Quiterie Bassonga Khiessie
 Docteure en Droit
 Enseignante à la Faculté de droit de l’Université Marien Ngouabi
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  https://orcid.org/0000-0002-3574-7521


 Edition: AHRY Volume 5
 Pages: 51 - 72
 Citation: QB Khiessie ‘Le contradictoire devant la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples’ (2021) 5 Annuaire africain des droits de l’homme 51-72
http://doi.org/10.29053/2523-1367/2021/v5a3
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RÉSUMÉ:

Principe universel, le contradictoire est mis en œuvre par toutes les juridictions internationales des droits de l’homme. La Cour africaine des droits de l’homme et des peuples ne fait pas exception, du fait que le contradictoire est aussi consacré dans la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, en son article 7(1)(c) ainsi que dans le Protocole y relatif portant création de la Cour, en son article 26. Néanmoins, la consécration formelle universelle du contradictoire ne garantit pas une uniformité dans sa mise en œuvre. L’objet de cette contribution est de démontrer, par le biais des méthodes exégétique et casuistique, qu’en dépit de la formulation laconique du contradictoire dans la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, la Cour procède à une consolidation dudit principe. Dans le système juridique africain, la particularité du contradictoire est davantage perceptible lorsqu’il est appréhendé à l’aune de l’œuvre prétorienne du juge africain des droits de l’homme et des peuples. L’examen de la jurisprudence de la Cour est révélateur de ce que le contradictoire est un principe établi et tropicalisé devant cette juridiction africaine des droits de l’homme et des peuples.

MOTS CLÉS: contradictoire, Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, droits de la défense, instance

TITLE AND ABSTRACT IN ENGLISH:

Adversarial proceedings before the African Court on Human and Peoples’ Rights

Abstract: As a universal principle, adversarial proceedings are implemented by all international human rights courts. The African Court on Human and Peoples’ Rights is no exception, as adversarial proceedings are also enshrined in article 7(1)(c) of the African Charter on Human and Peoples’ Rights and in article 26 of the Protocol establishing the Court. However, the universal formal enshrinement of adversarial proceedings does not guarantee uniformity in its implementation. The purpose of this article is to demonstrate, through exegetical and casuistic methods, that despite the laconic formulation of the adversarial principle in the African Charter on Human and Peoples’ Rights, the Court is consolidating this principle. In the African legal system, the particularity of adversarial proceedings is more perceptible when viewed in the light of the jurisprudence of the African Court. An examination of the Court’s case law reveals that adversarial proceedings are an established principle before the African human and peoples’ rights tribunal.

 KEYWORDS: adversarial process, African Court on Human and Peoples' Rights, African Charter on Human and Peoples' Rights, rights of the defense, proceedings

SOMMAIRE:

1 Introduction 

 2 Le contradictoire: un mode de concretisation d’un droit subjectif universel 

2.1 Le contrôle du respect de l’article 7(1)(c) de la Charte 

2.2 L’interprétation prétorienne extensive de l’article 7(1)(c) de la Charte  

3 Le contradictoire: une modalite d’organisation regionale du proces  

3.1 La mise en œuvre du contradictoire dans la procédure écrite  

3.2 La mise en œuvre du contradictoire dans la phase orale  

4 Conclusion  

1 INTRODUCTION

Le contradictoire est un principe universel qui est mis en œuvre par toutes les juridictions internationales. La Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (la Cour) n’échappe pas à ce principe. La création de la Cour vient rompre avec 19 ans1 de «paysage uni-institutionnel»2 de protection des droits de l’homme sur le continent. Au-delà de cette considération formelle, la Cour rompt substantiellement avec le «mécanisme de l’arbre à palabre»3 incarné par son aînée, la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (la Commission). Cette rupture est perceptible en ce que la Cour, contrairement à la Commission qui tend à judiciariser son office,4 est une juridiction internationale5 de protection des droits de l’homme. En effet,

Ne peuvent être qualifiées de juridictions internationales de protection des droits de l’homme agissant au sein du droit international des droits de l’homme que celles qui statuent sur le fondement d’un traité normatif de protection des droits de l’homme et offrent la voie du recours individuel, directement ou indirectement. 6

La Cour le reconnaît dans l’affaire Jean-Claude Roger Gombert c. Côte d’Ivoire en ces termes:

 (...) en tant que juridiction des droits de l’homme et des peuples, elle (la Cour) ne peut en principe connaître que des violations des droits des individus, des groupes d’individus ou des peuples, sur saisine des entités et personnes mentionnées à l’article 5 du Protocole (...).7 

Entant que tel et dans sa fonction contentieuse, elle recourt au contradictoire.

Jean Salmon définit le contradictoire comme le «caractère d’un procès où des parties opposées comparaissent et débattent devant un juge sur un pied d’égalité des éléments du litige en cause».8 Cette acception met en exergue l’aspect processuel du contradictoire, l’essence même du procès. En effet, ce dernier est étymologiquement «une marche, un développement, un progrès»,9 un processus vers le jugement.10 Le contradictoire y est considéré comme une phase inévitable du «rite processuel»,11 lequel est rythmé par des temps de silence. Il y a entre contradictoire et silence, une sorte d’intimité ontologique. En ce sens, soutient-on, que: «[s]ans silence, il n’y a pas de contradictoire. (...). Le temps du silence de l’un est le temps de parole de l’autre».12 Cette définition du contradictoire, qui est générale au contentieux international,13 diffère dans le cadre spécifique du contentieux international des droits de l’homme, qui est réputé comme un contentieux subjectif.14 Dans ce domaine, le contradictoire est perçu comme «le droit d’être informé et de répondre aux pièces et éléments de la procédure».15 Sous cet angle, il est davantage considéré comme un droit, qui incombe en premier lieu à la défense. Cette affirmation est étayée par la doctrine qui considère le contradictoire comme l’une des garanties du procès «qui joue essentiellement en faveur de la défense. La contradiction doit y être comprise comme un droit de la défense».16 Cette acception du contradictoire est consubstantielle au système accusatoire, dans lequel les parties à l’instance ont un rôle prépondérant et le juge y est réduit à un rôle d’arbitre.17

Des définitions précédentes, l’on est tenté de déduire que, tel Janus, le contradictoire comporte deux volets: un volet de droit subjectif et un volet de droit processuel. Toutefois, sans être adverses, ces deux approches du contradictoire forment, selon la doctrine, les «fonctions du contradictoire», auxquelles, elle ajoute la fonction de détermination de la vérité.18

La Cour n’ayant pas encore connu un «recours entre Etats adhérents»,19 cette étude se limitera à l’application du contradictoire dans le contentieux opposant l’individu à l’Etat. Au 29 novembre 2021, la Cour a reçu 32520 requêtes introductives d’instance dans lesquelles les requérants allèguent la violation des droits. Dans ses jugements, le juge régional appréhende diversement le contradictoire. Néanmoins, l’ensemble de ses jugements constitue une jurisprudence, c’est-à-dire, qu’ils contiennent des solutions généralement données à des problèmes de droit.21 Partant, cette jurisprudence, qui n’est pas silencieuse,22 ne se limite donc pas à l’application du contradictoire, tel que consacré conventionnellement, mais devient aussi son complément nécessaire, son «supplément prétorien».23

L’approche historique révèle que les sources du contradictoire remontent au-delà de l’ordre juridique africain. Au plan universel, le contradictoire est consacré aussi bien par l’article 11(1) de la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH), que par l’article 14(3)(d) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP). Au plan régional, le principe du contradictoire bénéficie en Afrique d’un fondement conventionnel. Il est formulé dans la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (la Charte) et dans le Protocole portant création de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (le Protocole). La Charte ne mentionne pas expressément le contradictoire. Ce dernier est contenu dans certaines garanties judiciaires. L’on peut lire à l’article 7(1)(c), ce qui suit: «Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue. Ce droit comprend: (...) le droit à la défense, y compris celui de se faire assister par un défenseur de son choix». L’on constate que cette disposition mentionne les droits reconnus à la partie défenderesse ou «les droits de la défense». Ils sont rattachés à la maxime «entendre l’autre partie», selon la formule latine audi alteram partem.24 L’on peut inférer de l’argumentation précédente que le contradictoire est la manifestation du droit à la défense. Toutefois, cette approche peut s’avérer limitée, en ce que le contradictoire sert aussi à la partie poursuivante. Il s’étend au-delà du droit à la défense, car

un droit de la défense peut n’être conçu que dans l’intérêt du défendeur, et c’est en cela que l’autonomie des droits de la défense se marque par rapport au contradictoire, qui est une charge et un bénéfice pour chacune des parties.25

Le Protocole mentionne expressément le contradictoire dans son article 26 relatif aux modalités de preuves. Aux termes de cet article, «[l]a Cour procède à l’examen contradictoire des requêtes qui lui sont soumises (...)». Une interprétation littérale de cette disposition permet de considérer le contradictoire davantage comme une modalité d’organisation du procès. Cette affirmation peut être confortée lorsque l’on combine la lecture de l’article 26 du Protocole et la règle 30 du Règlement de la Cour relatif aux phases de la procédure. Il en ressort que la contradiction se manifeste aussi bien dans la procédure écrite que dans celle orale.

L’on convient de ce que le contradictoire est un «principe général du procès international».26 Dès lors, la présente contribution se propose d’examiner la problématique suivante: comment le juge africain des droits de l’homme et des peuples recourt-il au contradictoire? L’objet de cette contribution est de démontrer, qu’au travers de sa jurisprudence, la Cour africaine des droits de l’homme, procède à une appropriation du principe universel du contradictoire.

Plusieurs méthodes juridiques seront invoquées en vue de cette réflexion, à savoir l’exégèse et la casuistique. D’abord, la méthode exégétique nous permettra de procéder à l’analyse des différents instruments qui consacrent le contradictoire et au-delà, d’établir l’existence des concepts juridiques généraux sur la base de ceux existant. Ensuite, par la casuistique, l’on examinera au cas par cas les différentes décisions de la Cour afin d’apprécier la mesure dans laquelle elle appréhende le contradictoire dans chacune d’elles.

En réponse à la problématique, le juge africain recourt diversement au contradictoire selon qu’il procède au contrôle de son respect par les juridictions nationales et selon qu’il l’applique lui-même. Partant, la Cour appréhende le contradictoire comme un mode de concrétisation d’un droit subjectif universel (partie 2) et comme une modalité d’organisation régionale du procès (partie 3)

2 LE CONTRADICTOIRE: UN MODE DE CONCRETISATION D’UN DROIT SUBJECTIF UNIVERSEL

La Cour est la garante des droits de l’homme et des peuples consacrés par la Charte, dont les droits de se défendre. Ces droits se manifestent au travers du contradictoire. La Cour veille donc au contradictoire en contrôlant son respect par les juridictions nationales et en procédant à son interprétation extensive.

2.1 Le contrôle du respect de l’article 7(1)(c) de la Charte

Les juridictions nationales peuvent être considérées comme les organes longa manus de la Cour. Elles sont seules compétentes, en raison du principe de subsidiarité, de mettre en œuvre les droits découlant de la Charte. La Cour quant à elle se contente de contrôler le respect par lesdites juridictions de ces droits, dont le droit à la défense et celui de se faire assister par un défenseur de son choix.

2.1.1 Le contrôle du respect du droit à la défense

Le droit à la défense relève des «droits que possède toute personne pour se protéger de la menace que constitue pour elle un procès».27 Il s’agit en réalité d’un droit subjectif, garanti à l’individu. Cette affirmation est d’autant plus avérée que le contentieux devant la Cour est généralement un contentieux qui oppose deux sujets de droit international inégaux: l’individu, sujet immédiat de droit international28 à l’Etat, qui en est le sujet primaire dévolu de la souveraineté.29

Toutefois, ce rapport déséquilibré trouve ses limites dans le contentieux international des droits de l’homme, car l’individu y bénéficie de certaines garanties, dont le droit à la défense. Dans cette optique, trouve toute sa place la thèse selon laquelle «permettre la défense, le contradictoire, c’est organiser la possibilité pour un accusé, un individu, de résister à la puissance répressive de l’Etat ou d’une collectivité. Il s’agit ici de garantir un droit individuel à la personne poursuivie face à la puissance poursuivante».30 Cette considération est confortée par la jurisprudence de la Cour.

Dans sa jurisprudence, la Cour définit le droit à la défense et en énumère les caractéristiques. Elle estime que ce droit est fonction de certains actes préparatoires. Il implique la possibilité pour l’accusé d’accéder à certaines déclarations et de réunir des preuves et que ses moyens de défense soit considérés.

D’abord, le droit d’accéder à certaines déclarations à charge peut être considéré comme un acte préparatoire du droit à la défense. Il est corroboré par l’affaire Thobias Mang’ara Mango et Shukurani Masegenya Mango c. Tanzanie. Les faits à l’origine de cette affaire peuvent être résumés ainsi: les requérants sont reconnus coupables et condamnés à une peine de réclusion de 30 ans pour vol à main armé par les juridictions tanzaniennes.31 Après plusieurs recours au terme desquels ils ont été déboutés,32 ils saisissent la Cour en alléguant qu’ils ont notamment été privés de leur droit d’être entendu.33 En réponse à cette allégation, la Cour rappelle que conformément à l’article 7(1)(c) de la Charte, toute personne a droit à la défense, en matière pénale, ce droit implique que les accusés soient rapidement informés des éléments de preuve qui soutiennent les accusations portées contre eux afin de leur permettre de préparer leur défense.34 Par conséquent, elle considère que

le refus opposé aux requérants d’accéder à certaines déclarations du témoin à charge et le retard dans la communication de celles-ci constituent une violation de l’article 7(1)(c) de la Charte par l’Etat défendeur.35

Cette position de la Cour est constante. L’examen de l’affaire opposant la Commission pour le compte d’un citoyen libyen à son Etat en est l’illustration. La Cour, en examinant l’allégation de la requérante, basée sur le droit à ce que sa cause soit entendue, relève que «le droit à la défense implique également (...) le droit de communiquer avec son avocat et le droit d’accès aux pièces nécessaires à la préparation de sa défense». 36

Ensuite, le droit à la défense implique la possibilité pour l’accusé de réunir des preuves. Celles-ci sont des éléments utilisés pour soutenir une prétention.37 Cette caractéristique du droit à la défense, corollaire du contradictoire, est inhérent au système accusatoire. Dans ce système, les preuves doivent être rapportées et discutées par les parties.38 C’est donc à bon droit que la Cour la considère comme un élément déterminant du droit à la défense. A titre illustratif, l’on peut mentionner l’affaire Sébastien Germain Ajavon c. Bénin dans laquelle la Cour soutient que

(...) l’exigence du droit de se défendre implique la possibilité pour l’accusé de proposer des preuves contraires à celles invoquées par l’accusation, d’interroger les témoins à charge ou de citer ses témoins.39

Elle conclut que «l’enquête telle qu’elle a été menée n’a pas permis au Requérant d’organiser sa défense».40

En définitive, l’article 7 de la Charte contient «un florilège de droits particuliers qui se déclinent tout au long du procès et dont il serait vain de vouloir épuiser la liste».41  L’on convient donc du «faible degré d’élaboration»42 de l’article 7 de la Charte. Aussi, le juge contrôle le respect du droit de se faire défendre.

2.1.2 Le contrôle du respect du droit de se faire défendre

Assurer sa propre défense n’est pas aisé pour une victime, tant le procès est

fondamentalement un combat. Ceux qui le pratique utilisent pour vaincre les armes pacifiques mais percutantes de la preuve, de l’argumentation et de l’éloquence dans une confrontation qui trouve son paroxysme dans les plaidoiries. 43

Le droit de se faire défendre peut être appréhendé comme la prérogative reconnue à une personne accusée ou poursuivie de voir sa défense être assurée par un professionnel, «les notables de la robe».44 C’est un droit fondamental que les juridictions nationales sont tenues de respecter. Cette assertion peut être confortée par la jurisprudence de la Cour. Dans l’affaire Sébastien Germain Ajavon c. Bénin, elle considère que toute limite à son exercice doit répondre à une exigence de nécessité.45

La Cour considère que le droit de se faire assister par un défenseur de son choix est un droit d’exercice obligatoire ce, que l’accusé soit absent à l’instance et a fortiori en considération des charges retenues contre lui.

L’absence à l’instance d’une personne poursuivie ne saurait la priver de son droit de se faire assister par un défenseur. Cette assertion, au-delà du problème de la vérité qu’elle résout,46 justifie le fait que c’est un droit naturel et trouve son fondement dans le droit canonique. Les Ecritures Saintes rapportent que même «Dieu ne condamne pas sans entendre».47 A l’image du «juge divin», le respect du droit d’être entendu par le «juge humain»48 est un moyen par lequel ce dernier «s’efforce d’accéder au mystère de la divinité».49 Cet exercice du juge régional des droits de l’homme est perceptible dans l’affaire Sébastien Germain Ajavon c. Bénin précitée. Dans cette affaire, le requérant allègue la violation notamment du droit de se faire assister par un conseil garanti par l’article 7(1)(c) de la Charte.50 En effet, il soutient que

en matière correctionnelle, le prévenu peut demander à être jugé en son absence en étant représenté par son avocat ou par un avocat commis d’office. (...) tant en matière correctionnelle qu’en matière criminelle (...) le tribunal et les Cours d’assises sont tenus d’entendre l’avocat qui se présente pour assurer la défense du prévenu (...); qu’en l’espèce (...) il a présenté ses excuses et a fait valoir qu’il n’entendait pas comparaître.51

Pourtant, en dépit de sa notification, les juridictions ont refusé la constitution de ses avocats au motif que l’accusé devait au préalable être inculpé.52 Par contre, l’Etat défendeur quant à lui soutient que devant la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (CRIET), le requérant en décidant de ne pas comparaître, ne remplissait pas les conditions pour se faire représenter par un conseil en son absence.53 Pour trancher cette question de la représentation d’un accusé par un conseil, la Cour pose un principe, en ces termes:

le droit d’être représenté par un avocat dont la finalité est d’assurer le caractère contradictoire revêt un caractère pratique et effectif de sorte que son exercice laisse la latitude au prévenu de comparaître personnellement ou de se faire représenter. Toute limite à l’exercice de ce droit doit répondre à une exigence de nécessité.54

Par conséquent, elle estime que «le défaut de comparution d’un accusé dûment convoqué ne saurait le priver de son droit d’être représenté par un avocat».55 Il en ressort que le droit de se faire défendre est un droit inhérent à un accusé.

De ce qui précède, l’on convient avec la doctrine que

L’article 7, bien qu’étant d’importance cardinale, est si riche qu’il cache, dans les replis de ses phrases, des questions épineuses. D’où les raisons d’espérer qu’une excellente interprétation du texte sera faite par la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples. 56

2.2 L’interprétation prétorienne extensive de l’article 7(1)(c) de la Charte

La Cour peut être considérée comme l’ «interprète authentique-autorité»57 de la Charte et des autres instruments des droits de l’homme ratifiés par les Etats. Dans l’exercice de son office, le juge procède à une interprétation extensive du droit à la défense et de celui de se faire défendre.

2.2.1 L’interprétation extensive du droit à la défense

Le droit à la défense, tel qu’il ressort de l’article 7(1)(c) de la Charte ne met pas en exergue toutes ses potentialités. Ce constat n’est pas surprenant d’autant plus que l’on reconnait le caractère général des conventions qui ne peuvent pas mentionner, de façon expresse, tous les cas particuliers.58 D’où l’intérêt pour le juge de procéder à l’interprétation de la norme considérée. En effet, loin d’être une simple «opération mécanique ou purement logique d’application de la loi»,59 l’application d’une règle impose le passage du général au particulier.60 Cette assertion va être éprouvée par un examen empirique de la jurisprudence de la Cour.

Dans l’affaire Thobias Mang’ara Mango et Shukurani Masegenya Mango c. Tanzanie, dont les faits sont déjà relevés supra, les requérants soutiennent notamment que les juridictions tanzaniennes ont poursuivi leur procès en dépit du fait qu’ils n’eussent reçu communication de certaines dépositions et même celles qui ont été communiquées, «leur ont été remises avec un retard excessif».61 Le droit de se défendre ne se réduit pas à la possibilité accordée à l’accusé d’assurer sa défense. Son exercice effectif est subordonné à la communication prompte des documents nécessaire à sa préparation. Dans cette perspective et en réponse à l’allégation des requérants, la Cour considère que

le refus opposé aux requérants d’accéder à certaines déclarations du témoin à charge et le retard dans la communication de celles-ci constituent une violation de l’article 7(1)(c) de la Charte par l’Etat défendeur.62

Il ne suffit donc pas pour les juridictions nationales de communiquer à l’accusé les documents nécessaires à la préparation de sa défense, mais elles doivent le faire avec diligence. Le retard dans la communication des pièces à la partie poursuivie pourrait être considéré comme une manœuvre dilatoire en faveur de la partie poursuivante. Cette position de la Cour avait déjà été affirmée dans un autre arrêt, l’affaire opposant Mohamed Abubakari c. Tanzanie.63

Dans cette affaire, le conseil du requérant allègue, au cours de l’audience publique, avoir plus d’une fois requis la production, devant les juridictions nationales, de la copie des actes d’accusation et des déclarations de témoins, pour être en mesure de se défendre, mais sans succès. Il a indiqué au surplus avoir dû attendre 50 jours pour recevoir la déclaration d’un seul témoin. Cinq mois plus tard, le Procureur avait admis n’avoir pu apporter les déclarations d’autres témoins faute du matériel de bureau.64 La Cour rappelle qu’aux termes de l’article 7(1) toute personne a le droit de se défendre. L’exercice effectif de ce droit implique notamment une communication diligente des pièces. Cette exigence n’est pas mise en évidence par la lettre de l’article 7. L’on peut convenir avec la doctrine du «faible degré d’élaboration de l’article 7 de la Charte»,65 considéré comme la norme en matière de contradictoire. Or,  «juger n’est nullement l’application mécanique de normes juridiques»66 et «toutes normes juridiques appellent une interprétation en tant qu’elles doivent être appliquées».67 L’article 7(1)(c) n’échappe pas à cette conception kelsenienne d’application des normes. Toutefois, l’interprétation littérale de cette disposition ne permet pas d’apprécier effectivement la violation du droit de se défendre alléguée dans l’affaire sous examen. Pour se faire, la Cour, qui a compétence en vertu de l’article 3(1) de son Protocole pour interpréter les dispositions de la Charte, recourt à la technique de la «combinaison des sources» ou le «cosmopolitisme normatif»68 pour interpréter l’article 7(1)(c). Partant, elle se réfère au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) en considérant que, conformément à l’article 14(3) du Pacte, toute personne accusée d’une infraction pénale a droit notamment à «être informée, dans le plus court délai (...) et de façon détaillée de la nature et des motifs d’accusation portée contre elle (...)». Il est utile de rappeler qu’en vertu de l’article 7 du Protocole de la Charte, le PIDCP rentre dans le cadre du droit applicable par la Cour. Aussi, pour conforter sa décision, elle se réfère à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (Cour européenne) et de la Cour interaméricaine des droits de l’homme (Cour interaméricaine) pour soutenir que

le droit pour l’accusé d’être complètement informé des charges portées à son encontre est un corollaire de son droit à la défense, et au-delà, un élément essentiel de son droit à un procès équitable.69

Il n’est pas inutile de noter qu’un tel recours à la jurisprudence de la Cour européenne et de la Cour interaméricaine participe de la «complémentarité des systèmes juridictionnels de protection des droits de l’homme».70

En définitive, et sur la question en discussion relativement à l’affaire Abubakari, la Cour africaine conclut que  

les autorités judiciaires n’ayant pas agi avec la diligence due pour communiquer en temps voulu au requérant toutes les pièces de l’accusation, l’Etat défendeur a violé son droit à la défense, tel que garanti par les articles 7(1)(c) de la Charte et 14(3) a et b du Pacte.71

Tout autant que le droit de se défendre, le droit de se faire défendre fait l’objet d’une interprétation extensive.

2.2.2 L’interprétation extensive du droit de se faire défendre

L’on ne peut appliquer une règle sans l’interpréter au préalable, a fortiori lorsqu’elle est formulée de façon laconique. Il en est ainsi du droit de se faire défendre. La Cour ne peut donc pas, en raison des spécificités qui caractérisent chaque affaire, appliquer ce droit dans sa lettre, car «la fonction de juger implique nécessairement celle d’interpréter». Ainsi, dans son œuvre interprétative, elle procède à l’éclaircissement des zones ombrageuses du droit de se faire défendre. Cette opération est perceptible dans différents arrêts, dont la casuistique permet de relever deux considérations: le droit de se faire défendre consiste en une assistance obligatoire et sans frais et il doit être exercé à toutes les étapes de la procédure.

Premièrement, le droit de se faire assister par un défenseur de son choix implique une assistance juridique obligatoire et sans frais. Le caractère obligatoire de cette assistance se justifie en que ce droit est inhérent à toute personne poursuivie ou accusée, qu’elle en fasse la demande ou pas, a fortiori lorsqu’elle est indigente. Le caractère gracieux quant à lui se justifie par le fait qu’il s’agit d’un droit dont la jouissance ne peut être réservée à une certaine couche de la société. L’on peut, à titre illustratif, se référer à l’affaire Magid Goa alias Vedastus c. Tanzanie.72

Dans cette affaire le requérant, qui assure personnellement sa défense, soutient que l’Etat défendeur a violé les dispositions de l’article 7(1)(c) de la Charte pour ne lui avoir pas fourni une assistance judiciaire pendant son procès, aussi bien en première instance qu’en appel.73 En examinant cette allégation, la Cour affirme:

l’article 7(1)(c) de la Charte ne prévoit pas explicitement le droit à une assistance judiciaire gratuite. Toutefois, la Cour de céans a interprété ces dispositions à la lumière de l’article 14(3)(d) du PIDCP et conclut que le droit à la défense comprend celui de bénéficier d’une assistance judiciaire gratuite. (...) toute personne accusée d’une infraction pénale a droit à une assistance judiciaire gratuite sans être obligé d’en faire la demande. 74

L’examen de cette décision permet de constater que la Cour ne se contente pas de la lettre de l’article 7(1)(c) de la Charte. Il tient compte de sa prérogative de recourir à d’autres sources du droit, à l’instar du PIDCP. Partant de cette technique de la combinaison des sources, elle procède à une interprétation pro homine du droit de se faire défendre. Elle reste constante dans cette démarche, car celle-ci était déjà perceptible dans un arrêt antérieur, en l’affaire Wilfred Onyango Ngani et 9 autres c. Tanzanie .75

De même dans l’arrêt déjà examiné, en l’affaire Mohamed Abubakari c. Tanzanie, la Cour observe que l’article 7 de la Charte ne traite pas de façon spécifique de la question de l’octroi d’une assistance juridique gratuite. Par contre,

l’article 7 de la Charte, lu conjointement avec l’article 14 du PIDCP, garantit le droit de toute personne accusée d’une infraction pénale, chaque fois que l’intérêt de la justice l’exige, de se voir attribué d’office un défenseur, sans frais, si elle n’a pas les moyens de le rémunérer.76

Cette technique d’interprétation extensive du droit de se faire défendre est reprise dans les arrêts du 26 juin 2020, en l’affaire Andrew Ambrose Cheusi c. Tanzanie77 et en l’affaire Kalebi Elisamehe c. Tanzanie.78

Deuxièmement, le droit de se faire assister par un défenseur doit être exercé à toutes les phases de la procédure judiciaire. Cette affirmation découle de l’interprétation extensive de la Cour notamment dans l’affaire Sébastien Germain Ajavon c. Bénin. Dans sa requête introductive d’instance, le requérant allègue devant la Cour la violation par les juridictions nationales de son droit à la défense, précisément celui de se faire représenter par un conseil.79 Dans son examen au fond, la Cour détermine la portée du droit à la défense en affirmant que

(...) le domaine de l’article 7(1)(c) s’applique à toutes les étapes de la procédure d’une affaire depuis les enquêtes préliminaires jusqu’au prononcé du jugement et ne se limite pas uniquement au déroulement des audiences.80

En définitive, la Cour, par son œuvre jurisprudentielle, clarifie et conforte l’acception des dispositions de l’article 7(1)(c) de la Charte. Partant, l’on partage l’assertion selon laquelle, «la spécificité de la protection internationale des droits de l’homme induit une conception extensive de l’office du juge des droits de l’homme».81 Néanmoins, le juge doit non seulement faire respecter le contradictoire, mais aussi le respecter lui-même.

3 LE CONTRADICTOIRE: UNE MODALITE D’ORGANISATION REGIONALE DU PROCES

Devant la Cour, les requêtes sont examinées de façon contradictoire, ainsi qu’il ressort de l’article 26 de son Protocole. Le contradictoire est par conséquent une modalité d’organisation africaine du procès. Il est mis en œuvre dans les deux phases de la procédure, à savoir la phase écrite et la phase orale.

3.1 La mise en œuvre du contradictoire dans la procédure écrite

La mise en œuvre du contradictoire dans la procédure écrite est perceptible dans l’examen de la jurisprudence de la Cour. Cet examen permet de relever que le contradictoire s’y manifeste par un échange obligatoire des écritures dont le respect conduit à une prorogation nécessaire des délais.

3.1.1 Un échange obligatoire des écritures

Dans la phase écrite, le contradictoire se manifeste par des «échanges écrits»,82 c’est-à-dire, par le «fait de s’exprimer tour à tour (...) par écrit».83 L’on peut donc considérer qu’il a pour point de départ la notification par l’Etat défendeur à la Cour de sa réponse à la requête introductive d’instance.

Toutefois, l’on ne devrait pas se limiter au constat formel d’un échange des écritures. Faudrait-il encore, pour apprécier le caractère contradictoire de la procédure écrite, opérer un constat substantiel. En d’autres termes, il faut procéder à l’identification du contenu desdites écritures. La Cour se soumet à cet exercice dans plusieurs arrêts. L’arrêt du 26 juin 2020, en l’affaire Fidèle Mulindahabi c. Rwanda et l’arrêt du 3 juin 2016, en l’affaire Commission africaine des droits de l’homme et des peuples c. Libye sont assez illustratifs à cet égard.

Dans la première affaire, la procédure écrite peut être retracée ainsi: la Cour est saisie, en date du 24 février 2017, d’une requête déposée par Fidèle Mulindahabi . Cette requête est notifiée à la partie adverse le 31 mars 2017. 84 Le 9 mai 2017, le greffe reçoit une lettre de l’Etat contre lequel la requête est introduite dans laquelle il rappelle à la Cour le retrait de sa déclaration faite en vertu de l’article 34(6) du Protocole et l’informe qu’il ne participerait à aucune procédure. Il demande à la Cour par voie de conséquence de s’abstenir de lui communiquer toute information relative aux affaires le concernant.85 Le 22 juin 2017, la Cour accuse réception de la correspondance du Rwanda et l’informe qu’elle lui communiquerait toutes les pièces de procédure.86 Après plusieurs prorogations de délai87 en vue de permettre au Rwanda de répondre aux différents actes de procédure et constatant que le Rwanda ne répond pas à la requête, la Cour clôt la procédure. L’examen de la procédure de cet arrêt est riche d’enseignements. Dans le cadre limité de la question de l’identification du contenu des écritures, l’on observe qu’il y a formellement une «communication» entre la Cour et le Rwanda. Toutefois, cet échange écrit ne suffit pas, car la contradiction «est une véritable réponse qui prend position sur les éléments fournis dans le mémoire en demande».88 En l’espèce, le contenu des écritures du Rwanda révèle le refus de sa participation à une procédure devant la Cour.

Dans la seconde affaire, Commission africaine des droits de l’homme et des peuples c. Libye, l’on peut retenir ce qui suit: le 31 janvier 2013, le greffe reçoit une requête introductive d’instance dirigée contre la Libye.89 Par lettre du 12 mars 2013 adressée au Ministère des affaires étrangères de la Libye avec copie à son ambassade à Addis-Abeba, le greffe communique au défendeur la requête et l’invite à y répondre dans un délai de 60 jours.90 En application des articles 27(2) du Protocole et 51(1) du Règlement intérieur, la Cour rend une ordonnance portant mesures provisoires suo motu.91 Celle-ci est communiquée aux parties92 et le défendeur devait déposer son rapport de mise en œuvre desdites mesures. Le 29 mai 2013, le défendeur adresse au Conseiller juridique de la Commission de l’Union africaine une note verbale.93 Après une transmission de ladite note à la partie requérante afin qu’elle fasse ses observations, la procédure a suivi son cours. Quelque mois plus tard, par note verbale du 16 mai 2014, l’Etat défendeur déclare soumettre à la Cour un rapport sur la mise en œuvre de l’Ordonnance du 15 mars 2013.94 Toutefois, lors de sa 33e session ordinaire tenue du 26 mai au 13 juin 2014, la Cour examine ladite «note verbale» et conclut qu’elle ne constitue pas le rapport demandée.95 Aussi, le greffe confirme que l’Etat défendeur n’a répondu ni à la requête sur le fond, ni à celle interlocutoire.96 En bref, l’on retient de cette procédure que l’échange de documents intervenu entre les deux parties n’est pas la manifestation du contradictoire, dans la mesure où le document transmis par la Libye, n’est nullement une réponse aux actes de procédure. La volonté de la Cour de respecter le contradictoire conduit inévitablement à une prorogation des délais de la procédure.

3.1.2 Une prorogation nécessaire des délais

L’article 37 du Règlement intérieur de la Cour détermine le délai dont dispose un Etat pour répondre à la requête. Il dispose: «L’Etat défendeur répond à la requête dont il fait l’objet dans un délai de soixante (60) jours qui pourrait être prorogé par la Cour, s’il y a lieu». Ce délai, qui est dorénavant de 90 jours, conformément à la règle 44 du Règlement du 25 septembre 2020, est accordé à l’Etat défendeur pour apporter sa réponse à une requête, c’est-à-dire, à «un acte de procédure par lequel une personne introduit une instance devant un organe quasi-judiciaire»97 ou judiciaire. Le nombre de prorogation dont peut bénéficier une partie n’est donc pas déterminé, tant «la décision de prorogation relève de l’appréciation discrétionnaire de la Cour».98 Cette disposition des instructions de procédure est effectivement observée par la Cour dans sa jurisprudence. L’examen de cette dernière révèle, qu’en vue de respecter le contradictoire dans la procédure écrite, le juge procède au tant de fois à une prorogation des délais. Cette prorogation influe doublement sur la procédure: elle prolonge sa durée et conduit même le juge à la rouvrir lorsqu’elle était déjà close.

Premièrement, la prorogation des délais de la procédure est perceptible notamment dans l’affaire Lucien Ikili Rashidi c. Tanzanie du 28 mars 2019. Dans cette affaire, la requête introductive d’instance est déposée le 19 février 201599 et transmise à la Tanzanie le 9 juin 2015.100 Cette dernière dépose sa réponse à la requête le 9 septembre 2015 et copie est transmise au requérant.101 Toutefois, l’on constate que la réponse de l’Etat défendeur à la requête introductive d’instance est déposée, au-delà du délai règlementaire, sans prorogation de la Cour, 90 jours après. Partant de cette constatation, le requérant sollicite de la Cour un arrêt par défaut au motif que la réponse de l’Etat défendeur est déposée au-delà des soixante jours. Cette réponse de l’Etat défendeur appelle éventuellement une réplique, c’est-à-dire, «une réponse à la réponse».102 Cependant, en raison de certaines difficultés de communication entre le requérant et son Conseil, la Cour proroge plusieurs fois le délai de dépôt de la réplique du requérant. Elle est finalement déposée huit mois plus tard, le 28 juillet 2016 et copie est transmise à l’Etat défendeur pour répondre aux arguments supplémentaires du requérant.103 Le 9 août 2016, la Cour rappelle l’Etat défendeur sur le dépôt de sa réponse aux arguments supplémentaires du requérant. Après plusieurs prorogations de délai, l’Etat défendeur dépose sa duplique le 27 avril 2017, soit neuf mois après. Cette duplique est transmise au requérant qui doit y répondre dans un délai discrétionnairement fixé à 15 jours. Le requérant verse au dossier plusieurs documents additionnels à l’appui de sa requête et ceux-ci sont communiqués à l’Etat défendeur.104 La procédure est close le 15 novembre 2017. Au terme de cette longue procédure, l’on retient que les échanges d’écritures, manifestation du contradictoire, peuvent durer aussi longtemps que de nouveaux éléments sont versés au dossier. Cette longueur de la procédure écrite pose le problème de la « nécessité de traiter un contentieux de masse dans des délais qui demeureraient raisonnable et en préservant la qualité de la jurisprudence ».105

Le respect du contradictoire a donc pour effet de prolonger la durée de la procédure, en l’espèce trois ans. L’on peut aussi mentionner l’affaire Actions pour la Protection des Droits de l’Homme (APDH) c. Côte d’Ivoire, dans laquelle l’Etat défendeur dépose son contre-mémoire au-delà des délais impartis et la Cour «a, dans l’intérêt de la justice décidé de l’accepter, bien que déposé hors délai».106 L’intérêt de la justice dont il est question n’est que le respect du contradictoire.

Néanmoins, l’on ne doit pas perdre de vue que le respect par la Cour du contradictoire ne devrait pas conduire les parties à outrepasser les délais impartis car, de la même manière qu’elle recourt à son pouvoir discrétionnaire pour proroger les délais, la Cour peut aussi discrétionnairement décider de ne pas recevoir une écriture soumise hors délai. Il en est ainsi, à titre illustratif, dans son arrêt rendu le 28 mars 2019, en l’affaire Collectif des anciens travailleurs du laboratoire ALS c. Mali.107 Ce refus ne constitue pas pour autant l’inobservation du contradictoire.

Deuxièmement, l’assertion selon laquelle la volonté manifeste de la Cour de respecter le contradictoire conduit à la réouverture d’une procédure écrite déjà close peut être étayée par l’affaire Ngunza Viking (Babu Seya) et Johnson Nguza (Papi Kocha) c. Tanzanie du 8 mai 2020. Dans cette affaire , la Cour doit se prononcer sur les réparations. Le 27 novembre 2018, le greffe transmet aux parties une copie certifiée conforme de l’arrêt sur le fond.108 Le 23 août 2018, les requérants déposent leurs conclusions sur les réparations et sont transmises à l’Etat défendeur le 24 août 2018. Le 18 mars 2020, l’Etat défendeur dépose son mémoire en réponse aux conclusions des requérants sur les réparations.109 La procédure écrite étant close le 16 décembre 2019, elle est à nouveau ouverte le 10 février 2020 à la demande de l’Etat défendeur, datée du 9 janvier 2020, aux fins de prorogation de délai pour déposer ses observations sur les réparations. L’Etat défendeur a déposé son mémoire en réponse le 18 mars 2020.110 L’on observe qu’une fois close, la procédure écrite peut toujours être rouverte à la demande d’une partie et après une autorisation de la Cour.

Le contradictoire n’est pas seulement observée dans la procédure écrite. Elle l’est aussi dans la phase orale.

3.2 La mise en œuvre du contradictoire dans la phase orale

Dans la phase orale, la mise en œuvre du contradictoire requiert la présence des parties à l’instance. Ce n’est que lorsqu’elles sont représentées, que la Cour peut effectivement mettre en œuvre le contradictoire.

3.2.1 Une mise en œuvre subordonnée à la présence des parties à l’instance

Le contradictoire ne peut être mis en œuvre que si les deux parties sont représentées. Cette assertion est d’autant plus soutenable que «(...) le procès est essentiellement un duel entre les parties, le contradictoire y devient ainsi d’autant plus central qu’il est l’image même du procès et sa transcription directe».111 Bien qu’en vertu de l’article 26 du Protocole, la Cour soit tenue de procéder à un examen contradictoire des requêtes, cette obligation n’est pas absolue. Son Règlement intérieur relativise cet «examen contradictoire» en envisageant l’hypothèse de la non-comparution d’une partie. Partant, la Cour devrait, à la demande de la partie comparante, tirer les conséquences juridiques de cette non-comparution en rendant un jugement par défaut, tel qu’il ressort de l’article 55 du même Règlement. L’on peut inférer de ce qui précède que la non-comparution n’entraîne pas systématiquement la suspension de la procédure. Toutefois, ce droit matériel de la juridiction régionale des droits l’homme et des peuples peut être éprouvé par l’examen empirique de sa jurisprudence. Une revue des arrêts de la Cour permet de constater que dans son examen des affaires dans lesquelles une seule partie a comparu, elle n’est pas restée constante. Tantôt, elle a procédé à la suspension de la procédure, tantôt elle a rendu, à la demande de la partie comparante, un jugement par défaut.

D’une part, la non-comparution d’une partie à l’instance a conduit la Cour à suspendre la procédure. Ce constat découle de l’examen de l’affaire opposant Ingabire Victoire Umuhoza, citoyenne rwandaise au Rwanda. Dans cette affaire, la requérante allègue devant la Cour, la violation de certains droits consacrés par la DUDH, le PIDCP et la Charte tout au long de son procès devant les juridictions nationales.112 Devant la Cour, les deux parties ont participé aux actes de la procédure écrite. Par lettre du 4 janvier 2016, le greffe informe les parties de la tenue d’une audience publique le 4 mars 2016.113 Trois jours avant la tenue de l’audience, l’Etat défendeur notifie à la Cour le dépôt de l’instrument de retrait de sa déclaration faite en vertu de l’article 34(6) du Protocole. Dans cette lettre, il précise ce qui suit:

La République du Rwanda demandait qu’après le dépôt dudit instrument de retrait, la Cour suspende toutes les affaires concernant le Rwanda jusqu’à ce qu’une révision de la déclaration soit faite et notifiée à la Cour en temps opportun. 114

Après plusieurs demandes, dont le report de la date de l’audience sollicité par les conseils de la requérante, le greffe informe les parties que l’audience publique aurait lieu, comme prévu.115 Il parait utile de préciser que l’Etat défendeur n’a soulevé aucune exception d’incompétence de la Cour et que l’audience du 4 mars porterait sur l’examen de l’affaire au fond. Lors de cette audience, l’Etat défendeur ne comparaît pas.116 Néanmoins, la Cour entend les représentants de la requérante sur les questions de procédure.117 Ceux-ci ont voulu, sans succès, présenter leurs arguments sur la question du retrait par l’Etat défendeur de sa déclaration faite en vertu de l’article 34(6) du Protocole.118 Cette audience publique est restée sans suite, car la Cour rend, deux semaines après, une ordonnance dans laquelle elle suspend de facto la procédure.

Cette suspension implicite de la procédure est perceptible dans l’analyse de ladite ordonnance. Le juge Fatsah Ouguergouz relève dans son opinion dissidente y jointe que

l’Etat défendeur (...) sans qu’il ait eu à comparaître à l’audience et à plaider quoi que ce soit, a obtenu de la Cour une suspension de l’examen de la recevabilité de la requête et du fond de l’affaire. La Cour (...) décide donc de différer sa décision (...) semblant ainsi vouloir sauvegarder le principe du contradictoire en faveur de l’Etat défendeur (...). 119

Si l’on peut considérer que la suspension de l’examen de cette affaire par la Cour serait justifiée par le souci de «ménager le principe du contradictoire»,120 cette thèse est relative dans la mesure où ladite affaire n’a pas fait jurisprudence.

D’autre part, le jugement étant la dernière étape du procès, le défaut peut être dû à deux raisons. La doctrine distingue le «défaut faute de comparaître» du «défaut faute de conclure».121 Dans la première hypothèse, la partie au différend fait le choix de ne pas être présent à l’instance. Dans la seconde hypothèse, la partie, bien que comparante, fait le choix de ne pas faire valoir ses moyens. La Cour n’a pas encore expérimenté cette dernière hypothèse. Dans les deux situations, le jugement par défaut ne peut être rendu qu’à la réunion de trois conditions cumulatives. Conformément à l’article 55(2) du Règlement de la Cour, il s’agit de la vérification de sa compétence, de la recevabilité de la requête et du caractère fondé en fait et en droit des conclusions de la partie comparante. Aux nombres des jugements par défaut rendus par la Cour, l’on peut mentionner notamment les affaires Fidèle Mulindahabi c. Rwanda, du 26 juin 2020, Rutabingwa Chrysanthe c. Rwanda, arrêt du 4 juillet 2019, révision de l’arrêt du 11 mai 2018 et l’affaire Commission africaine c. Libye, rendue le 3 juin 2016.

La particularité du jugement par défaut, faute de comparaître, réside dans la présence d’une seule partie à l’instance. Partant, le contradictoire ne peut y être mis en œuvre dans la mesure où la contradiction suppose la présence de deux parties à l’instance. Dans toutes ces affaires, le jugement est l’aboutissement d’un échange entre la partie requérante et la Cour.

Le contradictoire étant considéré comme le «(...) symbole du droit d’être pris en considération (...)»,122 cette prise en considération ne peut être effective que lorsque les parties sont représentées à l’instance.

3.2.2 Une mise en œuvre effective entre les parties à l’instance

Le contradictoire se manifeste par la prise de parole des parties pour faire valoir leurs prétentions. Il est perçu comme la faculté accordée à une partie de faire valoir ses arguments. Le choix du vocable «faculté» est justifié en ce que le contradictoire ne garantit pas une contradiction effective. L’on peut considérer qu’il s’agit d’un droit substantiel d’exercice facultatif. En ce sens, la doctrine relève ce qui suit:

Le principe du contradictoire ne garantit pas la contradiction effective. Si les parties disposent de la possibilité de discuter les arguments développés devant le juge, il importe peu qu’elles ne saisissent pas cette opportunité, l’essentiel étant qu’elles aient été  «en mesure de le faire».123

Cette position de la doctrine peut être confortée par la jurisprudence de la Cour, notamment: l’arrêt du 26 juin 2020, en l’affaire Andrew Ambrose Cheusi c. Tanzanie et l’arrêt du 28 novembre 2019, en l’affaire Ally Rajabu et autres c. Tanzanie.

Dans la première affaire, opposant Andrew Ambrose Cheusi à la Tanzanie, le requérant allègue plusieurs violations de droits dont celles relatives à la possibilité de présenter et défendre un alibi, du droit à l’égalité devant la loi et à une égale protection de la loi et du droit de ne pas être soumis à des traitements cruels, inhumains ou dégradants. La Cour procède à un examen contradictoire de ces différentes allégations, en accordant aux parties, à tour de rôle, le droit de faire valoir leurs prétentions. S’agissant de la première allégation, le requérant

affirme avoir informé le Tribunal de première instance de son intention de citer un témoin afin d’invoquer un alibi, ce qui lui a été refusé. Il affirme que, de ce fait, il a été privé de son droit à un procès équitable (...).124

L’Etat défendeur quant à lui n’a pas répondu à cette allégation.125 S’agissant des allégations de la violation du droit à l’égalité devant la loi et à une égale protection de la loi, le requérant soutient qu’il a été:

(...) isolé durant la procédure d’instruction et durant l’examen de l’affaire en appel, en violation du principe d’égalité devant la loi. Il soutient que de ce fait, les droits reconnus à l’article 3(1)(2) de la Charte ont été violés.126 

L’Etat défendeur quant à lui n’a pas répondu à ces allégations.127 Enfin, s’agissant de l’allégation de la violation du droit de ne pas être soumis à des traitements cruels, inhumains ou dégradants, le requérant affirme entre autre que

L’Etat défendeur a violé son droit de ne pas être soumis à des traitements cruels, inhumains ou dégradants, car il a été battu par les agents de l’Etat défendeur lors de sa première arrestation. Il affirme également avoir subi des intimidations et des tortures au poste de police durant l’enquête (...).128

A son tour, l’Etat défendeur n’a pas répondu à cette allégation.129  

Dans la deuxième affaire, Ally Rajabu et autres c. Tanzanie, le requérant allègue la violation des droits à la vie, à la dignité et la violation de l’article 1er de la Charte qui se rapporte à l’obligation des Etats membres de respecter et de mettre en œuvre les droits de l’homme et des peuples qui y sont consacrés. La particularité de cette affaire réside dans le fait que le silence de l’Etat défendeur face aux allégations des requérants est justifié par le fait qu’il avait déjà répondu à ces allégations dans le cadre d’une ordonnance de la Cour portant mesures provisoires. Par conséquent, la Cour, sans se contenter de relever que «l’Etat défendeur n’a pas répondu à cette allégation», rappelle les arguments pertinents de l’Etat défendeur soutenus dans un jugement antérieur (ordonnance) et en rapport avec l’allégation correspondante. A titre illustratif, relativement à la violation alléguée du droit à la vie, l’Etat défendeur n’a pas répondu aux arguments des requérants. Néanmoins, la Cour relève ce qui suit:

Dans sa réponse à l’ordonnance portant mesures provisoires rendue dans le cadre de la Requête en l’espèce, l’Etat défendeur a fait valoir que la disposition relative à la peine capitale dans sa législation est conforme aux normes internationales, qui n’interdisent pas l’imposition de cette peine. 130

La Cour recourt au même procédé relativement au silence de l’Etat défendeur sur les violations alléguées du droit à la dignité131 et de l’article 1er de la Charte.132  

4 CONCLUSION

L’examen de la jurisprudence de la Cour permet d’affirmer qu’elle applique le contradictoire dans ses deux versants.

D’une part, elle contrôle effectivement le respect par les juridictions nationales du droit à la défense et celui de se faire assister par un défenseur de son choix. Ce contrôle conventionnel ne la place pas au rang d’un organe d’appel des décisions des juridictions nationales, ainsi qu’elle l’affirme dans l’affaire Ernest Francis Mtingwi c. Malawi.133 Le rôle joué par la Cour correspond bien à celui commun aux juridictions internationales, qui n’est pas de

juger la conventionalité des règles de droit interne mais de savoir si une mesure appliquée in casu au requérant est compatible ou non avec les droits que les conventions garantissent. Leurs contrôles s’inscrivent dans une dimension subjective et concrète.134

Toutefois, la Cour ne se contente pas de s’approprier de ce principe universel. Elle recourt aussi au contradictoire comme modalité d’organisation du procès ce, dans les deux phases de la procédure: écrite et orale. Considéré sous ses deux versants, le contradictoire est respecté par la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples aussi bien en faveur du requérant que du défendeur.

 

 


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75. Wilfred Onyango Ngani et 9 autres c. Tanzanie 006/2013 arrêt 10 mars 2016 para 167.

76. Abubakari (n 63) para 138.

77. Andrew Ambrose Cheusi c. Tanzanie 004/2015 arrêt 26 juin 2020 para 105.

78. Kalebi Elisamehe c. Tanzanie 028/2015 arrêt 26 juin 2020 para 55.

79. Ajavon (n 39) para 142.

80. Ajavon (n 39) para 149.

81. Sudre (n 6) 254.

82. Santulli (n 13) 435.

83. Salmon (n 8) 407.

84. Fidèle Mulindahabi c. Rwanda 004/2017 arrêt 26 juin 2020 para 10.

85. Mulindahabi (n 84) para 11.

86. Mulindahabi (n 84) para 12.

87. Mulindahabi (n 84) paras 13-16.

88. Santulli (n 13) 435.

89. Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (n 36) para 12.

90. Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (n 36) para 13.

91. Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (n 36) para 15.

92. Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (n 36) para 16.

93. Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (n 36) para 19.

94. Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (n 36) para 27.

95. Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (n 36) para 28.

96. Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (n 36) para 32.

97. Salmon (n 8) 986.

98. Point 40 des Instructions de procédure de la Cour adoptée le 5 octobre 2012.

99. Lucien Ikili Rashidi c. Tanzanie 009/2015 (fond et réparations) 28 mars 2019 para 13.

100. Rashidi (n 99) para 14.

101. Rashidi (n 99) para 15.

102. Salmon (n 8) 977.

103. Rashidi (n 99) para 18.

104. Rashidi (n 99) para 19.

105. M-L Layus et F Simonetti ‘Procédure juridictionnelle: points communs et différences’ (2001) 96 Pouvoirs 85.

106. Actions pour la Protection des Droits de l’Homme c. Côte d’Ivoire 001/2014 arrêt 18 novembre 2016 para 26.

107. Collectif des anciens travailleurs du laboratoire ALS c. Mali 042/2016 (compétence et recevabilité) 28 mars 2019 para 10.

108. Ngunza Viking (Babu Seya) et Johnson Nguza (Papi Kocha) c. Tanzanie 006/2015 (réparations) 08 mai 2020 para 5.

109. Ngunza (n 107) para 6.

110. Ngunza (n 107) para 8.

111. Jouannet (n 15) 184.

112. Ces allégations n’étant pas mentionnées dans l’ordonnance rendue le 18 mars 2016, nous avons dû recourir par projection à la décision suivante: Ingabire Victoire Umuhoza c. Rwanda 003/2014 arrêt 24 novembre 2017 para 9.

113. Ingabire Victoire Umuhoza c. Rwanda 003/2014 (ordonnance) 18 mars 2016 para 6.  

114. Umuhoza (n 112) para 10.  

115. Umuhoza (n 112) para 11.  

116. Umuhoza (n 112) para 14.  

117. Umuhoza (n 112) para 15.  

118. Umuhoza (n 112) para 16.  

119. Umuhoza (Opinion dissidente du Juge Fatsah Ouguergouz) para 32.

120. H Werner ‘L’accès de l’individu à la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples’ (2016) 2 Revista Juridica 845.

121. Salmon (n 8) 744.

122. M-A Frisson-Roche ‘Le principe du contradictoire et les droits de la défense devant l’organe de règlement des différends de l’Organisation mondiale du commerce’ in HR Fabri et J-M Sorel (dirs) Le principe du contradictoire devant les juridictions internationales (n 15) 125.

123. L Sinopoli ‘Le principe du contradictoire et la Cour européenne des droits de l’homme’ in HR Ruiz Fabri et J-M Sorel (dirs) Le principe du contradictoire devant les juridictions internationales (n 15) 83.

124. Cheusi (n 77) para 95.

125. Cheusi (n 77) para 96.

126. Cheusi (n 77) para 125.

127. Cheusi (n 77) para 126.

128. Cheusi (n 77) para 131.

129. Cheusi (n 77) para 133.

130. Ally Rajabu et autres c. Tanzanie 007/2015 arrêt 28 novembre 2019 para 93.

131. Ally Rajabu et autres (n 129) para 116.

132. Ally Rajabu et autres (n 129) para 122.

133. Ernest Francis Mtingwi c. Malawi 001/2013 arrêt 15 mars 2013 para. 14.

134. M Afroukh ‘L’objectivation du contrôle juridictionnel’ in Joël Andriantsim- bazovina et al (dirs) La protection des droits de l’homme par les cours supranationales (n 6) 109.