Mireille Rabenoro
 Agrégation d’anglais, Paris; Maîtrise es Lettres, mention Histoire, Université d’Antananarivo
 Présidente de la Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme de la République de Madagascar
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 Edition: AHRY Volume 1
  Pages: 337 - 356
 Citation: M Rabenoro ‘Du “droit de la force” à la force du droit: pour la dépénalisation de l’avortement à Madagascar’ (2017) 1 Annuaire Africain des Droits de l’Homme 337-356 http://doi.org/10.29053/2523-1367/2017/v1n1a16
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RÉSUMÉ

D’après les estimations de l’Organisation mondiale de la santé, 67 800 femmes meurent chaque année dans le monde de complications d’un avortement non sécurisé. L’Afrique a le taux le plus élevé de décès maternels liés aux avortements non sécurisés. Cette mortalité élevée est due principalement à la pénalisation de l’avortement qui limite l’accès à l’avortement sécurisé et aux soins post avortement. Madagascar est l’un des pays criminalisant l’avortement au moyen d’une législation très restrictive en matière d’interruption volontaire de la grossesse. A travers une description historique et sociale, cet article montre que la pénalisation de l’avortement à Madagascar s’inscrit dans un environnement général d’inégalité et de violation des droits des femmes. Il présente l’impact négatif de l’avortement sur la santé et les droits des femmes contrairement aux engagements internationaux de Madagascar prévus dans les textes universels et régionaux consacrant le droit à la santé sexuelle et reproductive des femmes et filles. L’article appelle donc à une évolution du droit malgache en vue de consacrer sa force à une meilleure protection des droits des femmes et des filles.

TITLE AND ABSTRACT IN ENGLISH:

From the ‘law of force’ to the force of law: an argument for the decriminalisation of abortion in Madagascar

ABSTRACT: According to estimates by the World Health Organization, worldwide, 67,800 women die annually from complications of unsafe abortion. Africa has the highest rate of maternal mortality related to unsafe abortions. This high mortality rate is due mainly to the criminalisation of abortion, which limits access to safe abortion and post-abortion care. Madagascar is one of the countries that criminalises abortion through very restrictive legislation on the voluntary termination of pregnancy. Adopting a historical and social approach, this article shows that the criminalisation of abortion in Madagascar is part of a general climate of inequality and women’s rights violation. It presents the negative impact of abortion on the health and on the rights of the women, in violation with Madagascar’s international commitments set out in global and regional texts recognising the sexual and reproductive health rights of women and girls. The article accordingly calls for the development of Malagasy law to achieve improved protection of women’s and girls’ rights.

MOTS CLÉS: avortement non sécurisé, dépénalisation, l’accès à l’avortement sécurisé, droits des femmes, santé sexuelle et reproductive, Protocole de Maputo

SOMMAIRE:

1 Introduction 

2 L’avortement criminalisé, expression du ‘droit de la force’  

2.1 La perpétuation d’une violence institutionnelle  

2.2 La spirale de la violence sociale  

3 La dépénalisation de l’avortement: réhabiliter la force du droit  

3.1 Du Caire à Maputo: les droits des femmes Renforcés  

3.2 Le droit au service de la protection des droits humains en Afrique  

4 Conclusion  

1 INTRODUCTION

Madagascar, état partie à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (Charte africaine) depuis 1992, s’est abstenue jusqu’ici de ratifier le Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique (Protocole de Maputo).1 La raison plus ou moins avouée en serait le contenu de l’article 14(2), par lequel les états parties s’engagent à

protéger les droits reproductifs des femmes, particulièrement en autorisant l’avortement médicalisé, en cas d’agression sexuelle, de viol, d’inceste et lorsque la grossesse met en danger la santé mentale et physique de la mère ou la vie de la mère ou du fœtus.2

Les décideurs, tant au niveau de l’exécutif que du législatif, se sont en effet montrés réticents, parfois violemment opposés à l’idée d’un élargissement des conditions dans lesquelles l’avortement peut être autorisé. De fait, l’idée même que les femmes puissent avoir des ‘droits reproductifs’ tels qu’énoncés par le Protocole de Maputo est encore peu familière aux décideurs comme aux citoyen-ne-s malgaches, dont la grande majorité reste imprégnée d’une conception patriarcale de la famille et de la société. Celle-ci est d’ailleurs consacrée par la loi, qui énonce clairement que ‘le mari est le chef de la famille’, bien qu’un aménagement récent ait ajouté que ‘la femme concourt avec lui à la direction du ménage’.3 Dans ce cadre, la femme, loin d’avoir des droits reproductifs, a surtout des devoirs reproductifs, comme le montre par exemple le triste sort généralement réservé aux femmes réputées stériles, qui sont considérées incapables de remplir leurs devoirs envers leur mari et la communauté.

Le contexte juridique et social à Madagascar reste ainsi résolument hostile à la légalisation de l’interruption volontaire de la grossesse, que la loi considère comme un crime et punit comme tel.4 Seul le code de déontologie médicale - qui n’a pas force de loi - l’autorise dans un cas unique: lorsque la poursuite de la grossesse met la vie de la mère en danger. Même dans ce cas, les conditions sont difficiles à remplir, nécessitant par exemple l’avis de plusieurs médecins.5 Les peines relatives à l’avortement sont également lourdes: emprisonnement assorti d’amendes, touchant tant la personne qui aura procuré l’avortement que ses ‘complices’, et surtout la femme elle-même, à laquelle aucun droit n’est donc reconnu concernant son propre corps.6 Dans ces conditions, l’avortement se fait nécessairement dans la clandestinité, car il est réputé illégal, comme l’a constaté par exemple une étude réalisée dans la région Sud-Ouest de Madagascar.7 Effectué dans des conditions souvent inhumaines, l’avortement clandestin coûte la vie à plus de 575 femmes par an, selon une estimation.8

Le fait est en contradiction avec l’adhésion de Madagascar, depuis l’Indépendance en 1960, aux principaux instruments internationaux et régionaux de promotion des droits de l’homme, dont la Déclaration universelle des droits de l’homme (Déclaration universelle)9 et la Charte africaine,10 qui placent le droit à la vie parmi les droits fondamentaux de tous les êtres humains. Bien que la constitution de la République de Madagascar actuellement en vigueur (depuis 2010) stipule en son article 137 que ‘les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois’,11 sur la question de l’avortement provoqué c’est la loi nationale le criminalisant qui continue à faire autorité. Depuis quelques années pourtant, la recherche a montré les liens sans équivoque entre criminalisation de l’avortement et mortalité maternelle.12 Parallèle-ment, sur le plan du droit, les organes de suivi des instruments internationaux et régionaux de droits de l’homme se sont prononcés, à travers des observations générales et des recommandations aux états parties, en faveur de l’avortement médicalisé qui est considéré comme faisant partie intégrante du droit à la santé reproductive.13

Le présent article a pour ambition de déconstruire le blocage, de mettre au jour les éléments constitutifs des rapports de force, généralement défavorables à la femme, qui déterminent tant le recours à l’avortement que sa criminalisation; d’autre part, l’article s’attachera à explorer les conditions requises pour assurer la transition, du ‘droit de la force’ qui caractérise l’environnement actuel de l’avortement, vers la réalisation de la force du droit que représenterait sa dépénalisation. La démarche adoptée pour ce faire est essentiellement d’ordre sociologique, et se base sur les rares études réalisées directement sur l’avortement à Madagascar, y compris le profil des femmes qui y ont recours et de celles qui en meurent, leurs motivations décrites dans des études antérieures.14 L’étude s’appuie également sur des questions connexes comme celle de la sexualité des adolescents dans la région Sud-Ouest de Madagascar, qui contribue à faire comprendre les contradictions qui entourent le phénomène de l’avortement.15 Les données recueillies par ces études spécifiques sur l’avortement et son contexte à Madagascar ne peuvent pas prétendre à la représentativité, comme le souligne Guillaume à propos du phénomène de l’avortement en Afrique.16 Les enquêtes en effet sont principalement d’ordre qualitatif, et portent sur des échantillons nécessairement restreints, sans commune mesure avec les données autrement plus complètes qu’aurait pu obtenir une institution de statistiques dans un contexte où l’avortement aurait été légal. Quoi qu’il en soit, les données disponibles sont mises en perspective par celles portant sur les rapports entre législation et incidence de l’avortement d’une part, entre législation et mortalité maternelle d’autre part, au niveau international et particulièrement au niveau continental africain.

La première partie de l’étude s’attache à montrer en quoi la criminalisation de l’avortement est une expression du ‘droit de la force’. Depuis son entrée dans la législation, la répression de l’avortement apparait en effet comme une forme de violence institutionnelle: imposée dans le cadre général de la colonisation, elle ignore les inégalités au détriment des femmes, pourtant partie intégrante du phénomène de l’avortement. On peut parler d’une législation rigide, aveugle, qui ne tient aucun compte des mutations sociales au cœur de l’expansion actuelle de l’avortement, et qui accentuent davantage la victimisation des femmes, en ajoutant à l’inégalité de genre l’inégalité économique. La deuxième partie montre en quoi la dépénalisation de l’avortement contribuerait à rétablir la force du droit, en réhabilitant à la fois son efficacité sociale et son efficacité normative. En se rapprochant des réalités vécues, notamment par les femmes et les jeunes filles, la loi cessera d’être une force de répression anti productive, qui n’a jamais réussi, malgré les menaces qu’elle fait peser sur les femmes en quête d’avortement, à les en dissuader. Plus réaliste et plus juste, la loi sera aussi plus respectée, ce qui contribuera à faire de l’Etat de droit revendiqué par les gouvernants une réalité plus concrète.

 2 L’AVORTEMENT CRIMINALISE, EXPRESSION DU ‘DROIT DE LA FORCE’

Dès l’ère précoloniale, l’interruption volontaire de la grossesse est considérée comme un délit à Madagascar, comme en atteste par exemple le Code des 305 Articles, à la fois code pénal et code de procédure pénale promulgué par la reine Ranavalona II en 1881.17 Le Code, en effet, punissait l’avortement d’une peine d’amende unique, mais sans préciser qui l’encourait, de la femme qui se faisait avorter elle-même ou ceux que la loi coloniale allait qualifier plus tard de complices. La répression de l’avortement était probablement liée à la nécessité de favoriser la croissance démographique, dans un contexte où l’accès aux soins médicaux était quasiment exceptionnel, et la mortalité infantile conséquemment élevée.18 Il est également possible que cette disposition ait été inspirée par les missionnaires britanniques de la London Missionary Society, très influents auprès de la reine Ranavalona II, et dont les positions étaient à leur tour fortement influencées par les idées et les pratiques de leur temps en Europe. Cependant, il semble que, contrairement aux législations européennes de l’époque, le Code des 305 Articles ait considéré l’avortement comme un délit et non un crime, au vu de la relative légèreté des peines encourues.19 Il n’en demeure pas moins que dès ce premier acte de codification à l’européenne des lois et règlements à Madagascar, l’avortement a été introduit comme acte répréhensible, ce qui retirait aux femmes tout droit, toute initiative concernant leur propre corps, et faisait d’elles un instrument de reproduction sociale sur lequel la société, représentée par la loi, avait un droit de regard et de jugement.

2.1 La perpétuation d’une violence institutionnelle

C’est avec l’avènement de la colonisation, cependant, que la pression sur les fonctions reproductrices des femmes malgaches, comme de toutes les femmes des pays colonisés vers la fin du 19ème siècle, s’accentue jusqu’à devenir une forme d’oppression spécifique à l’intérieur du système d’oppression systématique que représente la colonisation.

2.1.1 Un vestige du droit colonial 

En 1896, année de l’annexion de Madagascar par la France, c’est toujours le code pénal de 1810 qui a cours en France, et se trouve donc applicable dans la nouvelle colonie. En son article 317, ce code pénal se montrait sévère envers toutes les personnes impliquées dans un acte d’avortement:

Quiconque, par aliments, breuvages, médicaments, violences, ou par tout autre moyen, aura procuré l’avortement d’une femme enceinte, soit qu’elle y ait consenti ou non, sera puni de la réclusion.

La même peine sera prononcée contre la femme qui se sera procuré l’avortement à elle-même, ou qui aura consenti à faire usage des moyens à elle indiqués ou administrés à cet effet, si l’avortement s’en est ensuivi.

Les médecins, chirurgiens et autres officiers de santé, ainsi que les pharmaciens qui auront indiqué ou administré ces moyens, seront condamnés à la peine des travaux forcés à temps, dans le cas où l’avortement aurait eu lieu.20

Pour les féministes françaises, qui dans les années 1960 allaient choisir pour mot d’ordre la formule ‘un enfant si je veux, quand je veux’ dans la lutte pour la libéralisation de la contraception, jusque-là interdite par la loi du 31 juillet 1920 ‘réprimant la provocation à l’avortement et à la propagande anticonceptionnelle’,21 c’est surtout la déshumanisation des femmes, par la formule ‘soit qu’elle y ait consenti ou non’, qui choquait, en ce qu’elle ne semblait accorder aucune valeur aux sentiments ou aux décisions des femmes concernées. Cette négation de l’individualité des femmes était aggravée par le fait qu’elles encouraient la même peine de réclusion en se faisant avorter elles-mêmes, comme si elles étaient aussi étrangères à leur propre corps que ‘les médecins, chirurgiens et autres officiers de santé’ visés par la loi.

Ce sont ces lois, aujourd’hui vieilles respectivement de deux siècles (en ce qui concerne le code pénal de 1810) et d’un siècle (la loi de 1920), qui ont été imposées à la société malgache colonisée. Si la seconde ne figure plus dans le code pénal, ayant été abrogée de fait par la loi portant sur la Politique Nationale de Population en 1990, la première a

toujours cours aujourd’hui à Madagascar. Les transpositions mot pour mot22 du code pénal français de 1810, réalisées au début des années 1960 pour doter les états africains nouvellement indépendants d’un code pénal censé leur être propre, étaient significatives de la nature de ces indépendances. L’apparente pérennité de ces lois répressives soulève néanmoins des interrogations. Il est inattendu, par exemple, que des lois aussi conservatrices aient pu traverser tous les régimes à Madagascar. De même, le code pénal sénégalais non seulement reprend mot pour mot, comme le fait le code pénal malgache, les termes du code pénal français de 1810, il introduit tardivement, en 1980, un article numéroté 305bis qui complète l’article 305 réprimant l’avortement, et reproduit les termes exacts de la loi française de 1920 réprimant la propagande anticonceptionnelle, en remplaçant seulement l’expression ‘crime d’avortement’ par celle de ‘délit d’avortement’.23

2.1.2 Le conservatisme postcolonial

L’attachement du législateur africain aux lois les plus répressives de l’ancien colonisateur est manifeste : plus de quarante ans après la loi Veil qui a dépénalisé l’avortement en France en 1975, aucune des anciennes colonies françaises en Afrique n’a libéralisé sa législation, à l’exception de la Tunisie qui en fait a précédé la France dans ce domaine puisqu’elle l’a fait dès 1973.24 D’après les défenseurs de la criminalisation de l’avortement, la parfaite similarité des termes du code pénal napoléonien de 1810 et du code pénal malgache actuel ne serait que coïncidence: l’esprit du code pénal français, les valeurs qui le sous-tendaient, en l’occurrence le respect de la vie, qui commencerait dès la conception in utero, seraient des valeurs universelles que partagerait la culture malgache.

D’après une étude du Centre français d’Etudes sur la Population et le Développement (CEPED) sur ‘les conditions du droit à l’avortement en 1994 et 1999’, sur les 53 pays du continent africain, en 1999, bien qu’aucun n’interdise totalement l’avortement, trois seulement, le Cap-Vert, la Tunisie et l’Afrique du Sud, l’autorisaient à la demande de la femme.25 Seize ans après, et dix ans après l’adoption du Protocole de Maputo, dont l’article 14(2)(c) appelle les états parties à autoriser l’avortement médicalisé dans certains cas, ces trois pays étaient toujours les seuls en 2015 à autoriser l’avortement à la demande de la femme, bien que 36 pays aient ratifié le Protocole. Cette lenteur de l’évolution de la situation illustre les difficultés que rencontrent les pays pour traduire en lois nationales les engagements pris au niveau international ou régional.

Madagascar fait partie des 15 pays africains qui ont signé le Protocole de Maputo, mais se sont abstenus de le ratifier jusqu’ici. Plusieurs tentatives ont été menées par des organisations de femmes pour pousser l’Assemblée Nationale et le Sénat à le ratifier, mais se sont heurtées au fil des ans aux mêmes réactions soutenues par les mêmes arguments, selon lesquels l’avortement serait contraire aux valeurs malgaches, ou aux valeurs chrétiennes, ou encore sa libéralisation encouragerait davantage les femmes à le pratiquer.26

Ainsi, la violence institutionnelle initialement introduite par la colonisation se perpétue à travers le maintien dans les législations nationales des pays africains, un demi-siècle après les Indépendances, de la loi réprimant sévèrement l’avortement, qui prive les femmes en situation de grossesse non désirée de leurs droits à la santé reproductive et même, dans certains cas, à la vie.

2.2 La spirale de la violence sociale

Selon une étude menée par UNFPA en 2005: ‘En Afrique subsaharienne [...], les données en provenance de sept pays ont révélé que 39 à 79 pour cent des patientes traitées pour des complications de l’avortement étaient des adolescentes’.27 Une fois de plus, Madagascar ne fait pas exception. L’étude de Focus Development Association sur la ‘sexualité des adolescents dans la région Sud-Ouest’ a mis en évidence des rapports de force, généralement au détriment des jeunes filles, déterminant l’apparition de grossesses imprévues qui se révèlent le plus souvent indésirables et sont donc interrompues par un avortement.28

2.2.1 La question sous-jacente de l’égalité homme-femme

Le premier de ces déterminants, le statut inférieur des femmes par rapport aux hommes, se manifeste à divers niveaux. Dans la sphère publique, la plus évidente, le déficit de statut apparait à travers les proportions de femmes aux postes de décision, qui n’ont globalement pas atteint les objectifs du Protocole de la SADC sur le Genre et Développement, c’est-à-dire 50 pour cent de femmes dans tous les domaines en 2015.29 Il est à noter que des progrès significatifs ont été enregistrés aux niveaux intermédiaires, avec par exemple 20 pour cent de femmes parlementaires ou directrices générales dans les ministères, et 38,2 pour cent de femmes responsables d’ONG d’une certaine envergure, mais très faibles aux niveaux de base, avec moins de 5 pour cent de femmes maires et conseillères communales en 2015-2016, ainsi que parmi les dirigeants d’associations communautaires.30 Dans la sphère privée, la loi accorde au mari le statut de chef de famille.31 A la différence de statut juridique répond celles des bénéfices économiques: par exemple la superficie économique moyenne exploitée par les ménages agricoles dirigés par une femme est de 1.3 Ha contre 1.8 Ha chez ceux dirigés par un homme.32 De même, en 2013 la valeur des revenus salariaux annuels moyens des femmes était de 1 462 000 Malagasy Ariary (USD 473) contre 2 025 000 Malagasy Ariary (USD 656) chez les hommes. En outre, au sein des ménages dirigés par un homme, le travail de production des femmes est rarement reconnu et comptabilisé.33 Il résulte de ces écarts des situations objectives ainsi que des sentiments profondément ancrés de dépendance économique des femmes par rapport aux hommes, avec des répercussions sur les attitudes et les comportements en matière de sexualité. Le schéma est le même dans bien des situations, de la jeune fille issue de famille pauvre que les parents proposent, même comme seconde épouse, à un homme réputé riche censé lui donner tout ce dont elle aura besoin, à la mère de famille nombreuse qui s’abstient d’adopter le planning familial parce que son mari le lui interdit, craignant selon une croyance tenace que la contraception moderne ne favorise l’infidélité de son épouse. En outre, la dépendance économique est l’une des raisons le plus souvent avancées par les femmes victimes de violence conjugale pour ne pas quitter leur mari ni porter plainte contre lui. Le statut inférieur des femmes peut ainsi les conduire à des situations où leur liberté d’initiative et de défense de leurs propres intérêts se trouve constamment réduite, notamment en ce qui concerne le contrôle de leur fonction reproductrice.

Ainsi, en criminalisant l’avortement, la loi malgache consacre et renforce les inégalités entre les hommes et les femmes, notamment les adolescentes mal informées et pauvres, qui n’ont pas accès à un service médicalisé d’autant plus onéreux qu’il est illégal, et supportent le plus souvent les conséquences fatales de la clandestinité de l’avortement. La loi ignore aussi les mutations en cours dans la société, les contradictions nées de la coexistence d’une part d’un passé nataliste encore bien présent, même chez certains professionnels de la santé, et d’autre part d’une forme de modernité où l’on assiste au déclin de la procréation comme valeur en soi. Ce changement de paradigme se traduit chez les hommes, particulièrement les adolescents par le fait que la satisfaction du besoin sexuel et le prestige social dérivé du nombre et de la qualité des partenaires sexuelles l’emportent souvent sur le désir de descendance qui était si fort chez leurs ainés; chez les femmes, l’aspiration à la stabilité, au mariage, contrariée par le refus de prise en charge de la part du père biologique, peut l’emporter sur la fierté de devenir mère et conduire à une décision d’interruption volontaire de la grossesse.34 D’autre part, le communautarisme qui fait d’une naissance en milieu traditionnel, même hors mariage, un événement relativement gérable, perd du terrain face à l’individualisme qui envahit les milieux urbains et déborde vers les milieux ruraux. En outre, la domination des cultures du Nord, à travers les films vidéo qui circulent jusque dans les villages, a été signalée comme facteur de permissivité irresponsable : les jeunes regarderaient avidement les scènes d’amour, mais sans comprendre le contexte du fait de la barrière linguistique.35 Il y a bien là un ensemble de situations nouvelles, complexes, qui favorisent tant les grossesses imprévues que la décision d’y mettre fin, avec des motivations suffisamment fortes pour rendre la loi, si répressive qu’elle soit, impuissante à contenir le phénomène.

2.2.2 Une question de violation des droits humains des femmes

Ces différentes situations d’inégalités hommes - femmes, associées à la pénalisation de l’avortement, ont un impact grave sur un droit fondamental des femmes: le droit à la vie. D’après les estimations de l’Organisation mondiale de la santé, sur les 67 800 femmes qui meurent chaque année dans le monde de complications d’un avortement non sécurisé, 67 500 se trouvent dans un pays en développement ; et de toutes les régions du monde, c’est l’Afrique qui a le taux le plus élevé de décès maternels, avec 680 décès pour 100 000 avortements non sécurisés, contre 0.7 dans les pays développés.36 Madagascar se situe plus ou moins dans la moyenne africaine, avec 575 décès pour 75 000 avortements non sécurisés par an, d’après une estimation du ministère de la Santé.37 Tous les pays africains, pourtant, sont parties prenantes à la Déclaration Universelle, ainsi qu’à la Charte africaine, qui posent le droit à la vie comme l’un des tout premiers des droits fondamentaux de l’être humain. C’est dans cette optique que le Plan décennal de mise en œuvre de l’Agenda 2063 pour la période 2014-2023 engage les états africains à réduire de moitié le nombre de cas de mortalité maternelle.38

Outre les traités fondamentaux des droits de l’homme juridiquement contraignants pour les états africains, la Recommandation Générale 19 du Comité sur l’Elimination des Discriminations à l’égard des Femmes (CEDEF) relative à la violence à l’égard des femmes stipule au paragraphe 7:

La violence fondée sur le sexe, qui compromet ou rend nulle la jouissance des droits individuels et des libertés fondamentales par les femmes en vertu des principes généraux du droit international ou des conventions particulières relatives aux droits de l’homme, constitue une discrimination, au sens de l’article premier de la Convention. Parmi ces droits et libertés, on peut citer notamment:

a) Le droit à la vie;

b) Le droit à ne pas être soumis à la torture et à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.39

Des formes de violence fondée sur le sexe telles que le viol et l’inceste constituent en soi une atteinte directe aux droits des femmes, qui peut être aggravée encore à deux niveaux: lorsqu’une grossesse résulte du rapport sexuel forcé, et que la loi en interdit l’interruption, obligeant la femme victime de viol et/ou d’inceste à rechercher un avortement clandestin dans des conditions habituellement cruelles ou dégradantes, en plus d’être dangereuses pour sa santé ou sa vie.

Au-delà du droit à la vie, la Stratégie africaine de la santé 2016-2030 reconnaît le droit à la santé en tant que droit de l’homme.40 Cette approche est complétée par les recommandations du Comité sur les Droits Economiques, Sociaux et Culturels et du CEDEF, selon lesquelles le droit des femmes à la santé inclut leur santé sexuelle et reproductive. Celle-ci est souvent sujette à des violations diverses, notamment lorsque la loi fait de l’avortement provoqué un crime. Ainsi, le CEDEF spécifie qu’il est ‘discriminatoire pour un État membre de refuser de pourvoir légalement la prestation de certains services de santé reproductive pour les femmes’.41 Le caractère discriminatoire apparait encore plus clairement lorsque l’on considère les contextes sociaux du refus de prestation de services d’avortement sécurisé dans les pays où il est illégal: les adolescentes, du fait de l’absence de ressources indépendantes, et les femmes pauvres sont habituellement celles qui meurent le plus souvent des complications d’un avortement clandestin, parce qu’elles n’auront pas eu les moyens de payer les services d’un médecin qualifié. C’est donc bien de la pénalisation de l’avortement provoqué que découle la discrimination. De plus, le Comité déclare que ‘les lois qui criminalisent les procédures médicales dont seules les femmes ont besoin et qui punissent les femmes qui subissent ces procédures’ sont un frein à leur accès aux soins de santé.42 Il en est ainsi de la criminalisation de l’avortement: parce qu’elles craignent de subir la rigueur de la loi, après un avortement les femmes et les jeunes filles n’approchent un centre de santé qu’en dernier recours, lorsqu’elles sont en danger de mort; en outre, aussitôt après les soins d’urgence le personnel médical les laissera partir parce qu’il est censé ignorer qu’il s’agissait d’un avortement provoqué. Les survivantes d’un avortement clandestin ne seront donc pas conseillées en matière de contraception, ce qui est contraire au ‘droit des femmes et des hommes’, tel que défini par la Plateforme d’action de Beijing adoptée à la suite de la Conférence mondiale sur les femmes en 1995, ‘d’être informés sur les méthodes de planification familiale qui soient sûres, efficaces, abordables et acceptables, et d’utiliser celle qui leur convient, ainsi que toute autre méthode de régulation des naissances qui ne soit pas illégale’.43

D’après le Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme, la santé sexuelle et reproductive des femmes est étroitement liée à de multiples droits humains, dont le droit à la vie, le droit de ne pas subir la torture, le droit à la santé, le droit à la vie privée, le droit à l’éducation et l’interdiction de la discrimination.44 Ce sont tous ces droits qui sont refusés aux femmes et aux jeunes filles en situation de grossesse non désirée dans les pays dont la législation criminalise l’avortement provoqué.

3 LA DEPENALISATION DE L’AVORTEMENT: REHABILITER LA FORCE DU DROIT

La criminalisation de l’avortement apparait ainsi comme source de drames au niveau individuel et de problèmes de santé publique au niveau national, autant que de violations des droits humains. Au cours des vingt dernières années cependant, la communauté internationale, au niveau des Nations Unies comme au niveau de l’Union Africaine, a tracé le chemin vers la reconnaissance du droit à l’accès à l’avortement sécurisé comme un droit humain des femmes.

3.1 Du Caire à Maputo: les droits des femmes renforcés

En une décennie, de la Déclaration de la Conférence mondiale sur les droits de l’homme (1993)45 au Protocole de Maputo (2003), la conception de la communauté internationale concernant les droits des femmes en matière de santé sexuelle et reproductive a considérablement évolué.

3.1.1 La santé sexuelle et génésique selon la CIPD et la Plateforme de Beijing

En son paragraphe 41, la Déclaration et le Programme d’action de Vienne adoptée par la Conférence mondiale sur les droits de l’homme réaffirmait,

en se fondant sur le principe de l’égalité de l’homme et de la femme, le droit de la femme à des soins de santé accessibles et suffisants et à la gamme la plus large possible de services de planification familiale.46

Ainsi, l’accès aux soins de santé et à la contraception était déjà présenté comme un droit. Le principe allait être repris et développé par la Conférence internationale sur la population et le développement du Caire en 1994, dont le Programme d’action, pour la première fois dans un texte international de cette envergure, traitait de la question des ‘avortements pratiqués dans de mauvaises conditions de sécurité’.47 Tout en évitant soigneusement d’utiliser le mot ‘droit’ dans l’ensemble du paragraphe, et en soulignant que

la plus haute priorité doit toujours être accordée à la prévention des grossesses non désirées et (que) tout devrait être fait pour éliminer la nécessité de recourir à l’avortement’, le texte n’en traitait pas moins de l’avortement clandestin et de ses conséquences comme d’un ‘problème majeur de santé publique.48

Ceci était important en ce sens que la question sortait pour la première fois, dans un contexte international, du ghetto des opinions personnelles et des jugements moraux ou religieux pour accéder à la sphère publique. De même, le texte, tout en recherchant le consensus propre aux conférences mondiales, préconisait l’accès des femmes, ‘dans tous les cas, ... à des services de qualité pour remédier aux complications découlant d’un avortement’,49 là où ce genre de situation était - et est encore - traité, dans les pays où l’avortement est illégal, dans le secret, la honte et le danger. Cependant, le Programme d’action du Caire préconisait que ‘toute mesure ou toute modification relative à l’avortement au sein du système de santé ne peuvent être arrêtées qu’à l’échelon national ou local conformément aux procédures législatives nationales’,50 de manière sans doute à ce que les pays hostiles au changement n’aient pas l’impression que la libéralisation de l’avortement leur était imposée.

Un an seulement après le Caire, la Conférence mondiale sur les femmes de Beijing reprenait les idées forces de la CIPD, mais en adoptant des termes plus fermes et en parlant du ‘droit des femmes et des hommes d’être informés sur les méthodes de planification familiale

qui soient sûres, efficaces, abordables et acceptables, et d’utiliser celle qui leur convient’.51 Les ‘avortements faits dans de mauvaises conditions, (qui) menacent la vie de nombreuses femmes’, y sont présentés comme ‘un grave problème de santé publique’.52 Ainsi, le Programme d’action de la CIPD et celui de Beijing posaient conjointement les bases d’une action à mener pour faire baisser le nombre des décès maternels dus à l’avortement clandestin, le premier évoquant sans les nommer d’éventuelles mesures de libéralisation de l’avortement à l’intérieur des pays.

3.1.2 L’accès à l’avortement sécurisé érigé en droit: le Protocole de Maputo

Les conférences mondiales de Vienne, du Caire et de Beijing ayant jeté les bases de l’affirmation de la santé sexuelle et génésique des femmes comme un droit, le Protocole de Maputo n’apparaissait pas comme novateur en consacrant son article 14 au ‘Droit à la santé et au contrôle des fonctions de reproduction’. Cependant, le Protocole de Maputo à la différence des autres documents est un traité produisant des obligations à l’égard des états l’ayant ratifié. Par ailleurs, c’est en appelant les états parties à ‘prendre toutes les mesures appropriées’ pour ‘protéger les droits reproductifs des femmes, particulièrement en autorisant l’avortement médicalisé en cas d’agression sexuelle, de viol, d’inceste et lorsque la grossesse met en danger la santé mentale et physique de la mère ou la vie de la mère ou du fœtus’ que le Protocole apparaissait comme révolutionnaire.53 La légalisation de l’avortement y est présentée comme un moyen dont disposent les états pour accomplir leur devoir de protection des droits reproductifs des femmes.

Bien que le tiers des 54 pays membres de l’Union Africaine, dont Madagascar, n’aient pas encore ratifié le Protocole de Maputo, essentiellement au motif qu’ils ne sauraient accepter d’autoriser l’avortement médicalisé, même dans les conditions prévues en son article 14(2)(c), et que nombre de ceux qui l’ont ratifié n’aient toujours pas pris à ce jour les mesures législatives nécessaires à sa mise en œuvre effective, le Protocole constitue un jalon essentiel vers la considération de l’avortement médicalisé comme partie intégrante de la protection des droits des femmes. Pour ne citer qu’un exemple, le Plan d’action pour la mise en œuvre du Cadre d’orientation continental pour la promotion des droits et de la santé en matière de sexualité et de reproduction en Afrique (2007-2010) adopté par la Conférence des ministres de la Santé de l’Union Africaine en 2006 prévoyait la prestation de ‘services d’avortement sans risque dans le cadre des

dispositions de la loi’.54 Bien qu’il s’agisse d’un simple plan d’action sans valeur contraignante pour les états, une telle disposition n’aurait sans doute pas été possible sans la référence essentielle que constitue le Protocole de Maputo.

La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (Commission africaine) a élaboré en 2014 les ‘Observations Générales 2 relatives aux articles 14(1)(a), (b), (c) et (f) ainsi qu’à l’article 14(2)(a) et (c) du Protocole de Maputo’, qui préconisent une approche holistique des droits de la femme.55 Elles précisent en effet que les dispositions de l’article 14,

doivent être lues et interprétées à la lumière d’autres dispositions du Protocole portant sur des aspects transversaux des droits humains de la femme, y compris le droit de ne pas faire l’objet de discrimination, le droit à la dignité, le droit à l’intégrité et à la sécurité, l’accès à la justice et le droit à l’éducation.56

La Commission africaine constate cependant que

ces droits restent encore caractérisés par le faible accès des femmes et des adolescentes à la planification familiale; la pénalisation de l’avortement et les obstacles que rencontrent celles-ci pour accéder à des services d’avortement sûrs et disponibles, y compris dans les cas autorisés par la loi nationale.57

C’est donc pour aider à inverser cette tendance que la Commission a élaboré les Observations Générales 2.

3.2 Le droit au service de la protection des droits humains en Afrique

Avec le Protocole de Maputo, et les Observations Générales 2 de la Commission africaine pour en guider la mise en œuvre, ainsi que les recommandations des organes de suivi des traités, tels le Comité des Droits de l’Homme chargé du suivi de l’application du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques, ou le CEDEF, le cadre juridique est désormais en place au niveau continental pour permettre aux états de l’Union Africaine d’être plus efficaces dans la protection des droits humains des femmes en Afrique, et notamment de leur droit à la santé sexuelle et génésique.

3.2.1 Reconnecter le droit aux réalités en Afrique

Une étude de l’Institut Guttmacher effectuée en 1999 estime que 30 pour cent environ des 40 millions de grossesses en Afrique n’étaient pas prévues, et que 12 pour cent ont été interrompues par un avortement.58

La criminalisation de l’avortement est directement mise en cause dans ce qu’un document publié par l’Organisation Mondiale de la Santé a appelé une ‘pandémie évitable’.59 Dès 1998 Blayo soulignait que ‘les risques de l’avortement dépendent beaucoup plus de son statut juridique que du niveau de développement des pays’.60 A Madagascar, s’il est vrai que la mortalité maternelle élevée est due principalement au faible taux des accouchements assistés par un personnel qualifié, ainsi qu’aux premières consultations prénatales tardives (vers le cinquième mois seulement à Madagascar), la part attribuable aux avortements (13 pour cent) est rarement mentionnée dans les rapports nationaux. Selon Gastineau et Rajaonarisoa, le ministère de la Santé estime, en l’absence de statistiques officielles, à 75 000 le nombre d’avortements pratiqués chaque année, soit ‘environ un avortement pour dix naissances vivantes’.61 En outre, d’après une ‘Etude sur l’avortement clandestin à Madagascar’, les récidives, c’est-à-dire le fait pour une femme d’avoir pratiqué plus d’un avortement au moment de l’enquête, ne sont pas rares: parmi les femmes qui ont déclaré avoir eu recours à l’avortement, elles sont 34,7 pour cent dans l’ensemble des centres urbains, 29,3 pour cent dans la capitale et 5,1 pour cent dans l’ensemble des centres ruraux, sites de l’enquête.62 Ces chiffres attestent qu’il y a bien là un problème de société, et en tout cas de santé publique: si le tiers des femmes qui ont déjà eu recours à l’avortement l’ont fait plus d’une fois, c’est qu’il y a, même en milieu urbain, une grave carence de services de contraception, y compris sous forme de conseils post-abortum. Ceci est corroboré par l’Enquête nationale sur le suivi des OMD (ENSOMD 2012-2013), selon laquelle le taux de femmes en union utilisant les méthodes contraceptives modernes est de 33,3 pour cent.63 Selon la même enquête, 17,8 pour cent des femmes malgaches qui ont besoin d’espacer ou de limiter les naissances n’utilisent aucune méthode contraceptive’.64

Ces réalités sont ignorées par la loi, qui continue de criminaliser l’avortement sans se soucier de ce que le recours à l’avortement traduit à la fois un besoin non satisfait et un droit non respecté à une contraception efficace. Décrites dans les rapports nationaux, notamment ceux de la société civile, concernant la mise en œuvre des traités ratifiés par Madagascar, parmi les données relatives à la mortalité maternelle, ce sont probablement ces réalités qui ont poussé les organes de suivi des droits de l’homme à formuler des recommandations demandant à l’état malgache de prendre en compte la réalité de l’avortement, tant dans la législation que dans les pratiques. Ainsi, le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, dans ses ‘Observations finales concernant les sixième et septième rapports périodiques de Madagascar’, appelait l’état à ‘légaliser l’avortement, au minimum dans les cas où la grossesse est préjudiciable à la santé de la mère ainsi que dans les cas d’inceste, de viol ou de graves malformations fœtales’.65 Le Comité demandait aussi à l’état ‘d’abroger les mesures punitives applicables aux femmes qui recourent à l’avortement’; et d’ ‘améliorer l’accès des femmes à des soins post-abortifs de qualité, en particulier dans les cas de complications résultant d’avortements illégaux, conformément à la recommandation générale 24 (1999) du Comité sur les femmes et la santé’.66 Ces recommandations n’ont pas été prises en compte jusqu’ici, le gouvernement s’étant abstenu de préparer un projet de loi légalisant l’avortement, ou même de diffuser les recommandations du Comité CEDEF. Parmi les motifs de réticence a été évoquée, tant au niveau de certains membres du gouvernement et du parlement que de la société civile, la crainte que la libéralisation n’ait pour résultat la pratique plus répandue encore de l’avortement. Pourtant, comme l’a indiqué la Commission africaine dans ses Observations Générales 2,

il a été démontré que dans un contexte où les lois nationales autorisent l’avortement thérapeutique lorsqu’il s’avère nécessaire, et où les services de santé sont disponibles, accessibles, acceptables et de bonne qualité, la prévalence ainsi que les complications résultant des avortements dangereux sont généralement moins élevées que dans les pays où les conditions légales de l’avortement sont restreintes.67

Au vu des réticences par rapport à la légalisation de l’avortement, nées de la méconnaissance des réalités dans le monde, mais aussi dans le pays même, la recommandation 37(e) du Comité CEDEF à l’endroit de Madagascar s’avère particulièrement pertinente.68 Le Comité appelait en effet l’état à ‘missionner, soutenir et financer des études et la collecte de données sur l’ampleur, les causes et les conséquences des avortements illégaux et pratiqués dans des conditions dangereuses ainsi que leur incidence sur la santé et la vie des jeunes filles et des femmes afin de recueillir des éléments factuels à l’appui de l’élargissement des motifs justifiant la légalisation de l’avortement.69 Une telle action ne peut que contribuer à la légalisation de l’avortement, par la production de données objectives qui devraient faire évoluer l’attitude des politiques vers davantage de réalisme.

3.2.2 Réconcilier les citoyen-ne-s avec la loi

La complexité des attitudes par rapport à la pratique de l’avortement est révélée entre autres par le nombre relativement faible de femmes et d’autres personnes en détention pour avoir pratiqué un avortement. Une enquête menée auprès des chefs de trois maisons d’arrêt dans trois villes de Madagascar a par exemple montré qu’aucune des détenues n’avait été placée là pour avortement.70 Cette situation diffère de celle d’autres pays tels que le Rwanda par exemple, où une détenue sur quatre est emprisonnée du fait de l’avortement, malgré sa dépénalisation en 2012 dans ce pays.71 Cette absence de poursuites pénales, rapportée aux 75 000 avortements clandestins pratiqués chaque année, selon les estimations du ministère de la Santé citées plus haut, est significative d’un rapport ambigu à la loi criminalisant l’avortement: plutôt que de se battre pour changer la loi, les femmes, le personnel de santé, les matrones semblent en effet préférer aider les femmes en quête d’avortement à le faire tout en échappant à la loi, et les dénonciations sont quasi inexistantes. Comme l’a montré l’étude de Focus, bien que la quasi-totalité des personnes interrogées se soient prononcées contre l’avortement, la grande majorité se sont également montrées compréhensives à l’égard des femmes qui peuvent en avoir besoin, les aidant selon leurs possibilités à se le procurer dans la discrétion.72

C’est là l’une des caractéristiques essentielles des rapports des citoyen-ne-s malgaches à la loi en général. Une sorte de pacte tacite s’établit généralement entre les diverses parties à une même entreprise pour contourner la loi. Celle-ci est unanimement respectée, ou même acceptée, mais seulement verbalement, pour se donner une apparence de conformité, voire de conformisme; mais peu de gens croient au bien-fondé d’une loi, ou de la loi d’une manière générale. Cette prise de distance par rapport à la loi tient sans doute à ce qu’un ensemble de lois étrangères ont été imposées en bloc, de manière brutale et sans concession, dès le début et tout au long de la période coloniale. En outre, le système de conception, d’adoption et d’application des lois n’a que peu changé à l’avènement de l’indépendance: une petite minorité d’hommes politiques se le sont approprié, au détriment de la majorité de la population, et notamment des femmes. Les assemblées provinciales réunies pour voter l’indépendance ne comptaient en effet aucune femme, non plus que la première version de l’Assemblée Nationale qui votait les lois, ou le premier gouvernement, auteur des projets de loi après l’indépendance. La magistrature chargée d’appliquer les lois non plus ne comprenait aucune femme. Cet état de choses a lentement changé au cours du demi-siècle depuis l’indépendance en 1960, mais les femmes ne sont que 20 pour cent au Parlement, et en moyenne 6 sur 30 au gouvernement.73 La magistrature constitue une exception, avec cinq femmes successives ministres de la Justice entre 2002 et 2014, et des magistrates à de nombreux postes clé comme chefs de cour ou de juridiction. Néanmoins les taux de présence dérisoires des députés à l’Assemblée Nationale pendant les sessions, même pour adopter des lois importantes, témoignent du faible niveau d’appropriation du système parlementaire par les élus eux-mêmes.74 Les Observations Générales 2 de la Commission africaine rappellent que

le Plan d’action de Maputo engage les gouvernements à adopter des politiques et cadres juridiques, en vue de réduire les cas d’avortement dans des conditions insalubres, ainsi qu’à élaborer et mettre en œuvre des plans d’action nationaux pour atténuer la prévalence des grossesses non désirées et des avortements pratiqués dans des conditions insalubres.75

Le gouvernement malgache, tout en adhérant au Plan d’action de Maputo, n’a pas réussi jusqu’ici à réduire les cas d’avortement pratiqués dans des conditions insalubres. Les réalités d’autres pays ont montré que ce ne serait possible que si l’avortement est décriminalisé, et que la loi, au lieu d’être perçue comme une menace à esquiver, devient aux yeux des femmes en quête d’avortement un instrument de protection de leurs droits.

4 CONCLUSION

Au-delà des intérêts immédiats, dont la protection, en toutes circonstances, du droit de toutes les femmes à la vie, la dépénalisation de l’avortement permettrait, entre autres effets bénéfiques, de renforcer l’effectivité de la loi par l’amélioration de sa perception par les citoyen-nes. D’après Hans Kelsen, ‘lorsqu’une norme juridique demeure dépourvue d’efficacité d’une façon durable, elle n’est plus considérée comme valable. Ainsi l’efficacité est une condition de la validité des normes juridiques’.76 La loi française de 1810 criminalisant l’avortement est manifestement devenue inefficace à Madagascar, au vu à la fois du taux élevé de mortalité maternelle due aux complications de l’avortement et de la très faible incidence des inculpations et des condamnations pour crime d’avortement. Ces données suggèrent que ni les sujets ni les autorités chargées de faire respecter la loi ne sont convaincus du bien-fondé de cette loi, malgré la quasi unanimité de façade contre sa dépénalisation. Pourtant, celle-ci non seulement rétablirait l’équité bafouée par l’accablement de la mère et la déresponsabilisation du père biologique du fœtus, elle contribuerait aussi à la nécessaire modernisation du droit malgache, en reconnaissant que ‘le droit n’est plus seulement un ensemble de normes impératives visant à encadrer les comportements, mais aussi un instrument de plus en plus complexe ayant pour fonction de promouvoir le changement social’.77 Encore faut-il pour cela que nos juristes et nos législateurs soient convaincus de ce qu’il est ‘logique, sinon nécessaire, que l’on s’attache à apprécier les effets concrets ou l’efficience de ces instruments juridiques de changement ou d’amélioration des données socio-économiques que constituent les règles de droit, au lieu de les laisser à l’état de normes aveugles, indifférentes à leur impact social et économique. 78 Même indépen-damment du principe fondamental du droit humain des femmes à la vie, l’amélioration de cette donnée socio-économique de 469 décès maternels en 1996-2003 et de 363 en 2008 pour 100 000 naissances vivantes devrait constituer une motivation pour l’état malgache.79 Des leçons peuvent être tirées de la libéralisation de l’avortement en Afrique du Sud, où en dix ans d’application de la loi décriminalisant l’avortement, le taux de mortalité maternelle liée aux complications de l’avortement a connu une baisse spectaculaire de 91 pour cent qui place ce pays au même niveau que les pays européens qui l’ont fait il y a un demi-siècle.

La communauté internationale, et particulièrement la communauté régionale africaine, avec les organisations de la société civile œuvrant pour les droits des femmes, a la capacité et le devoir d’encourager l’état malgache dans ce sens, qui constitue non seulement un pas de plus vers une décolonisation encore à parfaire, mais également un progrès social et une étape importante dans le respect des droits humains des femmes.

 


1. Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique, adopté le 11 juillet 2003 et entré en vigueur le 25 novembre 2005 (Protocole de Maputo).

2. Article 14(2) du Protocole de Maputo.

3. Article 54 de la Loi N° 2007-022 du 20 août 2007 relative au mariage et aux régimes matrimoniaux de Madagascar.

4. Article 317 du Code pénal de Madagascar de 1960 mis à jour au 30 mars 2005.

5. Voir DW Brinkerhoff et al ‘L’environnement légal pour la planification familiale et la santé de la reproduction à Madagascar’ (2017) 11 http://www.healthpolicyplus.com/ns/pubs/7146-7260_LegalEnvrnmentAssessmentMadagascarFRJune.pdf (consulté le 28 octobre 2017).

6. Article 317 du Code pénal de Madagascar.

7. Focus Development Association ‘Etude sur l’avortement clandestin à Madagascar’ (2007).

8. B Gastineau & S Rajaonarisoa ‘Santé de la reproduction et avortement à Antananarivo (Madagascar). Résultats d’une recherche originale’ (2010) 14 African Journal of Reproductive Health 226.

9. Adoptée le 10 décembre 1948.

10. Adoptée le 27 juin 1981 et entrée en vigueur le 21 octobre 1986.

11. Article 137 de la Constitution de Madagascar du 11 décembre 2010.

12. DA Grimes et al ‘Unsafe abortion: the preventable pandemic’ (2006) 368 Lancet 1908-1919.

13. Haut-Commissariat des nations unies aux droits de l’homme (HCDH) `L’avortement’. Série d’information sur la santé sexuelle et reproductive et les droits associés http://www.ohchr.org/Documents/Issues/Women/WRGS/SexualHealth/INFO_Abortion_FR_WEB.pdf (consulté le 19 septembre 2017).

14. Voir Focus Development Association (n 7 ci-dessus) et Gastineau & Rajaonarisoa (n 8 ci-dessus).

15. Focus Development Association ‘Etude sur les facteurs qui sous-tendent l’activité sexuelle des adolescents dans la région d’Atsimo Andrefana à Madagascar’ (2012).

16. A Guillaume L’avortement provoqué en Afrique: un problème mal connu, lourd de conséquences (2005).

17. Code des 305 articles: promulgué par la Reine Ranavalona II, le 29 mars 1881: texte malgache intégral avec traduction français et notes bibliographiques, 1960.

18. En ce dernier quart du 19ème siècle, seule la capitale, Antananarivo, disposait d’un hôpital créé par le Dr Davidson, missionnaire de la London Missionary Society.

19. Cette relative indulgence était peut-être due au fait que la Société des Missionnaires de Londres, fondée en 1795 par des groupes dits non conformistes, sans rattachement aux églises établies, avait généralement des positions plutôt progressistes pour son époque.

20. Code pénal français de 1810 http://ledroitcriminel.fr/la_legislation_criminelle/anciens_textes/code_penal_1810/code_penal_1810_1.htm (consulté le 28 avril 2017).

21. Loi française réprimant la provocation à l’avortement et à la propagande anticonceptionnelle du 31 juillet 1920 https://socialhistory.org/tr/exhibitions/neomalthusianisme-en-france/loi-du-31-juillet-1920 (consulté le 28 octobre 2017).

22. On parlerait aujourd’hui de ‘copier-coller’; la similarité est au point que les articles portant sur la répression de l’avortement dans le code pénal français de 1810 et le code pénal malgache de 1960, mis à jour en 2005, portent le même numéro 317.

23. Art 305 & 305 bis du Code pénal du Sénégal de 1965 http://www.wipo.int/edocs/lexdocs/laws/fr/sn/sn010fr.pdf (consulté le 28 octobre 2017).

24. Centre population et développement ‘Les conditions du droit à l’avortement en 1994 et 1999’ http://www.ceped.org/avortement/fr/chap1/800/chapitre1-800.htm (consulté le 28 octobre 2017).

25. Sus-cité.

26. ‘Madagascar: refus catégorique d’une loi autorisant l’avortement’ 16 juin 2008 http://www.avortementivg.com/article-20494764.html (consulté le 28 octobre 2017).

27. Etude citée par C Binet et al ‘Fécondité précoce à Madagascar: quel impact sur la santé maternelle et infantile ?’ in B Gastineau et al (eds) Madagascar face au défi des objectifs du Millénaire pour le Développement (2010) 270.

28. Focus Development Association (n 15 ci-dessus).

29. Adopté le 17 août 2008 et entré en vigueur le 22 février 2013. Madagascar a signé le Protocole de la SADC sur le Genre et Développement dès 2008, mais ne l’a toujours pas ratifié à ce jour.

30. Focus Development Association ‘Profil Genre de Madagascar’ (2017).

31. Article 54 de la loi relative au mariage et aux régimes matrimoniaux (n 3 ci-dessus).

32. Focus Development Association (n 30 ci-dessus).

33. Sus-cité.

34. Focus Development Association (n 15 ci-dessus).

35. Sus-cité.

36. World Health Organisation ‘Unsafe abortion: global and regional estimates of incidence and mortality due to abortion, with a listing of available country data’ cité dans E F Okonofua ‘Contribution of anti-abortion laws to maternal mortality in developing countries’ (2008) 3 Expert Review of Obstetrics & Gynecology 147-149.

37. Gastineau & Rajaonarisoa (n 8 ci-dessus).

38. Commission de l’Union Africaine ‘Agenda 2063: Premier plan décennal de mise en œuvre 2014-2023’ Septembre 2015 http://www.nepad.org/fr/resource/agenda-2063-premier-plan-d%C3%A9cennal-de-mise-en-oeuvre-2014-2023 (consulté le 28 octobre 2018).

39. CEDEF ‘Recommandation générale No 19, Violence à l’égard des femmes’ (onzième session, 1992) http://www.un.org/womenwatch/daw/cedaw/recommendations/reco mm-fr.htm (consulté le 28 octobre 2017).

40. African Union ‘Africa health strategy 2016-2030’ 2016 https://au.int/en/document/africa-health-strategy-2016-%E2%80%93-2030 (consulté le 28 octobre 2017).

41. CEDEF ‘Recommandation générale 24, Les femmes et la santé - Article 12’ (Vingtième session, 1999) UN Doc A/54/38/Rev.1, para 11 http://www.un.org/womenwatch/daw/cedaw/recommendations/recomm-fr.htm (consulté le 28 octobre 2017).

42. CEDEF (n 41 ci-dessus) para 14.

43. Quatrième Conférence mondiale sur les femmes ‘Déclaration et programme d’action de Beijing’ 15 Septembre 1995, para 97 http://www.un.org/womenwatch/daw/beijing/pdf/BDPfA%20F.pdf (consulté le 28 octobre 2017).

44. HCDH (n 13 ci-dessus).

45. Conférence mondiale sur les droits de l’homme ‘Déclaration et du Programme d’action de Vienne’ 25 juin 1993 http://www.ohchr.org/FR/AboutUs/Pages/ViennaWC.aspx (consulté le 28 octobre 2017).

46. Conférence mondiale sur les droits de l’homme (n 45 ci-dessus) para 41.

47. Conférence internationale sur la population et le développement ‘Programme d’action de la Conférence internationale sur la population et le développement’ Septembre 1994, para 8.25 https://www.unfpa.org/sites/default/files/event-pdf/icpd_fre.pdf (consulté le 28 octobre 2017).

48. Sus-cité.

49. Sus-cité.

50. Sus-cité.

51. Déclaration et Programme d’action de Beijing (n 43 ci-dessus) para 97.

52. Sus-cité.

53. Article 14(2)(c) du Protocole de Maputo.

54. Union Africaine ‘Plan d’action de Maputo pour la mise en oeuvre du Cadre d’orientation continental pour la promotion des droits et de la santé en matière de sexualité et de reproduction en Afrique 2007-2010’, http://hivhealthclearing house.unesco.org/sites/default/files/resources/iiep_maputoplansrhr_fr.pdf (consulté le 28 octobre 2017).

55. Commission africaine des droits de l’homme et des peuples ‘Observations Générales N ° 2 sur l’Aticle 14(1)(a), (b), (c) et (f) et Article 14(2)(a) et (c)) du Protocole à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples relatif aux Droits de la Femme en Afrique’ http://www.achpr.org/fr/instruments/general-comment-two-rights-women/ (consulté le 28 octobre 2017).

56. Commission africaine (n 55 ci-dessus) para 11.

57. Sus-cité, préface.

58. Guillaume (n 16 ci-dessus).

59. Grimes et al (n 12 ci-dessus).

60. Voir Centre population et développement (n 24 ci-dessus).

61. Gastineau & Rajaonarisoa (n 8 ci-dessus).

62. Focus Development Association (n 7 ci-dessus).

63. UNFPA ‘Rapport annuel Océan Indien 2015’ http://madagascar.unfpa.org/sites/default/files/pub-pdf/Rapport%20Annuel%20UNFPA%20MDG%20 (consulté le 2 mai 2017).

64. Sus-cité.

65. Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes ‘Observations finales concernant les sixième et septième rapports périodiques de Madagascar’ CEDAW/C/MDG/CO/6-7, para 37(d), 24 Novembre 2015.

66. Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (n 65 ci-dessus) para 37(d) & (g).

67. Commission africaine (n 55 ci-dessus) para 19.

68. Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (n 65 ci-dessus) para 37(e).

69. Sus-cité.

70. Visites de prisons menées par les membres de la Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme (CNIDH) de Madagascar. L’auteure du présent article a participé à ces visites en sa qualité de membre de la CNIDH.

71. M Umukunzi ‘1 Rwandaise sur 4 en prison pour avortement illégal’ JamboNews.net 19 octobre 2015 (consulté le 28 octobre 2017).

72. Focus Development Association (n 7 ci-dessus).

73. ‘Dossier: Les femmes qui occupent des postes politiques à Madagascar’ Midi Madagasikara 9 janvier 2017 http://www.midi-madagasikara.mg/dossiers/2017/01/09/dossier-les-femmes-qui-occupent-des-postes-politiques-a-madagascar/ (consulté le 28 octobre 2017).

74. La presse a par exemple rapporté qu’une loi aussi controversée que le Code de la communication médiatisée a été votée en novembre 2016 par 18 députés présents sur 151. ‘Code de la communication - Une minorité de députés vote le crime’ L’Express de Madagascar 15 juillet 2016 http://www.lexpressmada.com/blog/actualites/code-de-la-communication-une-minorite-de-deputes-vote-le-crime/ (consulté le 28 octobre 2017).

75. Commission africaine (n 55 ci-dessus) para 20.

76. H Kelsen Théorie pure du droit (1962).

77. F Rangeon ‘Réflexions sur l’effectivité du droit’ https://www.u-picardie.fr/curapp-revues/root/23/rangeon.pdf (consulté le 23 juin 2017).

78. A Jeammaud & E Serverin ‘Evaluer le droit’ (1992) Recueil Dalloz  264 cité dans Y Leroy ‘La notion d’effectivité du droit’ (2011) 79 Droit et société 715-732.

79. D Waltisperger & V Delaunay ‘Evolution de la mortalité des enfants et des mères à Madagascar: l’échéance 2015’ in Gastineau et al (eds) (n 27 ci-dessus).