation et du contrôle de l’application entre la Cour africaine d’une part, et la Commission africaine d’autre part.
Trois catégories de mécanismes sont prévus: les rapports étatiques périodiques, l’interprétation des dispositions des protocoles et enfin le contentieux de l’application.
3.1 Les rapports périodiques
Il est d’usage assez général que lors de la ratification d’un traité international relatif aux droits l’homme, les États parties assument une obligation de présenter des rapports périodiques à l’organe désigné18 par le traité pour recevoir et étudier de tels rapports. Cette procédure des rapports périodiques permet de contrôler si les États se conforment effectivement aux obligations mises à leur charge par le traité. Cette procédure a été instituée dans la plupart des traités universels des droits de l’homme tels que les deux Pactes internationaux de 1966, ou encore les différentes conventions sectorielles (discrimination raciale, torture, femmes, etc.).19
La procédure existe également au sein de Conseil des droits de l’homme de l’ONU sous la dénomination examen périodique universel (EPU) et consiste à passer en revue les réalisations de l’ensemble des Etats membres de l’ONU en matière de droits de l’homme. Chaque État a l’opportunité de présenter les mesures prises pour améliorer la situation des droits de l’homme sur son territoire en vertu de ses obligations en la matière.20
Au niveau de trois protocoles, objet de notre étude, cette procédure est consacrée. Dans son article 22(1), le Protocole sur les personnes âgées dispose:
Les États parties s’engagent à assurer la mise en œuvre du présent Protocole et à indiquer dans leurs rapports périodiques présentés à la Commission africaine conformément à l’article 62 de la Charte africaine, les mesures législatives et autres mesures prises en vue de la pleine réalisation des droits reconnus par le présent Protocole.
Une disposition équivalente existe au niveau du Protocole sur les personnes handicapées. Il s’agit de l’article 34(1) du Protocole:
Les États parties veillent à la mise en œuvre du présent Protocole et [à] indiquer, dans leurs rapports périodiques soumis conformément à l’article 62 de la Charte africaine, les mesures législatives et autres qu’ils ont prises pour la pleine réalisation des droits reconnus dans le présent Protocole.
Enfin, l’article 26(1) du Protocole de Maputo prévoit la même chose:
Les États assurent la mise en œuvre du présent protocole au niveau national et incorporent dans leurs rapports périodiques présentés conformément aux termes de l’article 62 de la Charte africaine, des indications sur les mesures législatives ou autres qu’ils ont prises pour la pleine réalisation des droits reconnus dans le présent protocole.
Ainsi les rapports périodiques sont soumis aux dispositions de l’article 62 de la Charte africaine qui règle la périodicité de la présentation des rapports et leur objet. Cependant, la Charte est muette concernant l’organe qui doit recevoir les rapports. Se prévalant des prérogatives que lui reconnaissent les articles 45 et 46 de la Charte, la Commission a alors demandé d’assumer cette fonction. Ainsi, à sa troisième session ordinaire tenue en avril 1988, elle a décidé de recommander à la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’OUA qu’elle «lui confie spécifiquement le mandat d’examiner les rapports des Etats et d’indiquer les orientations générales en ce qui concerne leur forme et leur contenu». Cette recommandation a été adoptée par la 24ème session ordinaire de la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement de l’OUA. Depuis lors, la Commission reçoit et examine les rapports des Etats présentés en application de l’article 62 de la Charte.
Relevons par ailleurs que la Commission africaine a adopté en 2009 les directives sur la présentation desdites rapports. Depuis lors, des États qui ont ratifié le Protocole ont soumis des rapports initiaux et périodiques sur le Protocole de Maputo.
Les rapports sont présentés tous les deux ans et indiquent les mesures prises par l’Etat pour rendre effectifs dans son droit internes ses engagements internationaux. A ce jour, il n’y a pas eu encore de présentation de rapports sur les protocoles des personnes âgées et des handicapées les deux protocoles n’étant toujours pas en vigueur. Cependant, nous pouvons évaluer l’efficacité de cette procédure à la lumière de la pratique aussi bien universelle que régionale des États. Le reproche le plus important adressé à la procédure des rapports est le non-respect de la périodicité de leur présentation, d’où un retard chronique au niveau de tous les organes universels et régionaux. Il faut dire, à la décharge des États, que ces derniers sont souvent submergés par le nombre et par la diversité des rapports à présenter. Par ailleurs, l’absence d’une sanction dissuasive est, de son côté, un facteur déterminant qui ne favorise pas le respect des délais.
Au niveau de la Commission, les statistiques en disent long sur le degré d’observation des délais. En consultant le 47ème rapport d’activité de la Commission,21 il ressort, concernant les rapports présentés en vertu de l’article 62 de la Charte, deux États seulement sont à jour.22 Huit États ont un retard d’un seul rapport,23 10 ont un retard de deux rapports,24 10 également sont en retard de trois rapports25 et 18 sont en retard de plus de trois rapports.26 Six États n’ont jamais présenté de rapport du tout.27
Concernant les rapports présentés en vertu de l’article 26 du Protocole de Maputo relatif aux droits des femmes, la situation n’est guère plus meilleure. En effet, et en nous référant au même 47ème rapport de la Commission, on relève les chiffres suivants: cinq États sont à jour,28 cinq ont un retard d’un seul rapport,29 trois sont en retard de deux rapports,30 un seul État est en retard de trois rapports31 et 28 États n’ont toujours pas soumis le moindre rapport.32 La sanction contre ces défaillances est prévue par l’article 84(1) de la Charte qui prévoit que
[l]e Secrétaire [de la Commission africaine] fera part à la Commission, à chaque session, de tous les cas de non présentation de rapports ou de renseignements supplémentaires [...] En pareil cas, la Commission pourra adresser à l’Etat Partie intéressé [...] un rapport ou un rappel concernant la présentation du rapport ou des renseignements supplémentaires.
Si, après ce rappel, l’État partie ne présente pas le rapport ou les renseignements supplémentaires demandés, la Commission le signale dans le rapport qu’elle adresse chaque année à la Conférence. Les rappels sont envoyés aux États parties tous les trois mois (avant c’était tous les six mois). Comme le montrent les statistiques, ces dispositions ne sont ni dissuasives ni incitatives. A chaque session du Conseil exécutif ou de la Conférence, un paragraphe redondant
FÉLICITE les États partie d’être à jour dans leur soumission des rapports périodiques à la Commission africaine et PRIE INSTAMMENT les autres États parties de soumettre leurs rapports périodiques conformément à l’Article 62 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (Charte africaine), l’Article 26 du Protocole de Maputo, et l’Article 14(4) de la Convention de Kampala
Ainsi la procédure des rapports périodiques s’avère être très peu suivi et le Etats parties à la Charte ou à un protocole ne semblent pas être particulièrement gênés par les retards accumulés.
3.2 L’interprétation
La plupart des traités internationaux consacrent une disposition à leur interprétation et surtout à la désignation de l’organe compétent en la matière. Issus de négociations diplomatiques entre une pluralité d’États hétérogènes «qui n’ont, le plus souvent, ni le même langage, ni les mêmes concepts juridiques, ni les mêmes traditions législatives»33 les traités sont toujours le fruit de compromis qui s’expriment souvent dans des formules générales, lapidaires, laconiques ambiguës voire contradictoires. Pour réaliser le résultat et aboutir à un consensus, on recourt souvent dans les organisations et conférences internationales chargées d’adopter un traité international, à ce que Guy de Lacharrière a appelé des «ambiguïtés constructives».34 Lors de l’application du traité, surgiront alors des problèmes pour établir le sens d’un ou de plusieurs termes, ou celui d’une disposition ou de plusieurs dispositions.
Les trois protocoles à la Charte africaine ont consacré, une disposition attributive de compétence à l’organe chargé de leur interprétation.
Le Protocole de Maputo sur les droits des femmes attribue la compétence de son interprétation de manière claire et précise à la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, et ce, à l’occasion, «des litiges relatifs à l’interprétation du présent Protocole découlant de son application ou de sa mise en œuvre».35 Etant donné que le Protocole a été adopté avant l’entrée en vigueur du Protocole portant création de la Cour36 et le début de son fonctionnement effectif,37 une disposition transitoire a été insérée à la fin du Protocole attribuant cette compétence à la Commission.38 Il faut signaler, qu’avant même l’adoption du Protocole, la Commission africaine a, à sa 23ème session ordinaire qui s’est tenue à Banjul, en Gambie, en avril 1998, établi un Rapporteur spécial sur les droits des femmes en Afrique. Le mandat a été renouvelé à quatre reprises avec l’adoption de la Résolution 63 à la 34ème Session ordinaire, la Résolution 78 à la 38ème Session ordinaire, la Résolution 112 à la 42ème Session ordinaire et la Résolution 154 à la 46ème Session ordinaire. Les différents rapporteurs spéciaux sur les droits de la femme ont tenu, depuis 2000, environ 10 missions pour s’informer de l’état des droits des femmes dans les États parties différents et adopté 16 résolutions. De même, la Commission a adopté les Observations générales No 2 sur l’article 14(1)(a), (b), (c) et (f) et article 14(2)(a) et (c)) du Protocole à la Charte africaine relatif aux droits de la femme en Afrique. Elles donnent des orientations claires sur les obligations générales et spécifiques des États - parties en vue de favoriser l’intégration et la mise en œuvre effectives des dispositions de l’article 14 du Protocole de Maputo. Les dites Observations générales doivent être utilisées également, lors de l’élaboration et de la soumission par les États de leurs rapports périodiques, pour rendre compte des mesures législatives et autres, par eux prises, dans le domaine de la promotion et de la protection de la santé sexuelle et reproductive des femmes et des adolescentes.
Pour sa part, le Protocole sur les personnes âgées, associe la Commission et la Cour pour assurer son interprétation. En effet, la compétence de principe est attribuée par l’article 22(2) à la Commission «[d]ans la mise en œuvre du présent protocole, la Commission africaine a le mandat de faire le suivi des dispositions du protocole conformément à la Charte africaine». Cependant, et en vertu de l’article 22(3)
[l]a Commission peut soulever toute question d’interprétation ou l’application de tout différend né de l’application ou de la mise en œuvre du présent Protocole devant la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples
Le Protocole ne précise pas si la Commission peut soulever ces questions par la voie contentieuse ou par la voie consultative.
Enfin, le Protocole sur les personnes handicapées reprend les mêmes mécanismes dans son article 34(3) et (4).
3. 3 Le contentieux
Les trois protocoles attribuent, normalement, la compétence de statuer sur les différends nés de leur application ou de leur mise en œuvre à la Charte africaine. Pour le protocole de Maputo, seule la Cour est compétente, la Commission n’intervenant qu’à titre transitoire. En vertu de l’article 27 du Protocole: «La Cour africaine des droits de l’homme et des peuples est compétente pour connaître des litiges relatifs à l’interprétation du présent Protocole, découlant de son application ou de sa mise en œuvre». La Cour africaine a eu à se pencher sur le Protocole de Maputo dans son arrêt du 11 mai 2018, Association pour le Progrès et la Défense des droits des Femmes (APDF) & Institute for Human Rights and Development in Africa (IHRDA c. Mali. Dans cette affaire, les requérants faisaient grief au code de la famille du Mali, adopté le 2 décembre 2011 par l’Assemblée nationale et promulgué le 30 décembre 2011 par le Chef de l’État, des violations du Protocole et de plusieurs autres instruments pertinents des droits de l’homme, dont la Convention africaine sur les droits et le bien-être des enfants et la Convention des Nations unies sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Dans cet arrêt, la Cour a statué sur les violations par l’État défendeur de plusieurs droits garantis par le Protocole de Maputo dont notamment: l’âge minimal du mariage pour les filles (article 6(b)), le droit de consentir au mariage (article 6(a)), le droit à la succession (article 21(2) et l’obligation d’éliminer les pratiques ou attitudes traditionnelles qui nuisent aux droits de la femme et de l’enfant (article 2(2)).39
Les deux autres protocoles attribuent également compétence à la Cour mais selon deux modes de saisine différents. Le premier mode est exercé, ainsi que cela a été mentionné ci-dessus, par la Commission africaine qui peut renvoyer à la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples les questions d’interprétation et d’exécution ou tout différend découlant de l’application ou de la mise en œuvre des protocoles en vertu des articles 22(3) du Protocole relatif aux droits des personnes âgées et 34(4) du Protocole relatif aux droits des personnes handicapées. Le deuxième mode est ouvert aux individus et ONG ayant le statut d’observateur auprès de la Commission en vertu de l’article 34(6) du Protocole de la Cour qui conditionne la recevabilité des recours des individus et des ONG à la souscription par l’État concerné d’une déclaration d’acceptation de la juridiction de la Cour. Il ya lieu de préciser à cet égard, qu’à ce jour, seuls six États membres de l’UA ont fait cette déclaration.40 Quatre autres Etats avaient fait la déclaration mais l’ont retirée suite à certaines décisions rendues par la Cour contre ces Etats.41 Bien évidemment, une telle exigence limite énormément l’accès au prétoire de la Cour aux citoyens africains.
4 CONCLUSION
L’adoption de trois protocoles normatifs additionnels à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples portant garantie de droits de catégories vulnérables est sans aucun doute une avancée considérable. Cependant, l’adhésion très timorée des Etats membres de l’UA à ces Protocoles laisse perplexe. Si le Protocole sur les droits des femmes a été ratifié par 42 États membres (avec de nombreuses réserves et déclarations interprétatives) et est entré en vigueur, il n’en est pas de même pour les deux autres protocoles sur les droits des personnes âgées ou des personnes handicapées. Non seulement ils ne sont toujours pas entrés en vigueur, mais ils n’ont été ratifiés que par deux Etats uniquement pour le Protocole sur les personnes âgées et zéro ratifications pour le Protocole sur les personnes handicapées. Il s’agit là d’un problème récurrent pour les traités conclus dans le cadre de l’OUA/UA. Très souvent, les Etats sont beaucoup plus prompts à ratifier les traités universels alors que la ratification des traités continentaux traîne en longueur.
1. A Ba et autres L’Organisation de l’unité africaine: de la Charte d’Addis-Abeba à la Convention africaine des droits de l’homme et des peuples (1984); F Ouguergouz La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples. Une approche juridique des droits de l’homme entre tradition et modernité (1993); The African Charter on Human and People’s Rights. A comprehensive agenda for human dignity and sustainable democracy in Africa (2003); M Kamto (dir) La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et le Protocole y relatif portant création de la Cour africaine des droits de l’homme (2011).
2. Le dernier pays africain à avoir recouvré son indépendance est la Namibie le 21 mars 1990. Elle était soumise à la colonisation sud-africaine.
3. Du 22 au 25 mai 1963, 30 pays africains participent dans la capitale éthiopienne à la conférence constitutive de l’OUA qui marque l’avènement de la première organisation panafricaine. Une Charte en définit les objectifs, principes et institutions. En juillet 1999, lors du sommet extraordinaire de Syrte, l’OUA décide d’établir une nouvelle organisation appelée à la remplacer. L’UA, lancée officiellement au Sommet de Durban en 2002, a pour objectif d’accélérer et d’approfondir le processus d’intégration économique et politique sur le continent. Son Acte constitutif prévoit des organes et institutions inspirés notamment du modèle de l’Union européenne.
4. ‘(h) promouvoir et protéger les droits de l’homme et des peuples conformément à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et aux autres instruments pertinents relatifs aux droits de l’homme’.
5. À ce jour, 30 États seulement ont ratifié le Protocole. Il s’agit de l’Algérie, du Bénin, du Burkina Faso, du Burundi, de la Côte d’Ivoire, des Comores, du Congo, du Gabon, de la Gambie, du Ghana, du Kenya, de la Libye, du Lesotho, du Mali, du Malawi, du Mozambique, de la Mauritanie, de Maurice, du Nigéria, du Niger, du Rwanda, de la République arabe sahraouie démocratique, de l’Afrique du Sud, du Sénégal, de la Tanzanie, du Tchad, du Togo, de la Tunisie, l’Ouganda et la République du Cameroun. Voir www.au.int
Le Protocole établissant la Cour africaine prévoit qu’une fois qu’un État a ratifié le Protocole, il doit aussi faire une déclaration spéciale acceptant la compétence de la Cour africaine pour permettre aux citoyens de saisir directement la Cour. À ce jour dix pays seulement ont fait une telle déclaration. Ces pays sont le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Gambie, le Ghana, le Rwanda, le Malawi, le Mali, la Tanzanie et la Tunisie. Cependant, le Rwanda, la Tanzanie, le Bénin et la Côte d’Ivoire ont retiré leurs déclarations si bien qu’il n’y a guère plus de cirq Etats qui reconnaissent la compétence de la Cour africaine de recevoir des requêtes individuelles ou des requêtes émanant d’ONG ayant le statut d’observateur auprès de la Commission africaine.
6. Signé par 49 et ratifié par 42 Etats, le Protocole de Maputo est entré en vigueur le 25 novembre 2005 avec cependant plusieurs réserves et déclarations interprétatives. Voir L Burgorgue-Larsen Les 3 cours régionales des droits de l’homme in context, la justice qui n’allait pas de soi (2020) 173 et 174; F Quilleré-Mazjoub ‘Le Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes: un projet trop ambitieux’ (2008) 73 Revue trimestrielle des droits de l’homme 127-162; CCM Kongo ‘Le protocole à la Charte africaine relatif aux droits de femmes en Afrique: état des lieux’ disponible sur https://www.researchgate.net/publication/339390675 (consulté le 2 novembre 2020).
7. Signé par 17 et ratifié par 2 Etats uniquement (Bénin et Lesotho). L’entrée en vigueur est conditionnée par le dépôt des instruments de ratification de 15 Etats.
9. Signée par 44 et ratifiée par 49 Etats avec des réserves importantes émanant de 4 Etats: Botswana, Egypte, Mauritanie et Soudan.
11. ‘Des protocoles ou accords particuliers pourront, en cas de besoin, compléter les dispositions de la présente Charte.’
12. Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant du 29 juillet 1990 et entrée en vigueur le 29 novembre 1999.
13. Convention de l’Union africaine sur la protection et l’assistance aux personnes déplacées en Afrique (Convention de Kampala) du 23 octobre 2009, entrée en vigueur le 6 décembre 2012.
14. Convention de l’OUA régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique du 10 septembre 1969, entrée en vigueur 20 janvier 1974.
15. Par exemple le paragraphe 10 du préambule du Protocole sur les personnes âgées: ‘Considérant les déclarations, conventions et instruments internationaux, notamment la Convention sur l’élimination de la discrimination raciale (CERD) de 1965, le Pacte international de 1966 relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), le Pacte international de 1966 relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC), la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDEF) de 1979, le Plan d’action des Nations Unies de 1982 sur le vieillissement, la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants de 1984, la Déclaration des Nations Unies sur le droit au développement de 1986, les Principes des Nations Unies pour les personnes âgées de 1991, la Proclamation des Nations Unies sur le vieillissement de 1992, le Plan d’action sur le vieillissement (PAIMV) de 2002 à Madrid’.
16. F Chatzistavrou ‘L’usage du soft law dans le système juridique international et ses implications sémantiques et pratiques sur la notion de règle de droit’ Le Portique 15 (2005) 15 décembre 2007 http://journals.openedition.org/leportique/591 (consulté le 21 octobre 2020).
17. Les Principes des Nations Unies pour les personnes âgées ont été adoptés par l’Assemblée générale des Nations Unies (résolution 46/91) le 16 décembre 1991.
18. Y Le Bouthillier & D Rouget ‘La procédure des rapports périodiques en application des traités relatifs aux droits de la personne: l’après-conférence de Vienne’ (1995) 32 Canadian Yearbook of International Law/Annuaire canadien de droit international 173-217; A Dormenval Procédures onusiennes de mise en œuvre des droits de l’homme: limites ou défauts? (1991) https://books.open edition.org/iheid/2182 (consulté le 21 novembre 2020).
19. Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale adoptée le 21 décembre 1965, entrée en vigueur le 4 janvier 1969; Pacte international relatif aux droits civils et politiques adopté le 16 décembre 1966, entré en vigueur le 23 mars 1976; Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, adopté le 16 décembre 1966, entré en vigueur le 23 mars 1976; Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, adoptée le 18 décembre 1979, entrée en vigueur le 3 septembre 1981; Convention contre la torture et les peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, adoptée le 10 décembre 1984, entrée en vigueur le 26 juin 1987; Convention relative aux droits de l’enfant, adoptée le 20 novembre 1989, entrée en vigueur le 2 septembre 1990; Convention internationale sur l’élimination et la répression du crime d’apartheid, adoptée le 30 novembre 1973, entrée en vigueur le 18 juillet 1976; Convention internationale contre l’apartheid dans les sports adoptée le 10 décembre 1985, entrée en vigueur le 3 avril 1988; Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille adoptée le 18 décembre 1990, non entrée en vigueur le 1er juillet 2003.
20. L’examen périodique universel a été établi par la résolution 60/251 adoptée le 15 mars 2006 de l’Assemblée générale des Nations Unies et qui est à l’origine de la création du Conseil des droits de l’homme.
21. Rapport soumis à la 32ème session ordinaire du Conseil exécutif de l’UA tenue à Addis-Abeba les 6 et 7 février 2020 et à la 33ème session de la Conférence de l’Union tenue à Addis-Abeba les 9 et 10 février 2020. La Conférence, dans sa décision EX.CL/Dec. 1080(XXXVI), a autorisé la publication du rapport.
24. Afrique du Sud, Algérie, Botswana, Côte d’Ivoire, Kenya, Maurice, Mauritanie, Namibie, République démocratique du Congo et Tchad.
25. Burkina Faso, Djibouti, Ethiopie, Gabon, Liberia, Malawi, Ouganda, République arabe sahraouie démocratique, Sénégal et Sierra.
26. Bénin, Burundi, Cabo Verde, Cameroun, Congo, Eswatini, Ghana, Guinée, Libye, Madagascar, Mali, Mozambique, Seychelles, Soudan, République centrafricaine, Tanzanie, Tunisie et Zambie.
32. Algérie, Bénin, Cabo Verde, Cameroun, Comores, Congo, Côte d’Ivoire, Djibouti, Eswatini, Ethiopie, Gabon, Ghana, Guinée, Guinée Bissau, Guinée équatoriale, Kenya, Liberia, Libye, Mali, Maurice, Mozambique, Ouganda, Sao Tomé et Principe, Sierra Leone, Seychelles, Tanzanie, Tunisie et Zambie.
36. Le Protocole est entré en vigueur le 25 janvier 2004, après avoir été ratifié par plus de 15 pays.
37. Les premiers juges de la Cour ont été élus en janvier 2006. Ils ont prêté serment devant l’Assemblée des Chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine, le 2 juillet 2006. La Cour a officiellement débuté ses activités en novembre 2006. Elle a rendu son premier jugement en 2009 suite à une requête en date du 11 août 2008 (Arrêt Michelot Yogogombaye c. Sénégal).
38. ‘En attendant la mise en place de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples est compétente pour connaître des litiges relatifs à l’interprétation du présent Protocole et découlant de son application ou de sa mise en œuvre’.