Daniel Owona
 Doctorant, Master en Droits de l’Homme et Action Humanitaire (Université Catholique d’Afrique Centrale), Licence en Droit et Administration publique (Université de Yaoundé II Soa)
Juriste, Field Legality Advisory Group. L’auteur remercie les membres du comité éditorial et Ada Pierre Gaël pour leurs commentaires qui ont permis l’amélioration de la présente contribution tant dans sa forme que dans son fond


 Edition: AHRY Volume 3
  Pages: 157 - 178
 Citation: D Owona ‘Droits de l’homme et justice climatique en Afrique’ (2019) 3 Annuaire africain des droits de l’homme 157-178 http://doi.org/10.29053/2523-1367/2019/v3a8
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RÉSUMÉ :

La justice climatique, dans son acception judiciaire, se développe progressivement dans le monde en touchant à plusieurs problématiques dont celle des droits de l’homme. Fort de ce constat, la présente contribution analyse la place accordée aux droits de l’homme dans les contentieux climatiques recensés en Afrique. En se fondant sur une approche sociojuridique et une analyse praxéologique des décisions de justice sélectionnées sur le continent, l’article constate le caractère subsidiaire des droits de l’homme dans lesdits contentieux. D’une part, des droits de l’homme spécifiques y sont invoqués comme moyens par les plaideurs et comme outils d’analyse par les juges. Il s’agit du triptyque droit à la vie, droit à la dignité humaine et droit à un environnement propre et sain, sans poison ni pollution et du droit à un environnement sain. D’autre part, le contentieux africain des droits de l’homme en matière climatique est relativement représenté sur le continent du fait de son caractère embryonnaire au niveau national et inexistant au niveau régional. Enfin, malgré l’inexistence du contentieux régional, le système africain des droits de l’homme et le régime communautaire de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) offrent des possibilités de développement au regard des interprétations juridictionnelles de droits de l’homme menacés par les changements climatiques. La recherche caractérise les droits humains dans la justice climatique en Afrique tout en proposant des pistes de multiplication.

TITLE AND ABSTRACT IN ENGLISH:

Human rights and the climate justice in Africa

ABSTRACT:

Climate change, in its judicial understanding, is increasingly developing worldwide by touching on various issues including human rights. Against that background, this article undertakes an analysis on the place afforded to human rights in the adjudication of climate related issues in Africa. Using a socio-legal approach and praxiological analysis of judicial decisions selected across the continent, the article establishes the subsidiary nature of human rights in such adjudication. On the one hand, specific human rights are invoked therein as submissions by the litigants and as tools of reasoning by judges, especially the trio of the right to life, the right to dignity and the right to a clean, healthy and safe environment, without poison or pollution. On the other hand, climate related human rights litigation in Africa is relatively represented in the continent due to its burgeoning nature at the national level and non-existent at the regional level. Finally, despite the necessity of regional litigation, the African human rights system and the regime operated by ECOWAS offer opportunities to consider human rights when climate justice issues are being adjudicated. This article therefore locates human rights in climate justice in Africa while proposing ways of developing related litigation.

MOTS CLÉS: droits de l’homme, justice climatique, contentieux climatique, contentieux africain des droits de l’homme en matière climatique

 

SOMMAIRE:

1 Introduction

2 L’invocation de droits de l’homme spécifiques

2.1 Le triptyque droit à la vie, droit à la dignité humaine et droit à un environnement propre et sain, sans poison ni pollution comme moyen

2.2 Le droit à un environnement sain comme outil d’analyse

3 La représentativité du contentieux africain des droits de l’homme en matière climatique

3.1 Un contentieux national embryonnaire

3.2 Un contentieux régional inexistant

4 Conclusion

1 INTRODUCTION

« De la justice environnementale, qui s’est jusqu’à présent focalisée sur les écosystèmes et la biodiversité, nous sommes passés à la justice climatique ».1 Cette assertion du juge pakistanais de la Lahore High Court dans l’affaire Leghari2 met en lumière l’importance accordée aujourd’hui à la justice climatique suite au constat des conséquences néfastes des changements climatiques.3 En effet, ces derniers représentent un enjeu majeur non seulement pour la protection de l’humanité, mais aussi pour celle des systèmes naturels.4 Pour preuve, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) affirme que les changements climatiques conduiront par exemple à un appauvrissement des ressources renouvelables en eau de surface et en eau souterraine dans la plupart des régions subtropicales arides, ce qui exacerbera la concurrence intersectorielle autour des ressources hydriques.5 Bien plus, en raison des changements climatiques, d’ici le milieu du 21e siècle et au-delà, la redistribution des espèces marines à l’échelle mondiale et la réduction de la biodiversité marine dans les régions sensibles auront une incidence sur la pérennité de la productivité de la pêche et d’autres services éco systémiques.6 Dès lors, des actions en faveur de la justice climatique concourront à la justice environnementale par la protection incidente des écosystèmes et de la biodiversité. Mais encore faut-il savoir ce que l’on entend concrètement par justice climatique.

Née des revendications de différents courants de la société civile qui lui associaient une compréhension particulière en fonction des intérêts défendus,7 la justice climatique apparaît comme un concept fondamentalement éthique mettant en exergue des questions relatives à l’équité, à l’égalité, à la responsabilité ou encore à la protection de droits subjectifs soulevées par les changements climatiques. Et, en fonction de la compréhension de ces questions, deux principaux types de justice climatique se démarquent en l’occurrence la justice corrective prônée par les pays du Sud, et la justice distributive à laquelle se réfèrent les économistes et philosophes des pays du Nord.8 La justice corrective vise à « corriger » les inégalités causées par les changements climatiques et subies le plus gravement et directement par les populations extrêmement pauvres et vulnérables.9 Parmi ces populations, l’on retrouve celles vivant sur le continent africain du fait de sa grande exposition aux changements climatiques et de sa faible capacité d’adaptation.10 Cette justice se fonde sur trois idées essentielles notamment la responsabilité historique des pays occidentaux dans les changements climatiques, leur dette écologique ou climatique envers les pays en développement et celle des « global commons » ou biens communs que fournit la terre.11 Elle représente alors un argument dans les négociations sur le climat pour permettre aux pays du Sud d’obtenir des aides dans la mise en œuvre des politiques de lutte contre les changements climatiques.12

La justice distributive quant à elle entend répartir les responsabilités des changements climatiques proportionnellement au niveau d’émission de gaz à effet de serre (GES) étant donné que celui-ci ne devient problématique qu’à partir du dépassement d’un seuil minimum.13 Cette justice est matérialisée par le principe des responsabilités communes mais différenciées énoncé expressément dans la Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement14 et réaffirmé dans la Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (Convention cadre sur le climat) de 1992.15 Ainsi, contrairement à la justice corrective, la justice distributive repose sur l’idée d’un partage de responsabilités entre tous les Etats dans la survenance des changements climatiques. Elle ne saurait donc être le fait d’un seul groupe.

Ces deux types de justice sont critiqués par certains parce qu’ils ne sont pas centrés sur la nature. D’une part, la justice distributive envisage la nature comme une ressource ou un ensemble de biens que l’on s’approprie ou que l’on se partage, d’autre part la justice corrective ne fait pas de place à la nature mais plutôt aux affrontements entre les Etats du Nord et du Sud.16 Pour remédier à cela il est alors proposé un concept de justice climatique qui lierait le social à l’environnemental en tenant compte de la diversité des cultures.17

Au-delà de ce volet éthique, le concept de justice climatique fait également référence au phénomène de « judiciarisation »18 du changement climatique sur lequel s’appesantit la présente recherche. En effet, des litiges administratifs ou judiciaires soulevant directement et expressément une question de fait ou de droit concernant les causes et effets du changement climatique19 se sont développés de manière significative dans divers Etats. En mars 2017, l’on dénombrait 654 contentieux « climatiques »20 aux Etats-Unis et 230 dans l’ensemble des autres Etats (Nigéria, Afrique du Sud, Nouvelle Zélande,...).21 Avec pour objectif d’établir la responsabilité des activités humaines sur le climat,22 ce mouvement est né du désir des organisations non gouvernementales de disposer d’un moyen de décision ou de contrôle des engagements climatiques des Etats23 en l’absence de mécanisme de contrôle et de sanction de la Convention-cadre sur le climat et de l’Accord de Paris.24 Mais le contentieux climatique ne se limite pas à l’engagement de la responsabilité de l’Etat ou de ses entités infra-étatiques du fait de leurs actions ou omissions dans la mise en œuvre des politiques climatiques.25 Il vise également les entreprises qui étaient d’ailleurs les premières cibles de ce contentieux dès les années 2000 aux Etats Unis.26

Ainsi, diversifiés par leur nombre, les contentieux climatiques le sont également par leur objet, les personnes dont l’engagement de la responsabilité est demandé ou encore la nature des recours. C’est ce qui a fait dire à Cournil et Varison que le contentieux climatique a une nature polymorphe27 du fait du dynamisme des requérants28 qui recherchent en permanence de nouvelles stratégies contentieuses pour obtenir gain de cause. C’est dans cette perspective des contentieux climatiques fondés sur les droits de l’homme a vu le jour dans le monde tant à l’échelle nationale qu’au niveau régional.29 Sur le continent américain par exemple, la Commission interaméricaine des droits de l’Homme (Commission interaméricaine) a été saisie par des peuples autochtones à la suite d’une modification de leur approche contentieuse. Initialement fondée sur la conception des changements climatiques comme une question de protection de la nature relevant alors du droit civil ou du droit de l’environnement, la stratégie des Inuit et des peuples Athabaskan des Etats-Unis et du Canada a été revue pour s’investir davantage sur les droits humains plus adaptés à leurs revendications.30 En effet, suite à l’échec de leur tentative de condamnation d’un groupe d’entreprises pétrolières et de l’énergie pour des dommages subis à cause des inondations en se fondant sur la théorie de la nuisance, les Inuit ont saisi la Commission interaméicaine en demandant réparation pour la violation de leurs droits humains par les Etats Unis du fait de leurs émissions de GES.31 Les requérants arguaient que les actes et les omissions des Etats Unis en matière climatique violaient différents droits humains à l’instar des droits aux bienfaits de la culture, à la propriété, à la santé ou encore à la vie.32

L’établissement progressif des liens entre les droits de l’homme et les changements climatiques tient au constat des impacts négatifs de ces derniers sur les conditions de vie humaines. A ce propos, le GIEC affirme par exemple que la modification du régime de précipitation ou de la fonte des neiges et des glaces perturbe les systèmes hydrologiques et influe sur la quantité et la qualité des ressources hydriques.33 Or, selon le Comité des droits économiques, sociaux et culturels, le droit à l’eau consiste en un approvisionnement suffisant, physiquement accessible et à un coût abordable, d’une eau salubre et de qualité acceptable pour les usages personnels et domestiques de chacun.34 Par ailleurs, une quantité adéquate d’eau salubre est nécessaire pour prévenir la mortalité due à la déshydratation et pour réduire le risque de transmission de maladies d’origine hydrique ainsi que pour la consommation, la cuisine et l’hygiène personnelle.35 Fort de cela, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels relève que les Etats parties au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels doivent établir des mécanismes pour36

évaluer les impacts des actions qui pourraient empiéter sur la disponibilité de l’eau et des écosystèmes naturels des bassins hydrographiques, tels que les changements climatiques, la désertification et l’augmentation de la salinité du sol, la déforestation et la perte de la biodiversité. (nous soulignons)

C’est dire que le changement climatique menace la jouissance du droit à l’eau en ce qu’il limitera la quantité et la qualité de l’eau salubre disponible pour les populations. En outre, les Etats ont des obligations positives pour assurer la jouissance de cette prérogative dans le contexte de changement climatique actuel.

La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (Commission africaine) a également reconnu que les droits de l’homme sont menacés par les changements climatiques. En effet, dans sa résolution 153 sur le changement climatique et les droits de l’homme et la nécessité d’une étude sur son impact en Afrique, elle se dit préoccupée que l’absence de sauvegarde des droits de l’homme dans divers projets de texte ou de convention sur les changements climatiques en cours de négociation ne mette en péril la vie, l’intégrité physique et les moyens de subsistance des membres les plus vulnérables, en particulier les communautés autochtones et locales isolées, les femmes et les autres groupes sociaux vulnérables.37 C’est la raison pour laquelle elle38

APPELLE la Conférence des chefs d’Etat et de Gouvernement de l’Union africaine à s’assurer que les normes et mesures de protection des droits de l’homme, telles que le principe du consentement préalable, libre et informé, soient incluses dans le texte juridique adopté sur le changement climatique devant servir de mesure préventive des réinstallations forcées, de la dépossession des biens, de la perte des moyens de subsistance de violations de droits similaires.

Malgré le constat d’un large consensus sur le fait que les changements climatiques ont généralement des impacts négatifs sur la réalisation des droits humains, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme relève toutefois qu’il est moins évident de déterminer si, et jusqu’à quel niveau, ces effets peuvent être qualifiés de violations des droits de l’homme au sens strictement légal.39 En effet, la justiciabilité des changements climatiques met en lumière diverses problématiques telles que la preuve des dommages ou encore le lien de causalité40 nécessaires pour l’établissement d’un lien strict avec un droit de l’homme. C’est pourquoi Cournil et Varison arguent que les contentieux climatiques représentent un laboratoire des grands défis juridiques.41 Les différents contentieux climatiques observables et notamment relatifs aux droits de l’homme dans le cadre de la présente recherche, constituent donc des tentatives d’approfondissement de ces liens afin de faire reconnaitre la violation de droits humains.

Le continent africain n’est pas en reste dans la dynamique de judiciarisation du climat. En effet, le Sabin Center for Climate Change Law recense six contentieux se déroulant sur le continent uniquement dans les pays anglo-saxons notamment le Nigéria, l’Afrique du Sud, l’Ouganda et le Kenya.42A ce jour, ni la base de données du Sabin Center for Climate Change Law, ni celle du Grantham Research Institute on Climate Change and the Environment n’ont recensé un contentieux climatique dans un pays autre que ces quatre.43 La présente contribution analyse la place accordée aux droits de l’homme

dans les contentieux climatiques identifiés à ce jour en Afrique44 à la lumière des décisions de justice rendues en la matière à l’échelle nationale. Trois des six contentieux climatiques africains recensés ont été sélectionnés compte tenu du fait qu’ils sont les seuls à avoir été jugés au cours de la période de recherche. Il s’agit notamment des affaires Jonah Gbemre45 du Nigéria, Thabametsi46 d’Afrique du Sud et Save Lamu47 du Kenya. Ainsi, il sera possible de présenter de manière incidente les tendances du contentieux climatique sur le continent car48

Les questions posées au juge lors de procédures permettent, comme un baromètre, de relever les tendances, les pratiques communes ou singulières et les pistes juridiques qui s’ouvrent sur le plan procédural et substantiel en matière climatique.

En dehors de ces contentieux, des affaires portant sur les droits de l’homme et relevant des questions d’ordre environnemental au niveau régional ont été sélectionnées dans l’optique d’envisager les possibilités de multiplication d’un contentieux africain des droits de l’homme en matière climatique. Ce dernier renvoie, dans le cadre de la présente recherche, à l’ensemble des litiges africains à l’échelle nationale ou régionale soulevant des questions de fait ou de droit sur les causes et effets du changement climatique en se fondant principalement sur les droits de l’homme. Parmi ces affaires, l’on retrouve les affaires SERAC49et Endorois50 devant la Commission africaine, Ogiek51 devant la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (Cour africaine), Le Centre pour les droits de l’homme52 devant le Comité africain d’experts sur les droits et le bien-être de l’enfant (Comité sur les droits de l’enfant) et SERAP53 devant la Cour de justice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cour de la CEDEAO).

Pour ce faire, la sociologie juridique a été choisie comme cadre conceptuel car elle permet de s’intéresser aux phénomènes juridiques primaires tels que les jugements tout en s’appesantissant sur des phénomènes juridiques secondaires à l’instar des justifications sociologiques voire politiques de la place du contentieux climatique en Afrique.54 Sur cette base, une analyse praxéologique55 des décisions sélectionnées sera effectuée.

Il apparait que les droits de l’homme ont une place subsidiaire dans le contentieux climatique en Afrique. Bien que certains soient invoqués dans les différents contentieux (2), le contentieux africain des droits de l’homme en matière climatique reste faiblement représenté sur le continent (3).

2 L’INVOCATION DE DROITS DE L’HOMME SPECIFIQUES

Les affaires Jonah Gbemre, Thabametsi et Save Lamu réaffirment les liens entre les droits de l’homme et les changements climatiques par leur invocation. D’une part, dans l’affaire Jonah Gbemre, le triptyque droit à la vie, droit à la dignité humaine et droit à un environnement propre et sain, sans poison ni pollution est invoqué comme un moyen (2.1.), d’autre part le droit à un environnement sain en particulier est utilisé comme un outil d’analyse par le juge (2.2.).

2.1 Le triptyque droit à la vie, droit à la dignité humaine et droit à un environnement propre et sain, sans poison ni pollution comme moyen

Le moyen est le fondement invoqué par un plaideur pour justifier ou critiquer une prétention.56 Il s’agit du fondement de droit ou de fait invoqué par une partie au soutien de ses prétentions.57 Lorsqu’il est désigné comme étant de droit, le moyen fait référence au fondement juridique, à la raison tirée d’une règle de droit propre à justifier ou critiquer une demande ou une décision.58 Par contre, lorsqu’il est désigné comme étant de fait, il renvoie à des éléments de fait spécialement allégués par un plaideur pour justifier ou critiquer une prétention.59

Dans l’affaire Jonah Gbemre, le lien entre le droit à la vie, le droit à la dignité humaine et le droit à un environnement propre et sain, sans poison ni pollution constitue le fondement juridique de la demande du requérant relative à l’arrêt de la pratique de torchage de gaz pratiquée par les entreprises pétrolières Shell Petroleum Development Company Nigeria LTD et Nigerian National Petroleum Corporation. Le droit à un environnement propre et sain, sans poison ni pollution n’étant pas consacré parmi les droits fondamentaux dans la Constitution nigé-riane,60 c’est par le truchement du droit à la vie et à la dignité humaine consacrés aux sections 33(1) et 34(1) de la Constitution de la République fédérale du Nigéria de 1999 et renforcés par les articles 4, 16 et 24 de l’African Charter on Human Procedure Rules (Procedure and Enforcement) Act61 ainsi que les lois de la Fédération du Nigéria de 2004 que le requérant a pu mettre en exergue son caractère fondamental.62 En l’espèce, Jonah Gbemre alléguait, pour lui-même et pour la communauté Iwherekan de l’Etat du Delta, que la pratique du torchage de gaz63 effectuée par les entreprises pétrolières Shell Petroleum Development Company Nigeria LTD et Nigerian National Petroleum Corporation dans leur communauté violait leurs droits fondamentaux à la vie et à la dignité humaine y compris à un environnement sain.64 Il a, par l’entremise de son avocat, fondé sa démonstration sur le fait que la signification du droit à la vie et à la dignité humaine incluent inévitablement le droit à un environnement propre et sain, sans poison ni pollution.65

Concernant le droit à la vie, il relève que selon la sixième édition du Blacks Law Dictionary, le droit à la vie ne signifie pas uniquement ne pas se voir couper la tête ou guillotiné mais inclut également le droit d’avoir des organes qui fonctionnent normalement et de jouir de toutes ses facultés.66 Par ailleurs, il souligne que le droit à la vie ne peut avoir pleinement son sens que si l’on retire les choses qui le mettent en danger ou le diminuent.67 Sur cette base, il affirme que le torchage de

gaz met en danger et diminue la vie des membres de la communauté Iwherekan qui ne peuvent pleinement en jouir.68 Cette pratique concourt également à la pollution de l’environnement par l’émission du dioxyde de carbone, principal GES contribuant aux effets négatifs des changements climatiques, expose sa communauté à un risque élevé de mort prématurée, de maladies respiratoires et de cancer.69 En outre, cela pollue leurs aliments et leur eau.70 Le plaignant estime alors que la communauté Iwherekan ne peut valablement jouir du droit à la vie dans un environnement pollué par le torchage de gaz.

Relativement au droit à la dignité humaine, il relève, en citant une affaire,71 qu’il comprend le droit de ne pas se voir infliger un traitement inhumain ou dégradant.72 Cela implique également de ne pas se faire infliger des préjudices physiques ainsi que des angoisses et des souffrances.73 Or, le torchage de gaz des entreprises est susceptible d’infliger de graves préjudices physiques aux membres de la communauté Iwherekan avec la diminution de la fonction du poumon ou la mort.74 De ce fait, vivre dans un environnement pollué qui n’est ni propre, ni sain du fait du torchage de gaz par les entreprises pétrolières est susceptible de nuire à la jouissance du droit à la dignité humaine des populations.75 Le juge a fait sien l’argumentaire du requérant en le disant fondé et ordonna aux entreprises en cause de restreindre la pratique du torchage de gaz.76

Ainsi, le lien qu’établit le requérant entre le triptyque droit à la vie, à la dignité humaine et droit à un environnement propre et sain, sans poison ni pollution est un moyen de droit en ce qu’il est tiré de règles de droit notamment des textes juridiques. Il représente le moyen principal de la demande de Jonah Gbemre. C’est la raison pour laquelle cette affaire est catégorisée par le Sabin Center for Climate Change Law parmi les contentieux climatiques fondés sur les droits de l’homme.77

La construction juridique autour du droit à un environnement propre et sain, sans poison ni pollution pourrait constituer le fondement de requêtes de membres de communautés affectées par l’exploitation de ressources extractives dans leur milieu de vie. Sur cette base, les communautés pourraient saisir les juridictions nationales ou des institutions régionales de protection des droits de l’homme suivant les règles de procédure applicables. Toutefois, il y a lieu de relever que le moyen constitué du triptyque droit à la vie, droit à la dignité humaine et droit à un environnement propre et sain, sans poison ni pollution n’a pas tenu compte de la communication de la Commission africaine dans l’affaire SERAC. Pourtant, la Commission africaine y a affirmé que la dégradation et la pollution de l’environnement à un niveau humainement inacceptable affecte la vie des populations et par conséquent viole leur droit à la vie.78 La décision de la Commission africaine aurait ainsi pu constituer un argument supplémentaire d’autant plus qu’elle concernait le Nigéria.

2.2 Le droit à un environnement sain comme outil d’analyse

Généralement classé parmi les droits de la troisième génération,79 le droit à un environnement sain a été consacré par la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (Charte africaine)80 en son article 24. Il dispose en effet que tous les peuples ont droit à un environnement satisfaisant et global, propice à leur développement.

Relevé dans divers autres instruments régionaux des droits de l’homme81, le droit à un environnement sain a été interprété dans certains contentieux initiés devant des organes quasi-judiciaires du système de l’Union africaine. Dans l’affaire SERAC, la Commission africaine relève par exemple que le droit à un environnement sain requiert que l’Etat prenne des mesures raisonnables et d’autres mesures pour prévenir la pollution et la dégradation écologique, favoriser la protection de l’environnement et garantir un développe-ment écologiquement et l’utilisation des ressources naturelles.82

Par ailleurs, le droit à un environnement sain est reconnu par le Comité africain d’experts sur les droits et le bien-être de l’enfant comme faisant partie intégrante des obligations d’un Etat partie à la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant en vertu du principe général de survie et de développement. En effet, il relève que83

Puisque la survie et le développement englobent le droit à la vie et impose aux Etats l’obligation d’assurer un niveau de vie suffisant pour les enfants, y compris le droit à la vie et à leur développement physique, mental, spirituel, moral, psychologique et social, les obligations de l’Etat partie en vertu de ce principe comprennent également la protection des droits des enfants à accéder [...] au droit de vivre dans un environnement sûr et propre.

Dans l’affaire Thabametsi en Afrique du Sud, le juge fait référence au droit à un environnement sain dans l’optique d’interpréter le National Environmental Management Act84 (NEMA) qui conditionne, en sa section 24, la réalisation de certaines activités par l’obtention d’une autorisation de l’administration en charge de la protection de l’environnement à la suite d’une étude de ses impacts environne-mentaux.85 En l’espèce, l’organisation non gouvernementale Earthlife Africa Johannesburg conteste la décision du Ministère sud-africain de l’environnement d’accorder l’autorisation environne-mentale de réaliser un projet de centrale thermique à charbon devant la North Gauteng High Court.86 Elle décriait le défaut de considération des incidences climatiques de ce projet.87 Dans sa décision, le juge a dégagé une obligation d’évaluation des impacts climatiques dudit projet. Elle n’est pas expressément formulée dans le NEMA mais considérée comme un des facteurs pertinents devant justifier l’octroi ou le rejet d’une autorisation environnementale.88 Pour formuler l’obligation d’évaluation climatique, le juge s’attèle à interpréter le NEMA à la lumière de dispositions pertinentes parmi lesquelles la section 24 de la Constitution. Elle dispose que89

Toute personne a le droit

(a) À un environnement qui ne soit pas nocif pour sa santé ou son bien-être; et

(b) D’avoir un environnement protégé pour le bénéfice des générations présentes et futures à travers des mesures législatives appropriées et d’autres mesures qui-

(i) Préviennent la pollution et la dégradation écologique;

(ii) Promeuvent la conservation; et

(iii) Sécurisent le développement écologiquement durable et l’utilisation des ressources naturelles tout en promouvant le développement écologique et social légitime.

Fort de cette disposition et plus particulièrement de son point (iii), le juge souligne que les changements climatiques posent un risque substantiel au développement durable de l’Afrique du Sud au regard de ses conséquences telles que l’augmentation des températures, la raréfaction de l’eau et l’augmentation de la fréquence des catastrophes naturelles.90 Ce développement ne peut donc se faire sans la prise en compte des changements climatiques qui doivent être évalués en fonction des conséquences à long terme.91 Sur cette base, les études d’impact environnemental devraient donc prendre en compte les évaluations des incidences climatiques. Le juge a ainsi recours au droit à un environnement sain pour justifier la nécessité de tenir compte des incidences climatiques de projets dans l’optique d’un développement écologiquement durable.

Dans cette affaire, le juge fait un pas significatif dans le contrôle de « projets climaticides » ou climatiquement non compatibles soumis à l’autorisation préalable des pouvoirs publics, et émet un signal fort aux futurs gestionnaires de projets basés sur l’exploitation de charbon ou d’autres énergies émettrices de GES.92

Enfin, pour ce qui est de l’affaire Save Lamu, les requérants contestent la validation de l’étude d’impact environnemental d’une centrale thermique à charbon par l’autorité nationale de gestion de l’environnement.93 Ils demandent au Tribunal national de l’environnement94 d’écarter la licence délivrée par cette autorité sur la base de cette étude d’impact et qu’une nouvelle soit effectuée avec la participation de toutes les parties prenantes.95 En outre, ils relèvent au soutien de leurs prétentions qu’il y a eu une mauvaise analyse des alternatives à ce projet ainsi qu’un échec dans la prise en compte des questions économiques qu’il soulève.96 Les requérants allèguent également que le projet de centrale thermique à charbon contribue au changement climatique et n’est ainsi pas cohérent avec les engagements de faible émission de carbone du Kenya.97 Dans cette affaire, le droit à un environnement sain est invoqué par le juge dans l’analyse de la participation publique aux études d’impact environnemental. Pour soutenir son idée de la place essentielle de la participation du public dans ces études, le juge cite l’affaire Ken Kasinga dans laquelle il est relevé que98

Lorsqu’une procédure de protection de l’environnement établie par la loi n’est pas respectée, il est possible de présumer que le projet en question viole le droit à un environnement sain ou à tout le moins est susceptible de nuire à l’environnement.

Or la participation publique étant une procédure de protection de l’environnement par son insertion dans les études d’impact environnemental, son absence est susceptible de violer le droit à un environnement sain des populations. Dans le cas d’espèce, le juge a demandé à l’entreprise Amu Power Company Limited en charge de la mise en place de la centrale thermique à charbon, au cas elle voudrait poursuivre ce projet, de faire une nouvelle étude d’impact environnemental respectant chaque étape requise par les normes en la matière au Kenya ainsi que les considérations de la loi sur les changements climatiques, de la loi sur l’énergie et de celle sur les ressources naturelles.99 Cette décision, dans le même sens que celle de l’affaire Earthlife peut inspirer des juges et requérants sur le continent.

Dans chacune de ces affaires, les juges citent des dispositions ou décisions de justice relatives au droit à un environnement sain pour guider leur raisonnement. Les prétentions des parties ne relèvent pas forcément le droit à un environnement sain mais ce dernier est utilisé par les juges comme une base de construction de sa décision.

Du triptyque droit à la vie, droit à la dignité humaine, droit à un environnement propre et sain, sans poison ni pollution comme moyen par les plaideurs au droit à un environnement sain comme un outil d’analyse de problèmes juridiques par le juge, il apparaît que certains droits de l’homme sont invoqués dans les contentieux climatiques recensés sur le continent africain. Par conséquent, les droits de l’homme sont donc pris en compte dans ce contentieux naissant. Toutefois, considérer ce constat comme la matérialisation d’une place prépondérante des droits de l’homme dans ce type de contentieux sur le continent serait étendre un voile sur une réalité somme toute différente, celle de la représentativité relative du contentieux africain des droits de l’homme.

3 LA REPRESENTATIVITE RELATIVE DU CONTENTIEUX AFRICAIN DES DROITS DE L’HOMME EN MATIERE CLIMATIQUE

Malgré l’invocation de certains droits de l’homme dans les décisions de justice en matière climatique recensées sur le continent africain, force est de constater que les contentieux climatiques ne portent pas tous sur les droits de l’homme à titre principal. En effet, le contentieux africain des droits de l’homme en matière climatique est encore embryonnaire à l’échelle nationale (3.1) tandis qu’à l’échelon régional, ce contentieux est encore inexistant (3.2).

3.1 Un contentieux national embryonnaire

A ce jour, seule l’affaire Jonah Gbemre au Nigéria est considérée comme un contentieux des droits de l’homme en matière climatique. En effet, elle représente la seule affaire dans laquelle les revendications sur les effets néfastes des changements climatiques sont principalement fondées sur des droits de l’homme notamment le droit à la vie, à la dignité humaine et à un environnement propre et sain, sans poison ni pollution. Les affaires Thabametsi en Afrique du Sud et Save Lamu au Kenya portent quant à elles sur des contestations d’autorisations environnementales de projets de construction de centrales thermiques à charbon délivrées par des administrations publiques compétentes sans prise en compte de leurs incidences climatiques. C’est dire que le contentieux des droits de l’homme est moins représenté à l’heure actuelle et que les stratégies contentieuses sur le continent en matière climatique ne se focalisent pas encore sur la question des droits de l’homme à titre principal. Afin de comprendre les raisons de cette situation, il sied d’analyser le cas de chaque Etat dans lequel s’est déroulé un contentieux climatique recensé dans le cadre de la présente recherche.

Pour le cas de l’Afrique du Sud, le succès de l’affaire Thabametsi a influencé le développement actuel du contentieux climatique. Il a conduit d’autres requérants à se focaliser sur le même fondement notamment l’obligation d’évaluation climatique de certains projets de centrales thermiques à charbon. A la suite de cette affaire deux autres requêtes ont été introduites devant les tribunaux. Il s’agit des affaires Kipower100 et Acwa Power.101 Dans l’affaire Kipower, le requérant relève que l’autorisation environnementale délivrée par le Directeur en chef compétent en la matière et la décision de confirmation de cette autorisation par le Ministère des affaires environnementales sont erronées en l’absence d’évaluation des impacts climatiques du projet de centrale près de la région de Delmas à Mpumalanga.102 Il rappelle pour cela que la North Gauteng High Court a établi, dans sa décision relative à l’affaire Thabametsi que103

(a) Les impacts climatiques d’une centrale thermique à charbon en prévision doivent être examinés et entièrement considérés comme faisant partie d’une étude d’impact environnemental conformément aux dispositions du NEMA avant qu’une décision ne soit prise sur la délivrance d’une autorisation environnementale; et

(b) En plus de l’obligation établie par le NEMA en sa section 240(1)(b) d’identifier les impacts pertinents ainsi que des mesures d’atténuation et de tenir compte des politiques et informations pertinentes pour décider de délivrer ou pas une autorisation environnementale, de même que les engagements politiques internationaux et nationaux de l’Afrique du Sud de résoudre le changement climatique, une évaluation climatique était nécessaire pour effectuer un examen exhaustif de l’impact environnemental du projet de centrale thermique à charbon préalablement à sa délivrance.

Le requérant relève, alors, que la décision de confirmation de l’autorisation environnementale délivrée par le Ministère des affaires environnementales va à l’encontre de l’obligation d’évaluation climatique établie par le juge.104 En effet, elle affirme qu’il n’existe actuellement aucune base légale dans le cadre juridique applicable aux études d’impact environnemental pour réaliser une évaluation des incidences climatiques.105

Pour ce qui est de l’affaire Acwa Power, le requérant relève que sa demande se fonde sur le jugement de la North Gauteng High Court dans l’affaire Thabametsi.106 A cet effet, il souligne que ce jugement a clairement établi pour la première fois dans le droit sud-africain que les impacts climatiques d’un projet de centrale thermique à charbon doivent être complètement évalués et considérés avant la délivrance d’une autorisation environnementale conformément au NEMA.107

A l’observation, l’affaire Thabametsi a manifestement créé un effet domino sur l’évaluation climatique en Afrique du Sud. Cela se comprend d’autant plus lorsque l’on sait que cet Etat fait face à des problèmes d’eau et que les conséquences des changements climatiques du fait des centrales thermiques à charbon pourraient conduire à une raréfaction accrue de l’eau.108 Bien que cette affaire n’entrave pas la possibilité d’une requête sur les violations de droits de l’homme en matière climatique en Afrique du sud, elle a tout de même ouvert la voie au développement actuel de contentieux fondés spécifiquement sur l’évaluation climatique des projets de centrales thermiques à charbon.

En ce qui concerne le Nigéria, le statut embryonnaire du contentieux national des droits de l’homme en matière climatique peut trouver sa justification dans l’impact mitigé de l’affaire Jonah Gbemre. En effet, bien que cette affaire ait construit un principe inédit en matière climatique, ses décisions n’ont pas pu être implémentées. Tout d’abord, l’entreprise Shell a refusé d’exécuter la décision de la Federal High Court en arguant qu’elle ne disposait pas d’assez de ressources pour liquéfier le gaz brûlé.109 Par ailleurs, la Cour a échoué à implémenter le droit à un environnement propre et sain, sans poison ni pollution car malgré la condition qu’elle avait donné à Shell de réduire progressivement le torchage de gaz, ce dernier ne s’est pas exécuté.110 Entre avril 2006 et avril 2007, Shell n’avait pas réduit la quantité de gaz torchée111 et continuait donc les activités qui ont donné lieu à ce contentieux.112 Pourtant, cette affaire s’inscrivait dans la perspective d’utiliser les juridictions comme des forums de changements sociaux susceptibles de mettre fin à la pratique de torchage de gaz effectuée par les entreprises pétrolières au regard de l’incapacité du gouvernement nigérian à le faire.113

Pour preuve, Jonah Gbemre demandait au juge de déclarer également que les dispositions de l’Associated Gas Re-injection Act sur la base duquel le torchage de gaz pouvait être autorisé étaient contraires aux sections 33(1) et 34(1) de la Constitution de 1999.114 Malgré des promesses répétées de suspendre les activités de torchage de gaz, en janvier 2008 le gouvernement nigérian n’avait toujours pas sanctionné Shell.115 Il a fallu attendre le recours intenté par Kenule Saro-Wiwa Jr contre Shell aux Etats Unis sur la base de l’Alien Tort Claims Act pour obtenir une décision exécutée en la matière.116 Cette situation a fait dire à Ukala qu’au Nigéria les contentieux environnementaux notamment fondés sur les droits de l’homme ne peuvent avoir du succès que dans l’hypothèse d’une bonne gouvernance.117 La décision du juge dans l’affaire Jonah Gbemre aurait pu susciter des contentieux similaires au titre de stratégie de limitation de la capacité des entreprises trans-nationales à méconnaitre les institutions et les lois des Etats de certaines régions,118 mais le contexte de gouvernance a sans doute influencé la multiplication de tels contentieux au Nigéria. Contraire-ment à l’Afrique du Sud où la décision dans l’affaire Thabametsi aurait suscité d’autres contentieux sur l’obligation d’évaluation climatique de projets, le Nigéria n’a toujours pas vu d’autres contentieux de droits de l’homme en matière climatique. Pourtant, le Nigéria était recensé comme un Etat susceptible de voir émerger plusieurs contentieux de droit de l’homme en matière climatique au regard de la forte présence de compagnies pétrolières sur son territoire.119

Enfin, en ce qui concerne le Kenya, bien que des contentieux climatiques fondés sur les droits de l’homme n’y soient pas encore recensés, il est également considéré comme l’un des Etats dans lesquels des personnes souffrant des impacts des changements climatiques peuvent introduire des recours sur la base des droits consacrés dans la Constitution de 2010 associés aux dispositions pertinentes de la loi sur la gestion et la coordination environnementales de 1999.120 Au titre des droits constitutionnels l’on peut notamment relever le droit à un environnement sain consacré en son article 70. Cette opportunité est d’autant plus envisageable avec la création de la Cour de l’environnement et du foncier121 qui a pour compétence de recevoir des contentieux relatifs aux problématiques climatiques.122 De ce fait, il y a lieu d’espérer le développement de contentieux climatiques fondés sur les droits de l’homme dans cet Etat dans les prochaines années.

Ainsi, plusieurs raisons justifient le caractère embryonnaire du contentieux africain des droits de l’homme en matière climatique à ce jour. Mais l’on ne peut que se réjouir des prédispositions juridiques des Etats recensés à connaitre ce type de contentieux dans un futur proche nonobstant l’influence des causes contextuelles extra juridiques susceptibles de nuire à son développement. Cet optimisme est également de mise à l’échelle régionale malgré l’inexistence d’un tel contentieux à ce jour.

3.2 Un contentieux régional inexistant

A ce jour, aucun organe judiciaire ou quasi-judiciaire de protection des droits de l’homme au niveau africain n’a rendu une décision ou une communication en matière climatique. Il sied tout de même de rappeler qu’il existe plusieurs décisions en matière de droits humains touchant aux questions environnementales et rendues par des juridictions régionales africaines notamment celles que nous avons retenu pour le cadre de l’étude123. De ce fait, l’on peut, de manière prospective entrevoir les possibilités de réalisation de ce contentieux à partir des droits de l’homme qui y sont relevés.

Dans l’affaire SERAC devant la Commission africaine, la communication des requérants alléguait que le gouvernement nigérian avait, entre autres, violé les droits à la santé et à un environnement sain du peuple Ogoni consacrés aux articles 16 et 24 de la Charte africaine en négligeant de fournir ou de permettre la conduite d’études sur les risques éventuels ou réels sur l’environnement et la santé causés par les activités pétrolières.124 A ce propos, la Commission africaine relevait que le respect par le gouvernement de l’esprit de ces articles incluait également le fait d’exiger et de publier des études sur l’impact social et environnemental avant tout développement industriel majeur.125 Cette explication de la Commission africaine peut être utilisée par des requérants pour introduire des communications relevant l’absence d’évaluation des impacts climatiques de projets tels que les centrales thermiques à charbon dans le cas de l’affaire Thabametsi. En effet, l’aspect environnemental de l’étude d’impact d’un projet industriel ne peut plus à ce jour éluder les changements climatiques au risque de ne pas prendre en considération des risques éventuels ou réels tant pour l’environnement que pour l’homme.

La Commission africaine relève également dans cette affaire que l’esprit des articles 16 et 24 de la Charte africaine implique pour le gouvernement d’126

[i]nformer les communautés exposées aux activités et produits dangereux et d’offrir aux individus la possibilité d’être entendus et de participer aux décisions relatives au développement affectant leurs communautés.

Or, l’affaire Save Lamu du Kenya nous montre que la participation du public aux études d’impact environnemental de projets de centrales thermiques à charbon est susceptible d’être relevée dans les contentieux climatiques.127 C’est dire qu’une communication alléguant la violation des articles 16 et 24 de la Charte africaine peut être adressée à la Commission africaine sur le fondement de l’absence de participation du public aux projets ayant des incidences climatiques tant pour l’environnement que pour les personnes.

Les affaires Endorois devant la Commission africaine et Ogiek devant la Cour africaine traitent, entre autres, du droit de propriété des peuples autochtones. Consacré à l’article 14 de la Charte africaine, il est généralement relevé comme ayant été violé dans plusieurs contentieux climatiques dans le monde à l’instar de la pétition des Inuits devant la Commission interaméricaine.128 Selon la Commission africaine, il comprend non seulement le droit d’avoir accès à sa propriété et empêcher l’empiètement de ladite propriété, mais aussi le droit à une possession et une utilisation ainsi qu’un contrôle en toute tranquillité de cette propriété, tel que ses propriétaires le désirent.129 La Commission africaine note également que la Cour européenne des droits de l’homme a reconnu que les droits de propriété pouvaient également comprendre les ressources économiques et les droits sur les terres communautaires des demandeurs.130 En matière climatique, sa violation peut être envisagée dans la mesure où131

Les prévisions relatives à l’élévation du niveau de la mer et l’augmentation des sécheresses pourraient rendre une grande partie du continent africain inhabitable [...] conduisant ainsi à de grandes pertes en vie et à des dommages à la propriété parmi d’autres conséquences.

Les requêtes devront alors démontrer le lien entre les actions ou omissions des Etats en matière climatique et la violation du droit de propriété.

Pour ce qui est de l’affaire Le Centre pour les droits de l’homme devant le Comité sur les droits de l’enfant, elle relève qu’en vertu de l’obligation d’assurer un niveau de vie suffisant pour les enfants, les Etats doivent également protéger leur droit de vivre dans un environnement sûr et propre.132 Cette reconnaissance tirée de l’interprétation du droit à la vie consacré à l’article 5 de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant (Charte africaine sur les droits de l’enfant), constitue un premier pas dans la possibilité d’introduire des requêtes en matière climatique devant le Comité sur les droits de l’enfant. En effet, comme dans l’affaire Jonah Gbemre, il pourrait être possible de lier aux changements climatiques le droit de tout enfant à la vie. Une autre possibilité réside également dans le droit à la santé consacré à l’article 14 de la Charte africaine sur les droits de l’enfant au regard des commentaires du Comité des droits de l’enfant y relatifs. En effet, il relève que133

La santé des enfants est affectée par une variété de facteurs dont la plupart a changé pendant les 20 dernières années et sont susceptibles de continuer à évoluer dans le futur. [...] Il y a également une compréhension grandissante de l’impact des changements climatiques et l’urbanisation rapide sur la santé des enfants.

C’est la raison pour laquelle il considère que les Etats doivent insérer les préoccupations relatives à la santé des enfants au centre dans leurs stratégies d’adaptation et d’atténuation des changements clima-tiques.134

Enfin, dans l’affaire SERAP, la Cour de la CEDEAO relève que135

l’adoption de lois en matière environnementale, quelle que soit leur modernité, ou la création d’agences inspirées des meilleurs modèles dans le monde, de même que l’allocation de ressources financières en quantité équitable, pourraient malgré tout ne pas être conformes avec les obligations internationales en matière de protection de l’environnement si ces mesures demeurent inappliquées et si elles ne sont pas accompagnées de mesures additionnelles et concrètes ayant pour objectif de prévenir la survenance de dommages ou assurer la responsabilité, avec la réparation effective des dommages environnementaux subis.

En matière climatique, les requêtes pourraient alors porter sur les omissions des Etats membres de la CEDEAO relativement à leurs politiques, lois ou encore stratégies.

Ainsi, comme le relevait déjà Boshoff pour le cas spécifique des droits de l’enfant,136 le système africain des droits de l’homme et la Cour de la CEDEAO sont adéquats pour connaitre des contentieux climatiques.

4 CONCLUSION

La présente étude avait pour objectif d’analyser la place des droits de l’homme dans la justice climatique en Afrique. Au terme de cette analyse, il ressort que la place des droits de l’homme dans ce phénomène naissant est subsidiaire. Cette subsidiarité s’explique tout d’abord par le constat d’un existant matérialisé par l’invocation de droits de l’homme spécifiques dans les contentieux climatiques recensés sur le continent. Le recours à ces droits a alors permis d’identifier un échantillon de droits humains sollicités dans les contentieux climatiques qui se sont avérés être utilisés comme des moyens par les plaideurs ou des outils d’analyse par les juges. Il s’agit du triptyque droit à la vie, droit à la dignité humaine et droit à un environnement propre et sain sans poison ni pollution relevé dans l’affaire Jonah Gbemre ainsi que du droit à un environnement sain invoqué dans les affaires Thabametsi et Save Lamu. Ces utilisations sont susceptibles d’inspirer de potentiels requérants dans la préparation de recours devant des juridictions internes ou régionales en matière climatique. Par ailleurs, des juges pourraient analyser les raisonnements effectués dans les contentieux sélectionnés pour avoir, le cas échéant, une meilleure compréhension des liens entre les droits de l’homme et les changements climatiques.

Cependant, l’invocation des droits de l’homme ne saurait donner l’illusion d’une place prépondérante dans la justice climatique en Afrique. Force est de constater que le contentieux africain des droits de l’homme en matière climatique est relativement représenté sur le continent. Pour preuve, il est embryonnaire au niveau national et inexistant à l’échelle régionale. Concernant son caractère embryon-naire au niveau national, il peut s’expliquer en Afrique du sud par le succès de l’affaire Thabametsi et au Nigéria par l’impact mitigé de l’affaire Jonah Gbemre. Malgré cette situation, le droit positif des Etats dans lesquels se sont déroulés les contentieux climatiques actuels, le système africain des droits de l’homme et l’implication de juridiction communautaire dans la protection de l’environnement laissent entrevoir des lueurs d’espoir tel la jeune pousse d’un arbre qui sort de terre. Ainsi, l’on ne peut que souhaiter le développement d’une justice climatique en Afrique accordant progressivement une place plus importante aux droits de l’homme au regard de leur interdépendance avec le changement climatique. Bien plus, que les requérants et leurs conseils utilisent davantage la boîte à outils des droits de l’Homme pour faire progresser la protection de l’environnement et du système climatique tout en protégeant les victimes climatiques potentielles, que ce soit par le biais des instruments internationaux des droits de l’Homme ou des droits nationaux comme les droits fondamentaux ou constitutionnels.137

 


1. Lahore High Court Asghar Leghari v Pakistan Affaire n° WP N° 25501/2015 (jugement du 25 janvier 2018) 22.

2. Asghar Leghari, agriculteur pakistanais avait esté en justice contre la Fédération du Pakistan devant la Lahore High Court pour non application de la politique nationale sur le changement climatique de 2012 et le cadre de mise en œuvre de cette politique. Dans cette espèce, la cour a relevé que le droit à la vie, le droit à la dignité humaine, le droit à la propriété et le droit à l’information consacrés dans les articles 9, 14, 23 et 19A de la constitution fournit les outils juridiques nécessaires pour résoudre et suivre les actions du gouvernement contre les changements climatiques. Voir Lahore High Court (n 1).

3. Les changements climatiques sont définis à l’article premier (2) de la Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques comme des changements de climat qui sont attribués directement ou indirectement à une activité humaine altérant la composition de l’atmosphère mondiale et qui viennent s’ajouter à la variabilité naturelle du climat observée au cours de périodes comparables.

4. GIEC ‘Changement climatique 2014: Incidence, adaptation et vulnérabilité. Résumés, foire aux questions et encarts thématiques’ (2014) Contribution du Groupe de travail II au cinquième Rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat 3.

5. GIEC ‘Changements climatiques 2014. Rapport de synthèse’ (2014) 13.

6. Ibid.

7. Tandis que pour les organisations non gouvernementales ce concept faisait, entre autres, référence à une plus grande représentation des communautés et peuples autochtones dans les instances de négociation sur les changements climatiques, pour les syndicats, il s’agissait plutôt de protéger les emplois des salariés travaillant dans les secteurs d’activité qui feront l’objet de transformations majeures. Des revendications ont également été émises par des courants religieux notamment sur le lien entre l’Homme et la terre ainsi que la nécessité de la protéger. A ce propos, le Pape François rappelle que le climat est un bien commun de tous et pour tous en relation avec beaucoup de conditions essentielles pour la vie humaine. Cf A Michelot ‘Définition(s) et perspectives de justice climatique’ in A Michelot (dir) Justice climatique/Climate justice: enjeux et perspectives/Challenges and perspectives (2016) 21-23; SP François Laudato Si’ sur la sauvegarde de la maison commune 20.

8. C Larrère ‘Qu’est-ce que la justice climatique ?’ in A Michelot (dir) Justice climatique/Climate justice: enjeux et perspectives/Challenges and perspectives (2016) 6.

9. Larrère (n 8) 7.

10. O C Ruppel ‘International climate change law and policy from an african perspective’ in OC Ruppel & E Kam Yogo (dirs) Droit et politique de l’environnement au Cameroun. Afin de faire de l’Afrique l’arbre de vie/Environmental Law and policy in Cameroon. Towards making Africa the three of life (2018) 493.

11. Larrère (n 8) 7-8.

12. Larrère (n 8) 9.

13. Ibid.

14. Principe 7, Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement de 1992

15. Article 3, Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques adoptée le 9 mai 1992 et entrée en vigueur le 21 mars 1994.

16. Larrère (n 8) 16.

17. Larrère (n 8) 18.

18. C Cournil & L Varison ‘Introduction’ C Cournil & L Varison (dirs) Les procès climatiques. Entre le national et l’international (2018) 19.

19. Ibid.

20. Encore appelés litige climatique ou procès climatique, le contentieux climatique n’est pas un nouveau type de contentieux au regard des catégories classiques existantes notamment judiciaires ou administratives puisqu’ils relèvent de ces différentes catégories. Il a été nommé comme tel par la doctrine du fait de son objet en l’occurrence les changements climatiques qui peuvent avoir une place centrale ou non dans la procédure. Voir dans ce sens M Hautereau-Boutonnet ‘Les procès climatiques par la ‘doctrine du procès climatique’’ in C Cournil & L Varison (dirs) Les procès climatiques. Entre le national et l’international (2018) 33.

21. Programme des Nations Unies pour l’Environnement & Sabin Center for Climate Change Law, ‘L’état du contentieux climatique: revue mondiale’ (2017) 12.

22. Cournil & Varison (n 18) 19.

23. Cournil & Varison (n 18) 22.

24. L Canali ‘Les contentieux climatiques contre les entreprises: Bilan et perspectives’ in C Cournil & L Varison (dirs) Les procès climatiques: Entre le national et l’international (2018) 67.

25. Cournil & Varison (n 18) 21-22.

26. Canali (n 24) 68.

27. Cournil & Varison (n 18) 21.

28. Personnes physiques, organisations non gouvernementales, peuples autochtones, entreprises, entités infra-étatiques.

29. Le Sabin Center for Climate Change Law est une organisation qui tient à jour une base de données du contentieux climatique dans le monde. Elle a regroupé à ce jour vingt-cinq contentieux climatiques dans la catégorie ‘Human rights’. http://climatecasechart.com/non-us-climate-change-litigation/ (consulté le 23 septem-bre 2019).

30. C Perruso & L Varison ‘La saisine du système interaméricain de protection des droits de l’homme en matière climatique: l’analyse des pétitions autochtones’ in C Cournil & L Varison (dirs) Les procès climatiques. Entre le national et l’international (2018) 180-181.

31. Perruso & Varison (n 30) 182-183.

32. Perruso & Varison (n 30) 183.

33. GIEC (n 5) 4.

34. CEDESC Observation générale n° 15. Le droit à l’eau (art. 11 et 12 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels) (2002) 2.

35. Ibid.

36. Traduction libre. Cf. The Independent Expert on the issue of human rights obligations relating to the enjoyment of a safe, clean, healthy and sustainable environment ‘Mapping Human Rights Obligations Relating to the Enjoyment of a Safe, Clean, Healthy and Sustainable Environment. Focus report on human rights and climate change’ (2014) 4 https://www.ohchr.org/EN/Issues/Environment/SREnvironment/Pages/MappingReport.aspx (consulté le 21 octobre 2019).

37. Résolution sur le Changement Climatique et les Droits de l’Homme et la Nécessité d’une Etude sur son impact en Afrique-CADHP/Res.153 (XLVI) 09 https://www.achpr.org/fr_sessions/resolutions?id=291 (consulté le 21 octobre 2019).

38. Ibid.

39. Programme des Nations Unies pour l’Environnement ‘Climate Change and Human Rights’ (2015) 13.

40. Cournil & Varison (n 18) 25.

41. Cournil & Varison (n 18) 24.

42. http://climatecasechart.com/non-us-jurisdiction/ (consulté le 13 août 2019).

44. Différentes études ont été menées sur la question des droits de l’homme dans le contentieux climatique, certaines soulignant d’ailleurs des affaires en Afrique sans toutefois aborder la question de leur place au niveau africain. Voir sans prétention à l’exhaustivité, C Cournil ‘Etude comparée sur l’invocation des droits constitutionnels dans les contentieux climatiques nationaux’ in C Cournil & L Varison (dirs) Les procès climatiques. Entre le national et l’international (2018); C Cournil & C Perruso ‘Réflexions sur “l’humanisation” des changements climatiques et la “climatisation” des droits de l’homme. Emergence et pertinence’ (2018) 14 La Revue des droits de l’homme; C Huglo Le contentieux climatique: une révolution judiciaire mondiale (2018); M Dutu ‘Climate change and human rights: emergence of a new fundamental right to proper climate’ in Michelot (n 7).

45. Federal High Court of Nigeria Jonah Gbemre v Shell Petroleum Development Company Nigeria LTD & Others Affaire n° FHC/B/CS/53/05 (jugement du 14 novembre 2005).

46. High Court of South Africa Earthlife Africa Johannesburg v The Minister of Environmental Affairs & Others Affaire n° 65662/16 (jugement du 8 mars 2017) (Thabametsi).

47. National Environmental Tribunal Save Lamu & Others v National Environ-mental Authority & Other Affaire n° NET 196 de 2016 (jugement du 26 juin 2019).

48. Cournil & Varison (n 18) 24.

49. Social and Economic Rights Action Center (SERAC) and Another v Nigeria (2001) AHRLR 60 (ACHPR 2001).

50. Centre for Minority Rights Development & Others c. Kenya (2009) AHRLR 75 (ACHPR 2009).

51. Commission africaine des droits de l’homme et des peuples c. Kenya (mesures provisoires) (2013) 1 RJCA 200.

52. Le Centre pour les droits de l’homme (Université de Pretoria) et la rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme (Sénégal) c. Sénégal Décision 3/Com/001/2012 du 15 avril 2014 lors de la 23e session ordinaire du Comité africain d’experts sur les droits et le bien-être de l’enfant.

53. SERAP c. Federal Republic of Nigeria (14 décembre 2012) Arrêt n° ECW/CCJ/JUD/18/12.

54. JL Bergel Théorie générale du droit (2012) 194-196.

55. Elle renvoie à une analyse du droit par les pratiques. Voir J Colemans & B Dupret (dirs) Ethnographies du raisonnement juridique (2018).

56. S Guinchard & T Debard (dirs) Lexique des termes juridiques 2017-2018 (2017) 1240.

57. B Metou ‘Le moyen de droit international devant les juridictions internes en Afrique: quelques exemples d’Afrique noire francophone’ (2009) 22 Revue québécoise de droit international 129.

58. Guinchard & Debard (n 56) 1241.

59. Ibid.

60. Huglo (n 44) 105.

61. La loi sur les règles de procédure relatives aux droits de l’homme consacrés par la Charte africaine des droits de l’homme (traduction libre).

62. Federal High Court of Nigeria (n 45) 2.

63. Cette pratique consiste à brûler les rejets de gaz à différentes étapes de l’extraction de pétrole et qui est responsable du rejet dans l’atmosphère de plus de 350 millions de tonnes de dioxyde de carbone chaque année. Ces rejets sont particulièrement nocifs. Cf https://www.banquemondiale.org/fr/news/press-release/2018/07/17/new-satellite-data-reveals-progress-global-gas-flaring-dec lined-in-2017 (consulté le 21 octobre 2019).

64. Federal High Court of Nigeria (n 45) 2.

65. Federal High Court of Nigeria (n 45).

66. Federal High Court of Nigeria (n 45) 19.

67. Federal High Court of Nigeria (n 45).

68. Federal High Court of Nigeria (n 45) 20.

69. Federal High Court of Nigeria (n 45) 4.

70. Federal High Court of Nigeria (n 45) 5.

71. Uzoukwo c. Ezeonu (1991) 6 NWI.

72. Federal High Court of Nigeria (n 45) 22.

73. n 72.

74. Federal High Court of Nigeria (n 45) 5.

75. Federal High Court of Nigeria (n 45) 22.

76. Federal High Court of Nigeria (n 45) 29-31.

78. Social and Economic Rights Action Center (SERAC) and Another v Nigeria (n 49) 73.

79. Huglo (n 44) 102.

80. Adoptée le 27 juin 1981 et entrée en vigueur le 21 octobre 1986.

81. L’article 18(1) du Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes adopté le 11 juillet 2003 et entré en vigueur le 25 novembre 2005 dispose que les femmes ont le droit de vivre dans un environnement sain et viable. En outre, le droit à un environnement sain transparait de l’article 11(2)(g) de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant adoptée le 1 juillet 1990 et entrée en vigueur le 29 novembre 1999 qui relève que l’éducation de l’enfant vise à susciter le respect de l’environnement et des ressources naturelles.

82. Social and Economic Rights Action Center (SERAC) and Another v Nigeria (n 49) 68.

83. Le Centre pour les droits de l’homme (Université de Pretoria) et la rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme (Sénégal) c. Sénégal (n 52) 13.

84. La loi sur gestion de l’environnement (traduction libre).

85. High Court of South Africa (n 46).

86. n 85.

87. Cournil & Varisan (n 18) 98.

88. High Court of South Africa (n 46) 3.

89. Traduction libre. Voir à ce sujet, High Court of South Africa (n 48) 33.

90. n 89.

91. n 89.

92. Cournil (n 44) 98.

93. Traduction libre. Cf. National Environmental Tribunal (n 47) 2.

94. Traduction libre.

95. National Environmental Tribunal (n 49) 2.

96. n 95.

97. n 95.

98. Traduction libre. Cf. National Environmental Tribunal (n 47) 28.

99. Traduction libre. Cf. National Environmental Tribunal (n 47) 49.

100. High Court of South Africa Trustees for the Time Being of the Groundwork Trust v Minister of Environmental Affairs & Others Affaire n° 54087 (4 août 2017).

101. High Court of South Africa Trustees for the Time Being of the Groundwork Trust v Minister of Environmental Affairs & Others Requête n° 61561 (5 septembre 2017).

102. High Court of South Africa (n 100) 14.

103. Thabametsi (n 46), traduction libre.

104. High Court of South Africa (n 100) 15.

105. n 100.

106. High Court of South Africa (n 101) 12.

107. n 106.

108. High Court of South Africa (n 46) 11.

109. Ukala ‘Gas flaring in Nigeria’s Niger Delta: failed promises and reviving Community voices’ (2012) 2 Washington and Lee Journal of Energy, Climate and The Environment 108.

110. Ukala (n 109) 109.

111. n 109.

112. KG Kingston ‘Shell oil company in Nigeria: impediment or catalyst of socio-economic development?’ (2011) African Journal of Social Sciences 1 10.

113. Ukala (n 109) 107.

114. Federal High Court of Nigeria (n 45) 2.

115. Ukala (n 109) 110.

116. n 115.

117. Ukala (n 109) 113.

118. Kingston (n 109) at 11.

119. Environmental Law Alliance Worldwide ‘Holding corporations accountable for damaging the climate’ (2014) 33 https://www.elaw.org/system/files/elaw.climate.litigation.report.pdf (consulté le 21 octobre 2019).

120. Traduction libre. Cf. Environmental Law Alliance Worldwide (n 119) 27.

121. Traduction libre de Environment and Land Court.

122. Environment and Land Court Act 2011 para 13(2)(a).

123. Affaires SERAC et Endorois devant la Commission africaine, Ogiek devant la Cour africaine, Le centre pour les droits de l’homme devant le Comité sur les droits de l’enfant et SERAP devant la Cour de la CEDEAO.

124. Social and Economic Rights Action Center (SERAC) and Another v Nigeria (n 49) 5.

125. Social and Economic Rights Action Center (SERAC) and Another v Nigeria (n 49) 6.

126. n 125.

127. National Environmental Tribunal (n 47) 49.

128. Cette pétition alléguait que les actions et omissions des Etats Unis en matière climatique violaient leur droit fondamental à l’utilisation et à la jouissance de leur propriété. Elle relevait que la propriété n’est pas uniquement conçue comme les biens matériels que l’on peut posséder mais aussi du patrimoine personnel. Sur cette base, les plaignants affirment les changements climatiques diminuent la valeur de leur propriété personnelle, intangible. Cf. Watt-Cloutier c. Etats Unis, Commission Interaméricaine des droits de l’homme, CIADH (7 décembre 2005), P-1413-05.

129. Centre for Minority Rights Development & Others c. Kenya (n 50) 120.

130. Ibid.

131. M Addaney et al ‘The climate change and human rights nexus in Africa’ (2017) 9 Amsterdam Law Forum 6-7.

132. Le Centre pour les droits de l’homme (Université de Pretoria) et la rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme (Sénégal) c. Sénégal (n 52) 13.

133. The Independent Expert on the issue of human rights obligations relating to the enjoyment of a safe, clean, healthy and sustainable environment (n 36) 6.

134. Ibid.

135. Traduction libre. Cf. SERAP c. Nigeria (14 décembre 2012) (n 53) 26.

136. E Boshoff ‘Protecting the African child in a changing climate : are our existing safeguards adequate?’ (2017) 1 Annuaire africain des droits de l’homme at 23.

137. Cournil & Varison (n 18) 26.