Benjamin Kagina
Doctorant en droit à l’Université Laval (Canada), Master 2 en droit des libertés: mention Histoire, Théorie et Pratique des Droits de l’Homme à l’Université Grenoble Alpes.
Chargé de cours à l’Université Laval et Chercheur au Centre de recherche et d’études sur l’état de droit en Afrique
https://orcid.org/0000-0002-8974-8001
Edition: AHRY Volume 6
Pages: 361-374
Citation: B Kagina ‘Commentaire de l’arrêt de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples dans l’affaire Anudo Ochieng Anudo c. Tanzanie’ (2022) 6 Annuaire africain des droits de l’homme 361-374
http://doi.org/10.29053/2523-1367/2022/v6a16
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RÉSUMÉ:
La Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (Cour africaine) a rendu, dans l’affaire Anudo Ochieng Anudo c. République-Unie de Tanzanie, son premier arrêt relatif au droit de ne pas être privé arbitrairement de sa nationalité en lien avec le droit de ne pas être arbitrairement expulsé. La Cour a été saisie par la requête de M. Anudo Ochieng Anudo d’origine tanzanienne. Dans son arrêt, la Cour s’est fondée sur l’article 15(2) de la Déclaration universelle des droits de l’homme pour condamner l’Etat défendeur en prenant le contre-pied de la position constante de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (Commission africaine) dans des affaires similaires. Le présent commentaire vise à faire ressortir la particularité de cet arrêt en rapport avec la jurisprudence de la Commission africaine et de la Cour européenne des droits de l’homme. Il met également en relief la nécessité de finaliser l’adoption du Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux aspects spécifiques du droit à la nationalité et l’éradication de l’apatridie en Afrique pour une protection efficace de ce droit en Afrique.
TITLE AND ABSTRACT IN ENGLISH:
Commentary on the judgment of the African Court on Human and Peoples’ Rights in the case of Anudo Ochieng Anudo v United Republic of Tanzania
ABSTRACT:
The African Court on Human and Peoples’ Rights (African Court) handed down its first judgment on the right not to be arbitrarily deprived of one’s nationality in relation to the right not to be arbitrarily expelled in the case of Anudo Ochieng Anudo v Tanzania. The Court was seized by Anudo Ochieng Anudo, a Tanzanian national. In its judgment, the African Court relied on Article 15(2) of the Universal Declaration of Human Rights to find against the respondent State. The position of the Court is contrary to a consistent position of the African Commission on Human and Peoples’ Rights (African Commission) in similar cases. This commentary therefore aims to highlight the particularity of this judgment in relation to the jurisprudence of the African Commission and European courts. It emphasises the need to finalise the adoption of the Protocol to the African Charter on Human and Peoples’ Rights on the Specific Aspects of the Right to Nationality and the Eradication of Statelessness in Africa for effective protection of this right in Africa.
MOTS CLÉS: Droit à la nationalité, expulsion arbitraire, Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, étranger et national, preuve de la nationalité
2 L’apport de l’arrêt de la Cour africaine sur le droit à la nationalité
2.1 L’article 15(2) de la Déclaration universelle des droits de l’homme comme fondement du droit à la nationalité
2.2 La preuve de la nationalité incombe à celui ou celle qui la conteste
3 L’apport de l’arrêt de la Cour sur le droit de ne pas être arbitrairement expulsé
3.1 De la non pertinence du statut juridique du requérant dans le pays d’accueil face à une expulsion arbitraire
3.2 De l’interdiction d’expulser son propre national ou de faire de son national un étranger dans le seul but de l’expulser
1 INTRODUCTION
Par son arrêt du 22 mars 2018, la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (Cour africaine) a examiné, pour la première fois, la question du droit à la nationalité en rapport avec l’expulsion individuelle et avec le respect du droit à un procès équitable. Dans ses dispositifs, la Cour a conclu que «la République-Unie de Tanzanie avait violé le droit du requérant de ne pas être privé arbitrairement de sa nationalité; son droit de ne pas être arbitrairement expulsé ainsi que son droit à un procès équitable».1
En effet, cet arrêt concerne une affaire de privation de nationalité tanzanienne du sieur Anudo Ochieng Anudo par les autorités tanzaniennes, suivi de son expulsion pour séjour illégal en Tanzanie, le 1er septembre 2014. Le requérant avait des parents d’origine tanzanienne, dénommés respectivement Anudo Achok et Dorcas Rombo Jacop.
Ainsi, ce commentaire se propose de revenir sur les avancées qu’apporte cet arrêt dans la protection au niveau africain du droit à la nationalité ou du droit de ne pas en être privé arbitrairement, ainsi que du droit de ne pas être arbitrairement expulsé. Il reviendra aussi sur certaines positions plus ou moins discutables adoptées par la Cour dans l’analyse de ces droits. Pour atteindre notre objectif, nous avons choisi de comparer cette pratique de la Cour africaine avec principalement celle de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (Commission africaine) dans des affaires similaires.
2 L’APPORT DE L’ARRÊT DE LA COUR AFRICAINE SUR LE DROIT À LA NATIONALITÉ
L’analyse du droit à la nationalité ou tout du moins du droit de ne pas être privé arbitrairement de sa nationalité par la Cour africaine laisse apparaître à la fois des divergences et des convergences d’approches avec celles de la Commission africaine notamment.
Alors que dans des affaires similaires, la Commission africaine s’est appuyée sur les dispositions de l’article 5 de la Charte africaine, la Cour, elle, s’en écarte en prenant comme fondement l’article 15(2) de la Déclaration universelle des droits de l’homme (2.1). Elle a également innové en adoptant une analyse intéressante de la question de la charge de la preuve de la nationalité (2.2). L’analyse de ce point se distingue de la littérature existante2 en ce sens qu’il insiste davantage sur la charge de la preuve de la nationalité ainsi que sur le choix par la Cour de la Déclaration universelle des droits de l’homme comme fondement de ce droit.
2.1 L’article 15(2) de la Déclaration universelle des droits de l’homme comme fondement du droit à la nationalité
La première question de droit sur laquelle la Cour s’est prononcée en rapport avec le droit de ne pas être privée arbitrairement de sa nationalité, c’est celle de son fondement juridique. Prenant le contre-pied de la position de la Commission africaine sur la même question, la Cour africaine réaffirme le caractère coutumier de la Déclaration universelle des droits de l’homme sur la base de son article 15(2).
En effet, dans son arrêt du 22 mars 2018, la Cour africaine admet que «ni la Charte africaine ni le Pacte international relatif aux droits civils et politiques» ne consacrent expressément un droit de ne pas être arbitrairement privé de sa nationalité»3 ou plus globalement un droit à la nationalité.
Toutefois, cela ne devrait pas signifier que ce droit est totale- ment méconnu. Plusieurs textes généraux4 ou de portée restreinte font plus ou moins référence à ce droit ou à certains de ses aspects. Mais la Cour a fait le choix de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Par exemple, au niveau international, c’est le cas de l’article 5(1) de la Convention sur la réduction des cas d’apatridie qui dispose que «si la législation d’un Etat contractant prévoit la perte de la nationalité par la suite d’un changement d’état tel que le mariage, dissolution du mariage, légitimation, reconnaissance ou adoption, cette perte doit être subordonnée à la possession ou à l’acquisition de la nationalité d’un autre Etat».
Au niveau régional, notamment africain, ce sont les articles 6 de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant ainsi que du Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique. L’article 6 de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant dispose par exemple que «tout enfant a le droit d’acquérir une nationalité». Alors que l’article 6 du Protocole de Maputo sur les droits des femmes en Afrique dispose que «la femme mariée a le droit de conserver sa nationalité et d’acquérir la nationalité de son mari».
Ainsi, l’on peut observer que ces deux articles ne consacrent pas expressément un droit de ne pas être privé arbitrairement de sa nationalité. Seul l’article 15(2) de la Déclaration universelle des droits de l’homme consacre expressément ce droit. D’où la pertinence de la question de son applicabilité devant la Cour, de son caractère conventionnel5 ainsi que de son caractère contraignant.
En effet, adoptée le 10 décembre 1948, la Déclaration universelle des droits de l’homme est une résolution de l’Assemblée générale des Nations unies et n’avait pas une valeur juridique contraignante au moment de son adoption. La Cour a eu l’occasion de le rappeler dans ses arrêts antérieurs. Elle l’a rappelé dans son arrêt du 28 mars 2014 dans l’affaire Franck David Omary et autres c. Tanzanie. Dans cet arrêt, «la Cour rappelle tout d’abord que la Déclaration universelle des droits de l’homme est une résolution de l’Assemblée générale des Nations Unies. La Cour relève encore que même si la Déclaration est l’un des premiers instruments dont l’objectif est de protéger des droits subjectifs de l’individu, elle n’est pas ratifiée par les Etats».6
S’agissant de la valeur juridique de cette Déclaration, la Cour note que «même si la Déclaration n’est pas un traité qui nécessite une ratification par les Etats pour entrer en vigueur, elle a été élevée au statut de droit international coutumier et de norme incontournable».7 Cette position fut ensuite, rappelée dans l’arrêt de la Cour du 11 mai 2018 dans l’affaire Mango and Another v Tanzania. A l’occasion, la Cour a également rappelé que «... même si la Déclaration universelle des droits de l’homme n’est pas un instrument international des droits de l’homme soumis à la ratification des États, elle a déjà établi, ... que la Déclaration est reconnue comme faisant partie du droit coutumier international».8
Dans son arrêt du 28 mars 2014, dans l’affaire Ayant droits de feus Norbert Zongo et autres c. Burkina Faso, la Cour avait admis le principe de l’examen des dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’homme devant elle.9 C’est donc pour toutes ces raisons que la Cour africaine avait conclu dans son arrêt du 22 mars 2018 que «...la Déclaration universelle des droits de l’homme qui est reconnue partie intégrante du Droit coutumier international [...] consacre ce droit en son article 15».10
Ainsi, au sens de l’arrêt de la Cour, la Déclaration universelle a une valeur juridique contraignante11 d’origine coutumière. Quoiqu’elle ne soit pas une convention aux termes de l’article 3(2) du Protocole à la Cour africaine, elle est susceptible d’être interprétée et appliquée par la Cour.
Donc, si cette affirmation de la Cour n’est pas nouvelle, elle marque cette fois-ci une réelle volonté de la Cour de renforcer la protection des droits de l’homme dans le système africain. Cependant, ce choix de la Cour de prendre comme fondement du droit à la nationalité ou tout le moins du droit de ne pas en être arbitrairement privé, l’article 15(2) de la Déclaration universelle des droits de l’homme, au lieu de l’article 5 de la Charte africaine des droits de l’homme qui différencie la position de la Cour à celle de la Commission. En effet, à l’instar de la Cour africaine, la Commission africaine constate que la Charte africaine ne consacre pas expressément un droit à la nationalité. Mais contrairement à la Cour, la Commission déduit ce droit des autres droits12 notamment l’article 5 de la Charte africaine qui consacre un droit à la personnalité juridique. Cet article 5 dispose que «tout individu a droit au respect de la dignité inhérente à la personne humaine et à la reconnaissance de sa personnalité juridique». Et le droit à la nationalité est ici compris comme un des attributs de la personnalité juridique. La Commission africaine avait par exemple adopté cette position dans l’affaire John K. Modise c. Botswana dans laquelle la nationalité du requérant était contestée par le Botswana. La Commission avait noté:13
... le père de John Modise était un Tswana au moment de l’indépendance, le 30 septembre 1966 et son fils, le plaignant, n’ayant eu aucune indication sur son autre nationalité, a acquis la citoyenneté du Botswana en vertu de la section 20(2) de la Constitution du Botswana alors en vigueur. Le déni de ce droit est une violation des articles 3(2) et 5 de la Charte.
Dans une autre constatation dans l’affaire Open Society Justice Initiative c. Côte d’Ivoire, la Commission avait réitéré cette position en soulignant que «... le droit protégé à l’article 5 de la Charte est celui de la «reconnaissance de la personnalité juridique» définie plus haut. Ceci dit, la nationalité est une composante intrinsèque de ce droit ... ».14 Elle rajoute que «...le droit à la nationalité de toute personne humaine est un droit fondamental dérivé aux termes des dispositions de l’article 5 de la Charte ...».15 Cette affaire concernait notamment la question de la violation du droit à la nationalité des Dioulas de la Côte d’ivoire, victimes de la politique d’«ivoirité» mise en place successivement par les gouvernements Henri Konan Bédié, Guéi et Laurent Gbagbo.
Cette position fut encore rappelée dans d’autres constatations relatives à l’affaire Communauté Nubienne du Kenya c. le Kenya en février 2015. La Commission était appelée à statuer sur plusieurs questions de droit, notamment sur celle de la citoyenneté ou mieux du refus de la citoyenneté kenyane aux membres de la communauté nubienne du Kenya. Face à l’absence d’un cadre juridique spécifique sur le droit à la nationalité, la Commission africaine a déduit ce droit des dispositions de l’article 5(1) de la Charte africaine des droits de l’homme énoncée ci-dessus.
Ainsi, la Commission a par exemple noté «qu’elle partage la position défendue ci-dessus, à savoir que la nationalité est intimement liée à la personnalité juridique d’un individu et que le refus d’accès aux documents d’identité qui permettent à une personne de jouir des droits liés à la citoyenneté viole le droit d’un individu à la reconnaissance de sa personnalité juridique».16
Il ressort donc de cette position de la Commission africaine que toute violation du droit à la nationalité implique celle du droit à la personnalité juridique, car ces deux notions sont intimement liées. Cette position de la Commission africaine n’est pas prise en compte par la Cour africaine dans l’arrêt commenté. La Cour a préféré une autre approche, celle de s’appuyer sur la Déclaration universelle des droits de l’homme.
Il faudra signaler que sur cette question de nationalité, la Commission a été la première à y être confrontée avant l’avènement de la Cour au niveau africain.17 Si pour Donald Dayoro,18 le choix par la Cour africaine de s’appuyer sur une disposition de la Déclaration universelle des droits de l’homme résulte de la volonté de celle-ci de «(...) mettre fin aux violations autrement le requérant se retrouverait sans protection» nous estimons pour notre part, qu’il n’est pas vraiment le cas. Car, la Cour disposait bien d’une autre solution notamment l’approche souvent adoptée par la Commission dans les affaires similaires. Mais le fait pour la Cour de recourir à la Déclaration universelle s’inscrit dans sa jurisprudence qui reste réceptive à l’évocation de cette Déclaration par devers la elle. Ainsi, qu’il s’agisse de l’approche adoptée par la Commission ou bien de celle adoptée par la Cour, elles demeurent toutes deux des alternatives à un régime de protection claire et précis.
Ce nouveau régime devrait se baser sur le Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux aspects spécifiques du droit à la nationalité et l’éradication de l’apatridie en Afrique. L’adoption par l’Union africaine marquerait donc une réelle avancée dans la protection de ce droit sur le continent.19 Étant donné que ce Protocole consacre plusieurs droits pertinents notamment un droit de ne pas être arbitrairement privé de sa nationalité en son article 3 et la procédure requise avant de priver quelqu’un de son droit à la nationalité à l’article 16(6) de ce Protocole.
Comparativement aux autres systèmes régionaux des droits de l’homme, l’approche adoptée par la Commission africaine, consistant à considérer le droit à la nationalité comme un droit dérivé se rapproche de celle de la Cour européenne des droits de l’homme. En effet, si pour la Commission africaine, le droit à la nationalité ou de ne pas être privé arbitrairement de sa nationalité peut être tiré du droit à la reconnaissance de sa personnalité juridique, pour la Cour européenne par contre, ce droit est tiré du droit au respect de sa vie privée. La Cour européenne en a décidé ainsi dans son arrêt du 17 octobre 2016 dans l’affaire Ramadan c. Malte.20 Elle avait par exemple rappelé que «la perte d’une nationalité acquise ou de naissance peut produire un effet identique (voire un effet plus important encore) sur la vie privée et familiale de la personne concernée».21
La Cour rajoute qu’«une déchéance arbitraire de nationalité pourrait dans certaines circonstances poser un problème au regard de l’article 8 de la Convention du fait de son impact sur la vie privée de l’intéressé».22 Cette affaire concernait un cas de retrait de la nationalité maltaise du requérant, au motif qu’elle aurait été obtenue par des moyens frauduleux; prétention que le requérant contestait naturellement. Celui-ci soutint qu’il avait régulièrement acquis la nationalité maltaise et que depuis lors, il avait eu trois enfants maltais. Par conséquent, ce retrait portait atteinte à ses droits fondamentaux.
Face à l’absence de la consécration d’un tel droit dans la Convention européenne des droits de l’homme, la Cour s’est appuyée sur les dispositions de l’article 8 relatif au droit au respect de la vie privée pour analyser la violation du droit à la nationalité du requérant. La Cour a très clairement rappelé cette position dans plusieurs autres de ses arrêts dont l’arrêt Karassev c. Finlande. Elle a noté que «bien que le droit d’acquérir une nationalité ne soit garanti, comme tel, ni par la Convention ni par ses Protocoles, la Cour n’exclut pas qu’un refus arbitraire de nationalité puisse, dans certaines conditions, poser un problème sous l’angle de l’article 8 de la Convention en raison de l’impact d’un tel refus sur la vie privée de l’intéressé».23
Donc, contrairement à la Commission africaine, la Cour européenne tire ce droit des dispositions du droit au respect de la vie privée, alors que la Commission le tire du droit à la reconnaissance de la personnalité juridique. Mais toutes ces deux instances partagent en commun le fait que ce droit soit un droit dérivé.
De plus, toutes ces deux instances différent de la Cour africaine des droits de l’homme et de la Cour de justice de l’Union européenne. Car pour la Cour de justice de l’Union européenne, le droit à la citoyenneté européenne a comme fondement l’article 20 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. C’est donc pour cette raison que la Cour de justice de l’Union européenne avait noté dans son arrêt du 2 mars 2010 dans l’affaire Janko Rottmann que «le statut de citoyen de l’Union a vocation à être le statut fondamental des ressortissants des États membre».24
Dans un autre arrêt, la Cour de justice de l’Union européenne avait aussi noté que «l’article 20 TFUE [s’oppose à des mesures nationales ayant pour effet de priver les citoyens de l’Union de la jouissance effective de l’essentiel des droits conférés par leur statut de citoyen de l’Union]».25 Autrement dit, pour la Cour de justice de l’Union européenne, le droit à la citoyenneté européenne est consacré à l’article 20 du TFUE, alors que la citoyenneté nationale est consacrée par les législations nationales. Toutefois, la privation de cette nationalité doit rester conforme aux dispositions communautaires pour ne pas porter atteinte à l’essentiel des droits consacrés par l’Union européenne.
Ainsi, la position de la Cour de justice se rapproche de celle de la Cour africaine sur le point de la consécration de ce droit dans une source primaire,26 alors qu’elle s’en distancie sur la nature de cette source.27
2.2 La preuve de la nationalité incombe à celui ou celle qui la conteste
La deuxième question de droit à laquelle la Cour était appelée à examiner était celle relative à la charge de la preuve de la nationalité du requérant. En effet, selon la Cour, «le [r]equérant soutient qu’il est de nationalité tanzanienne, ce que l’Etat défendeur conteste. Il s’agit dans ces conditions de savoir sur qui repose la charge de la preuve».28 Sans tergiverser, la Cour a fait application du principe général admis en droit de la preuve, celui d’actori incumbit probatio; c’est-à-dire que c’est à celui qui allègue les faits, d’en apporter les preuves. La Cour note par exemple que «dès le moment où l’Etat défendeur conteste la nationalité que le [r]equérant possédait de fait depuis sa naissance sur la base de documents légaux fournis par l’Etat défendeur lui-même, la charge de la preuve du contraire lui incombe».29
S’agissant des documents légaux probatoires de la nationalité tanzanienne, la Cour africaine analyse non seulement le fait que le requérant dispose d’un passeport, mais aussi le fait qu’il dispose d’un acte de naissance tanzanien régulièrement délivré par les autorités compétentes. La Cour va plus loin, en prenant également en compte le fait que le requérant a toujours vécu dans ce pays depuis plus de 33 ans; qu’il y a étudié, travaillé comme tout citoyen tanzanien durant toutes ces années.30 Et face à la contestation éventuelle de la filiation parentale et indirectement, de l’acte de naissance du requérant, la Cour admet la possibilité de recourir au témoignage et plus globalement au test ADN.
Ainsi, ce raisonnement de la Cour se rapproche de celui que la Commission africaine adopte régulièrement dans les constatations portant sur des questions similaires. Seule l’admission de la possibilité de recourir au test ADN pour établir la paternité constitue une innovation de la Cour.
Il s’agit d’abord, des constatations du 5 mai 1999 dans l’affaire Amnesty International c. Zambie devant la Commission africaine. Dans cette communication, il était allégué une série de violations des droits contenus dans la Charte africaine en lien avec l’exécution d’une mesure d’expulsion du territoire zambien de deux requérants: William Steven Banda et Feu John Lyson Chinula. Ils étaient tous deux, des éminents politiques de la Zambie et opposants à l’époque des faits. Si la situation du premier requérant s’éloigne un peu de celle du requérant de l’arrêt de la Cour africaine sous commentaire, la situation du Feu John Lyson Chinula en est très proche. Car non seulement celui-ci a été expulsé «de force» de la Zambie pour le Malawi; mais aussi il n’a pas eu la possibilité d’exercer les voies de recours existantes.
De plus, sa nationalité zambienne était également contestée, alors qu’il disposait «d’une carte nationale d’identité et d’un passeport zambien. Et que pendant des années, il en a librement fait usage sans aucun problème».31
Ainsi dans son raisonnement, la Commission africaine a pris en compte ces différents éléments32 pour conclure à la violation des articles 5, 7(1)(2) et 12(4) de la Charte africaine du fait que «(...) la résidence et le statut de Banda en Zambie avaient été acceptés. Il avait apporté une contribution à la politique du pays».33
Donc, dans cette affaire, le raisonnement de la Cour et de la Commission se rapproche, en ce qui concerne la prise en compte de la possession d’une carte d’identité nationale, d’un passeport ou d’un acte de naissance et d’une intégration locale «politique ou sociale» du requérant dans la décision portant sur la violation du droit à la nationalité.
De plus, loin d’être un cas isolé, la Commission africaine a de nouveau adopté la même position dans les constatations du 6 novembre 2000 dans l’affaire John K. Modise c. Botswana.
En effet, le requérant dans cette affaire revendiquait la citoyenneté botswanaise dans la mesure où son père détenait régulièrement cette nationalité et estimait que par filiation paternelle,34 il serait botswanais. Cette prétention du requérant était par ailleurs contestée par l’Etat défendeur et était à la base de son expulsion à quatre reprises en direction de l’Afrique du Sud, pays dont il n’avait pas non plus de nationalité. Dans son raisonnement, la Commission africaine a conclu que «le père de John Modise était un Tswana au moment de l’indépendance, le 30 septembre 1966 et son fils, le plaignant, n’ayant eu aucune indication sur son autre nationalité, a acquis la citoyenneté du Botswana en vertu de la section 20(2) de la Constitution du Botswana alors en vigueur. Le déni de ce droit est une violation des articles 3(2) et 5 de la Charte».35
Ainsi, cette conclusion de la Commission, qui consiste à prendre en compte uniquement la filiation paternelle pour justifier la nationalité botswanaise de John Modise, est également reprise par la Cour africaine dans l’arrêt commenté. Dans la mesure où la nationalité tanzanienne du père du requérant dans l’arrêt Anudo n’était pas contestée par l’Etat défendeur. Il contestait plutôt la validité de l’acte de naissance et de passeport en rapport avec la législation tanzanienne. C’est donc pour cette raison que la Cour africaine a conclu que «(...) les preuves fournies par l’Etat défendeur pour justifier le retrait de la nationalité du [r]equérant ne sont pas convaincantes et en conclut que l’annulation de la nationalité du [r]equérant a été arbitraire».36
La similarité entre le raisonnement de la Commission et celui de la Cour dans l’arrêt ici commenté découle de la prise en compte de la filiation paternelle dans l’analyse de la question de nationalité. En plus, dans les deux affaires analysées ci-dessus (Affaire Modise et Affaire Anudo), les Etats défendeurs n’avaient pas pris soin de vérifier si les requérants détenaient bel et bien d’autres nationalités sans lesquelles ils risqueraient d’être apatrides.
Il faut noter que ces solutions sont reprises dans le Projet du Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples sur les aspects spécifiques du droit à la nationalité et l’éradication de l’apatridie en Afrique notamment en son article 12 relatif à la preuve de la nationalité. L’article 13(5) de ce Protocole dispose par exemple que «même lorsqu’un document d’identité attestant de la nationalité ne vaut pas preuve irréfutable de la nationalité, la possession d’un tel document impose à la personne qui met en doute le statut de national de l’intéressé d’administrer la preuve contraire».37
3 L’APPORT DE L’ARRÊT DE LA COUR SUR LE DROIT DE NE PAS ÊTRE ARBITRAIREMENT EXPULSÉ
Dans son arrêt, la Cour réaffirme le principe selon lequel nul ne peut être arbitrairement privé de sa nationalité dans le seul but d’être expulsé (3.2). Elle rappelle également que toute expulsion arbitraire, qu’elle concerne un national ou un étranger, est interdite en droit international (3.1).
3.1 De la non pertinence du statut juridique du requérant dans le pays d’accueil face à une expulsion arbitraire
La Cour rappelle les différents fondements juridiques de ce droit. Au niveau international, le droit de ne pas être arbitrairement expulsé est consacré à l’article 12(1)(2) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Cet article dispose au paragraphe 1 que «quiconque se trouve légalement sur le territoire d’un Etat a le droit d’y circuler librement et d’y choisir librement sa résidence», alors que le paragraphe 2 de ce même article dispose que «toute personne est libre de quitter n’importe quel pays, y compris le sien». Et la Cour a noté que «c’est la disposition pertinente par rapport à l’affaire en l’espèce, en particulier, le droit ‘de revenir dans son pays’». En l’espèce, c’est cet aspect que la Cour va examiner, fait fi du fait que «le [r]equérant a quitté le territoire de l’Etat défendeur contre sa volonté».38
Au niveau africain, ce droit est consacré en l’article 12(2) de la Charte africaine des droits de l’homme qui dispose que «toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays». Alors qu’au niveau national, ce droit est consacré au point 17(1), partie III, Chapitre 1 de la Constitution de la République-Unie de Tanzanie. Il dispose qu’«every citizen of the United Republic has the right to freedom of movement in the United Republic and the right to live in any part of the United Republic, to leave and enter the country, and the right not to be forced to leave or be expelled from the United Republic».
Pour le Comité des droits de l’homme, ce droit suppose à la fois le droit de «rester dans son propre pays», mais aussi et surtout le droit de «retourner dans son pays après l’avoir quitté ou d’y entrer pour la première fois».39 Le Comité rappelle en outre que «le terme son propre pays doit être compris de manière large, c’est-à-dire les nationaux et les étrangers légalement établis sur le territoire d’un Etat».40 Autrement dit, toute interdiction d’un national ou d’une personne légalement établie d’entrer ou de rentrer sur le territoire d’un Etat soit prohibée dès l’instant qu’elle est arbitraire. C’est donc ce raisonnement que la Cour africaine a adopté dans l’arrêt commenté. Dans la mesure où, pour la Cour, s’il est admis que l’expulsion ou le refus de l’Etat défendeur de permettre au requérant de rentrer dans son pays est arbitraire, alors son statut juridique en Tanzanie (national ou étranger) reste non pertinent.41 Cette position est largement partagée dans la doctrine pertinente en la matière. Olivier Delas écrit par exemple que «la notion de propre pays prend en compte non seulement les citoyens, mais plus généralement toute personne qui est capable d’établir un attachement profond et fondé au dit pays».42 Dans le même sens, Jean Sorel soutient par exemple que «le paragraphe 2 ne précise pas la question du lien de rattachement de l’individu à «son pays». La logique implique un lien de nationalité, mais un lieu de résidence depuis de nombreuses années peut aussi suffire».43 Ainsi, la position de la Cour sur cette question reste classique et est calquée sur l’état actuel du droit international.
En ce qui concerne le caractère arbitraire de cette expulsion ou tout le moins du refus d’autoriser le retour du requérant dans son pays, la Cour a conclu à la violation de ce droit notamment du fait de l’absence de voies de recours contre toute mesure d’expulsion dans la législation tanzanienne. Cette absence se heurte donc au devoir de prévisibilité attendue à toute mesure privative des droits garantis.44 Contrairement à Avlessi «(...) l’objectif poursuivi par la Cour en protégeant contre l’expulsion arbitraire [serait non seulement] de permettre au requérant d’exercer les voies de recours contre la décision de déchéance de sa nationalité»,45 mais aussi et surtout de réaffirmer l’interdiction internationale de toute forme d’expulsions arbitraires». Par cette position, la Cour a donc réaffirmé le principe de la non pertinence du statut juridique de la personne à expulser face à une expulsion arbitraire.
3.2 De l’interdiction d’expulser son propre national ou de faire de son national un étranger dans le seul but de l’expulser
La Cour africaine rappelle qu’en droit international, l’expulsion de son propre national n’est admise que dans des cas limitatifs.46 Elle s’appuie sur l’observation générale du Comité des droits de l’homme qui note que «les cas dans lesquels la privation du droit d’une personne d’entrer dans son propre pays pourrait être raisonnable, s’ils existent, sont rares».47 Selon Olivier Delas, «(...) les restrictions à la liberté de mouvement telles qu’elles apparaissent dans le paragraphe 3 du Pacte ne s’appliquent pas au paragraphe 4. C’est une façon de reconnaître, indirectement, l’interdiction de déportations massives de nationaux hors des frontières».48 La Cour a donc rappelé sa conclusion selon laquelle, «le requérant détient bel et bien la nationalité tanzanienne et conclut que son expulsion ou son refus de revenir dans son pays constitue une atteinte à son droit aux termes de l’article 12 du Pacte».49 La Cour s’est en outre inscrite dans l’esprit de l’article 12(4) du Pacte qui interdit l’expulsion de son propre national dans le but de prévenir l’apatridie d’une part50 et d’autre part, dans le but de préserver «le lien indéfectible qui doit unir un Etat et ses ressortissants».51 Dans le cas d’espèce, l’expulsion du requérant vers le Kenya (alors qu’il ne détenait pas la nationalité kenyane), le refus des autorités tanzaniennes d’autoriser le retour de celui-ci dans son pays afin qu’il se réunisse avec les membres de sa famille se heurtent donc à ces deux objectifs.
Ainsi, le raisonnement de la Cour reste conforme à l’état actuel du droit international en la matière, qui n’admet l’expulsion de son national que de manière exceptionnelle. Il exige également le respect de certaines conditions notamment la prévention de l’apatridie et l’interdiction de porter atteinte aux autres droits fondamentaux.52
Somme toute, dans l’analyse de ce droit [droit de ne pas être arbitrairement expulsé], la Cour africaine adopte une approche classique, systématiquement rappelée par la Commission africaine des droits de l’homme dans les affaires similaires. En ce sens, elle rappelle que le droit de ne pas être arbitrairement expulsé est bel et bien garanti en droit international. La protection de ce droit devrait davantage être renforcée lorsqu’il y a lieu d’expulser un national exposé au risque d’apatridie.53 Et lorsqu’il devrait être limité, il devrait être prévu dans une loi, proportionnelle au droit violé et nécessaire dans une société démocratique.54
4 CONCLUSION
L’analyse de cet arrêt a permis de relever son apport essentiel dans la construction d’une architecture africaine de protection du droit à la nationalité et du droit de ne pas être arbitrairement expulsé. Cela dit, la Cour a sans doute été limitée par l’absence d’un cadre normatif adéquat, ce qui l’a contrainte à se réfugier dans une approche plus ou moins discutable.
En tout état de cause, l’arrêt aura servi à comprendre la nécessité de finaliser l’adoption du cadre africain de protection de la nationalité à travers l’adoption du Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples sur le droit à la nationalité en Afrique. Tout cela dans le but de rendre effectifs les droits fondamentaux garantis et de prévenir l’apatridie. Il a en outre mis en avant la justiciabilité de ce droit à la nationalité, ainsi que des autres droits analysés devant la Cour dans l’espoir d’encourager des victimes de ces droits de saisir la Cour dans l’avenir. Cet arrêt nous a également permis de comprendre la différence d’approche dans l’analyse du droit à la nationalité entre d’une part, la Cour africaine et la Commission africaine et d’autre part, entre la Cour africaine et les instances régionales européennes. Il serait donc intéressant de continuer à suivre la position de la Cour dans ses futurs arrêts et après la finalisation de l’adoption du Protocole.
2. RF Avlessi ‘La prévention de l’apatridie dans le système africain des droits de l’homme’ (2019) 3 Annuaire africain des droits de l’homme 295. Voir aussi: D Dayoro ‘Commentaire Affaire Anudo Ochieng Anudo c. République-Unie de Tanzanie, Requête 012/2015’ in A Soma & S Dabiré (dirs) Commentaire des grands arrêts de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (2022) 318.
5. L’article 3(1) du Protocole à la Cour africaine dispose que «la Cour a compétence pour connaître de toutes les affaires et de tous les différends dont elle est saisie concernant l’interprétation et l’application de la Charte, du présent Protocole, et de tout autre instrument pertinent relatif aux droits de l’homme et ratifié par les Etats concernés».
6. Frank David Omary et autres c. République-Unie de Tanzanie (fond) (2014) 1 RJCA 370 para 72. C’est nous qui soulignons.
9. Ayants droit de feus Norbert Zongo, Abdoulaye Nikiema dit Ablasse, Ernest Zongo et Blaise Ilboudo et Mouvement Burkinabé des droits de l’homme et des peuples c. Burkina Faso (fond) (2014) 1 RJCA 22, para 157.
11. P Mpunga ‘L’application de la déclaration universelle des droits de l’homme par la Cour africaine des droits de l’homme et de peuples. Qui trop embrasse mal étreint’ (2021) 34(1) Revue québécoise de droit international 129.
13. John K. Modise c. Botswana, Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, Communication 97/93 14 (2000) para 89.
14. Open Society Justice Initiative c. Côte d’Ivoire, Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, Communication 318/06 (2015) para 62.
17. L Balle ‘La nationalité saisie par les droits de l’homme: perspectives africaines’ (2022) Revue juridique de Faso 5.
19. B Kagina ‘L’interdiction de déchoir arbitrairement de sa nationalité aux fins d’être expulsé vue par la Cour africaine’ (2022) Cahiers de l’EDEM 20.
25. CJUE, affaire Gerardo Ruiz Zambrano contre Office national de l’emploi (ONEM), affaire C-34/09, 8 mars 2011, para 42.
26. La Déclaration universelle des droits de l’homme pour la Cour africaine et le TFUE pour le Cour de justice de l’Union européenne.
27. Elle est coutumière devant la Cour africaine (DUDH) et conventionnelle devant la Cour de justice de l’Union européenne.
31. Amnesty International c. Zambie, Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, Communication 212/98(1999), para 39.
32. Le fait qu’il dispose notamment d’une carte nationale d’identité et d’un passeport de la Zambie.
37. Commission africaine des droits de l’homme, Projet du Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples sur les aspects spécifiques du droit à la nationalité et l’éradication de l’apatridie en Afrique, Note explicative, révisé juin 2018.
39. Comité des droits de l’homme, Observation générale No 27 sur la liberté de la circulation, Genève, 2 novembre 1999, para 19.
42. O Delas ‘Commentaire de l’article 12 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques’ in E Decaux Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Commentaire article par article (2011) 304.
43. J-M Sorel ‘Article 12’ in M Kamto (dir) La Charte africaine des droits de l’homme et des Peuples et le protocole y relatif portant création de la Cour africaine des droits de l’homme (2011) 301.
44. Voir l’article 1 du Projet de Protocole du Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples sur les aspects spécifiques du droit à la nationalité et l’éradication de l’apatridie en Afrique.