Serges Frédéric Mboumegne Dzesseu
 Professeur, Maître de Recherche en Droit au Centre National d'Education, MINRESI-Cameroun; Membre Expert du Comité pour la Prévention de la Torture en Afrique; Directeur Afrique et Directeur de la formation professionnelle à l'IQAI (Institut Québécois des Affaires Internationales)
Chargé d'enseignement vacataire, Master 2 Droit International et Européen des Droits Fondamentaux, Université de Nantes-France
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 Edition: AHRY Volume 3
  Pages: 72 - 92
 Citation: SFM Dzesseu ‘Le temps du procès et la sécurité juridique des requérants dans la procédure devant la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples’ (2019) 3 Annuaire africain des droits de l’homme 72-92 http://doi.org/10.29053/2523-1367/2019/v3a4
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RÉSUMÉ:

La sécurité juridique des requérants, en matière contentieuse ou non, impose une certaine clarté, une précision des délais raisonnables afin de parer à l’instabilité des situations juridiques. La Cour africaine des droits de l’homme et des peuples pour aborder la question des délais, fait usage des dispositions du Protocole qui l’a créée ainsi que son Règlement intérieur, sans ignorer la jurisprudence en la matière. Le présent article propose une réflexion sur les délais dans la procédure devant la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples afin apprécier leur raisonnabilité ou non et leurs impacts sur les droits des requérants à la justice. Par ce biais, il envisage ultimement de présenter des pistes de réformes au sujet du délai raisonnable dans la pratique de la Cour africaine autant en matière contentieuse que consultative. La conjugaison de la méthode juridique dans sa double dimension dogmatique et casuistique a permis de noter que la Cour détermine une des conditions de recevabilité des requêtes devant elle à partir de l’épuisement des voies de recours internes. Certes, mais c’est sa jurisprudence qui détermine le point de départ de la computation des délais en cette matière. Par ailleurs, l’on note une mise en œuvre de la souveraineté de la Cour à propos de la définition du point de départ de sa saisine. Cette situation concourt à former l’impression d’une tergiversation contraire à la recherche de la sécurité juridique et de la stabilité des situations juridiques des requérants. Or, la juridiction elle-même sanctionne, à travers ses œuvres prétoriennes, les violations du droit à un délai raisonnable, composante du procès équitable. Pour rechercher le juste milieu de ces paradigmes, il faut tout de même reconnaître qu’ils sont mus par cette tendance qu’a le juge continental de se positionner en faveur des victimes des violations des droits de l’homme.

TITLE AND ABSTRACT IN ENGLISH:

The length of trial and the legal security of applicants in proceedings before the African Court on Human and Peoples’ Rights

ABSTRACT:

Legal certainty for the applicants in contentious or non-contentious matters requires a certain clarity, a precision of reasonable deadlines in order to avoid the instability of legal situations. The African Court on Human and Peoples’ Rights, in addressing the issue of time, relies on the provisions of its Protocol and Rules of Procedure as well as relevant case law. The purpose of this article is to discuss timeframes in proceedings before the Court in order to assess whether they are reasonable or not and their impact on the applicants’ right to justice. In this way, it ultimately intends to present proposals for reforms on reasonable time in the practice of the Court in contentious and advisory matters. The combination of the legal method in its dual dogmatic and casuistic dimension made it possible to note that the Court determines one of its admissibility conditions of application on the basis of the exhaustion of domestic remedies. However, its case law determines the starting point for the calculation of time in this respect. Besides, it appears that the Court exercises discretion in determining the date on which it should be seized. Such situation leads to the impression of uncertainty which is contrary to the need for legal certainty and the stability of the applicants’ legal situation. The issue is that the Court, in its own judgments, sanctions violations of the right to be tried within a reasonable time, as a component of the right to a fair trial. In order to strike the correct balance in these paradigms, it must be acknowledged that they are justified by the Court’s approach in favour of victims of human rights violations.

MOTS CLÉS: Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, délai raisonnable, sécurité juridique, stabilité des situations juridiques, recevabilité, date retenue par la Cour africaine

 

SOMMAIRE:

1 Introduction

2 La souveraineté de la Cour africaine dans la détermination du délai raisonnable en matière de recevabilité, source d’insécurité juridique des requérants

2.1 La flexibilité dans la détermination du délai raisonnable de l’épuisement des voies de recours interne à la saisine de la Cour : la règle de l’examen au cas par cas

2.2 L’imbroglio créé par la notion de « date retenue par la Cour »

3 L’attitude de « Janus » de la Cour africaine de la phase d’instruction au prononcé de l’arrêt sur les réparations, une atteinte à la stabilité des situations juridiques des requérants

3.1 Un temps non maîtrisé

3.2 La sanction du non-respect du délai raisonnable par les parties

4 Conclusion: pistes pour la clarté et la précision des délais devant la Cour africaine des droits de l’homme

1 INTRODUCTION

L’œuvre de justice s’insère inéluctablement dans le temps.1 Dans la perspective du justiciable, une justice crédible, efficace et effective se traduit nécessairement par l’obtention et l’exécution d’une décision sur le fond dans un temps qui satisfait à ses impératifs économiques, sociaux et personnels.2 C’est le principe de sécurité juridique qui y est donc inévitablement la boussole. Pour ce qu’il en est, le temps est consubstantiel au procès. Le temps du procès se déroule comme une succession de délais qui naissent dès la saisine de la juridiction et se prolongent après la décision de justice si elle est susceptible de recours. Le procès lui-même est un mécanisme visant à établir ou à rétablir la paix sociale par l’intervention d’un tiers légitime chargé de régler un litige né, latent ou virtuel, selon une procédure respectant les garanties fondamentales du procès équitable.3 S’agissant de la sécurité juridique, il convient de dire que c’est un principe qui exige un respect de la norme juridique ainsi qu’une stabilité de celle-ci, une détermination claire et précise des délais de recours ou de mise en œuvre de prescriptions ou de forclusions répondant à l’exigence de la stabilité des situations juridiques.4 De plus, le mot « procédure » évoque la progression vers un but déterminé, le processus selon lequel certaines décisions doivent être prises, certaines opérations conduites. Au sens matériel, c’est l’enchaînement ou l’ensemble des actes et des formalités qui conduisent à la prise d’une décision.5 Le requérant est l’auteur de la requête, le justiciable demandeur dans l’intérêt duquel la requête est présentée au juge.6 Il en ressort que le délai est au cœur de la trilogie: temps, procès et sécurité juridique.

La procédure devant la Cour africaine exige, entre autres, le respect des délais. Le délai raisonnable, qui y fait régulièrement objet de débat, est une notion à géométrie variable du fait d’une absence de définition précise et d’une variété d’approches tant en doctrine que dans la jurisprudence.

Primo, il suppose le maintien d’un équilibre entre les intérêts du requérant et les exigences d’une bonne administration de la justice ou de la sécurité publique.7 Secundo, la jurisprudence internationale des droits de l’homme appréhende cette notion à travers plusieurs critères. Ainsi, elle met en exergue: la complexité de l’affaire,8 le comportement du requérant,9 le comportement des autorités nationales,10 et l’enjeu du litige pour le requérant.11

Le délai raisonnable est donc une donnée fondamentale en droit processuel et se pose avec acuité devant les juridictions internationales qui connaissent spécifiquement du contentieux des droits de l’homme. Bien que l’article 56(6) de la Charte africaine, repris par l’article 40(6) du Règlement intérieur de la Cour d’Arusha, fixe le droit applicable en matière de délai raisonnable, l’application de ses normes soulève la question suivante: l’appréhension du délai raisonnable par la Cour africaine concourt-elle à l’affermissement d’un régime juridique garant de la sécurité juridique des requérants?

A la lecture de l’arsenal juridique et de la jurisprudence de la Cour africaine, il convient de noter que celle-ci oscille entre deux « supposés » raisonnable et un déraisonnable. La Cour, suivant la logique de son cadre juridique,12 détermine une de ses conditions de recevabilité à partir de l’épuisement des voies de recours internes. Certes, mais c’est sa jurisprudence qui détermine le point de départ de la computation des délais en cette matière. Par ailleurs, l’on note une mise en œuvre de la souveraineté de la Cour quant à la définition du point de départ de sa saisine. Ce qui concourt à une tergiversation contraire à la recherche de la sécurité juridique et la stabilité des situations juridiques des requérants. Or, elle sanctionne, à travers ses œuvres prétoriennes, les violations du droit à un délai raisonnable, composante du procès équitable.

Cette contribution revêt un intérêt certain dans la mesure où elle envisage des pistes de réformes en matière de délai raisonnable dans la pratique de la Cour africaine en matière contentieuse et consultative. Son analyse nécessite la conjugaison de la méthode juridique dans sa double dimension dogmatique et casuistique. Elle permet d’explorer le cadre juridique qui balise les délais dans le contentieux international des droits de l’homme en Afrique et d’apprécier son application dans la jurisprudence de la Cour africaine. Une telle investigation peut bénéficier utilement d’une approche comparée à la lumière des pratiques des autres juridictions régionales des droits de l’homme qui ont forgé des pratiques plus éprouvées en matière de gestion du temps procédural.

Il ressort à l’observation que la souveraineté de la Cour dans la détermination du délai raisonnable en matière de recevabilité est source d’insécurité juridique (2). De même, l’attitude, tel un « Janus », de la Cour, observée de la phase d’instruction au prononcé de l’arrêt sur les réparations, participe à l’instabilité des situations juridiques des requérants (3).

2 LA SOUVERAINETÉ DE LA COUR AFRICAINE DANS LA DÉTERMINATION DU DÉLAI RAISONNABLE, SOURCE D’INSÉCURITÉ JURIDIQUE DES REQUÉRANTS

Le caractère raisonnable de la durée d’une procédure s’apprécie en fonction des circonstances particulières de la cause, in concreto.13 L’article 40(6) du Règlement intérieur de la Cour africaine dispose, en ce qui concerne les conditions de recevabilité des requêtes qu’elles doivent, entre autres « être introduites dans un délai raisonnable courant depuis l’épuisement des recours internes ou depuis la date retenue par la Cour comme faisant commencer à courir le délai de sa propre saisine ». Il ressort de cette disposition l’existence d’une option: faire courir le délai à partir de la date à laquelle a été rendue la décision définitive dans l’ordre juridique interne de l’Etat mis en cause; et dans le cas contraire, fixer la date faisant courir ledit délai.14 L’interprétation de cette disposition montre qu’elle est empreinte d’une grande souplesse15 telle qu’il ressort d’ailleurs de la jurisprudence de la Cour en la matière.

Cette attitude de la Cour, contraire au principe de sécurité juridique, qui exige des requérants de connaître avec exactitude et de façon dépourvue d’ambiguïté leurs droits et obligations,16 justifie la flexibilité dans la détermination du délai raisonnable de l’épuisement des voies de recours internes à la saisine de la Cour d’une part et, d’autre part, du recours à la notion imprécise de « date retenue par la Cour ».

2.1 La flexibilité dans la détermination du délai raisonnable de l’épuisement des voies de recours interne à la saisine de la Cour: la règle de l’examen au cas par cas

La règle de l’épuisement des voies de recours internes a connu des développements importants en doctrine. Selon Wiebringhaus, elle joue un rôle important dans le domaine de la justice internationale. Elle a été par la suite consacrée en droit international.17 Elle figure ainsi à l’article 41 du Pacte relatif aux droits civils et politiques, aux articles 2 et 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte relatif aux droits civils et politiques, aux articles 11(3) et 14 de la convention sur l’élimination de toute forme de discrimination raciale. L’article 26 de la Convention européenne des droits de l’homme est consacré à la même règle. On la retrouve aussi aux articles 56(6) de la Charte africaine et 40(6) du Protocole à la Charte africaine portant création de la Cour africaine. Tel que confirmé par la doctrine et la jurisprudence, le bien-fondé de la règle est de donner à l’Etat mis en cause la possibilité de réparer le dommage qu’on lui impute par les moyens de ses mécanismes internes compétents.18 Les organes qualifiés de l’Etat qui sont concernés doivent pouvoir statuer préalablement sur la réclamation. Ils doivent être à même de préciser le contenu du litige et d’en mesurer la portée.19 Ce n’est qu’après avoir donné cette faculté à l’Etat défendeur que le différend pourra être porté sur le plan international. Elle vise donc la protection de la souveraineté des États en leur accordant la marge de priorité nécessaire à la réparation des violations alléguées avant qu’une instance internationale n’examine le litige.20

Aux termes de l’article 40 du Règlement intérieur de la Cour africaine, qui fixe les conditions de recevabilité des requêtes, il ressort que ces dernières doivent remplir, entre autres, les conditions ci-après: « (...) être introduites dans un délai raisonnable courant depuis l’épuisement des recours internes (...) ».21 L’épuisement des recours internes est une règle qui impose à celui qui saisit une juridiction internationale d’avoir au préalable exercé toutes les voies de recours accessibles dans l’ordre interne22 alors que le délai raisonnable est une notion à géométrie variable qui s’apprécie suivant plusieurs critères, à savoir : la complexité de l’affaire, le comportement du requérant, le comportement des autorités nationales, l’enjeu du litige pour le requérant.23 Si le délai est le laps de temps fixé par la loi, le juge ou la convention soit pour interdire, soit pour imposer d’agir avant l’expiration de ce temps,24 le raisonnable, d’après Salmon constituerait un moyen d’apprécier l’adéquation des moyens aux fins, d’apprécier l’adéquation d’un comportement aux circonstances, de tracer une limite entre ce qui est discrétionnaire et arbitraire, d’éviter l’absurde ou le ridicule et d’établir un équilibre entre des intérêts divergents.25

Cette notion imprécise et par conséquent controversée,26 au même titre que l’épuisement des voies de recours eu égard à son appréciation, sont à l’origine de l’attitude de la Cour africaine, lorsqu’elle examine la recevabilité d’une requête. Elle le fait ‘au cas par cas’ comme dans la requête Norbert Zongo c. Burkina Faso,27 et ce, en ces termes: « la Cour a établi le principe selon lequel le caractère raisonnable d’un délai de sa saisine dépend des circonstances particulières de chaque affaire, et doit être apprécié au cas par cas ». Il s’agit d’apporter une appréciation du délai raisonnable ou de l’épuisement des voies de recours internes en fonction de la spécificité de chaque requête. Les éléments ci-après sont pris en compte: la situation personnelle du requérant28 ainsi que les éléments objectifs susceptibles d’allonger les délais de saisine.29 A titre d’illustration, la Cour africaine se prononce de la manière suivante dans l’espèce Mohamed Abubakari c. Tanzanie:30

Dans la présente affaire, le fait que le requérant soit incarcéré; le fait qu’il soit un indigent qui n’ait pas été capable de se payer un avocat; le fait qu’il n’ait pas eu l’assistance gratuite d’un avocat depuis juillet 1997; le fait qu’il soit illettré; le fait qu’il a pu ignorer jusqu’à l’existence de la présente Cour en raison de sa mise en place relativement récente; toutes ces circonstances justifient une certaine souplesse dans l’évaluation du caractère raisonnable du délai de saisine.

De plus, dans l’affaire Alex Thomas, elle argumente sa position de la manière suivante:31

74. Compte tenu de la situation du requérant, qui est une personne ordinaire, indigente et incarcérée et considérant le temps qu’il a fallu pour obtenir une copie du dossier de procédure et le fait qu’il a tenté d’utiliser des recours extraordinaires comme la procédure de requête en révision, la Cour conclut que tous ces facteurs constituent des éléments suffisants pour expliquer pourquoi il n’a introduit la requête devant la Cour que le 2 août 2013, soit trois ans et cinq mois après le dépôt de la déclaration prévue à l’article 34(6). Pour ces motifs, la Cour conclut que la requête a été déposée dans un délai raisonnable après épuisement des voies de recours internes, conformément à l’article 56(5) de la Charte.

Ont ainsi été jugés raisonnables des délais de 360 jours, en ces termes: 32

La Cour accepte l’argument des requérants selon lequel il n’y a pas eu de retard excessif dans la soumission des requêtes car après l’arrêt de la Cour d’appel, les requérants étaient en droit d’attendre la réaction du Parlement. Compte tenu de ces circonstances, la période de près de 360 jours (soit environ un an) qui s’est écoulée entre le jugement et le dépôt des requêtes n’a pas été prolongée de manière non raisonnable.

On y retrouve une introduction de la requête après trois ans et cinq mois depuis l’épuisement des voies de recours interne. En l’espèce,33

La Cour d’appel a estimé que la question était de nature politique et qu’elle devait donc être résolue par le Parlement. Celui-ci a alors entamé un processus constitutionnel en vue de résoudre la question. Il s’agit d’un processus de consultation visant à recueillir l’opinion des citoyens tanzaniens sur une éventuelle modification de la Constitution. Durant l’audience publique, il a été confirmé devant la Cour que la procédure était toujours en cours

et trois ans et six mois après le dépôt par l’Etat défendeur de la déclaration. En ce sens, « la Cour conclut en conséquence que le délai entre la date de sa saisine en la présente affaire, le 8 octobre 2013, et la date du dépôt par l’Etat défendeur de la déclaration de reconnaissance de la compétence de la Cour pour connaître des requêtes individuelles, le 29 mars 2010, est un délai raisonnable au sens de l’article 56(6) de la Charte ».34

Ce tâtonnement de la Cour africaine au sujet du délai raisonnable de recevabilité, du fait de l’absence de prévisibilité, de clarté et de précision, d’inconstance jurisprudentielle, peut influer négativement sur l’observance de la sécurité juridique des requérants. La Convention européenne des droits de l’homme est assez claire et précise sur le délai de recevabilité de la requête. L’article 35(1) dudit texte dispose que: « La Cour ne peut être saisie [que] dans un délai de six mois à partir de la date de la décision interne définitive ». Cette prévisibilité n’existe pas dans le cadre juridique procédural applicable par la Cour africaine, qui sur la base de ses textes fait une application au cas par cas et parfois, cumule les options jurisprudentielles. Le principe de sécurité juridique concerne en premier lieu l’agencement, le contenu et la précision des dispositions d’un ordre juridique. Il est donc avant tout un problème normatif;35 de même, il vise à garantir la prévisibilité des relations juridiques relevant du droit. Dans son arrêt Marckx, la Cour européenne des droits de l’homme reconnaît implicitement sa dette à l’égard de la Cour de justice, qualifiant le principe de la sécurité juridique de «principe nécessairement inhérent au droit de la Convention comme au droit communautaire».36 De ce fait, l’admissibilité des recours doit être jugée au regard des besoins de la sécurité juridique.

Cette position de la Cour européenne est issue de la Convention qu’elle supervise et qui fixe une limitation temporelle de six mois37 depuis l’épuisement des voies de recours pour saisir la Cour. La finalité première de la règle des six mois est de servir la sécurité juridique et de veiller à ce que les affaires soulevant des questions au regard de la Convention soient examinées dans un délai raisonnable, tout en évitant aux autorités et autres personnes concernées d’être pendant longtemps dans l’incertitude.38 En outre, cette règle fournit au requérant potentiel un délai de réflexion suffisant pour lui permettre d’apprécier l’opportunité d’introduire une requête et, le cas échéant, de déterminer les griefs et arguments précis à présenter, et elle facilite l’établissement des faits dans une affaire car, avec le temps, il devient problématique d’examiner de manière équitable les questions soulevées.39 La Cour africaine semble avoir intégrée cette logique de la limitation temporelle par un revirement jurisprudentiel dans l’affaire Wilfred Onyango Nganyi et 9 autres c. Tanzanie. Elle se repositionne de la manière suivante : « 101(...) la Cour a déduit des pièces de procédures que la dernière décision de la Cour d’appel dans cette affaire a été rendue le 20 mars 2013 et que la requête en l’espèce a été introduite devant la Cour africaine le 23 juillet 2013. On peut retenir que contrairement à la Cour européenne qui peut s’appuyer sur un délai fixe de six mois conformément à la norme écrite avec des applications au cas par cas dans sa jurisprudence, la Cour africaine en l’absence d’une telle précision textuelle, ne peut qu’adopter une approche souple. Ainsi, un mois pourrait être tout aussi raisonnable que quatre ans en fonction des cas. À tous les égards, une période de quatre mois est un délai raisonnable selon l’instance. 102. La Cour considère en conséquence que la requête a été effectivement introduite dans un délai raisonnable».40

Cette voie a été également suivie par son homologue de la Commission africaine qui, a fait de la règle de la limitation temporelle, une règle de fait. La Commission fait usage d’une limitation dans le temps à certains égards. Dans l’affaire Michael Majuru c. Zimbabwe, même si la Commission accepte que le plaignant a fui le pays et qu’il a eu besoin de temps pour s’installer ou qu’il était préoccupé par la sécurité des membres de sa famille, 22 mois après sa fuite du pays vont au-delà d’un délai raisonnable. La Commission africaine considère donc que la soumission de la communication a été indûment retardée et n’est donc pas compatible avec les exigences de l’article 56(6) de la Charte.41 On doit noter que le facteur central en l’espèce était que l’on n’aurait pas pu espérer du requérant qui avait fait l’objet de traitements constitutifs de torture et menacé de mort devait retourner sur le territoire de l’Etat violateur pour épuiser les recours internes. Des différentes analyses faites, il ressort que la Cour africaine fait preuve d’une extrême largesse dans l’appréciation du délai raisonnable.

L’indécision que nous postulons est également relevée lorsqu’elle se prononce sur le point de départ de l’épuisement des voies de recours internes.

2.2 L’imbroglio créé par la notion de « date retenue par la Cour »

L’article 56(6) de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples repris par le Règlement intérieur de la Cour africaine dispose que les requêtes doivent « être introduites dans un délai raisonnable courant depuis l’épuisement des recours internes ou depuis la date retenue par la [Cour] comme faisant commencer à courir le délai de sa propre saisine».42 Il convient de relever que cette disposition applicable par la Cour africaine montre qu’il y a bien de l’abstrait dans la détermination du point de départ de la computation du délai d’épuisement des voies de recours interne. Au fil de sa jurisprudence sur la question, elle apporte des clarifications sur la notion bien qu'elle soit variable. La distinction s’opère selon qu’il s’agit d’un fonctionnement normal ou anormal des voies de recours internes.

Dans le premier cas, le principe est clair: le délai de saisine commence à s’écouler à compter du premier jour franc suivant l’épuisement des recours internes (soit, en pratique, la date de la dernière décision insusceptible de recours rendue par le juge national).43 A ce principe, une exception a été relevée par la Cour africaine dans l’affaire Ayants droits de feus Norbert Zongo et autres c. Burkina-Faso. Les juges estimèrent qu’une interprétation raisonnable et de bonne foi devait conduire à apprécier la question du délai raisonnable à partir de l’adoption de son Règlement intérieur intérimaire en date du 20 juin 2008 au lieu du 22 août 2006 (date correspondant au premier jour franc à compter de l’épuisement des recours internes). Cet argument de l’auguste juridiction se base sur le fait qu’elle n’était pas encore opérationnelle. Et c’est seulement à partir d’elle que tous les requérants potentiels ont pu être en mesure de prendre connaissance du contenu de son Règlement intérieur, et de songer à saisir la Cour.44 De même, si la déclaration a été déposée après que le requérant ait épuisé les recours internes pertinents, le délai de saisine commencera à courir à compter de la date du dépôt de la déclaration, et non à compter de celle de la dernière décision judiciaire rendue.45 Ainsi, dans l’affaire Alex Thomas c. Tanzanie, la dernière décision rendue par le juge interne datait du 29 mai 2009. L’Etat défendeur n’ayant fait la déclaration susvisée qu’un an plus tard, le 29 mars 2010, la Cour décida de prendre cette dernière date comme point de départ.46

Dans le second cas, en cas de fonctionnement anormal des recours internes, il se pose le problème de la computation du point de départ des délais. L’affaire Onyango Nganyi et autres c. Tanzanie est assez édifiante à ce sujet, en ce sens qu’une clarification de l’anormalité y est donnée de même que la position de la Cour lorsque les recours internes se prolongent de façon anormale. Ainsi, selon le Black’s Law Dictionary, (Dictionnaire juridique de Black), «de façon anormale » signifie « de manière excessive » ou « sans justification».47 S’appuyant sur la jurisprudence de la Commission Africaine des Droits de l’Homme, la Cour note que dans la Communication 293/04: Zimbabwe Lawyers for Human Rights et Institute for Human Rights and Development in Africa c. Zimbabwe, la Commission africaine a fait observer que même si elle n’a pas formulé de définition standard de « prolongé de façon anormale», elle peut être guidée par les circonstances et le contexte de chaque affaire et par la doctrine de la Common Law du « test de l’homme raisonnable ». Sous ce critère, la Commission cherche à savoir, compte tenu de la nature et des circonstances particulières d’une affaire, quelle aurait été la décision d’un homme raisonnable.48 Dans cette affaire illustrative, la Cour relève que : « depuis 2006, près de dix ans après l’arrestation et la mise en accusation, des requérants jusqu’à ce qu’ils saisissent la Cour en 2013, les juridictions de l’État défendeur n’ont pas mené cette affaire à son terme. Les arguments avancés par le défendeur selon lesquels les retards sont dus aux requêtes en suspension des procédures introduites par les requérants ne sauraient prospérer, car il revient aux juridictions de l’État défendeur de traiter les affaires jusqu’à leurs conclusions. Comme nous avons démontré plus loin, l’imbroglio se justifie par le fait que la Cour procède par une extension des critères d’appréciation du délai raisonnable. Dans l’arrêt Woyomé par exemple, la Cour va au-delà de ses critères originels d’appréciation du point de départ du délai raisonnable et prend également en compte le critère lié aux faits de l’espèce.

Par ailleurs, rien n’indique que les juridictions de l’État défendeur ont fait droit à l’une quelconque de ces demandes de suspension dans les affaires concernées (...). Compte tenu de la situation dans laquelle se trouvent les requérants, qui est aggravée par le retard mis à leur fournir les comptes rendus d’audience, et l’absence de conseil au stade ultérieur de la procédure, la Cour considère que l’exception du défendeur tirée du non-épuisement des voies de recours internes est dénuée de tout fondement et la rejette en conséquence».49 Il convient donc de dire que le recours interne s’est prolongé de manière excessive ; par conséquent, le requérant était fondé à saisir la Cour africaine. Dans un autre cas, la date qui doit être retenue est alors celle de l’expiration du délai de recours non exercé selon le droit national.50 Néanmoins, dans certains cas, la Cour africaine semble appliquer une méthode en déphasage avec son Règlement intérieur. Elle fait conjointement usage de la date retenue par elle comme faisant commencer à courir le délai de sa saisine et se réfère aussi à certains faits pour déterminer sa saisine. L’article 40(6) du Règlement intérieur de la Cour dispose : « Être introduites dans un délai raisonnable courant depuis l’épuisement des recours internes ou depuis la date retenue par la Cour comme faisant commencer à courir le délai de sa propre saisine ». On peut se rendre compte que deux options sont prévues. Or la Cour va au-delà et se réfère à certains faits pour déterminer sa saisine.

Cette inconstance dans sa jurisprudence a été relevée dans l’affaire Alfred Agbesi Woyomé c. Ghana en ces termes:51

85. La Cour note que les recours internes avaient été épuisés le 29 juillet 2014 devant la Cour suprême, certes, mais que le requérant pouvait raisonnablement escompter que la procédure pénale engagée contre lui et la procédure de la Commission d’enquête aboutissent à une décision en sa faveur. 86. La Cour note en outre que le temps que le requérant a passé d’attendre la décision des procédures pénales engagées contre lui ainsi que celle de l’affaire devant la Cour d’appel contestant les conclusions de la Commission d’enquête justifie à suffisance le dépôt de la requête deux ans, cinq mois et dix-sept jours après l’épuisement des recours internes ».

Cette pratique, à en croire une certaine opinion, que nous partageons d’ailleurs, est erronée et ne répond pas à l’esprit du texte car les articles de la Charte et Règlement stipulent clairement la date retenue par la Cour et non des faits retenus pour fixer le délai de saisine.52 La Cour en retenant la date de l’arrêt de la chambre en révision (2014) et la date du dépôt de la requête (2017) et en tenant compte des faits survenus après la date de l’arrêt de la chambre en révision est sortie du sens même de l’article car par cette façon de faire, elle n’a déterminé aucune date comme faisant commencer à courir le délai de sa propre saisine et a par contre mélangé les deux choix que lui octroient les articles sus visés.53 De même, il convient de relever le raisonnement à double vitesse de la Cour consistant à rejeter les recours extraordinaires dans l’application de l’article 56(5) mais en les prenant tout de même en compte au moment d’évaluer le caractère raisonnable du délai de saisine après l’épuisement des recours. A titre illustratif, dans le même arrêt, faisant fi du recours en révision, la Cour constate que des recours internes étaient certes disponibles, mais n’auraient pas été efficaces pour répondre aux griefs du requérant.54 Or, pour déterminer si cette requête a été déposée dans un délai raisonnable, la Cour considère que les recours judiciaires ordinaires liés à la présente affaire ont été épuisés lorsque la Chambre de révision de la Cour suprême a rendu son arrêt le 29 juillet 2014.55 Il se dégage donc l’impression d’une trop grande largesse dans les critères ou circonstances prises en compte. On relève par conséquent une impression d’une certaine inconstance dans les délais et l’absence de différenciation selon les situations et la durée des délais. Par exemple, la question pertinente serait de savoir pourquoi un délai de cinq ans serait tout aussi raisonnable qu’un délai de deux ans dans les mêmes circonstances d’indigence du requérant.

En fin de compte, l’imbroglio est imposé par la Cour africaine elle-même, eu égard au non-respect de ses propres textes en matière de recevabilité de la requête. Ce qui semble également s’observer à d’autres stades de procédures.

3 L’ATTITUDE DE « JANUS » DE LA COUR AFRICAINE DE LA PHASE D’INSTRUCTION AU PRONONCÉ DE L’ARRÊT SUR LES RÉPARATIONS, UNE ATTEINTE À LA STABILITÉ DES SITUATIONS JURIDIQUES DES REQUÉRANTS

Le terme « Janus » renvoi à un nom d’une grande divinité romaine dont le temple était ouvert en temps de guerre, et fermé en temps de paix, et qui était représentée avec deux faces regardant l’une en avant l’autre en arrière.56 Dans le cadre de cette contribution, c’est cette physionomie de deux faces qui est mise en exergue. La Cour africaine, sanctionne le non-respect du délai raisonnable par les défendeurs alors qu’elle balbutie elle-même dans l’appréciation du temps des procédures.

3.1 Un temps non maîtrisé

Une juridiction qui peut condamner les Etats pour le non-respect des délais pourrait voir sa crédibilité mise à mal lorsqu’elle-même ne respecte pas lesdits délais; les normes qu’elle a fixées.57

3.1.1 Une variation du temps du prononcé des avis, ordonnances et arrêts

Le rôle de la jurisprudence dans les systèmes juridiques n’est plus à démontrer. Elle participe à l’éclairage des concepts, via la précision et la création des concepts.58 De même, elle est le reflet de l’application des dispositions légales à travers des canaux de production bien déterminés.59 Parmi ces canaux, on retrouve, les avis consultatifs, l’arbitrage, et l’ensemble du contentieux (fond et réparations). Les canaux de production de la Cour africaine sont prévus par le protocole portant création de la Cour et plus explicite dans son Règlement intérieur. Elle a compétence, a) pour connaître de toutes les affaires et de tous les différends dont elle est saisie concernant l’interprétation et l’application de la Charte, du Protocole et de tout instrument pertinent relatif aux droits de l’homme et ratifié par les Etats concernés ; b) pour donner un avis consultatif sur toute question juridique concernant la Charte ou tout autre instrument pertinent relatif aux droits de l’homme à condition que l’objet de l’avis consultatif ne se rapporte pas à une requête pendante devant la Commission; c) pour tenter de régler à l’amiable les affaires qui lui sont soumises conformément aux dispositions de la Charte; d) pour interpréter un arrêt qu’elle a rendu; e) pour réviser son arrêt à la lumière de nouvelles preuves en conformité avec l’article 67 du règlement.60

Une lecture minutieuse de quelques éléments de gestion des affaires permet d’analyser et d’apprécier le temps raisonnable du prononcé des arrêts ou décisions par la Cour africaine et ses avantages ou inconvénients à l’égard des requérants. Une demande d’avis consultatif introduite par Socio-Economic Rights and Accountability Project en date du 14 mars 2013 a été rendue le 26 mai 2017, soit cinq ans deux mois depuis son introduction.61 Une analyse du dossier révèle que le 29 juin 2016 est la date de clôture des échanges dans le cadre de ce dossier. Pour un avis consultatif qui est une procédure sans contradiction, la Cour n’aurait pas attendu presque 1 an avant de vider sa saisine. Entre le 14 mars 2013, date d’introduction de la demande et le 26 juin 2016, se sont produits des échanges entre les parties et les tiers. Si l’on s’en tient au nombre de sessions annuelles de la Cour, pendant un an, elle tient quatre sessions. Elle aurait dû vider sa saisine au plus sur deux sessions.

Une ordonnance de mesures provisoires a été demandée par Ingabiré Victoire Umuhoza c. Rwanda, en date du 3 octobre 2014; l’ordonnance a été rendue en date du 18 mars 2016, soit environ un an et cinq mois.62 Dans l’affaire Joseph Chacha c. Tanzanie, le requérant a introduit une requête en date du 30 septembre 2011 et la Cour a vidé sa saisine par un arrêt rendu le 28 mars 2014; soit une durée de trois ans six mois.63 De manière statistique, on peut se rendre compte que le délai pendant lequel la Cour se prononce soit sur un avis consultatif, soit sur une demande en révision, interprétation, sur le fond ou sur les réparations, est relativement excessif. Le rythme de productivité judiciaire par session, la lenteur dans la finalisation des affaires ainsi que la nature non permanente du fonctionnement de la majorité des juges de la Cour africaine, sont, entre autres, les causes de retard.

 

AGES

Nature des décisions

˂ 1

[1-2]

[2-3]

[2-3[

[3-5[

˃5

Mesures conservatoires

11

3

 

 

 

 

Fond

1

10

 

18

6

 

Fond et réparation partielle

 

 

2

 

 

 

Fond et réparation

1

1

 

 

 

 

Avis consultatifs

 

2

 

 

 

1

 

Statistique de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples de 2006 à 2018

 

D’ailleurs, la lecture faite à partir du tableau ci-dessus a plusieurs implications: la longueur du traitement de certaines affaires donne au requérant la conviction à un dénouement heureux, la confiance légitime; ce qui n’est pas le cas lorsque sa requête est déclarée après plusieurs années d’attentes irrecevable. De même, l’on note la perte de confiance envers la Cour, l’engorgement du rôle de la Cour du fait des affaires non encore vidées et de nouvelles affaires inscrites au rôle et l’incertitude des requérants quant à la réalisation de la jouissance de leurs droits du fait de la mise en péril de la stabilité de leur situation juridique.

3.1.2 Une différence d’appréciation du temps de la réparation

Le droit à réparation prend sa source dans la nécessité de civiliser la solution à la violation d’une obligation en substituant la réparation à la vengeance jadis acceptée comme la norme.64 Dans la même logique, la réparation est envisagée comme ayant un caractère exclusivement compensatoire et, donc, étranger à toute visée répressive.65 Aussi, c’est la « prestation fournie ou à fournir à un État ou à une organisation internationale en compensation d’un dommage subi et consistant dans le rétablissement de la situation antérieure à l’acte dommageable ou dans le versement d’une indemnité pécuniaire.66» A l’instar de nombreux autres principes juridiques, la réparation s’est importée dans le droit international avant de devenir partie intégrante du contentieux international des droits de l’homme.67 Dans le système africain des droits de l’homme, la Cour africaine s’illustre comme le modèle le plus avancé dans la galaxie des recours consacrant la réparation dans sa double acception d’obligation et de droit.68 Ce modèle est consacré sous le double angle normatif et jurisprudentiel. Eu égard à ce que le Protocole portant création de la Cour se limite à disposer quant au pouvoir de la juridiction à ordonner des réparations, c’est au Règlement intérieur qu’il faut se tourner pour être fixé sur les options procédurales y afférentes. On note ainsi qu’alors que l’article 27 du Protocole pose le principe de la réparation et donne le pouvoir à la Cour pour les liquider, le Règlement laisse à la juridiction un choix entre l’examen de la cause sur le fond conjointement avec les demandes sur les réparations et l’examen des réparations dans un arrêt séparé.69

Les affaires Mtikila c. Tanzanie70 et Armand Guéhi c. Tanzanie,71 constituent les temps fort de l’approche adoptée par la Cour africaine en matière de réparation. Dans le premier cas, la réparation est intervenue après la décision rendue sur le fond, alors que dans le second, elle a été prononcée simultanément sur le fond et les réparations. Au-delà du respect de l’alternative prévue par son Règlement intérieur, la Cour africaine procède à la mise en œuvre de sa décision prise depuis sa 49e session d’examiner à l’avenir les requêtes autant sur le fond que sur les réparations.72 Malgré ce revirement, néanmoins conforme à son cadre juridique, l’option de séparation perdurera du fait du nombre important des affaires dans lesquelles la Cour africaine a décidé d’examiner les questions de réparations dans un arrêt séparé. Dans l’affaire Alex Thomas c. Tanzanie,73 « La Cour, à l’unanimité, ordonne au défendeur de prendre toutes les mesures nécessaires dans un délai raisonnable pour réparer les violations constatées aux articles 7(1)(a), (c) et (d) de la Charte et 14(3)(d) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en particulier, pour avoir privé le requérant de la possibilité de reprendre la présentation des moyens de la défense et de rouvrir le procès, et d’informer la Cour des mesures prises, dans un délai de six mois, à compter de la date du présent arrêt ».

Dans le même ordre d’idée, dans l’affaire Ayants droit de feu Norbert Zongo et autres c. Burkina Faso,74 la Cour a ordonné:

à l’unanimité, i. à l’Etat défendeur de payer 25 millions FCFA à chacun des conjoints, 15 millions FCFA à chacun des fils et filles et 10 millions FCFA à chacun des pères et mères des personnes décédées. Ces paiements devraient se faire sur présentation des documents établissant les liens de parenté, tels qu’indiqués dans l’arrêt, notamment un acte de mariage, un acte de naissance et une attestation de parenté. ii. l’arrêt du 28 mars 2014 en la présente affaire constitue une forme de réparation du préjudice moral subi par le Mouvement Burkinabé des droits de l’homme et des peuples (MBDHP) ordonne, pour le surplus, à l’Etat défendeur de payer un franc CFA symbolique au MBDHP, à titre de réparation dudit préjudice. iii. A l’Etat défendeur de payer aux requérants la somme de quarante (40) millions de FCFA au titre des frais et honoraires qu’ils doivent à leurs avocats conseils, (...)

De manière globale, ces arrêts illustrent la pratique de l’examen disjoint du fond et de la réparation. Dans l’affaire Konaté, l’arrêt sur le fond a été rendu le 5 décembre 2014 alors que celui portant sur les réparations a été rendu le 3 juin 2015. Dans l’arrêt rendu sur le fond, il est décidé comme suit: « La Cour ayant statué sur l’ensemble des allégations formulées par les parties, elle se prononcera sur la demande en réparation dans un autre arrêt (...)».75 Pareillement, dans l’affaire Zongo, à l’unanimité, la Cour réserve la question des demandes en réparation et ordonne aux requérants de soumettre à la Cour leur mémoire sur les réparations dans les trente jours qui suivent la date de l’arrêt sur le fond.76 En ce qui concerne particulièrement la procédure sur les réparations, le temps y demeure un facteur important. Un arrêt rendu dans un délai raisonnable contribuera au rétablissement rapide de la situation de la victime. Or, la célérité n’est pas de mise à la lumière du temps mis par la Cour africaine pour vider sa saisine en matière de réparation. Dans ses arrêts disjoints, l’on note depuis l’introduction de la demande de réparation jusqu’au prononcé de l’arrêt par la Cour, une variété de temps relativement long. Ce temps diffère selon les cas. L’on note à titre illustratif une durée de trois ans et huit mois dans l’affaire Alex Thomas c. Tanzanie,77 une durée de trois ans et deux mois dans l’affaire Wilfried Onyango,78 une durée de onze mois dans l’affaire Révérend Mtikila, dix-huit mois dans l’affaire Lohé Issa Konaté, douze mois dans l’affaire Norbert Zongo et trois ans et un mois dans l’affaire Mohamed Abubakari.79

Ce rallongement de temps qui ne prend pas en compte la durée observée de la saisine de la Cour jusqu’à l’obtention de sa décision sur le fond, produit comme conséquence une perte. Cette perte que peut causer aux parties la longueur induite par la procédure en deux temps est bien le coût psychologique et économique.80 Le premier peut causer un préjudice fondamental en ce que c’est d’abord le besoin de justice que vient chercher un requérant devant la Cour africaine. Il suffira de noter que justice retardée est déni de justice. S’agissant du coût économique et même financier, à moins que la Cour n’ait ordonné des mesures provisoires, il va sans dire que plus longue est la procédure notamment vers les réparations, plus élevé est le risque de manque à gagner, de perte économique et financière, de voir la décision de la Cour intervenir à un moment où le requérant a déjà subi davantage de préjudice qu’il n’avait existé à l’introduction de la requête.81

3.2 La sanction du non-respect du délai raisonnable par les parties

Il s’agit d’une part de la radiation des affaires du rôle et d’autre part la mise en œuvre de la responsabilité de l’Etat.

3.2.1 La radiation des affaires du rôle pour non-respect du délai de réponse 

La radiation est une sanction du défaut de diligence des parties ou de leurs représentants, résultant d’une décision d’administration judiciaire qui entraine retrait du rang des affaires en cours et suspension de l’instance, sans cependant faire obstacle à la poursuite de celle-ci après rétablissement de l’affaire.82 Dans l’affaire Commission africaine des droits de l’homme et des peuples c. Lybie, la Cour africaine a procédé à la radiation de l’affaire inscrite à son rôle en ces termes:83

26. Jusqu’au 25 mars 2013, le Requérant n’avait toujours pas répondu à la demande du défendeur et ni le défendeur ni PALU n’avaient répondu à la lettre que leur avait adressée le Greffe ; Au vu de ce qui précède, a) la Cour constate que le requérant n’a pas déposé sa réplique malgré la prorogation au 31 août 2012 du délai requis, et qu’il a plutôt tenté de contourner cette exigence en demandant un ajournement sine die de l’instance, par sa lettre du 28 août 2012; b) En conséquence, la Cour estime que le requérant n’a pas cherché à faire aboutir la requête déposée le 31 mars en l’espèce; c) la Cour constate également que le requérant n’a pas répondu à la demande d’abandon de l’affaire formulée par le défendeur bien que cette demande ait été dûment notifiée au requérant.

3.2.2 La mise en œuvre de la responsabilité de l’Etat défendeur pour violation du droit à un délai raisonnable

D’emblée, il convient de dire que tous les justiciables ont droit à une bonne justice et, même si la justice des hommes est par essence relative, tout doit être fait pour que celle-ci soit rendue de la manière la plus satisfaisante possible. Il s’agit d’un droit fondamental qui passe par le respect du droit au juge et, plus largement, par celui du droit à un procès équitable.84 Ce dernier suppose pour sa mise en œuvre l’accomplissement de plusieurs exigences. Notamment: le droit à un tribunal établi par la loi, indépendant, impartial ; le droit à ce que sa cause soit entendue publiquement et équitablement et le droit d’être jugé dans un délai raisonnable, entre autres. La durée raisonnable de la procédure préserve la crédibilité de la justice et son efficacité.85 Une justice de qualité répond à un critère fondamental qui est celui de la célérité des procédures.86 En matière de délai raisonnable, il est essentiel de distinguer entre célérité et précipitation.

D’après la doctrine, l’on ne saurait trop se presser au risque de négliger des éléments probants capitaux à la manifestation de la vérité ; mais aussi, l’on ne doit pas trop prendre son temps, au risque de laisser dépérir les éléments de preuve essentiels à la manifestation de la vérité.87 Par ailleurs, il est aussi question d’éviter « que l’écoulement du temps ne préjudicie les droits et les intérêts des requérants».88 Les lenteurs de la justice valent aux Etats des condamnations sur le plan africain. L’illustration en est faite à travers la jurisprudence de la Cour africaine relative à la sanction de la violation du non-respect du délai raisonnable.

Dans l’affaire Wilfried Onyango Ngani et autres c. Tanzanie, plusieurs critères ont permis à l’auguste juridiction continentale, d’engager la responsabilité du défendeur pour violation des dispositions de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatives à l’exigence du droit à un délai raisonnable, et libellé en ces termes: « 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue. Ce droit comprend: (d) le droit d’être jugé dans un délai raisonnable par une juridiction impartiale.89» Le défendeur, après six années de détention du requérant, n’avait pas vider sa saisine. L’argument de la complexité de l’affaire, le comportement du requérant, le comportement des autorités judiciaires nationales ont été analysé par la Cour pour motiver sa décision. D’après elle, pour apprécier la complexité d’une affaire, tous les aspects doivent être pris en considération, étant donné que la complexité peut porter à la fois sur des questions de fait et de droit.90 Dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, la complexité peut être, entre autres facteurs, due à: la nature des faits qui sont à établir, le nombre d’accusés et de témoins, les éléments internationaux, la jonction de l’affaire à d’autres affaires, l’intervention des autres personnes dans la procédure.91

En conséquence, plus une affaire est complexe, plus longue en est la procédure. Cependant, même dans des affaires très complexes, les retards déraisonnables peuvent encore se produire.92 S’agissant du comportement du requérant, il y a lieu de dire que dans l’affaire Union Alimentaria Sanders SA c. Espagne, la Cour européenne des droits de l’homme a conclu que le requérant est seulement tenu de « faire preuve de diligence dans l’exécution des étapes procédurales pertinentes pour lui, de s’abstenir de recourir aux tactiques dilatoires et de se prévaloir des possibilités offertes par les lois internes pour abréger la procédure».93 Enfin, s’agissant du comportement des autorités judiciaires nationales, l’on peut retenir que les juges ont également le droit, aussi bien que le devoir, de s’assurer activement que les procédures judiciaires devant eux respectent l’exigence du délai raisonnable. D’ailleurs, dans l’affaire Cuscani c. Royaume-Uni, la Cour européenne a par exemple estimé que « le juge de première instance est l’ultime gardien de l’équité»,94 qu’elle attend du juge de première instance une attitude plus proactive.95 Ainsi, dans la jurisprudence de la Cour européenne, les retards qui ont été imputés à l’État dans les affaires pénales sont dus au transfert des dossiers d’une juridiction à une autre, à l’audition d’affaires impliquant soit deux, soit plus de deux accusés ensemble, à la communication du jugement à l’accusé et à la préparation et à l’audition des appels.

En outre, dans l’affaire Lucien Ikili Rashidi c. Tanzanie, pour engager la responsabilité de l’Etat défendeur pour violation du droit d’être jugé dans un délai raisonnable, prévu par l’article 7(1) d de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, « (...) la Cour fait observer que l’État défendeur avait déjà arrêté et incarcéré le Requérant en 2006 pour séjour illégal, soit sept ans avant le jugement de la Haute Cour de 2014 qui a conduit à son expulsion. L’État défendeur avait donc amplement connaissance du statut du Requérant. Par ailleurs, tel qu’il ressort du dossier, eu égard aux actes posés en juin 2006, il n’a fallu que quelques jours à l’État défendeur pour établir que le Requérant était en situation irrégulière et expulser sa famille. Dans ces circonstances, la Cour estime excessif le délai de six ans et quatre mois mis pour déterminer si une personne est en situation irrégulière par rapport à la loi de l’État défendeur sur l’immigration ».96 Après avoir passé en revue les différents éléments permettant d’apprécier le délai raisonnable, la Cour retient que cela n’a pas été respecté en raison du manque de diligence de la part des autorités judiciaires nationales.97

4 CONCLUSION: PISTES POUR LA CLARTÉ ET LA PRÉCISION DES DÉLAIS DEVANT LA COUR

La question des délais devant la Cour africaine est épineuse, eu égard aux nombreuses interprétations, et options prévues par les textes organisant la procédure contentieuse. Ce qui justifie de nombreuses conséquences à l’égard des requérants. Les pistes d’améliorations sont les suivantes: l’examen conjoint sur le fond et les réparations déjà expérimenté par la Cour africaine depuis ses quarante neuvièmes sessions. La pérennisation de cette option permettra de purger le rôle des audiences de la Cour qui regorge une centaine d’affaires pendantes.98 Il est aussi vrai que le problème de la longueur de la procédure conjointe va demeurer une équation irrésolue en ce que la Tanzanie, première pourvoyeuse du contentieux devant la Cour Africaine, a obtenu des délais supplémentaires allant jusqu’à quatre mois dans les requêtes les plus récentes notamment celles introduites à partir de 2017.99 Par ailleurs, le traitement des affaires en lignes peut-être une issue favorable, en ce sens que les requérants et même la Cour africaine, par le biais des outils numériques notamment l’internet pourront de manière virtuelle, relever le défi de la célérité et la dématérialisation des actes de procédures donc la paperasse alourdie les procédures. De même, l’on ne peut oublier le rythme de productivité judiciaire dont il faut revoir, notamment la réorganisation du travail en interne malgré la non-permanence de dix des juges de la Cour africaine. L’exigence de célérité dans les échanges entre juristes et juges rapporteurs, entre la division juridique et l’unité des langues dans la traduction et révision des projets d’arrêt, sont autant de pistes à explorer. Aussi, il urge de réformer le Règlement intérieur afin d’assurer la sécurité juridique et la stabilité des situations des requérants.


1. L Cadiet (dir) Dictionnaire de la justice (2004) 313.

2. Ibid.

3. Cadiet (n 1) 1088.

4. Allemagne c. Commission CJCE (26 mai 1982) 44/81.

5. Cadiet (n 1) 1053. Voir aussi G Cornu Vocabulaire juridique (2016) 811.

6. Cornu (n 5) 909.

7. O Corten L’utilisation du ‘raisonnable’ par le juge international (1997) 440.

8. Boddaert c. Belgique CEDH (12 octobre 1992) Ser A 235.

9. Deumeland c. Allemagne CEDH (20 mai 1986) Ser A 100.

10. Martins Moreira c. Portugal CEDH (26 octobre 1988), Ser A 143.

11. O c. Royaume-Uni CEDH (8 juillet 1987) Ser A 120.

12. Voir article 40 al 6 du règlement intérieur de la Cour.

13. Obermeier c. Autriche (28 juin 1990) CEDH Ser A 179.

14. F Ouguergouz ‘Conditions de recevabilité des “autres communications” in M Kamto (dir) La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et le protocole y relatif portant création de la cour africaine des droits de l’homme, Commentaire article par article (2011) 1043.

15. CV Nouazi Kemkeng ‘Le recours individuel dans les systèmes régionaux de protection des droits de l’homme. Etude comparative des systèmes africain, européen et interaméricain’ PhD thèse, Université de Yaoundé II 2016 205.

16. Gondrand (9 juillet 1981) CJUE 169/80.

17. H Wiebringhaus ‘La règle de l’épuisement préalable des voies de recours internes dans la jurisprudence de la Commission européenne des droits de l’homme’ (1959) 5 Annuaire français de droit international 685.

18. Guzzardi c. Italie (10 mars 1977) CEDH Ser A 76; Selmouni c. France (28 juillet 1999) CEDH Ser A 74; Kudła c. Pologne (26 octobre 2000) CEDH Ser A 152.

19. R Pinto La sentence Ambatielos (1957) Clunet 598.

20. T Larrouturou ‘La QPC est-elle une voie de recours à épuiser avant de saisir la cour européenne des droits de l’homme?’ (2015) 1 Revue du droit public et de la science politique en France et à l’étranger 111.

21. Article 40 alinéa 6 du Règlement intérieur (2010) 33.

22. Cornu (n 2) 411.

23. O Corten L’utilisation du ‘raisonnable’ par le juge international (1997) 557-559.

24. Cornu (n 2) 315.

25. Corten (n 7) 163.

26. JF Renucci Droit européen des droits de l’homme (2017) 389.

27. Ayants droit de feus Norbert Zongo, Abdoulaye Nikiema dit Ablassé, Ernest Zongo et Blaise Ilboudo & Mouvement Burkinabé des droits de l’homme et des Peuples c. Burkina Faso (21 juin 2013, exceptions préliminaires).

28. On peut citer le degré d’alphabétisation, indigence, détention ou non, etc.

29. C’est le cas de l’entrée en fonction de la juridiction.

30. Mohamed Abubakari Tanzanie, CAfDH (3 juin 2016, fond) para 92.

31. Alex Thomas c. Tanzanie, CAfDH (20 novembre 2015, fond) 1 RJCA 482 para 74. Dans la même logique, voir Kijiji c. Tanzanie CAfDHP (21 mars 2018, Compétence et recevabilité), délai raisonnable: deux ans et onze mois, le requérant était profane en matière de droit, indigent et incarcéré et sans assistance judiciaire et en plus, ignorait l’existence de la Cour et comment la saisir; Nguza Viking c. Tanzanie CAfDHP (23 mars 2018, Compétence et recevabilité), délai raisonnable: un (1) an et vingt-et-jours (21), le requérant était profane en matière de droit, indigent, incarcéré et sans assistance judiciaire et a tenté d’exercer un recours en révision; Amiri Ramadhani c. Tanzanie CAfDHP (11 mai 2018, recevabilité), délai raisonnable:  cinq ans (5) et un mois (1) treize jours (13), le requérant était profane en matière de droit, indigent, incarcéré, sans liberté de mouvement , accès limité à l’information et sans assistance judiciaire.

32. Tanganyika Law Society, The Legal and Human Rights Centre, Révérend Christopher R. Mtikila c. République de Tanzanie, requêtes n 9/2011 et n 11/2011, CAfDHP (14 juin 2013, fond) para 83.

33. Tanganyika Law Society (n 2) para 74.

34. Mohamed Abubakari (n 2) para 93.

35. R Kolb ‘La sécurité juridique en droit international: aspects théoriques’ (2002) 10 African Yearbook of International Law 118.

36. Marckx c. Belgique 1979 CEDH 58.

37. Article 35 para 1 de la Convention européenne des droits de l’homme- Conditions de recevabilité ‘1. La Cour ne peut être saisie [que] dans un délai de six mois à partir de la date de la décision interne définitive’.

38. Mocanu et autres c. Roumanie 2006 CEDH 258; Lopes de Sousa Fernandes c. Portugal 2017 CEDH 129

39. Sabri Güneş c. Turquie 2012 CEDH 39 99.

40. Wilfred Onyango Nganyi et 9 autres c. Tanzanie CAfDHP (18 mars 2016, fond) 1 RJCA 526. Voir aussi Anudo Ochieng c. Tanzanie CAfDHP (22 mars 2018, fond) dans laquelle la Cour a considéré cinq (5) mois et vingt-et-un jour (21) comme étant un délai raisonnable motif pris de ce que le requérant se trouvait en dehors du pays.

41. Michael Majuru c. Zimbabwe, Communication 308/05 para 109, Commission Africaine des droits de l’homme et des peuples, Rapport de la 44e session ordinaire (10-24 novembre 2008).

42. Article 40(6) du règlement intérieur (n 2) 33.

43. W Hoeffner L’accès de l’individu à la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (2016). Curitiba 876.

44. Zongo et autres c. Burkina Faso CAfDHP (21 juin 2013, exceptions préliminaires) 1 RJCA 2019.

45. Hoeffner (n 43) 877.

46. Alex Thomas c. Tanzanie, CAfDHP (20 novembre 2015, fond) para 73.

47. Wilfred Onyango Nganyi et 9 autres c. Tanzanie, CAfDHP (18 mars 2016, fond) para 91.

48. Wilfried Onyango Ngani (n 2) para 92.

49. n 2, paras 94 et 96.

50. Ayants droits de feus Norbert Zongo, Abdoulaye Nikiema dit Ablasse, Ernest Zongo et Blaise Ilboudo et Mouvement Burkinabé des droits de l’homme et des peuples c. Burkina Faso, CAfDHP (21 juin 2013, exceptions préliminaires) para 116.

51. Alfred Agbesi Woyomé c. République du Ghana CAfDHP (28 juin 2019, compétence et recevabilité).

52. Voir l’opinion individuelle du juge Bensaoula, jointe à l’affaire Alfred Agbesi Woyomé c. Ghana CAfDHP (28 juin 2019, compétence et recevabilité).

53. Voir opinion individuelle du Juge Bensaoula.

54. Alfred Agbesi Woyomé (n 51) para 68.

55. n 51, 81.

56. Dictionnaire le littré (1880).

57. S Hanffou Nana La Cour africaine des droits de l’homme et des peuples: etude à la lumière de l’expérience européenne (2016) 332.

59. Gatsi (n 58) 488.

60. Article 26 du Règlement intérieur de la Cour africaine.

61. SERAP CAfDHP (26 mai 2017, avis consultatif).

62. Ingabire Victoire Umuhoza c. Rwanda CAfDHP (18 mars 2016, mesures provisoires).

63. Joseph Chacha c. Tanzanie CAfDHP (28 mars 2014, fond).

64. G Tomeba Mabou ‘La réparation devant les juridictions judiciaires internationales’ PhD Thèse, Université de Strasbourg, 24 janvier 2017 11.

65. G Tomeba Mabou (n 64) 11.

66. J Basdevant (dir) Dictionnaire de la terminologie de droit internationale public (1960) 528.

67. S Oré ‘La systématisation de la réparation devant la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples’ (2019) 1.

68. Aucune des conventions portant création des autres institutions juridictionnelles régionales n’inclut une disposition similaire à celle du Protocole portant création de la Cour africaine relativement aux mesures de réparations pouvant être ordonnées en cas de violation des droits humains.

69. Oré (n 67) 2.

70. W Monzala Le contentieux de la réparation devant la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples: A propos de l’arrêt Révérend Christopher R. Mtikila c. République Unie de Tanzanie’ (2015) 53  Petites affiches 6.

71. Armand Guehi c. Tanzanie CAfDHP (7 décembre 2018, fond et réparations).

72. Oré (n 67) 3.

73. Alex Thomas c. Tanzanie CAfDHP (2013).

74. Ayants droit de feu Norbert Zongo et autres c. Burkina Faso.

75. Ayants droit de feu Norbert Zongo para 174.

76. Ayants droit de feu Norbert Zongo paras 203, 6 et 7.

77. Le requérant a introduit sa demande en réparation le 27 novembre 2015 et l’arrêt sur les réparations a été rendu le 04 juillet 2019. Voir Alex Thomas c. Tanzanie CAfDHP (4 juillet 2019, réparations).

78. Voir Wilfried Onyango Ngany et 9 autres c. Tanzanie CAfDHP (4 juillet 2019, réparations). Le requérant a introduit sa demande en réparation en avril 2016, la procédure a été close en date du 28 janvier 2019 et l’arrêt sur les réparations prononcé le 4 juillet 2019.

79. Voir Mohamed Abubakari c. Tanzanie CAfDHP (4 juillet 2019, réparations). Le requérant a introduit sa demande en réparation courant juin 2016, la clôture de la procédure est intervenue le 28 septembre 2018 et l’arrêt sur les réparations prononcé le 4 juillet 2019.

80. Oré (n 67) 13.

81. Oré (n 67) 13.

82. Cornu (n 5) 846.

83. Commission africaine c. Lybie CAfDHP (15 mars 2013, fond).

84. Renucci (n 26) 399.

85. F Sudre Droit international et européen des droits de l’homme (1999) 237.

86. F Foka Le contentieux africain des droits de l’homme et des peuples (2008) 3 73.

87. Foka (n 86) 74.

88. B-RG Dongmo ‘Pratique du contentieux des droits de l’homme et procédures d’urgence’ in JD Boukongou (dir) Protection des droits de l’homme en Afrique (2007) 185-195.

89. Article 7(1)(d) de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples.

90. Wilfried Onyango Ngani (n 2) para 138.

91. Boddaert c. Belgique (1987) CEDH 129 19.

92. Boddaert c. Belgique (1987) CEDH 87 dans laquelle une période de six ans et trois mois n’a pas été considérée comme non raisonnable par la Cour, du fait qu’elle concernait une enquête difficile sur un meurtre et l’évolution parallèle de deux affaires.

93. Union Alimentaria Sanders SA c. Espagne (1989) 011 681 CEDH para 35.

94. Cuscani c. Royaume Uni (24 septembre 2002) CEDH 32771196.

95. Cuscani (n 94).

96. Lucien Ikili Rashid c. Tanzanie, CAfDHP (28 mars 2019, fond et réparations) para 108.

97. Wilfried Onyango Ngani (n 40) para 155.

98. Précisément 155 au 30 juin 2019 selon les statistiques du Greffe de la Cour disponible sur http://www.african-court.org (consulté le 30 juin 2019).

99. Oré (n 2) 13.