Randianina Radilofe
 Docteur en droit (Université Côte d’Azur) (2019) et Titulaire d’un Master 2 en Droit économique et des affaires (2013) et d’un Master 2 en droit international et européen spécialité sécurité internationale (2014) de l’Université Côte d’Azur
 Enseignant-chercheur contractuel de droit public de l’Université de Picardie Jules Verne
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https://orcid.org/0000-0001-9049-3256


 Edition: AHRY Volume 4
  Pages: 255 - 276
 Citation: R Radilofe ‘Perspectives africaines des droits de l’homme en droit international des investissements’ (2020) 4 Annuaire africain des droits de l’homme 255-276
 http://doi.org/10.29053/2523-1367/2020/v4a13
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RÉSUMÉ:

Pendant longtemps, le droit international des investissements ne s’est intéressé qu’à la promotion et à la protection des investissements étrangers sur le territoire d’un État. Or, la globalisation de l’économie a pu conduire à des dérives, et notamment des violations graves des droits de l’homme et du droit de l’environnement notamment la pollution massive des eaux, déplacements de population, travail des enfants et esclavage moderne. Si le droit international des investissements contribue à la croissance économique en attirant les capitaux étrangers, il ne doit pas couvrir les violations graves des droits fondamentaux des populations vulnérables. Cette contribution analyse les perspectives africaines de protection des droits de l’homme à la lumière du droit international des investissements. En effet, l’étude des traités d’investissements récemment conclus par les États permettra de démontrer qu’il existe une évolution dans la prise en compte de ces considérations. Outre les aspects substantiels, les aspects procéduraux ont également permis une meilleure appréhension des problèmes relatifs aux droits de l’homme et droit de l’environnement par le juge de l’investissement qu’est l’arbitre. Enfin, l’État d’origine de l’investisseur s’est progressivement saisi de la question en règlementant les activités de ses opérateurs économiques à l’étranger. La mise en œuvre de leur responsabilité fait encore aujourd’hui face à des difficultés. Malgré les difficultés de l’entreprise, ce travail de recherche met ainsi en perspective l’évolution des droits de l’homme dans la pratique africaine du droit international des investissements: la pratique des États au niveau régional et continental, la pratique des organisations non-gouvernementales, la pratique des juridictions régionales africaines qui peuvent avoir une influence indirecte sur la pratique des juridictions arbitrales impliquant les États africains.

TITLE AND ABSTRACT IN ENGLISH:

African perspectives on human rights in international investment law

Abstract:

For years, international investment law was merely interested in the promotion and protection of foreign investment in a state’s territory. However, globalisation of the economy have caused abuses, particularly serious violations of human rights and environmental law: massive water pollution, displacement of population, child labour, modern slavery, etc. Although international investment law contributes to economic growth by attracting foreign capital, it should not be an excuse for serious violation of the rights of vulnerable populations. This article therefore analyses African perspectives on human rights under international investment law. Indeed, the study of recently concluded investment treaties will show that there is an evolution in the way these considerations are addressed. In addition to the treaties, procedural aspects have led to a better understanding of the human rights and environmental law issues by the arbitrator. Finally, the investor’s home state has gradually taken up the issue by regulating the activities of its economic operators abroad. The implementation of their responsibility still faces difficulties nowadays. Despite the difficulties, this research puts into perspective the evolution of human rights in the African practice of international investment law: the practice of states at the regional and continental level, the practice of NGOs and associations, the practice of African regional courts which may have an indirect influence on the practice of arbitration courts involving African states.

MOTS CLÉS: droit des investissements internationaux, droits de l’homme, arbitrage transnational, peuples autochtones

 

SOMMAIRE:

1 Introduction  

2 L’incorporation progressive des droits de l’homme dans la pratique conventionnelle du droit des investissements  

3 Les droits de l’homme dans la pratique des tribunaux d’investissement 

3.1 L’admission des demandes reconventionnelles  

3.2 La pratique des amici curiae  

4 La saisine d’entités tierces à l’État hôte  

4.1 Les instruments contraignants et non-contraignants régionaux de protection des droits de l’homme  

4.2 Le rôle des juridictions étrangères dans l’application des droits fondamentaux dans l’État hôte de l’investissement 

5 Conclusion  

 1 INTRODUCTION

La libéralisation du commerce international a été suivie d’une forte compétition entre les pays d’Afrique, d’une concurrence entre les systèmes juridiques1 pour attirer les investissements étrangers. Cette logique d’attractivité a pu amener à des abus sur les conditions de travail, les droits sociaux, les libertés démocratiques des populations locales dont les autorités nationales et les entreprises multinationales auraient pu être à l’origine.2

De plus, les règles nationales, régionales voire transnationales en matière sociale et environnementale évoluent disproportionnellement à la vitesse du marché globalisé. De fait, les relations entre droit des investissements et droits de l’homme sont tumultueuses, et mêmes opposées. En effet, cela s’explique par une logique contradictoire qui les anime. D’une part, une logique capitaliste caractérisée par la maximisation du profit, et donc de protection de l’investissement, et d’autre part, une logique de protection des droits fondamentaux des populations vulnérables. Les relations entre droits de l’homme et droit des investissements peuvent être qualifiées de contradictoires, ayant une logique diamétralement opposée: la défense des intérêts publics d’une part, et la maximisation de profit d’autre part. La protection des intérêts publics a pris une importance telle que, ces dernières années, elle s’est incorporée progressivement dans la pratique conventionnelle du droit des investissements.

En effet, l’investissement international est régi par des règles qui, à l’origine, avaient pour principal objectif de protéger l’investisseur étranger considéré comme «vulnérable» face au gouvernement d’un État.3 A l’origine des premiers voyages commerciaux, les étrangers étaient craints ou méprisés, et privés de toute capacité juridique.4 Ainsi, d’étranger soumis aux velléités de l’État hôte, l’investisseur est passé progressivement à la situation de «super privilégié»5 par la consolidation de sa protection par le droit international, particulièrement le droit international des investissements.

Cette situation crée aujourd’hui un déséquilibre entre l’État et l’investisseur. En effet, la majorité des investissements internationaux est aujourd’hui régie par les traités internationaux d’investissements. L’observation de ces traités montre une asymétrie entre les obligations des investisseurs et les obligations de l’État. Un traité d’investissement retrace principalement les obligations à la charge de l’État sans mention d’obligations à la charge de l’investisseur. Finalement, un traité d’investissement est, et n’est rien de plus que ce que son nom l’indique: un accord de protection et promotion des investissements - du moins les modèles de première génération.

Aujourd’hui, le droit des investissements ne doit pas être pensé uniquement sous l’angle économique, protéger uniquement les intérêts de l’investisseur, et ainsi occulter les intérêts de l’État. En effet, les investissements internationaux posent aujourd’hui des problèmes majeurs en matière de droits de l’homme, notamment lorsque les sociétés transnationales peuvent être tenues responsables de violations des droits de l’homme à l’occasion de leurs activités. De plus, la faible résistance des droits nationaux face aux dérives corruptives peut gravement porter atteinte aux droits fondamentaux de la population locale.

Face à une crise de légitimité du droit international des investissements, des réformes sont progressivement menées pour tenir compte des considérations d’intérêt général qui, à l’origine, n’étaient pas incluses dans le régime juridique du droit des investissements internationaux.

La question se pose ainsi de savoir dans quelle mesure la pratique africaine du droit des investissements a contribué à l’évolution globale des considérations de droit de l’homme en droit international économique. L’analyse du régime juridique des investissements va permettre de rendre compte de l’évolution des droits de l’homme en la matière. Elle sera principalement étudiée à la lumière des traités internationaux et régionaux récents conclus par les États africains d’une part, et de la jurisprudence de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (Commission africaine) et des tribunaux d’investissement, d’autre part.

Si la défense des intérêts publics a progressivement intégré la pratique conventionnelle du droit international des investissements (2) et le contentieux international de l’investissement (3), les juridictions régionales et étrangères se sont aussi saisies de ces problématiques liées aux activités des sociétés transnationales (4).

2 L’INCORPORATION PROGRESSIVE DES DROITS DE L’HOMME DANS LA PRATIQUE CONVENTIONNELLE DU DROIT DES INVESTISSEMENTS

L’essentiel du droit international des investissements repose aujourd’hui sur les traités bilatéraux d’investissement.6 L’analyse de ces traités d’investissement montre une asymétrie entre les obligations pesant sur les investisseurs et les obligations pesant sur l’État. L’objet principal de ces traités est de promouvoir et protéger les investissements étrangers.

Un simple regard sur le droit international contemporain permet de constater la place essentielle qu’occupe les traités internationaux d’investissement. Ils en sont aujourd’hui la composante essentielle.7 Quelques milliers de traités d’investissement ont été conclus par les États,8 traités qui ont pour objet d’encadrer les pouvoirs de l’État en prohibant toute forme d’abus, et ainsi garantir aux investisseurs une certaine stabilité juridique.9

De nombreuses critiques10 ont conduit à la dénonciation de ces traités, notamment par les pays d’Amérique latine. En effet, l’une des critiques les plus virulentes, et certainement la plus partagée par l’opinion publique, tient au fait qu’un tribunal arbitral, une forme de justice privée, pourrait engager la responsabilité de l’État qui aurait pu prendre des mesures dans un but d’intérêt général,11 telle que la protection contre les violations des droits fondamentaux de sa population.

Tenant compte des controverses, des réformes ont été ainsi menées afin de tenir compte de considérations extra-économiques que sont principalement les droits sociaux et environnementaux. Ainsi, les définitions des investissements couvertes par les traités connaissent désormais des limitations. Par exemple, des clauses qui visent à «préserver la liberté de l’État d’adopter les mesures nécessaires à la protection de la sécurité, de l’ordre public et d’autres intérêts nationaux» sont insérées dans les nouveaux traités.12 Selon la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), ces réformes mettent l’accent «sur le développement durable, le maintien d’une marge d’action règlementaire et l’amélioration (ou l’omission) du règlement des différends entre investisseurs et États».13

A titre d’illustration, pour le règlement des litiges, le traité bilatéral d’investissement (TBI) Rwanda-Émirats Arabes Unis conclu le 1er novembre 201714 prévoit un renvoi aux juridictions internes ou au Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI) suivant les conditions prévues par le traité en cas de litiges.15 Le traité va encore plus loin en précisant le droit pour l’État de règlementer -16 «right to regulate» pour reprendre la terminologie adoptée par le traité - notamment dans les domaines de santé publique, sécurité, droit de l’environnement et droit du travail.

Par ailleurs, s’inspirant de la décision Salini,17 le TBI Nigéria-Maroc constitue également un modèle de traité d’investissement prévoyant des dispositions innovantes qui concilient développement durable et investissement.18 Outre les obligations «traditionnelles» incombant à l’État, le traité prévoit une série d’obligations pesant sur l’investisseur. C’est notamment le cas à ses articles 14, 18, 19 et 24 qui établissent des obligations telles que le respect des droits de l’homme dans le droit interne de l’État hôte ou de l’État d’accueil ou le respect des normes de gouvernance d’entreprise au niveau national et international. L’article 18(1) exige notamment des investisseurs étrangers de «[keep] with good practice requirements relating to the size and nature of the investment, maintain an environmental management system. Companies in areas of resource exploitation and high-risk industriel enterprises shall maintain a current certification to ISO 14001 or an equivalent environmental management standard.»

Au niveau régional, le Marché commun de l’Afrique orientale et australe (COMESA), la Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) ou encore la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC) ont adopté des instruments juridiques en matière d’investissement qui visent à responsabiliser les investisseurs sur les questions relatives aux droits de l’homme. Ainsi, en 2007, la COMESA a adopté un accord d’investissement - l’Accord de la Zone d’investissement commune de la COMESA (ZICC) - qui limite le champ d’application de la clause de la nation la plus favorisée.19

En 2008, la CEDEAO a adopté un acte supplémentaire sur la protection des investissements, entré en vigueur en janvier 2009. Cet acte met l’accent sur la responsabilisation des investisseurs en distinguant l’obligation de pré-établissement à l’article 12 de l’Acte,20 et ainsi mener des études d’impact social et environnemental préalablement à l’établissement.

Puis, en 2012, la SADC a adopté un traité ainsi qu’un protocole d’investissement qui mettent l’accent sur la contribution de l’investissement au développement durable.21 Le préambule de l’Annexe 1 du Protocole précise les principaux objectifs de la SADC et reprend à plusieurs reprises la notion de «développement durable» ou «sustainable development» parmi ces objectifs.

Enfin, au niveau continental, le code panafricain des investissements procède à un véritable rééquilibrage entre les intérêts des investisseurs et les intérêts publics22 en formulant des obligations à l’encontre des investisseurs,23 en insistant sur le droit des États de réguler, et enfin des exceptions au traitement de la nation la plus favorisée en «vue de protéger ou d’atteindre des objectifs légitimes de bien être public comme la santé publique, la sécurité et l’environnement» tel que prévoit l’article 8 du code. Le Code panafricain des investissements constitue une véritable exception africaine en matière d’accord d’investissement en octroyant la protection internationale uniquement aux investissements «durables». Il faut toutefois souligner que le code est principalement un instrument d’orientation pour les États, et l’article 3 précise qu’il n’a pas vocation à affecter «les droits et obligations des États membres découlant de tout accord d’investissement existant».

Outre le code panafricain des investissements, l’accord portant création de la Zone de libre échange continentale africaine (ZLECAF) met également au centre de ses objectifs24 des valeurs telles que la promotion du développement durable, le développement socio-économique inclusif et durable et l’égalité des genres.

L’insertion de dispositions visant à la protection des droits de l’homme dans les traités d’investissement se banalise progressivement.25 Cependant, même si les accords dites de nouvelle génération tiennent compte de nouvelles considérations relatives aux droits de l’homme, notamment pour limiter les entraves au pouvoir normatif de l’État dans un but d’intérêt général, les accords de première génération représentent plus de 90 % du régime des accords internationaux d’investissement aujourd’hui.26 Aussi, faut-il se tourner vers les juges de l’investissement pour faire évoluer la pratique en la matière.

3 LES DROITS DE L’HOMME DANS LA PRATIQUE DES TRIBUNAUX D’INVESTISSEMENT

Le juge de l’investissement, qui tient sa compétence des traités d’investissement, constitue un des acteurs principaux qui peut mettre en œuvre les droits de l’homme en droit des investissements. Si les traités d’investissement actuellement en vigueur accordent une importance moindre aux considérations sociales et environnementales à la charge de l’investisseur, des réformes procédurales ont été menées pour faire évoluer la pratique arbitrale avec l’admission des demandes reconventionnelles d’une part, et des amici curiae d’autre part.

3.1 L’admission des demandes reconventionnelles

L’une des critiques majeures qui ressort des traités d’investissement à l’égard de l’arbitrage transnational réside dans la qualité de demandeur de l’investisseur, et de défendeur de l’État d’accueil devant un tribunal arbitral, la réciproque n’étant pas vraie. En effet, d’un côté, l’investisseur dispose de la faculté de saisir un tribunal arbitral transnational sur le fondement du traité d’investissement. Alors que, d’un autre, l’État ne dispose pas de cette faculté, ce qui présente un déséquilibre27 en défaveur de l’État.28

En outre, l’essor de l’arbitrage d’investissement par l’évolution jurisprudentielle «aussi brutale qu’inattendue»29 dans les années 1990 pose le problème de l’équilibre plus fondamentalement. En effet, un TBI n’était utile que s’il se fondait sur un contrat, d’où, par ailleurs, leur appellation d’origine de «traités parapluies».30 La jurisprudence connue sous le nom AAPL c. Sri Lanka31 constitue alors un tournant majeur dans le contentieux du droit contemporain de l’investissement. En effet, le tribunal arbitral CIRDI s’est déclaré compétent pour trancher un litige sur le seul fondement du TBI Royaume-Uni-Sri Lanka qui contenait une clause compromissoire renvoyant à l’arbitrage CIRDI, l’investissement n’étant pas appuyé sur un contrat avec les autorités mais reposant uniquement sur des liens entre l’investisseur de Hong Kong32 et des personnes privées sri lankaises.

Le tribunal a ainsi considéré que cette disposition vaut engagement des deux États à se soumettre à l’arbitrage avec un ressortissant de l’autre État en cas de litige, et ainsi la reconnaissance d’un droit de saisine directe du tribunal arbitral au profit de l’investisseur. Deux ans auparavant, dans une sentence SPP c. Egypte,33 un tribunal arbitral avait admis pour la première fois un arbitrage à l’initiative de la personne privée sur le fondement d’une loi nationale de l’État d’accueil, la loi nationale relative aux investissements étrangers faisant référence à l’arbitrage international pour le règlement des litiges valant ainsi offre permanente d’arbitrage.

Cette technique que la doctrine qualifie de «consentement dissocié»34 des parties à l’arbitrage a eu pour principal effet d’augmenter le nombre d’instances arbitrales, et ce, même en l’absence d’une clause d’arbitrage traditionnelle, et de fait, de multiplier les traités d’investissement au cours des vingt dernières décennies.

Le développement de l’arbitrage transnational unilatéral pose alors la question de la possibilité pour l’État de relever des violations des droits de l’homme sur son territoire devant les tribunaux arbitraux. En effet, ces tribunaux ont eu à connaître des droits de l’investisseur. La question des droits de l’État d’accueil ne se pose pas, car ces droits n’ont pas été insérés dans le traité d’investissement sur la base duquel le tribunal arbitral tire sa compétence.

Il a donc fallu introduire des mécanismes pour «briser» ce déséquilibre caractérisé par un investisseur disposant de la possibilité d’attraire un État devant un tribunal arbitral sur la base d’un TBI ou d’une loi nationale, et ce, même en l’absence d’un contrat. L’investisseur dispose d’une protection large en droit international des investissements.

De son côté, pendant très longtemps en droit international des investissements, l’État n’a pas eu la possibilité de faire reconnaître la violation des droits de l’homme commis par un investisseur étranger sur son territoire devant le juge de l’investissement.35 On comprend ainsi très bien la qualification d’arbitrage transnational unilatéral que confère la doctrine à l’arbitrage d’investissement,36 la procédure n’allant que dans un sens, celui de l’investisseur.

Ces questions sont d’autant plus cruciales que les débats en matière d’extraction de ressources naturelles sont principalement orientés sur la responsabilisation des investisseurs privés et le souci d’encadrer juridiquement leurs activités dans les pays en développement,37 connus pour être plus tolérants sur ces questions, et ce, dans un souci d’attirer les capitaux étrangers.

Des réformes ont alors été menées dans la procédure d’arbitrage, tenant compte de ces problèmes majeurs en matière de droits de l’homme et droit de l’environnement. La procédure reconventionnelle a ainsi été pensée en ce sens.38 En droit de l’arbitrage transnational, la procédure de demande reconventionnelle est le mécanisme au cours de l’arbitrage d’investissement par lequel un État défenderesse se porte lui-même demandeur contre le requérant en formant une demande incidente.

L’admission d’une demande reconventionnelle dans l’arbitrage d’investissement permet d’assurer un rééquilibrage entre les intérêts économiques de l’investisseur, et les intérêts des États, et particulièrement des populations autochtones39 touchées directement par les investissements internationaux. En effet, d’un arbitrage transnational unilatéral à l’initiative de l’investisseur à l’origine, une brèche s’ouvre en permettant à l’État d’introduire une demande reconventionnelle en cas de violation grave des droits de l’homme et de l’environnement, et ce, pour protéger les intérêts publics. L’État peut ainsi tenter d’obtenir une indemnisation complémentaire, et dans certains cas, tendre à faire échouer la procédure en cours.40

Si la possibilité d’introduire une demande reconventionnelle devant le CIRDI était dans l’esprit des rédacteurs de la Convention de Washington,41 on a pu voir que la formulation des clauses de règlement des différends dans les traités d’investissement constituait une base fragile pour l’aboutissement d’une telle procédure. En effet, les rédacteurs de la Convention de Washington n’étaient pas au fait des subtilités des traités d’investissement que l’on connaît aujourd’hui et qui dominent le droit international des investissements.42

Face à l’obstacle des traités d’investissement, la doctrine est allée jusqu’à qualifier les États de «défendeurs perpétuels»,43 de parties ayant «tout à perdre»44 allant jusqu’à «une tendance dominante de déception pour l’État demandeur reconventionnel».45 Selon les statistiques, seulement 5 % des affaires CIRDI incluaient des demandes reconventionnelles durant les 45 premières années de la Convention. Et, la première demande reconventionnelle ayant abouti en février 2017 comme on a pu l’observer avec l’affaire Burlington46 et ses spécificités.

Ces «30 ans d’échec»47 sont principalement dus aux critères restrictifs posés par la jurisprudence arbitrale. Et, dans les cas les plus récents où les tribunaux se déclaraient compétents pour connaître de la demande reconventionnelle, les demandes étaient rejetées car elles étaient considérées comme mal fondées.

La première affaire dite Hamester c. Ghana48 qui ouvre véritablement la voie aux demandes reconventionnelles impliquait une société de droit allemand et l’État Ghanéen. Le Ghana introduit une demande reconventionnelle au motif que le comportement de la société partie de l’accord de «joint-venture» a fait subir un préjudice moral et des pertes matérielles à celui-ci. Malgré l’échec de la demande, la doctrine voit cette brèche ouverte par la jurisprudence comme un accueil favorable aux demandes reconventionnelles,49 le tribunal s’étant déclaré incompétent, le fondement présenté par le Ghana étant qualifié d’insuffisant.50

Cependant, l’année suivante, l’élan porté par la jurisprudence Hamester semble s’être arrêté par la sentence Roussalis c. Roumanie51 où le tribunal arbitral s’est déclaré incompétent pour connaître de la demande reconventionnelle au motif que les parties n’avaient pas consenti à la possibilité pour l’État d’accueil d’introduire une demande reconventionnelle à partir du moment où le TBI Grèce-Roumanie limitait les procédures arbitrales aux obligations prévues par ledit traité.52

L’étape supplémentaire pour l’introduction de demande reconventionnelle a été franchie par la sentence Urbaser53 où le tribunal s’est prononcé pour la première fois sur sa compétence matérielle54 en considérant que le champ de compétence pouvant lui être soumis ne se limitait pas aux droits découlant directement de l’application ou de l’interprétation du TBI, que les TBI ne pouvaient être interprétés et appliqués «dans le vide», et être interprétés en harmonie avec les autres règles de droit international avec lesquelles il forme un ensemble, incluant les règles relatives aux droits de l’homme. La demande de l’Argentine a cependant été rejetée au motif qu’elle était mal fondée.

L’affaire Burlington55 constitue une sentence, non seulement, sans précédent en matière de demande reconventionnelle mais aussi inédite dans la mesure où la question de la compétence ne s’était point posée, les parties ayant conclu un accord au début de la procédure admettant l’introduction de demande reconventionnelle par l’État équatorien.

Pour autant, malgré les échecs, l’analyse des sentences montre une volonté des arbitres et des institutions arbitrales de procéder à un rééquilibrage dans l’arbitrage transnational unilatéral en évoluant les techniques procédurales par l’introduction de nouvelles modalités telles que les amici curiae.

3.2 La pratique des amici curiae56

Depuis 2006, le règlement d’arbitrage CIRDI admet les mémoires d’amicus curiae, sous certaines conditions prévues à l’article 37 du Règlement. Le continent africain est un terrain d’études foisonnant en matière de mise en œuvre de l’amicus curiae. Le mécanisme des amici curiae vient renforcer les réformes en matière de droit de l’homme. En effet, un amicus curiae, entité indépendante au litige, apporte son expertise au tribunal arbitral pour l’éclairer sur l’issue de la sentence arbitrale, et ce, sous la forme d’un mémoire. Si l’arbitre n’est pas juridiquement lié par l’expertise des amicus curiae, il a la possibilité d’en tenir compte dans la sentence arbitrale, ce qui peut avoir un impact sur l’issue même de la demande reconventionnelle d’un État. Les «amis de la cour» constituent ainsi une évolution intéressante pour soutenir les demandes reconventionnelles sur le fondement de violations de droits de l’homme et droit de l’environnement. Trois principales affaires africaines font ainsi évoluer la pratique sur le continent africain: Biwater Gauff (Tanzanie) Ltd. c. Tanzanie,57 Piero Foresti, Laura de Carli & Others c. Afrique du Sud, 58 et Bernhard von Pezold et autres c. Zimbabwe.59

3.2.1 L’affaire Biwater Gauff (Tanzanie) Ltd. c. Tanzanie60

Cinq organisations non-gouvernementales61 ont demandé l’autori-sation de participer aux phases écrites et orales de la procédure et d’avoir accès aux soumissions écrites des parties. Au soutien de leur demande, elles estiment qu’en l’absence d’accès aux documents de la procédure, le tribunal devait interpréter de manière souple les conditions de l’article 37(2); que leur expertise leur permettait d’obtenir une perspective différente des parties sur le litige; qu’elles limiteraient leur expertise au champ du litige; que le litige revêtait un caractère public; et enfin, elles ont rappelé le rôle important joué par les amici curiae en terme de crédibilité et de légitimité des arbitrages d’investissement.62

La partie demanderesse au litige s’est opposée à la demande d’intervention des ONG en tant qu’amici curiae,63 tandis que la partie étatique, comme on pouvait s’en douter, a favorablement accueilli la demande.64 La jurisprudence Biwater Gauff est éclairante dans la pratique des amici curiae dans la mesure où le tribunal, en répondant à l’argument de la partie demanderesse qui a estimé qu’aucun intérêt largement compris n’était mis en cause, a considéré que

even if Claimant ultimately proves that such wider interests, as a matter of fact, are untouched by its claim, the observation of the tribunal in the Methanex case still applies with force, namely that: ‘the acceptance of amicus submissions would have the additional desirable consequence of increasing the transparency of investor state arbitration.65

A la lumière de cette jurisprudence, on voit l’évolution du rôle octroyé par les tribunaux CIRDI aux amici curiae. En effet, les amici curiae permettent d’éclairer sur des points d’intérêt public du litige tels que le développement durable, l’environnement ou les droits de l’homme, le service public des eaux dans une grande métropole susceptible d’affecter des millions de personne en l’espèce, et soutenir les arguments de la partie étatique. Cependant, ce rôle se limite à cet aspect général et consultatif.66

3.2.2 L’affaire Piero Foresti, Laura de Carli & Others c. Afrique du Sud67

Dans cette affaire, quatre ONG68 - deux sud-africaines et deux internationales - ont soumis une demande d’intervention, l’affaire étant soumise au règlement du mécanisme supplémentaire du CIRDI,69 règlement qui comporte des dispositions analogues aux articles 37(2) et 32(2) du Règlement arbitral. La demande d’intervention était admise par le tribunal arbitral par une décision du 11 septembre 2009, décision où le tribunal précise que les parties mettraient à disposition des parties intervenantes leurs écritures et consultations juridiques, la liste des témoins et experts relatifs aux faits et au quantum du dommage sans, toutefois, en révéler le contenu.70

Le tribunal justifie ainsi sa décision en invoquant le rôle des amici curiae et rappelle que ceux-ci lui permettent de donner des informations et arguments afin de l’éclairer dans sa décision, sans pour autant révéler des informations relevant des parties. Le tribunal s’assure ainsi que la procédure se déroule correctement en tenant compte des informations et arguments des parties intervenantes, tout en respectant les droits des parties litigantes.

En l’espèce, l’affaire a fait l’objet d’une transaction, et les ONG n’ont pas pu être entendues au cours d’une audience. Cependant, malgré la résolution de l’affaire par une transaction, la sentence du 4 août 2010 sur les frais montre l’évolution de la jurisprudence quant au rôle des amici curiae au cours d’une instance. En effet, les parties intervenantes (les ONG) ont pu avoir accès aux pièces du dossier,71 certes de manière limiteé, contrairement à l’affaire Biwater Gauff. En outre, le tribunal s’est laissé la possibilité de s’exprimer sur la participation ou l’intervention au cours de l’audience des amici curiae. Le tribunal adopte ainsi une approche moins restrictive de l’intervention des amici curiae au cours de l’instance arbitrale, un arbitrage qui était auparavant limité aux deux parties que sont l’État et l’investisseur.72 De plus, le tribunal lui-même précise l’importance des amici curiae: ils permettent de les éclairer sur des points d’expertise en matière de droits de l’homme.

3.2.3. L’affaire Bernhard von Pezold et autres c. Zimbabwe73

Cette affaire concerne une expropriation alléguée de domaines forestiers au Zimbabwe. Concernant l’intervention d’amicus curiae, contrairement aux affaires précédemment abordées, la question de la recevabilité74 des interventions était au cœur de l’admission ou non par le tribunal de cinq ONG, quatre locales et une internationale.75 D’une manière classique, les parties intervenantes ont sollicité l’admission de leurs observations écrites et l’accès aux principaux documents de la procédure.

La partie demanderesse s’oppose à la demande en faisant valoir, d’une part, que la procédure ne mettait pas en cause les droits des communautés indigènes76 et que l’ECCHR n’avait pas de connaissances particulières susceptibles d’éclairer le tribunal dans sa décision.77 Elle ajoute que l’indépendance au sens de l’article 37(2) des amici curiae était compromise dans la mesure où les demandeurs au litige n’étaient pas étrangers aux parties défenderesses. En effet, les membres de la communauté indigène avaient occupé une partie du domaine faisant l’objet du litige. Un conflit d’intérêts dans la procédure ne serait donc pas à exclure.

Dans cette affaire, le raisonnement adopté par le tribunal met l’accent sur les tensions de l’admission des amicus curiae. En effet, le tribunal doit concilier des intérêts contraires: la nécessité d’assurer une procédure «juste, équitable et efficace» et la volonté de «faire valoir un intérêt général, qui, par définition, dépasse celui, plus limité, des par-ties en présence».78

Cependant, face à la crise de légitimité des investissements par la prétendue sur protection des intérêts des investisseurs privés, il a été nécessaire d’introduire des mécanismes tels que les «amis de la cour» pour tenter de concilier ces différents intérêts en permanente tension. Des auteurs ont notamment souligné la nécessité d’autoriser les amici curiae, relevant d’une approche progressiste du contentieux international des investissements.79 Les amici curiae ont permis une ouverture des tribunaux arbitraux d’investissement. En effet, leur intervention, certes peut être limitée, peut avoir une conséquence sur la décision des arbitres, et notamment sur les questions d’intérêt public tels que démontrent ces trois affaires africaines devant le CIRDI.

Outre l’incorporation des droits de l’homme dans le droit international des investissements, les juridictions tierces à l’État hôte se sont également saisies de ces questions au cœur des préoccupations face à un marché globalisé.

4 LA SAISINE D’ENTITÉS TIERCES À L’ÉTAT HÔTE

Si les droits de l’homme s’intègrent progressivement dans les instruments juridiques du droit des investissements, les juridictions régionales africaines comme étrangères se sont intéressées aux activités économiques pouvant affecter les droits fondamentaux des populations locales.

4.1 Les instruments contraignants et non-contraignants régionaux de protection des droits de l’homme

Les peuples autochtones d’Afrique habitent le plus souvent sur des terres faisant l’objet de valorisation économique par les autorités dans le cadre d’exploitation des ressources naturelles ou de projets touristiques. Sur le fondement de la Charte africaine des droits de l’homme et de peuples, et conformément à l’article 56, la Commission africaine peut connaître d’allégations de violation des droits de l’homme. Ces droits recouvrent notamment le droit de propriété, le droit à la libre disposition de leurs richesses ou de leurs ressources naturelles.

Ainsi, pour la première fois en 2001, dans Ogoni, la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples a eu à connaître d’allégation de violation des droits de l’homme du peuple Ogoni au Nigeria.80 En l’espèce, les autorités nationales nigérianes ont procédé à une vente des terres du peuple Ogoni à des exploitants industriels. La Commission africaine a ainsi considéré que le gouvernement nigérian a violé l’article 21 de la Charte sur la libre disposition des richesses et des ressources naturelles des peuples, et ce, en permettant à une compagnie pétrolière d’exploiter leurs terres.

Dans une une autre affaire, Endorois,81 la Commission africaine s’est penchée sur la question de la spoliation de terres ancestrales de la communauté Endorois. Celle-ci estime qu’elle a droit à une réparation pour violation de ses droits collectifs sur ses terres et ses ressources naturelles. Selon la communauté, les autorités kényanes ont procédé à un déplacement de la communauté dans le but de créer une réserve naturelle sur leurs terres ancestrales dans les années 1970. Les frais de relocation n’ont pas été assurées dans leur intégralité et le déplacement du peuple Endorois a conduit à la perte d’une partie de leurs ressources agricoles. En outre, les Endorois qui se sont rendus sur leurs terres ancestrales ont été arrêtés par les autorités kenyanes.82

Les Endorois ont intenté un recours devant la Cour d’appel kenyane, recours qui n’a pas été couronnés de succès. Aussi, la Commission africaine a été saisie sur le fondement de l’article 55 de la Charte.83 La Commission a ainsi condamné le Kenya pour violation des droits fondamentaux de la communauté Endorois,84 du droit à la propriété, à la libre disposition de leurs richesses et ressources naturelles, à la libre pratique de leur religion, à leur culture et à leur développement.85

Enfin, dans une affaire encore plus récente de 2017, la décision Ogiek devant la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples,86 la Commission africaine a renvoyé l’affaire à la Cour africaine au motif que l’existence de violations graves ou massives des droits humains était établies.87 Dans une décision historique du 26 mai 2017, la Cour confirme le droit de propriété du peuple Ogiek sur leurs terres ancestrales. Selon la Cour, le lien existant entre leur territoire et leur capacité de pratiquer librement leur religion suffit à constituer une atteinte à la liberté de pratiquer leur religion, liberté prévue à l’article 2 et à l’article 8 de la Charte. En outre, en reconnaissant le statut de population autochtone à la communauté Ogiek,88 la Cour estime, selon le paragraphe 109 de la décision, que l’expulsion ou la privation d’accès à leur territoire pour exercer leur droit à leur culture par les autorités nationales n’était pas justifiée:

S’agissant de la priorité dans le temps, les différents rapports et mémoires déposés par les parties devant la Cour indiquent que les Ogiek ont la priorité dans le temps en ce qui concerne l’occupation et l’utilisation de la forêt de Mau.

Ainsi, la Cour enjoint les autorités kényanes à prendre toutes les mesures nécessaires dans des délais raisonnables pour remédier aux violations.

La pratique montre une évolution de la protection des droits des populations autochtones du fait de décisions d’autorités nationales en faveur d’investissements nationaux comme étrangers. Les décisions Endorois et Ogiek ont une influence indirecte sur le droit des investissements africain. En effet, même si l’évolution semble limitée dans la mesure où les entités régionales ne peuvent s’adresser qu’aux États parties à la convention, et non aux investisseurs, ces décisions constituent des signaux importants aux investisseurs qui seraient tentés de violer les droits de l’homme dans une réserve naturelle ou sur le territoire des peuples autochtones. En renvoyant aux États, la Commission peut exercer une «influence par ricochet» sur les investisseurs étrangers et les risques d’un litige. Par exemple, en cas d’arbitrage d’investissement, rien n’exclut l’introduction d’une demande reconventionnelle et l’intervention d’amicus curiae sur le fondement de ces violations. On pourrait ainsi envisager que les amici curiae dans le cadre d’un arbitrage d’investissement puissent se référer, du moins en partie, aux décisions de la Commission, ce qui pourrait avoir éventuellement une conséquence considérable sur l’issue de l’arbitrage. Cela ne lierait certainement pas les arbitres. Toutefois, il serait envisageable que les arbitres tiennent compte des décisions de la Commission à titre consultatif à travers les ONG et associations en tant qu’amicus curiae dans la procédure d’arbitrage transnational.

4.2 Le rôle des juridictions étrangères dans l’application des droits fondamentaux dans l’État hôte de l’investissement

Il existe aujourd’hui un mouvement de «cosmopolitisation des juges nationaux» à travers la notion de «compétence universelle»,89 c’est-à-dire un mouvement d’harmonisation, ou du moins une tentative d’harmonisation, des décisions autour de valeurs communes telles que les droits de l’homme et le droit de l’environnement. Le phénomène d’«extraterritorialité du droit»90 ou d’application à l’étranger du droit national représente un vecteur de ce mouvement.

La loi française sur le devoir de vigilance en est une illustration des plus récentes. En effet, elle crée une obligation pour certaines sociétés91 de créer «un plan de vigilance» à visée principalement préventive, et ce, afin de prévenir les atteintes aux droits fondamentaux, aux dommages corporels, environnementaux et sanitaires. Ce devoir de vigilance s’impose aux sociétés dans leurs activités directes comme indirectes, c’est-à-dire qu’il vise également leurs filiales et sous-traitants.

Cette loi trouve son origine dans l’effondrement en 2013 du Rana Plaza, un immeuble regroupant des ateliers de confection au Bangladesh, qui a conduit à la disparition de 1 138 victimes, employées pour la totalité par des sous-traitants de grandes marques de textiles. On se sert des opérateurs transnationaux pour en faire les vecteurs du droit français, en rejetant, en l’espèce, les normes de sécurité en vigueur au Bangladesh.

Les normes sont portées par le droit français, mais restent cependant, d’origine internationale. En effet, la loi sur le devoir de vigilance s’est inspirée des principes Ruggie et des principes directeurs de l’OCDE destinés à protéger les droits de l’homme et le développement social. Les évènements liés aux entreprises ou sociétés transnationales se sont multipliés: corruption, pollution de l’environnement, violation grave des droits de l’homme qui inclut l’exploitation des enfants et des communautés autochtones.

Les législations qui mettent en place des instruments pour engager la responsabilité des sociétés-mères pour une violation des droits de l’homme et droit de l’environnement se multiplient. Cette année encore, le 1er janvier 2020, est entrée en vigueur la loi sur la diligence raisonnable contre le travail des enfants aux Pays-Bas, loi adoptée le 14 mai 2019.92 Cette loi introduit un devoir de prévention de l’approvisionnement en biens et services produits par le travail des enfants. Les critères liés à la nationalité ont été exclus de la loi au seul profit de critères liés aux activités conduites aux Pays-Bas. Cette loi vient ainsi élargir la compétence du juge aux entreprises étrangères présentes sur le territoire néerlandais. Toutefois, comparée à son homologue français, la loi se limite la compétence du juge au travail des enfants, tandis que la loi sur le devoir de vigilance porte sur les droits humains et sur l’environnement.

De nombreuses juridictions européennes et américaines ont été récemment saisies sur le fondement de ces lois qui ont vocation à donner une compétence extraterritoriale au juge national pour les activités impliquant les filiales à l’étranger de sociétés-mères dont elles sont ressortissantes. C’est notamment le cas au Royaume-Uni, aux Pays-Bas ou encore au Canada. A titre d’illustration, les tribunaux hollandais ont eu à connaître d’une affaire impliquant la multinationale Shell au Nigeria pour des violations de droit de l’environnement et droits de l’homme.93

En France, les juridictions françaises ont été récemment saisies par des ONG ougandaises et françaises sur le fondement de la loi sur le devoir de vigilance. La multinationale française Total devient ainsi la première entreprise à être saisie sur le fondement de cette loi pour une insuffisance du plan de vigilance en matière environnementale ainsi que de sa mise en œuvre.94 En l’espèce, les ONG estiment qu’un projet d’exploitation du pétrole dont Total est actionnaire viole les droits fondamentaux des populations locales. Une première audience historique a eu lieu le 20 décembre 2019 au Tribunal judiciaire de Nanterre, tribunal qui se déclare incompétente au profit du tribunal de commerce le 30 janvier 2020 au motif que «l’élaboration et la mise en œuvre du plan de vigilance participent directement du fonctionnement des sociétés commerciales et font partie de leur gestion».95 Les ONG interjettent appel de la décision, l’affaire étant actuellement pendante.

La multiplicité de ces affaires témoigne d’une approche progressiste du droit dans la mise en œuvre de la responsabilité des multinationales, malgré la difficulté de la relation entre société-mère et filiale. Cependant, l’affaire impliquant Total pour ses activités en Ouganda démontre la difficulté à l’heure actuelle de la mise en œuvre de la responsabilité des sociétés-mères pour les activités de leur filiale.

 5 CONCLUSION

La question des rapports entre investissements internationaux et droits de l’homme dans le domaine de l’exploitation des ressources naturelles constitue un terrain d’études privilégié des intérêts en contradiction.96 De nombreuses actions judiciaires sont aujourd’hui menées par les associations et ONG devant les juridictions étrangères pour des faits commis en territoire africain par des multinationales. Si les juridictions étrangères se sont saisies de la question des droits de l’homme, les tribunaux d’investissement ne sont pas pour autant en reste. En effet, la pratique permet d’observer une approche progressiste du droit international des investissements par les arbitres en incorporant des considérations d’intérêt public dans les sentences arbitrales.

Les recherches montrent une évolution positive, certes encore insatisfaisante au regard de la pratique, de l’articulation entre droits de l’homme et droits des investissements. Si les traités d’investissement de nouvelle génération incluent des obligations à la charge de l’investisseur, la majorité des investissements internationaux à l’heure actuelle sont régis par les anciens traités. Les modèles de traité «Maroc-Nigeria» restent encore une exception qui devrait se généraliser, les droits de l’homme et le droit de l’environnement devant être liés au droit des investissement par le biais des traités.

En outre, le développement du recours aux amici curiae dans les arbitrages d’investissement, mais également de la croissance des contentieux relatifs au déploiement à l’étranger des filiales de sociétés-mères européennes comme américaines démontrent du rôle croissant des ONG et associations africaines dans la prise en compte des considérations de droits de l’homme en droit international des investissements. Toutefois, leur implication reste aujourd’hui limitée dans la procédure d’arbitrage transnational, dans la mesure où elle ne dispose que d’un rôle purement consultatif.

Un rééquilibrage des intérêts par les différentes techniques du droit international97 et une nouvelle manière d’appréhender le droit des investissements se font progressivement par la pratique conventionnelle comme jurisprudentielle. On constate ainsi que le droit international et régional africain, et les acteurs africains eux-mêmes, jouent un rôle déterminant dans ce rééquilibrage, autant dans l’adoption des traités dits de nouvelle génération que la jurisprudence qui se veut progressiste. La doctrine va jusqu’à parler de «décolonisation» ou «africanisation du droit international des investissements».98

 


1. Voir CA Michalet ‘L’évolution de la législation sur les investissements directs étrangers et la dynamique de la mondialisation’ in C Leben & E Loquin & Mahmoud Salem (dirs) Mélanges en l’honneur de Philippe Kahn. Souveraineté étatique et marchés internationaux à la fin du 20 siècle, A propos de 30 ans de recherches du CREDIMI (2000) 440; S Mohamed ‘La mise en concurrence des systèmes juridiques nationaux. Réflexions sur l’ambivalence des rapports du droit et de la mondialisation’ (2001) 15 Revue internationale de droit économique 251.

2. F Marella ‘Protection internationale des droits de l’homme et activités des sociétés transnationales’ (2017) 385 Recueil des cours de l’Académie de droit international 33.

3. Voir B Nolbe ‘Droit et technique des traités de commerce’ (1924) 3 Recueil des cours de l’Académie de droit international 299.

4. MS Dougal & L-C Chen & HD Lasswell ‘Protection of aliens from discrimination and word public order: responsibility of states conjoined with human rights’ (1976) 70 American Journal of International Law 433-437.

5. WB Hamida L’arbitrage transnational unilatéral. Réflexions sur une procédure réservée à l’initiative d’une personne privée contre une personne publique, Thèse de doctorat en droit, Université Paris II (2003) 186.

7. A De Nanteuil Droit international de l’investissement (2017) 92.

9. C Leben ‘Contrat d’État et droit international des investissements’ (2003) Recueil des cours de l’Académie de droit international 201.

10. M Sattorova ‘Les pays en développement bénéficient-ils réellement des traités d’investissement? Les effets du droit international des investissements sur la gouvernance nationale’ (2018) 9 Investment treaty news 9.

11. Pour une analyse de la critique Lire A De Nanteuil ‘Les mécanismes permanents de règlement des différends, une alternative crédible à l’arbitrage d’investissement?’ (2017) 1 Journal du droit international 55.

12. C Crepet Daigremont ‘Les sources du droit international des investissements’ in C Leben (dir) Droit international des investissements et de l’arbitrage transnational (2015) 96.

13. Daigremont (n 12) 96.

14. Toutefois, le TBI n’est pas encore entré en vigueur.

15. ‘Provided the conditions set out in Article 13 are met, an Investor-State Dispute may be submitted either to the competent domestic courts of the Contracting Party in whose Territory the Investment has been made or arbitration by either party under: a) the ICSID Convention, if both Contracting Parties are party to the ICSID Convention: or b) the ICSID Additional Facility Rules, if only one Contracting Party is a party to the ICSID Convention; or c) the UNCITRAL Arbitration Rules, as applicable on the date of signature of this Agreement, unless the parties to the Investor-State Dispute agree otherwise; or d) any other arbitration rules on which the parties to the Investor-Dispute agree’.

16. Voir l’Article 9 du TBI Rwanda Emirats Arabes Unis ‘Right to Regulate’.

17. Affaire Salini et Italstrade v Royaume du Maroc CIRDI (23 juillet 2001) (2002) Journal du droit international 196.

19. L’article 22(1)(a)(b) et (c) du texte.

20. Voir l’article 12(1) Pre-establishment impact assessment.

21. Voir les articles 1 & 4; 14 & 17; 21 & 29 de l’Accord.

22. Voir notamment les articles 22 sur l’obligation de contribuer au progrès économique, social et environnemental, l’article 23 sur l’exploitation des ressources naturelles locales ou l’article 24 sur l’obligation pour l’investisseur de respecter l’éthique commerciale et les droits humains du Code panafricain des investissements, EA15660 - 15, décembre 2016.

23. Voir également l’Article 20 du Code panafricain des investissements sur les obligations socio-politiques des investisseurs.

24. Voir notamment l’article 3 des Objectifs généraux.

25. F Pascual-Vives ‘Investissements étrangers et protection des intérêts publics’ in C Titi (dir) Droits de l’homme et droit international économique (2020) 180.

26. Les accords de deuxième génération n’étant pas encore en vigueur dans tous les pays en développement qui ont adopté les réformes (le cas du Mozambique ou du Rwanda par exemple).

27. E Gaillard ‘L’avenir des traités de protection des investissements’ in C Leben Droit international des investissements et de l’arbitrage transnational (2015) 967. Il faut rappeler que ce déséquilibre a été justifié, à l’origine, par le souci de protection de l’étranger face à la puissance de l’État.

28. En ce sens voir Hamida (n 5).

29. De Nanteuil (n 7) 48.

30. Il s’agissait principalement d’instruments destinés à couvrir une relation contractuelle entre un État et un investisseur étranger. Aussi, la saisine d’une justice arbitrale internationale n’était possible que si un contrat existait entre l’investisseur et l’État d’accueil, et que ce contrat prévoyait la possibilité d’une telle saisine, Voir De Nanteuil (n 7) 48.

31. Affaire Asian agricultural products ltd. (AAPL) c. République du Sri Lanka CIRDI (27 juin 1990) ARB/87/3 ILM (1990) 580.

32. Il faut noter que l’on se situe à une époque où Hong Kong n’a pas encore été rétrocédé à la Chine.

33. Affaire Southern Pacific Properties c. République d’Egypte CIRDI (14 avril 1980) ARB/84/3 JDI (1994) 220.

34. WB Hamida ‘L’arbitrage État-investisseur cherche son équilibre perdu: dans quelle mesure l’État peut introduire des demandes reconventionnelles contre l’investisseur privé’ (2005) 7 International Law FORUM du droit international 261.

35. WB Hamida (n 34) 261.

36. Sur cette qualification, voir Hamida (n 5) 26; A Prujinier ‘L’arbitrage unilatéral: un coucou dans le nid de l’arbitrage conventionnel?’ (2005) Revue de l’arbitrage 61.

37. L Liberti ‘Investissements et droits de l’homme’ in P Khan & T Walde (dirs) Les aspects nouveaux du droit des investissements - New aspects of international investment law (2007) 791.

38. N Monebhurrun ‘La demande reconventionnelle comme procédure permettant d’engager la responsabilité environnementale des investisseurs: l’exemple du droit international des investissements’ (2020) 45 Revue juridique de l’environnement 516.

39. Sur la question de la protection des populations autochtones, L Lankarani ‘Le droit international et l’accès à la justice sociale des peuples autochtones’ in M Bidault et autres Réciprocité et universalité, Sources et régimes du droit international des droits de l’homme, Mélanges en l’honneur du Professeur Emmanuel Decaux (2017) 949; voir également, V Vadi ‘Heritage, power, and destiny: the protection of indigenous heritage in international investment law and arbitration’ (2019) 50 George Washington International Law Review 725.

40. Sur ce point, voir WB Hamida ‘Les demandes reconventionnelles dans la jurisprudence arbitrale récente relative aux investissements’ (2010) 10(37) Revista Brasileira de Arbitragem, Comitê Brasileiro de Arbitragrem CBAr & IOB 68.

41. Voir Rapport des administrateurs sur la Convention pour le règlement des différends relatifs aux investissements entre États et ressortissants d’autres États (18 mars 1965) 41 para 13.

42. N Rubins ‘Les demandes reconventionnelles dans l’arbitrage CIRDI’ in WB Hamida, A Ngwanza & JB Harelimana (dir) Un demi-siècle africain d’arbitrage d’investissement CIRDI, Regards rétrospectifs et prospectifs (2019) 184.

43. IC Popova & F Poon ‘From perpetual respondent to aspiring counterclaimant? State counterclaims in the new wave of investment treaties’ (2015) 2 BCDR International Arbitration Review 223.

44. A Vohryzek-Griest ‘State counterclaims in investor-state disputes: a history of 30 years of failure’ (2009) 83 Revista colombiana de derecho internacional 86.

45. ‘Even on the rare occasions that counterclaims appear to have been raised, the pervading trend has been one of disappointment for the counterclaiming State’, Lire T Kendra ‘State counterclaims in investment arbitration - a new lease of life?’ (2013) 9 Arbitration International 580.

46. Affaire Burlington Ressources Inc. c. Équateur CIRDI (7 février 2017) ARB/08/5.

47. Rubins (n 42) 185; Vohryzek-Griest (n 44) 86.

48. Affaire Gustav F W Hamester GmbH & Co KG c. République du Ghana CIRDI (18 juin 2010) ARB/07/24.

49. Hamida (n 5) 68.

50. Affaire Gustav F W Hamester GmbH & Co KG (n 50) para 355-356: ‘However, in the absence of any submissions on the nature of the Respondent’s counterclaim under the BIT, the Tribunal is unable to analyse whether it is capable, in accordance with Article 46 of the Convention, of falling within the parties’ scope of consent. In any event, it would appear that the counterclaim is based on Hamester’s alleged fraudulent conduct and breach of fiduciary duty in connection with the initiation of and performance under the JVA. The ROG is not a party to the JVA and the Tribunal has concluded that Cocobod is not an organ of the Ghanaian State. The acts of which the Respondent principally complains concern alleged losses suffered by Cocobod - not the ROG. Since, as noted, Cocobod is neither a Party to the arbitration nor an organ of the State, the Tribunal does not have jurisdiction over claims in respect of its alleged losses arising out of the JVA’.

51. Affaire Spyridon Roussalis c. Roumanie CIRDI (7 décembre 2011) ARB/06/01.

52. Affaire Spyridon Roussalis (n 4) para 873. Toutefois, voir l’opinion dissidente du Pr Reisman (jointe à la sentence) qui estime qu’en concluant le TPI, le Burundi a par là même accepté que les différends qui seraient soumis à l’arbitrage dans le cadre du CIRDI soient réglés dans les conditions et selon les procédures fixées par la Convention de Washington. Il a notamment accepté que les demandes incidentes, additionnelles ou reconventionnelles présentées en cours d’instance soient examinées par le Tribunal dans les conditions fixées par l’article 46 de la Convention et l’article 40 du Règlement d’arbitrage. En acceptant l’offre contenue dans le TPI, les consorts Goetz ont à leur tour accepté qu’il en soit ainsi. Ce double consentement donne compétence au Tribunal pour connaître des demandes reconventionnelles’.

53. Affaire Urbaser S.A. et Consorcio de Aguas Bilbao Bizkaia, Bilbao Biskaia Ur Partzuergoa c. Argentine CIRDI (8 décembre 2016) ARB/07/26.

54. Affaire Urbaser SA (n 2) para 1191 & 1200.

55. Affaire Burlington Ressources Inc. c. Équateur CIRDI (7 février 2017) ARB/08/5.

56. Sur les détails de l’affaire et la pratique d’amici curiae voir R Radilofe ‘Enclavement juridique et investissements internationaux: essai sur un phénomène de droit transnational’ (2019) Thèse de doctorat en droit, Université Côte d’Azur.

57. Affaire Biwater Gauff (Tanzanie) Ltd. c. Tanzanie CIRDI (2 février 2007) ARB/05/22.

58. Affaire Piero Foresti, Laura de Carli & Others c. Afrique du Sud CIRDI ARB/07/01 (30 juin 2009).

59. Affaire Bernhard von Pezold et autres c. Zimbabwe CIRDI (28 juin 2015) ARB/10/15.

60. Affaire Biwater Gauff (n2) Ordonnance de procédure No 5 sur l’amicus curiae du 2 février 2007.

61. The Lawyers’ Environmental Action Team (LEAT), The Legal and Human Rights Center (LHRC), The Tanzania Gender Networking Program (TGNP), The Center for International Environmental Law (CIEL), The International Institute for Sustainable development (IIISD).

62. Affaire Biwater Gauff (n 3) ordonnance de procédure No 5 sur l’amicus curiae du 2 février 2007, para19-24.

63. para 31-37.

64. para 42-44.

65. para 54.

66. C Kaplan ‘L’intervention des tiers’ in WB Hamida & A Ngwanza & JB Harelimana (dirs) Un demi-siècle africain d’arbitrage d’investissement CIRDI, Regards rétrospectifs et prospectifs (2019) 199.

67. Piero Foresti et autres (n 2) Avis de motion: demande d’admission en qualité d’amicus curiae du 30 juin 2009.

68. Center for Applied Legal Studies (CALS), Legal Resources Center (LRC), The Center for International Environmental Law (CIEL), International Center for the Legal Protection of Human Rights (INTERIGHTS).

69. Voir Article 39(2) et 41(3) du Règlement du mécanisme supplémentaire du CIRDI.

70. Piero Foresti et autres (n 58) Lettre du secrétariat du tribunal du 25 septembre 2009: ‘NDP participation is intended to enable NDPs to give useful information and accompanying submissions to the Tribunal, but is not intended to be a mechanism for enabling NDPs to obtain information from the Parties’; Sentence sur les coûts du 4 octobre 2010.

71. Ce qui était inenvisageable auparavant dans un arbitrage d’investissement.

72. Kaplan (n 66) 204.

73. Affaire Bernhard von Pezold et autres (n 59).

74. Affaire Bernhard von Pezold et autres (n 59), Ordonnance de procédure n°1 du 26 juin 2012.

75. European Center for Constitutional and Human Rights (ECCHR).

76. Affaire Bernhard von Pezold et autres (n 59); Affaire Border timbers limited, border timbers international (private) limited, and hangani development co. (private) limited c. République du Zimbabwe, CIRDI (26 juin 2012) ARB/10/25, Ordonnance de procédure no 1 du 26 juin 2012, para 31.

77. Affaire Bernhard von Pezold et autres (n 59), para 9.3.5 & 35.

78. Kaplan (n 66) 206.

79. Intervention de MM Mbengue ‘Due diligence et droit international des investissements’ 70 ans de la Déclaration universelle des droits de l’Homme, Due diligence des Etats, des entreprises et des individus, Société de législation comparée Paris (10 décembre 2018).

80. Social and Economic Rights Action Center (SERAC) and Center for Economic and Social Rights (CESR) v Nigeria (2001) Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, No 155/96, 30e sess, 15e rapport d’activité (2001); Voir également CA Odinkalu ‘Analysis of paralysis or paralysis by analysis? Implementing economic, social and cultural rights under the African Charter on Human and Peoples’ Rights’ (2001) 23 Human Rights Quarterly  327-69 et 346-7.

81. Center for Minority Rights Development (Kenya) and Minority Rights Group (on behalf of Endorois Welfare Council) c. Kenya (2009), Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples, No 276/03, 46e sess, 27e Rapport d’activité (2009).

82. T Braun & L Mulvagh Le système africain des droits humains: un guide pour les peuples autochtones (2008) 9.

83. Pour le détail procédural, voir OD Ndayambaje ‘La contribution de la reconnaissance des droits des peuples autochtones à la protection de l’environnement à la lumière de l’affaire Endorois c. Kenya’ (2016) 29 Revue québécoise de droit international 173-190.

84. K Sing’oei Manuel sur la promotion et protection des droits des populations communautés autochtones à travers le système africain des droits de l’homme (2012) 9; O Dismas Ndayambaje ‘La contribution de la reconnaissance des droits des peuples autochtones à la protection de l’environnement à la lumière de l’affaire Endorois c. Kenya’ (2016) 29 Revue québécoise de droit international 173.

85. Voir JNP Francis, C Beninger & S Beninger ‘Traditional knowledge as a genetic resource: protections for sustainable development in Africa’ (2014) 2 Revue africaine de droit de l’environnement 79-100.

86. Commission africaine des droits de l’homme et des peuples c. Kenya (26 mai 2017) Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, Décision 6/2012.

87. Il faut noter que la Commission africaine ne dispose d’aucun pouvoir de sanction, à l’inverse de la Cour africaine. Elle émet principalement des recommandations. La gravité des violations peut ainsi justifier le renvoi d’une affaire de la Commission à la Cour africaine, organe de contentieux. Voir N Eba Nguema ‘La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples et sa mission de protection des droits de l’homme’ (2017) 11 Revue des droits l’homme 9.

88. Sur le fondement des recherches menées par la Commission et du rapporteur spécial des Nations Unies sur les questions relatives aux minorités Lire para 105-106 de la Décision.

89. JB Racine ‘Vers un ordre public mondial?’ in L Boy et autres (dirs) Pluralisme juridique et effectivité du droit économique (2011) 433.

90. M Audit, R Bismuth & A Mignon Colombet ‘Sanctions et extraterritorialité du droit américain: quelles réponses pour les entreprises françaises?’ (2015) 1-2 La semaine juridique edition générale 64-65.

91. Voir les conditions de l’article 1 de la loi.

92. Wet zorgplicht kinderarbeid, 2019.

93. Pour une analyse détaillée des procès impliquant la multinationale Shell voir Amnesty international Legal actions against the oil multinational (2020) 32 p.

94. Ordonnance de référé du 30 janvier 2020, No R.G.: 19/02833 - No Portalis DB3R-W-B7D-VIPX.

95. Ordonnance de référé du 30 janvier 2020, No R.G.: 19/02833 - No Portalis DB3R-W-B7D-VIPX.

96. L Liberti ‘Investissements et droits de l’homme’ in P Khan & Th Walde (dirs) Les aspects nouveaux du droit des investissements investissements - New Aspects of International Investment Law (2007) 791.

97. Voir notamment en ce sens, l’intervention du Professeur Makane Mbengue lors de la conférence de lancement de l’association Africarb, MM Mbengue ‘Traités, initiatives et négociations récentes à l’échelle régionale et continentale: de nouvelles normes en matière d’investissement?’ Arbitrage en Afrique: quo vadis ? Université Paris II Panthéon-Assas, Africarb (14 juin 2018).

98. MM Mbengue ‘“La loi des nations est faite de fer”? Reconnaissance et “décolonisation” du droit international des investissements’ in E Tourme-Jouannet & A Geslin (dirs) Le droit international de la reconnaissance, un instrument de décolonisation et de refondation du droit international? (2019) 97; MM Mbengue & S Schacherer ‘The “Africanization” of International Investment Law: the Pan-African Investment Code and the reform of the international investment regime’ in MM Mbengue & S Schill (dirs) Africa and the Reform of the International Investment Regime Journal of World Trade and Investment (2017) 414.