Christian Via Balole
 Doctorant en sciences juridiques de l’Université Catholique de Louvain – Centre de recherche interdisciplinaire Droit, Entreprise et Société (CRIDES) – Atelier de droit social (Belgique) et de l’Université Catholique de Bukavu (RD Congo), titulaire du diplôme de Master de spécialisation en droits humains de l’Université Catholique de Louvain et du diplôme de Licence en droit de l’Université Catholique de Bukavu. Boursier FRESH du FRS–FNRS
  christian.viabalole@ uclouvain.be / This email address is being protected from spambots. You need JavaScript enabled to view it.
  https://orcid.org/0009-0006-2880-5179


 Edition: AHRY Volume 7
 Pages: 237-259
 Citation:  CV Balole ‘La protection des normes fondamentales du travail dans le droit de la zone de libre-échange continentale africaine: contribution à l’émergence du régionalisme social dans le commerce régional africain’ (2023) 7 Annuaire africain des droits de l’homme 237-259
 http://doi.org/10.29053/2523-1367/2023/v7a11
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RÉSUMÉ:

Les normes fondamentales du travail constituent le parent pauvre du droit de la zone de libre-échange continentale africaine, qui se contente de promouvoir la libéralisation du commerce tout en passant sous silence les dimensions sociales. Sur la base du principe d’intégration systémique, cette contribution démontre les mécanismes juridiques via lesquels ces normes peuvent tout de même être protégées dans ce droit. Considérant toutefois qu’il s’agit d’une protection par ricochet pouvant se révéler inefficace, cet article met en évidence le besoin criant d’un cadre juridique qui protège expressis verbis ces normes. Il s’agit d’un cadre juridique qui ne se contente pas de faire référence à des normes internationales du travail reconnues par l’Organisation internationale du Travail, mais qui prévoit aussi des systèmes de règlement des différends, des mécanismes de coopération en matière de travail, ainsi que des sanctions financières. Une telle approche est de nature à déboucher sur l’émergence du régionalisme social dans le commerce régional africain.

TITLE AND ABSTRACT IN ENGLISH:

The protection of core labour standards in the African Continental Free Trade Area treaty: contribution to the emergence of social regionalism in African regional trade

ABSTRACT

The core labour standards are a poor side in the African free trade area treaty which focuses on the promotion of trade liberalisation while completely ignoring social dimensions. Based on the principle of systemic integration, this contribution demonstrates the legal mechanisms through which these standards can nonetheless be protected in this law. Considering, however, that this is an indirect protection that can prove ineffective, this article highlights the crying need for a legal framework that expressly protects these standards. This is a legal framework that not only refers to international labour standards recognised by the International Labour Organisation, but also provides for dispute settlement systems, labour cooperation mechanisms and financial penalties. Such an approach is likely to lead to the emergence of social regionalism in African regional trade.

MOTS-CLÉS: protection, normes fondamentales du travail, zone de libre-échange continentale africaine, intégration systémique, moralité publique, régionalisme social 

SOMMAIRE:

1 Introduction 

2 La protection par ricochet des normes fondamentales du travail dans le droit de la ZLECAf 

2.1 La protection des normes fondamentales du travail via les principes de la préservation des acquis et de prise en compte des meilleures pratiques 

2.2 La protection des normes fondamentales du travail via le régime juridique des exceptions générales à l’Accord 

2.3 La protection des normes fondamentales du travail au travers les règles d’interprétation applicables au règlement de différends 

3 La protection expresse des normes fondamentales du travail dans le droit de la ZLECAf 

3.1 Intérêt et fondement juridique de la protection expresse des normes fondamentales du travail dans le droit de la ZLECAf 

3.2 Les mesures de protection des normes fondamentales du travail dans la ZLECAf 

4 Conclusion 

1 INTRODUCTION

L’idée prévalente selon laquelle «le travail est une affaire purement intérieure et que le niveau national est approprié à sa gouvernance» n’est qu’un nationalisme méthodologique.1 En effet, comme le fait remarquer Adelle Blackett, la problématique du travail peut trouver des réponses puissantes dans le régionalisme social, car ce dernier «propose une autre vision de la gouvernance du travail dans le commerce régional, vision qui porte la justice distributive au-delà des frontières nationales».2 Bien que la protection des normes du travail relève traditionnellement de l’État, qui a l’obligation de protéger les travailleurs sur son territoire, elle peut avoir également lieu dans un espace économique dépassant les frontières nationales dans le cadre de la libération des échanges. Dans cet espace où les activités économiques ont une base transnationale, les droits des travailleurs ne peuvent plus être envisagés uniquement dans le seul cadre étatique.3 Le respect de ces droits dans cet espace transnational appelle donc une action globale, qui ne peut s’arrêter aux frontières des États.4 A cet égard, le régionalisme social se présente comme un outil visant à renforcer la mise en œuvre des législations nationales du travail que chaque État doit respecter dans le cadre particulier de la libéralisation des échanges.

En Afrique, cette problématique est assez délicate étant donné que le continent fait partie des régions qui ont la plus forte proportion de travailleurs pauvres et où les déficits de travail décent sont on ne peut plus accrus.5 Ces déficits prennent la forme de «chômage et de sous-emploi, d’emplois improductifs et de faible qualité, de travaux dangereux et de revenus précaires, de droits bafoués et d’inégalité entre les sexes».6 

Néanmoins, au travers le régionalisme économique mis en place dans le cadre de la zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), ces déficits pourraient trouver des réponses satisfaisantes. En effet, lancée en 2021, la ZLECAf, par le truchement de la libéralisation du commerce qu’elle induit, constitue une sorte de new deal africain susceptible de booster le commerce intra-africain7 ainsi que la participation des entreprises africaines aux chaînes d’approvisionnement régionales et mondiales.8 Qui plus est, elle est susceptible de séduire de plus en plus les investisseurs en vue du développement économique et social du continent africain. Ce développement est possible via la création d’emplois,9 grâce à la recrudescence des flux de capitaux10 et des chaînes de valeur qu’induit la libéralisation des échanges.11

De surcroît, en éliminant progressivement les barrières tarifaires et non-tarifaires au commerce des marchandises,12 la ZLECAf permet de réduire les coûts de production des entreprises et de propulser le taux de cette production. Ainsi, les possibilités d’emploi devraient s’ouvrir, car les entreprises bénéficient d’économies d’échelle afin de profiter de nouveaux marchés.13

Cependant, ces impacts potentiels ne doivent aucunement occulter les répercussions de la libéralisation des échanges sur les normes fondamentales du travail. Ces normes comprennent: l’interdiction du travail forcé, le droit à la liberté d’association et à la reconnaissance effective du droit de négociation collective, l’abolition effective du travail des enfants, l’élimination de la discrimination en matière d’emploi et de profession ainsi que le droit à un milieu de travail sûr et salubre.14 Ces normes sont celles dont leur mise en œuvre conditionne le bien-être des travailleurs15 et, à cet effet, constituent des objectifs stratégiques du travail décent.16 Ce dernier

résume les aspirations des êtres humains au travail. Il regroupe l’accès à un travail productif et convenablement rémunéré, la sécurité sur le lieu de travail et la protection sociale pour tous, de meilleures perspectives de développement personnel et d’insertion sociale, la liberté pour les individus d’exprimer leurs revendications, de s’organiser et de participer aux décisions qui affectent leur vie, et l’égalité des chances et de traitement pour tous, hommes et femmes.17

Dans le cadre de la ZLECAf, s’il est vrai que la libéralisation du commerce est susceptible de créer nombre d’emplois, il n’en reste pas moins que les emplois existants et à créer risquent, malgré leur potentielle augmentation, de ne pas assurer aux travailleurs les conditions de travail décent. Ce risque s’explique par le fait que les dimensions sociales constituent le parent pauvre du droit de la ZLECAf. Ce dernier, qui comprend l’Accord portant création de la ZLECAf (l’Accord) et ses protocoles, met en effet l’accent sur les impacts positifs du commerce et passe sous-silence les normes fondamentales du travail. Dans une telle situation, la quantité d’emplois prend manifestement le pas sur la qualité de ces derniers. Pourtant, il est admis que la libéralisation du commerce est susceptible de compromettre la qualité de l’emploi, se manifestant par «une baisse des salaires, une moindre sécurité de l’emploi, des problèmes de santé et de sécurité, une augmentation des heures de travail et une intensification de la charge de travail».18 Autrement dit, les normes fondamentales du travail risquent d’être affectées par cette libéralisation du commerce19 étant donné que l’Accord s’inscrit dans le schéma de certains accords de libre-échange (ALE), qui font pencher les règles du jeu économique en faveur des investisseurs et contre les travailleurs.20 Cet état de fait est inquiétant tant il n’est pas sans importance de rappeler que

les travailleurs ne sont pas une marchandise qui peut être déplacée et exploitée à moindre prix, au mépris des législations et systèmes nationaux. [Cela a] pour conséquence la perte de tout espoir pour un emploi durable [et le refus] aux travailleurs le droit à l’égalité et à la dignité.21

Le concept de dumping social imputable aux lacunes du droit permet de mieux expliquer les conséquences de cette carence de protection des normes fondamentales du travail dans le droit de la ZLECAf. En effet, le dumping social se produit:

Lorsque les entreprises abusent de la libre circulation dans le marché unique pour porter atteinte ou se soustraire aux normes et réglementations du travail, s’assurant ainsi un avantage concurrentiel au détriment des entreprises de bonne foi.22

[De même,] lorsque les droits de douane et autres barrières sont supprimés, les entreprises sont incitées à déplacer la production vers les endroits où les coûts sont les plus bas. Les emplois sont alors transférés des pays où les salaires sont plus élevés et les protections du travail meilleures vers les pays où le coût de production est plus faible. Cela peut déclencher ce que l’on appelle une “course vers le bas”, où les pays tentent de se surpasser en abaissant les réglementations et la protection du travail.23

En dépit de la non prise en compte des dimensions sociales dans le droit de la ZLECAf, il convient tout de même de savoir par quel mécanisme juridique les normes fondamentales du travail peuvent-elles être protégées au sein de ce droit? La réponse à cette question met en évidence le fait que l’absence de protection de ces normes doit être lue avec nuance. En effet, le droit de la ZLECAf peut offrir une protection par ricochet des droits humains fondamentaux au travail (2). Cependant, comme nous le verrons dans les lignes qui suivent, une telle protection peut connaître certaines limites. A cet égard, une protection expresse s’avère la mieux indiquée (3).

2 LA PROTECTION PAR RICOCHET DES NORMES FONDAMENTALES DU TRAVAIL DANS LE DROIT DE LA ZLECAf

L’article 31(3)(c) de la Convention de Vienne sur le droit des traités consacre l’interprétation systémique, c’est-à-dire la lecture qui vise à éclairer un fragment du texte par d’autres textes. L’intégration systémique part donc de l’idée que les traités sont une création du système juridique international et leur application est fondée sur ce fait. Ainsi, le droit international est perçu comme un système juridique en ce que ses règles et principes opèrent en relation avec d’autres règles et principes et devraient être interprétés dans le contexte de ces derniers.24 Il s’agit de l’interprétation systémique stricto sensu, sur lequel peut s’appuyer l’argument de la protection par ricochet des normes fondamentales du travail au travers les règles d’interprétation applicables au règlement de différends (2.3). Au-delà de cette interprétation systémique autonome, le droit de la ZLECAf lui-même admet l’interprétation systémique. En effet, au travers le régime juridique des exceptions à l’Accord de la ZLECAf (2.2), les obligations des États, au titre de cet Accord, sont à interpréter de sorte qu’elles ne puissent pas compromettre d’autres engagements souscrits par les États dans d’autres domaines, en particulier en matière de travail. De même, ce droit définit les principes de la ZLECAF, dont certains font référence à la préservation des acquis et meilleures pratiques pouvant inclure notamment les normes du travail (2.1).

2.1 La protection des normes fondamentales du travail via les principes de la préservation des acquis et de prise en compte des meilleures pratiques

La préservation des acquis et la prise en compte des meilleures pratiques au sein des CER et dans le cadre des conventions internationales applicables à l’Union africaine (UA) font partie des principes qui régissent la ZLECAf.25 Parmi ces acquis et pratiques, certains portent sur les droits au travail.

En effet, au niveau régional, plusieurs CER ont manifesté leur volonté de défendre les droits de l’homme. Dans le cadre de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADEC) par exemple, il a été adopté la Charte des droits sociaux fondamentaux, qui met en avant les droits à l’emploi et à la protection sociale. Dans le cadre du Marché commun de l’Afrique orientale et australe (COMESA) et de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), les États se sont fixés l’objectif d’améliorer la qualité de vie des habitants. La CEDEAO a en particulier adopté une convention générale sur la sécurité sociale des travailleurs migrants.26 De même, le Traité créant la CEDEAO rappelle la nécessité de la sécurité sociale et encourage les États membres à harmoniser leur droit du travail et la législation relative à la sécurité sociale.27

En ce qui concerne la prise en compte des meilleures pratiques dans le cadre des conventions internationales applicables à l’UA, tous les États africains sont tenus de respecter les conventions fondamentales du travail, considérées comme contraignantes pour tous les États.

Il en découle que les États parties à la ZLECAf se sont engagés, dans le cadre de CER et de l’UA à respecter, protéger et réaliser les droits de l’homme, en particulier les droits au travail.28 Ces engagements sont des acquis et pratiques qui mettent en avant la protection de ces droits. Ainsi, les États parties à la ZLECAf devraient mettre en œuvre leurs obligations au titre de l’Accord de la ZLECAf sans compromettre leurs engagements en matière de travail.

2.2 La protection des normes fondamentales du travail via le régime juridique des exceptions générales à l’Accord

D’emblée, il convient de noter que le huitième alinéa du préambule de l’Accord reconnaît le droit des États parties de réglementer sur leur territoire les flexibilités dont ils disposent pour poursuivre des objectifs légitimes de politique publique, y compris dans les domaines de la moralité publique.

Qui plus est, l’article 26 du protocole sur le commerce des marchandises et l’article 15 du protocole sur le commerce des services disposent ce qui suit:

Sous réserve que de telles mesures ne soient pas appliquées d’une manière à constituer un moyen de discrimination arbitraire ou injustifiable entre les États parties où les mêmes conditions existent, ou une restriction déguisée au commerce international, aucune disposition [des présents Protocoles]ne peut être interprétée comme empêchant l’adoption ou l’application par tout État partie, des mesures: ... nécessaires à la protection de la moralité publique ...

Cette exception est aussi prévue dans le droit de l’Organisation mondiale du Commerce (OMC) au travers l’article XX de l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT). A l’instar du GATT, le droit de la ZLECAf ne fournit aucune indication de ce qu’il convient d’attendre par «mesures nécessaires» et «moralité publique». Néanmoins, l’apport de la jurisprudence de l’OMC pourrait servir à déterminer la portée de ces concepts.

En effet, en ce qui concerne les mesures nécessaires, dans l’affaire Thaïlande-Restrictions à l’importation et taxes intérieures touchant les cigarettes, le Groupe spécial de l’OMC a conclu que

les restrictions à l’importation imposées par la Thaïlande ne pouvaient être considérées comme «nécessaires» que s’il n’y avait pas d’autres mesures compatibles, ou moins incompatibles, avec l’Accord général qu’elle pouvait raisonnablement être censée employer pour atteindre les objectifs de sa politique de santé.29

De même, dans l’affaire États-Unis-Prohibition à l’importation de certaines crevettes et de certains produits à base de crevettes, l’organe d’appel (l’OA) de l’OMC a souligné que l’article XX du GATT comprend

les mesures qui sont reconnues comme étant des exceptions aux obligations de fond établies par le GATT de 1994, parce que les politiques internes incorporées dans ces mesures ont été reconnues comme ayant un caractère important et légitime.30

Il découle de ces tendances jurisprudentielles qu’une mesure est nécessaire lorsqu’elle favorise la réalisation de l’objectif poursuivi, qui doit être important et légitime. Les États sont donc appelés à analyser «a) l’importance de la valeur protégée; b) la contribution de la mesure au but poursuivi; et c) les effets de la mesure sur le commerce».31

Quant à la moralité publique, dans l’affaire Chine-Mesures affectant les droits de commercialisation et les services de distribution pour certaines publications et certains produits de divertissement audiovisuels, le Groupe spécial de l’OMC a souligné que

la protection de la moralité publique figure parmi les valeurs ou intérêts les plus importants recherchés par les Membres dans le cadre de la politique publique. Nous ne voyons rien de fortuit dans le fait que l’exception relative à la « moralité publique» est la première exception indiquée dans les dix alinéas de l’article XX. Nous convenons donc que la protection de la moralité publique est une valeur ou un intérêt extrêmement important.32

Ainsi, en application de cette exception, nombre d’États membres de l’OMC adoptent des

mesures commerciales restrictives visant à protéger la moralité publique à l’intérieur de [leurs] frontières, menacée par une activité commerciale qui porte atteinte aux mœurs de ses citoyens, et ce, à cause de la manière dont les produits visés ont été fabriqués.33

Pour la doctrine, il s’agit d’une interprétation dynamique «autorisant les États à prendre des mesures restrictives pour le commerce afin de protéger les droits au travail».34 Nous venons de voir que la jurisprudence de l’OMC considère cette moralité comme «une valeur ou un intérêt extrêmement important». Or, la violation des droits humains constitue une atteinte aux «valeurs fondamentales»35. Ainsi, au nom de la protection de la moralité publique, certains États membres de l’OMC interdisent notamment l’importation des biens fabriqués sous-couverts du travail forcé,36 des pires formes de travail des enfants,37 de la traite des êtres humains,38 ou en violation de normes relatives au travail de façon générale.39

Dans le cadre de la ZLECAf, toutes ces mesures restrictives au commerce sont, en application des articles 26 et 15 des protocoles sur le commerce des marchandises et des services, susceptibles d’être prises par les États africains en vue de concourir à la protection des normes fondamentales du travail. Ces restrictions au commerce sont aussi justifiées par le fait que

tous les pays ont un intérêt commun à la réalisation et au maintien de normes équitables de travail en rapport avec la productivité de la main-d’œuvre et, de ce fait, aux conditions de rémunération et de travail meilleures que cette productivité rend possibles.40

Enfin, il est important de noter qu’au-delà de cette exception liée à la moralité publique, les normes fondamentales du travail peuvent aussi être protégées par une autre exception à l’Accord. En effet, les articles 26 et 15 susvisés permettent également aux États de prendre les mesures nécessaires pour assurer le respect des lois ou règlements qui ne sont pas incompatibles avec les dispositions de l’Accord. Parmi ces lois et règlements, figurent évidemment les législations du travail. Les États parties à la ZLECAf sont ainsi obligés de prendre des mesures restrictives comme au commerce aux fins d’assurer le respect des normes fondamentales du travail.

Il appert toutefois que, dans le cadre de l’OMC, l’exception relative à la moralité publique est celle qui est généralement invoquée aux fins d’assurer la protection des normes du travail. Dans tous les cas, les deux exceptions peuvent utilement être invoquées.

2.3 La protection des normes fondamentales du travail au travers les règles d’interprétation applicables au règlement de différends

L’article 30 du protocole sur les règles et procédures relatives au règlement des différends dispose que le Groupe spécial et l’OA «interprètent les dispositions de l’Accord, conformément aux règles coutumières d’interprétation du droit international public, notamment la Convention de Vienne sur le Droit des Traités ...». Aux termes de cette convention, aux fins de l’interprétation d’un traité, «le contexte comprend, outre le texte, préambule et annexes inclus: ... toute règle pertinente de droit international applicable dans les relations entre les parties».41

Les États membres de la ZLECAf ont, dans le septième alinéa du préambule de l’Accord, reconnu expressis verbis l’importance des droits de l’homme pour le développement du commerce international. Nous venons de voir également que le huitième alinéa du préambule de l’Accord reconnaît le droit des États parties de réglementer sur leur territoire les flexibilités dont ils disposent pour poursuivre des objectifs légitimes de politique publique. Ces derniers comprennent notamment le respect de la législation sociale et la moralité publique. Ainsi, lorsque le différend porte sur les mesures restrictives au commerce afin de protéger cette moralité publique, le Groupe spécial et l’OA devront notamment interpréter le droit applicable à la lumière du préambule de l’Accord qui renvoie aux droits de l’homme. Parmi ces derniers, figurent les normes fondamentales du travail. Ainsi, la règle pertinente de droit international à laquelle renvoie la convention de Vienne comporte principalement les conventions fondamentales de l’OIT, qui garantissent les droits humains fondamentaux au travail. Ces derniers sont, en effet, des «objectifs de justice sociale»42 et constituent «la base d’un dialogue social et d’institutions du marché du travail efficaces».43 Le Groupe spécial et l’OA ne doivent donc pas limiter l’examen des affaires portées devant eux au seul cadre juridique actuel au motif qu’il est dépourvu des normes du travail. Qui plus est, bien que le protocole sur les règles et procédures relatives au règlement des différends limite la compétence de l’organe de règlement de différend (ORD) aux différends survenant entre les États parties concernant leurs droits et obligations en vertu des dispositions de l’Accord, il n’en reste pas moins qu’il ne limite en aucun cas les sources du droit potentiellement applicables. A cet égard, comme le souligne le Professeur Lorand Bartels s’agissant du droit de l’OMC44 dépourvu aussi de protection expresse des normes fondamentales du travail, 45 tout le droit international est potentiellement applicable.

Cette lecture rencontre même l’affirmation de l’organe d’appel de l’OMC qui a souligné qu’«il ne faut pas lire l’Accord général en l’isolant cliniquement du droit international public».46 En d’autres termes, «les règles de l’organisation n’empêchent pas les États de respecter à la fois leurs obligations en matière commerciale et celles qui leur incombent en vertu du droit international du travail».47 Le Groupe spécial de l’OMC a d’ailleurs souligné à cet égard que «la Convention interaméricaine peut raisonnablement servir de référence ...».48 Ces lectures devraient guider les groupes spéciaux et l’OA institués dans le cadre de la ZLECAf aux fins de tenir en compte, dans le règlement de différends, du cadre juridique international dans lequel s’inscrit le droit de la ZLECAf. Ce cadre juridique comprend notamment le droit international des droits de l’homme.49 Or, il est admis que

l’ensemble des normes de l’OIT contribue à la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels ainsi qu’aux droits civiques et politiques. La protection des droits au travail fait [donc]partie intégrante des obligations en matière de respect des droits de l’homme.50

De même, à l’instar du droit de l’OMC, les groupes spéciaux et l’OA, en application de l’interprétation sus évoquée, devront, autant que faire se peut, s’appuyer, dans des différends ultérieurs, sur le raisonnement et les conclusions contenus dans des rapports qu’ils ont adoptés51 précédemment à l’issue d’une analyse faite à la lumière du droit international du travail. Cela s’explique par le fait que, une fois adoptés, «les rapports de groupes spéciaux et de l’Organe d’appel suscitent chez les [États membres] des attentes légitimes et devraient donc être pris en compte lorsqu’ils sont pertinents pour un autre différend»52 portant sur les restrictions au commerce en vue de la protection des droits au travail.

Ces quelques mécanismes juridiques sont de nature à garantir le respect des normes fondamentales du travail et, partant, le travail décent dans la ZLECAf, et ce, indépendamment du fait que l’Accord ne les protège pas expressément. Cependant, aussi louables soient-ils, ces mécanismes juridiques peuvent s’avérer inefficaces. En effet, en interprétant l’Accord de la ZLECAf à l’aune du droit international du travail, les États seraient critiques à l’égard de décisions de l’ORD qui ferait preuve d’un certain activisme et irait au-delà, voire contre, la volonté expresse des États telle que contenue dans l’Accord. Dans ce dernier en effet, les États se sont principalement engagés à la libéralisation des échanges. Cette critique est d’ailleurs formulée par les États-Unis notamment à l’encontre de l’OA de l’OMC pour son «activisme judiciaire».

Du point de vue des États-Unis, le rôle de l’OA devrait se résumer à appliquer les règles de l’OMC et corriger les erreurs de droit commises par le groupe d’experts. Dans les faits, les États-Unis reprochent à l’OA une tendance à vouloir combler les lacunes des textes et établir un principe complémentaire là où les règles de l’OMC ne disaient rien.53

A cet égard, seule la protection expresse de ces normes dans le droit de la ZLECAf obligerait les États à veiller à leur respect. Elle obligerait également, sans équivoque, les Groupes spéciaux et l’OA à interpréter l’Accord à la lumière du droit international du travail.

3 LA PROTECTION EXPRESSE DES NORMES FONDAMENTALES DU TRAVAIL DANS LE DROIT DE LA ZLECAf

Nombre des mesures peuvent être adoptées par les États parties à l’Accord en vue de protéger expressément les normes fondamentales du travail dans la ZLECAf (3.2). Cette protection expresse doit cependant être justifiée et son fondement juridique mérite d’être établi (3.1).

3.1 Intérêt et fondement juridique de la protection expresse des normes fondamentales du travail dans le droit de la ZLECAf

Le besoin d’une protection expresse des normes fondamentales du travail dans la ZLECAf est criant aux fins de développer un commerce exempt de dumping social.54 Il s’inscrit d’ailleurs dans le droit fil de la nouvelle réalité du système commercial mondial, qui vise à lier explicitement les privilèges commerciaux à l’amélioration des réglementations du travail afin d’empêcher un nivellement par le bas préjudiciable aux droits des travailleurs.55 Ainsi, au-delà de la libéralisation des échanges, le droit de la ZLECAf devrait être un outil permettant de mettre fin à la violation des droits des travailleurs,56 en accordant un accent prioritaire sur les défauts d’application de la législation nationale du travail.57

Cette protection permet aussi de concourir à la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies. En effet, le huitième ODD porte sur «le travail décent et la croissance économique». Cette dernière est donc étroitement liée au travail décent en ce qu’il n’y pas de cloison étanche entre les deux. Le travail décent est aussi un élément clé à la réalisation d’une mondialisation juste, à la réduction de la pauvreté et à la promotion de la paix58 dont le continent africain a plus que besoin. Or, cette paix «ne peut être établie que sur la base de la justice sociale».59 Pour parvenir à cette dernière, la promotion du travail décent constitue une des clés essentielles.60 Cette promotion comporte nombre d’objectifs stratégiques incluant en particulier les normes fondamentales du travail.61 Enfin, il est dans l’intérêt des pays africains de s’unir pour non seulement bénéficier du libre-échange, mais aussi pour étendre le bénéfice à tous dans un monde globalisé.62 Cette extension implique l’importance de rétablir des mécanismes de redistribution et de solidarité au sein même des accords de libre-échange.63

La protection des normes fondamentales du travail repose également sur des fondements juridiques évidents. En effet, les États ont expressément reconnu dans l’Accord l’importance des droits de l’homme pour le développement du commerce international.64 Le développement du commerce est donc lié au respect des droits de l’homme. Parmi ces derniers, figurent les droits humains fondamentaux au travail qui constituent «un pilier central des principes universels devant guider les transactions économiques».65 Ainsi, le travail n’est donc pas considéré comme un «ajout», un «supplément», au commerce, mais plutôt comme un élément indispensable dans la façon de concevoir le social dans l’économique.66 Il convient de souligner également que l’Accord tient en compte, dans le 4e alinéa du préambule, les aspirations énoncées dans l’Agenda 2063 de l’union africaine (UA).67 Parmi ces aspirations, la première porte sur «une Afrique prospère fondée sur la croissance inclusive et le développement durable». Pour y parvenir, le premier domaine prioritaire que se sont fixés les États membres de l’UA est le travail décent.68 De même, en 2015, dans la Déclaration d’Addis-Abeba visant à transformer l’Afrique grâce au travail décent pour un développement durable, les États africains et les organisations d’employés et d’employeurs se sont mis d’accord sur la nécessité d’intégrer davantage le travail décent dans des cadres régionauxet69 ont fait du travail décent l’une des priorités stratégiques à l’échelle du continent.70 Enfin, tous les pays africains membres de la ZLECAf ont quasi ratifié toutes les conventions de l’OIT portant sur les principes et droits fondamentaux au travail.71 Il est important de noter que, s’agissant même des pays qui ne les ont pas encore ratifié, ils ont l’obligation du seul fait de leur appartenance à l’OIT, de les respecter, de les promouvoir et de les réaliser de bonne foi, et ce, conformément à la constitution de l’OIT.72 Ainsi, la protection des normes fondamentales du travail dans le droit de la ZLECAf ne serait qu’une des voies efficaces pour les États africains de concourir au respect de leurs obligations juridiques contractées à l’échelle internationale, régionale voire nationale.73

Certes, il ne faut pas perdre de vue que la principale raison de ne pas insérer les clauses sociales dans les accords commerciaux semble être les coûts liés à la protection des droits au travail.74 Bien plus, les États, notamment ceux en voie de développement

voient dans cette clause sociale une mesure protectionniste ...[qui] aurait pour conséquence d’entraver leur développement industriel et de remettre en cause leurs avantages comparatifs, liés notamment à leur capacité à utiliser de manière productive une main-d’œuvre bon marché.75

Cette approche est sujette à critique, car elle relègue au second plan les droits de l’homme en faveur du commerce. Pourtant, comme le fait remarquer Tiphaine Régnier, les normes fondamentales du travail

devraient être soustraites au libre jeu de la concurrence[, car]le lien entre les normes de travail et le commerce est envisagé sous l’angle des droits de l’homme, avec l’idée que les droits des travailleurs doivent être protégés en raison de leur valeur propre, et non en raison de leurs effets sur l’économie ....76

Dans le cadre de la ZLECAf, bien que nous n’ayons pas de base pour confirmer ces raisons, il reste clair que les États ont privilégié les intérêts économiques en ignorant de protéger les normes du travail dans l’Accord.

3.2 Les mesures de protection des normes fondamentales du travail dans la ZLECAf

Dans le droit de la ZLECAf, les normes fondamentales du travail peuvent être expressément protégées à travers un protocole dédié à leur protection (3.2.1), qui doit prévoir un système de règlement de différends (3.2.3) et être assorti des mesures destinées à assurer le respect de ses dispositions (3.2.4). Cette protection peut aussi être assurée à travers le cadre institutionnel de mise en œuvre de la ZLECAf (3.2.2).

3.2.1 L’adoption d’un protocole sur les normes du travail

Aux termes de l’Accord, «les instruments supplémentaires, jugés nécessaires dans le cadre de la poursuite des objectifs du présent Accord sont conclus et font, dès leur adoption, partie intégrante du présent Accord».77 Pour les raisons sus évoquées, le besoin d’adoption d’un protocole sur les normes du travail est indéniable.

En vertu de ce protocole, tous les États parties à l’Accord seront tenus au respect mutuel des droits des travailleurs, de se conformer à l’agenda du travail décent de l’OIT78 et à la Déclaration sur les principes et droits fondamentaux au travail.79 Bien plus, ce protocole devra, à l’instar notamment de l’ALE entre les États-Unis et la Jordanie (2000-2001), engager surtout les États «à respecter leur législation nationale et précise[r] que les faibles normes du travail ne doivent pas être utilisées pour encourager le commerce».80 Il s’agit, comme cela ressort notamment de l’ALE entre le Canda et le Pérou, d’une clause de non-dérogation selon laquelle

Toute Partie ne renonce pas ou ne déroge pas, ni n’offre de renoncer ou de déroger, à son droit du travail d’une façon qui affaiblisse ou qui diminue l’adhésion aux principes et aux droits du travail internationalement reconnus ... dans le but de stimuler le commerce ou l’investissement.81

De surcroît, ce protocole devra consacrer le principe de la primauté des droits sociaux fondamentaux sur les libertés économiques. Cette primauté vise à protéger la dignité des travailleurs, qui est une valeur importante par rapport aux libertés économiques. Le protocole devra prévoir également la responsabilité solidaire dans les chaînes de sous-traitance ou d’approvisionnement. Une telle responsabilité serait possible en consacrant, dans ce protocole, l’obligation de diligence raisonnable. Les États africains devront peser cette obligation sur toutes les entreprises, indépendamment de leur structure sociale, de leur taille, de leur chiffre d’affaires et de leur nombre de salariés. En effet, toutes les entreprises sont susceptibles, par action ou omission, d’être responsables, dans leurs chaînes d’approvisionnement, de violations des droits humains fondamentaux au travail. Le protocole devra étendre également cette obligation «à toutes les entités auxquelles l’entreprise est connectée, que ce soit par des investisse-ments ou des relations contractuelles».82

Le protocole gagnerait en efficacité en organisant en plus un régime de renversement de la charge de la preuve en faveur des travailleurs victimes. Un tel renversement est soutenable, car c’est l’entreprise qui détient des «informations pertinentes relatives à ses activités et à l’organisation de ses relations avec ses filiales ou ses partenaires commerciaux, et la victime n’y a généralement pas facilement accès».83 De cette façon, ce protocole aura le mérite de pousser toutes les entreprises opérant dans la ZLECAf d’identifier, de prévenir et d’atténuer les incidences négatives, réelles ou potentielles, de leurs activités sur les normes fondamentales du travail ainsi que de rendre compte de la manière dont elles y remédient.84

Il convient enfin de noter que l’article 28 de l’Accord permet de le réviser tous les cinq ans après son entrée en vigueur en vue notamment de l’adapter aux enjeux nouveaux du développement régional et international. Parmi ces enjeux, les dimensions sociales occupent une place on ne peut plus importante. Cet article 28 constitue une «clause évolutive» permettant aux États de développer et d’approfondir la coopération instaurée par l’Accord et de l’étendre à des domaines non couverts. Cette évolution n’est pourtant plus à démontrer de nos jours. En effet, elle s’inscrit en droite ligne de l’agenda progressiste ou inclusif en commerce international, qui se traduit par des dispositions dans les accords commerciaux dans des domaines jugés prioritaires tels que les droits des travailleurs.85

Dans le cadre de ce nouveau régime qui serait institué par la ZLECAf, l’effectivité des normes fondamentales du travail serait renforcée par le fait que, au-delà des sanctions financières que nous verrions plus loin, les États seraient plus incités à respecter ces normes. En effet, leur non-respect devra impliquer, entre autres comme conséquences, la suspension des avantages économiques issus de la libéralisation des échanges. Les mécanismes de coopération entre États en matière de travail devant être mis en place dans le cadre de ce protocole sont aussi de nature à amener les États à mieux respecter leurs obligations en faveur des travailleurs.

3.2.2 La protection des normes fondamentales du travail à travers le cadre institutionnel de mise en œuvre de la ZLECAf

Le cadre institutionnel pour la mise en œuvre, l’administration, la facilitation, le suivi et l’évaluation de la ZLECAf comprend nombre d’organes notamment le Conseil des ministres. En effet, aux termes de l’Accord «il est créé un Conseil des ministres composé des ministres africains en charge du commerce, ou d’autres ministres, autorités ou fonctionnaires dûment désignés par les États parties».86

Si cette composition reflète la place que l’Accord réserve au commerce via la représentation des ministères du commerce, il n’en reste pas moins qu’elle insinue aussi le fait que les dimensions sociales ne sont pas une priorité pour la ZLECAf. A cet égard, au vu des raisons sus évoquées, il conviendrait d’inclure également les ministres africains en charge du travail dans la composition de ce Conseil. Ces ministères seraient chargés de veiller à la mise en œuvre effective des dimensions sociales de l’Accord devant être intégrées au travers le protocole sus référé. Ils devront également proposer au conseil des Ministres les mesures nécessaires pour la promotion des normes fondamentales du travail, les projets des règlements, des directives et faire des recommandations en matière sociale. Ils devront, en plus, donner des avis aux projets des règlements et/ou des directives dans d’autres domaines autres que le social en vue de déceler leur éventuel impact sur les normes fondamentales du travail et ainsi proposer des mesures de mitigation. L’implication de ces ministères de travail est aussi indispensable, car le ministère du commerce pourrait ne pas aller au-delà de son mandat afin de veiller à la protection des normes du travail. Pour autant, il ne s’agirait pas d’impliquer une multitude des ministères. En effet, comme vu précédemment, l’agenda progressiste ou inclusif en commerce international, veut que seuls les domaines jugés prioritaires tels que les droits des travailleurs et la protection de l’environnement soient pris en compte.87

Enfin, dans le cadre de la mise en œuvre, du suivi et d’évaluation des dispositions du protocole sur les normes du travail, le Conseil des ministres comportant déjà en son sein les ministères de travail, devra, à l’instar des protocoles sur le commerce des marchandises et des services, instituer un comité sur les normes du travail. Ce comité devra exercer les fonctions assignées par le Conseil des ministres pour faciliter l’application du protocole sur les normes du travail et réaliser ses objectifs. Ce comité pourra aussi, le cas échéant, être doté des organes subsidiaires appropriés pour l’exécution effective de ses missions. Les rapports annuels devront également être produits par ce comité, en concertation avec les ministères de travail et les principales organisations syndicales, en vue de faciliter le processus de mise en œuvre, de suivi et d’évaluation du protocole sur les normes du travail.

L’impact de ces initiatives est indéniable, car une fois adoptées par le Conseil des ministres, elles sont obligatoires à l’égard de tous les États parties. En effet, aux termes de l’Accord, «Les décisions prises par le Conseil des ministres, dans l’exercice de son mandat, sont contraignantes pour les États parties»,88 «Les États parties prennent les mesures nécessaires en vue de mettre en œuvre les décisions du Conseil des ministres».89

3.2.3 La protection des normes fondamentales du travail via le régime juridique de règlement de différends

Le protocole sur les normes du travail ne devrait pas se contenter de répertorier et de reconnaître les normes fondamentales du travail. Il devra aussi prévoir un système de règlement des différends90 de nature à concourir à son respect.

En effet, aux termes de l’article 20 de l’Accord, «il est institué ... un mécanisme de règlement des différends qui s’applique au règlement des différends entre les États parties». Ce mécanisme «s’applique conformément au Protocole sur les règles et procédures relatives au règlement des différends». Ce protocole «s’applique aux différends survenant entre les États parties concernant leurs droits et obligations en vertu des dispositions de l’Accord».91

Ainsi, le protocole sur les normes du travail étant adopté, il sera considéré, en application de l’article 8(3) de l’Accord, comme faisant partie intégrante dudit Accord. A cet égard, ses dispositions devront également faire l’objet de résolutions des litiges au même titre que les obligations commerciales.92

Afin d’assurer le respect des normes du travail, le protocole sur les règles et procédures relatives au règlement des différends devra être amendé sur plusieurs points. D’emblée, le mécanisme de règlement des différends de la ZLECAf, au-delà d’être «un élément essentiel pour assurer la sécurité et la prévisibilité du système commercial régional»,93 devra aussi être outil pour assurer le respect des normes fondamentales du travail au sein de la ZLECAf.

Qui plus est, le terme «Partie à un différend ou à une procédure» ne devra pas seulement désigner «un État partie à un différend ou à une procédure»,94 mais aussi les principales organisations syndicales, qui devront être habilitées à saisir l’organe de règlement de différend (ORD). Ces organisations seront à identifier au regard de leur représentativité nationale (les confédérations de syndicats nationaux) et régionale (l’Organisation régionale africaine de la Confédération syndicale internationale: CSI-Afrique). Le différend devra ainsi désigner un désaccord entre les États parties ou entre une ou plusieurs organisations syndicales et un ou plusieurs États parties relatif à l’interprétation et/ou application de l’Accord en rapport avec les droits et obligations des États parties. Dans cette optique, les organisations syndicales devront également être considérées comme «Partie plaignante». Ainsi, à l’instar des États, elles devront en premier lieu faire recours à la procédure des consultations en vue de trouver une solution à l’amiable. Lorsque celle-ci se révèle infructueuse, elles devront alors saisir l’ORD. Le droit d’action des organisations syndicales devrait ainsi comprendre le droit d’initier la procédure des consultations et le droit de saisir l’ORD de l’affaire et de demander la mise en place d’un Groupe spécial de règlement du différend. Ces amendements sont indéniables, car bien qu’il soit prévu que le recours aux procédures de règlement des différends ne doit pas être considéré comme des «actes contentieux»,95 il n’en reste pas moins que, pour s’éviter d’éventuels ennuis politiques, les demandes de consultations ou la saisine de l’ORD par les États parties seront rares en matière sociale. Ainsi, ne pas reconnaître aux principales organisations syndicales la possibilité d’initier la procédure de règlement de différends portant sur le protocole relatif aux normes du travail pourrait tout simplement amenuir la mise en œuvre et l’efficacité dudit protocole. Il convient donc de ne pas laisser son application être étroitement soumise à la volonté politique des États, car leur degré d’implication au sujet des droits des travailleurs varie fortement selon leur sensibilité politique et leur idéologie.96

Quant à la Tierce partie dans un différend, elle devra, au-delà d’«un État Partie ayant un intérêt substantiel dans un différend»,97 être étendue aux principales organisations syndicales ayant un intérêt à faire respecter les dispositions du protocole sur les normes du travail, lorsque ce sont ces dernières qui font l’objet du différend. Ainsi, ces organisations syndicales pourront aussi participer aux procédures des consultations et dans une affaire portée devant l’ORD en vue de se faire entendre et de présenter des communications écrites. Pour participer aux consultations, le protocole sur les règles et procédures relatives au règlement des différends dispose que la tierce partie doit avoir un «intérêt commercial substantiel».98 Cet intérêt devra être étendu aux fins de comporter également un «intérêt social substantiel». Ce dernier implique, en effet, toute violation des normes fondamentales du travail. De même, lors de l’examen de l’affaire, en vue d’être suffisamment éclairé, le nouveau cadre juridique à mettre en place devra mentionner expressis verbis que le Groupe spécial a le droit de demander aux organisations syndicales des renseignements nécessaires lorsque le différend porte sur la violation des dispositions du protocole relatif aux normes du travail.

Ces quelques propositions de réforme permettront ainsi de faire participer les organisations syndicales dans le processus de règlement des différends portant sur le protocole relatif aux normes du travail. Cette participation s’avère nécessaire, car, au-delà de l’intérêt ci-haut mentionné, ces organisations ont une prise sur les réalités des conditions de travail et constituent les véritables représentants99 et défenseurs des travailleurs et de leurs droits. Elles permettent aussi de mettre à jour des pratiques néfastes de certaines entreprises en matière sociale et, partant, de contribuer à les faire disparaître.

Enfin, il est important de noter que l’implication des organisations syndicales peut utilement s’appuyer sur les acquis et pratiques de certaines CER, qui font intervenir les acteurs non étatiques dans le règlement des différends. A titre exemplatif, le West Africa Network for Peacebuilding (WANEP) a joué un rôle important dans le système de surveillance sur le terrain dans le cadre du réseau d’alerte rapide et de réponse de la CEDEAO. Cette collaboration entre le WANEP et la CEDEAO est un exemple de pratique optimale pour nouer des alliances avec la société civile. Elle est examinée par d’autres sous-régions africaines qui en sont au stade préliminaire de la mise en place de tels systèmes, comme la Communauté économique des États de l’Afrique centrale.100

3.2.4 La protection des normes fondamentales du travail via le régime juridique applicables aux mesures visant le respect des recommandations et décisions de l’ORD

Le protocole sur les règles et procédures relatives au règlement des différends dispose que les recommandations ou les décisions sont prises à l’égard d’un État dont l’une ou nombre de ses mesures ont été jugées incompatibles avec l’Accord.101 Lorsque ces recommandations et décisions ne sont pas mises en œuvre102 dans un délai raisonnable, l’article 25(1) de ce protocole dispose qu’il peut, bien que non-préférable, être fait recours à la compensation et la suspension de concessions ou d’autres obligations. Il ne s’agit donc pas de deux mesures à appliquer au même moment. En effet, c’est

si aucune compensation satisfaisante103 n’est convenue[que] la partie plaignante peut demander à l’ORD l’autorisation de suspendre les bénéfices en faveur de l’État partie concerné des concessions ou autres obligations relevant de l’Accord.104

Comme dans le cas de la compensation, la suspension de concessions ou d’autres obligations est une mesure corrective temporaire qui ne se substitue pas, mais incite plutôt à la mise en conformité.105 Par conséquent, ces contre-mesures qui ne sont pas des mesures correctives punitives106 doivent être levées une fois que l’État défendeur s’est pleinement conformé aux recommandations et décisions de l’ORD.107

Ces solutions peuvent utilement être retenues, en premier chef, lorsque les recommandations ou décisions du Groupe spécial ou de l’OA sont prises à l’issue d’un différend mettant en cause les dispositions du protocole sur les normes du travail. Il convient toutefois de préciser que la suspension de concessions ou d’autres obligations n’implique pas la suppression ou la réduction des normes fondamentales du travail par un ou plusieurs États qui ont été lésés. Cette suspension implique la suppression ou la réduction des avantages que l’État qui ne s’est pas conformé aux recommandations et décisions bénéficient au titre de l’Accord et de ses protocoles, excepté le protocole sur les normes du travail qui, une fois adopté, ne devra pas autoriser de réciprocité. En effet, ce protocole, en tant qu’instrument des droits de l’homme, ne pourra pas constituer « un réseau d’échanges d’obligations interétatiques» en ce qu’il vise à reconnaître des droits aux individus.108 Bien plus, à l’instar du droit de l’Union européenne, le droit de la ZLECAf conviendrait à offrir des préférences tarifaires supplémentaires aux pays qui mettent effectivement en œuvre les normes fondamentales du travail.109 Ces préférences devront être définies avec la participation notamment du Conseil des ministres, du comité sur les normes du travail et des principales organisations syndicales. Enfin, des sanctions financières pourront également être imposées.110A l’instar notamment de l’ALE entre le Canada et le Pérou, les fonds issus de ces sanctions devront servir à alimenter «un fonds destiné à développer des activités de coopération en matière de travail».111 Cette coopération est indéniable112 en ce que la contribution des mesures restrictives du commerce à l’atteinte de l’objectif de protection des droits humains fondamentaux au travail peut s’avérer peu efficace. Ainsi, parmi les solutions de rechange moins restrictives au commerce, la coopération internationale peut aussi être préférée pour assurer le respect effectif et efficace des normes du travail.113 Bien entendu, toutes mesures sont sans préjudice d’autres mesures ou sanctions prévues par le droit de chaque État à l’encontre des entreprises ou toute autre personne impliquée dans la violation des normes fondamentales du travail.

4 CONCLUSION

Le droit a, schématiquement, deux fonctions à l’égard de l’économie. D’une part, il aide l’économie à accomplir son rôle de maximisation des richesses, en établissant les conditions minimales de possibilité des échanges de ressources ... et en corrigeant certaines imperfections du marché. D’autre part, le droit est chargé de redistribuer les richesses en fonction de choix politiques basés sur des conceptions de la justice sociale.114

C’est autour de ces deux fonctions complémentaires que se situent les analyses ci-haut développées. Dans le cadre de la ZLECAf, cette contribution a cherché à démontrer qu’il ne doit pas y avoir de cloison étanche entre le régionalisme économique et le régionalisme social. Cela sous-tend, en effet, que tout en réglementant le commerce, le droit de la ZLECAf devrait également réglementer la protection des normes fondamentales du travail au sein de ce régionalisme commercial. Il s’agit donc de ne pas considérer le travail comme un «ajout», un «supplément» au commerce, mais plutôt comme un élément indispensable dans la façon de concevoir le social dans l’économique.115

Pour y arriver, les organisations syndicales africaines ont un rôle majeur à jouer.116 Ces dernières, via le dialogue social,117 sont appelées à s’investir dans la promotion de ce régionalisme social dans le commerce régional africain. Leurs actions syndicales gagneraient en termes d’impact à être soutenues par les organisations syndicales internationales. En effet, face à un monde en constante mutation, à des crises et défis globaux, la solidarité entre travailleurs doit dépasser les frontières pour plus de justice sociale partout dans le monde.118 Les organes de la ZLECAf, notamment le Conseil des Ministres, devraient également privilégier la consultation des organisations syndicales dans l’élaboration, l’adoption et l’implémentation de décisions prises en vertu de l’Accord et qui ont une incidence sur les normes du travail. Concrètement, ils sont appelés à solliciter

de façon appropriée les vues, les conseils et le concours des organisations d’employeurs et de travailleurs dans des domaines tels que: (i) la préparation et la mise en œuvre de la législation touchant leurs intérêts.119

Cette consultation est essentielle pour promouvoir le développement économique qui n’affecte pas négativement les conditions de travail et qui élève les niveaux de vie de chacun.120

Toutes ces mesures devront permettre de créer l’espace nécessaire pour remettre en cause le cadre actuel de l’économique, qui a pour effet de reléguer le social.121

 

 


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71. Point 10 Déclaration d’Addis-Abeba Transformer l’Afrique grâce au travail décent pour un développement durable. Cadres et perspectives pour un développement inclusif et durable; voir aussi https://www.ilo.org/africa/areas-of-work/labour-standards/lang--fr/index.htm (consulté le 13 juillet 2023).

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84. Déclaration de principes tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale, 2022.

85. S Paquin et H Rioux (dir) ‘L’agenda progressiste et les accords commerciaux de nouvelle génération’ (2021) 65 Revue Interventions économiques 4.

86. Art 11(1) de l’Accord.

87. S Paquin et H Rioux (dir) ‘L’agenda progressiste et les accords commerciaux de nouvelle génération’ (2021) 65 Revue Interventions économiques 4.

88. Art 11(5) de l’Accord.

89. Art 11(6) de l’Accord.

90. https://www.ilo.org/global/standards/information-resources-and-publications/free-trade-agreements-and-labour-rights/lang--fr/index.htm (consulté le 6 mars 2023).

91. Art 3(1) protocole sur les règles et procédures relatives au règlement des différends.

92. J Ghatii Etude exploratoire. Conception de la zone de libre-échange (ZLEC): une perspective sur les droits humains en Afrique (2016) 36.

93. Art 4(1) du protocole sur les règles et procédures relatives au règlement des différends.

94. Art 1(f) du protocole sur les règles et procédures relatives au règlement des différends.

95. Art 4(5) du protocole sur les règles et procédures relatives au règlement des différends.

96. Zini (n 80) 163.

97. Art 1(g) du protocole sur les règles et procédures relatives au règlement des différends.

98. Art 7(10) du protocole sur les règles et procédures relatives au règlement des différends.

99. Daniel (n 23) 7.

100. T Ekiyor Le rôle de la société civile dans la prévention des conflits: les expériences ouest-africaines (2008) 31-32.

101. Art 23 et 24 du protocole sur les règles et procédures relatives au règlement des différends.

102. Ce concept de mise en œuvre implique le retrait ou la modification de la mesure incompatible avec les règles violées. Décision de l’arbitre États-Unis-Loi sur la compensation (Amendement Byrd) (article 21(3)(c)), para 49.

103. Il s’agit, en effet, de la même mesure prévue dans le droit de l’OMC. Inde-Brevets (États-Unis), Rapport de l’Organe d’appel, para 41.

104. Art 25(4) du protocole sur les règles et procédures relatives au règlement des différends.

105. Voir les décisions des arbitres CE - Bananes III (États-Unis) (article 22:6 - CE), para 76.

106. Voir les décisions des arbitres CE - Bananes III (États-Unis) (article 22:6 - CE), para 6.3.

107. États-Unis-Maintien de la suspension / Canada - Maintien de la suspension, Rapports de l’Organe d’appel para 355.

108. Voir l’observation générale n° 24 du 4 novembre 1994 du Comité des droits de l’homme sur les questions touchant les réserves formulées au moment de la ratification du Pacte ou des Protocoles facultatifs y relatifs ou de l’adhésion à ces instruments, ou en rapport avec des déclarations formulées au titre de l’article 41 du Pacte, paragraphe 17.

109. D Chambovey ‘Le système de commerce multilatéral et la question des normes du travail’ (1996) 15 Annuaire suisse de politique de développement 197.

110. Ghatii (n 92) 37.

111. Zini (n 80) 165.

112. R Andreychuk et P Downe Les accords de libre-échange: un levier de prospérité économique, Rapport du comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international (2017) 39.

113. Villanueva (n 31) 622.

114. H Culot ‘Les sanctions dans le droit de l’Organisation mondiale du commerce’ (2013) 73 Annales de Droit de Louvain 41.

115. Blackett (n 1) 681.

116. Daniel (n 23) 6-27.

117. Labour Research and Policy Institute, Trades Union Congress (Ghana) (n 10) 26.

118. A Smyth ‘Travail décent en RD Congo: quels rôles pour les syndicats et la coopération internationale?’ (2021) 15-16 Dynamiques. Histoire sociale en revue: Travail et conditions de travail en RD Congo hier et aujourd’hui 1.

119. Point 5(b) Recommandation OIT 113 sur la consultation aux échelons industriel et national, 1960.

120. Point 4 Recommandation OIT 113 sur la consultation aux échelons industriel et national, 1960.

121. Blackett (n 1) 680.