Junior Mumbala Abelungu
 Docteur en droit (PhD) de l’Université de Gand (Belgique), Master de spécialisation en droit international de l’Université Libre de Bruxelles, Master de spécialisation en droits de l’homme des Universités Catholique de Louvain, Namur et Saint-Louis, Master de spécialisation en Analyse interdisciplinaire de la construction européenne des Universités Catholique de Louvain et Saint-Louis,
 Professeur de droit international humanitaire et droits de l’homme à l’Ecole de Criminologie de l’Université de Lubumbashi, de droit international public à l’Université Protestante de Lubumbashi et de droit administratif à l’Institut Supérieur de Commerce de Lubumbashi en RD Congo
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 Ezéchiel Amani Cirimwami
 Doctorant en droit international aux facultés de droit et de criminologie de la Vrije Universiteit Brussel et de l’Université Catholique de Louvain (Cotutelle), LLB en droit (Université Officielle de Bukavu), LLM en droit international humanitaire et droits de l’homme (Université Catholique de Bukavu)
 Ancien Substitut du Procureur de la République et actuellement Juge en RD Congo
Ezechiel. Cirimwami.Amani@vub.be


 Edition: AHRY Volume 2
  Pages: 1 - 23
 Citation: JM Abelungu & EA Cirimwami ‘Le système africain de protection des droits de l’homme et le droit international humanitaire’ (2018) 2 Annuaire africain des droits de l’homme 1 - 23 http://doi.org/10.29053/2523-1367/2018/v2n1a1
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RÉSUMÉ

Cet article examine la manière dont le système africain de protection des droits de l’homme appréhende le droit international humanitaire (DIH) ou résiste à l’aborder. L’analyse se base essentiellement sur la pratique de la Commission et de la Cour africaines des droits de l’homme et des peuples. L’article examine d’abord si la Commission et la Cour africaines des droits de l’homme et des peuples peuvent interpréter et appliquer les instruments de DIH. Il y répond par l’affirmative. Il analyse ensuite la pratique de ces deux institutions et constate que dans les affaires où celles-ci ont eu l’opportunité d’interpréter ou d’appliquer les règles de DIH, elles se sont caractérisées par une réticence.  Enfin, en perspective de la nouvelle Cour africaine de justice, des droits de l’homme et des peuples, en sa section de droit international pénal, l’article s’interroge également sur l’avenir de l’interprétation et de l’application du DIH.

TITLE AND ABSTRACT IN ENGLISH

The African human rights system and international humanitarian law

ABSTRACT: This article examines the way in which the African human rights system tackles or resists to tackle issues relating to international humanitarian law (IHL). The analysis conducted therein is essentially based on the practice of both the African Commission of Human and Peoples’ Rights and the African Court of Human and Peoples’ Rights. In examining whether the African Court and the African Commission may interpret and apply IHL instruments, this article argues that they do in fact have the power to do so. However, on the basis of a close scrutiny of both the Commission and the Court’s practices, the authors note that in instances where the two bodies could have applied IHL norms and standards, they have refrained from doing so. In the last part, the article questions the prospect of the interpretation and the application of IHL by the new African Court of Justice and Human and Peoples’ Rights, essentially through its International Criminal Law Section.

MOTS CLÉS: Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, droit international humanitaire, droits de l’homme, interprétation, application

 

SOMMAIRE:

1 Introduction 

2 La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples et la mise en œuvre du DIH   mise en œuvre du DIH  

3 La Cour africaine des droits de l’homme et des peuples et la mise en œuvre du DIH   œuvre du DIH  

3.1 Fondement de l’application complémentaire des droits de l’homme et du droit international humanitaire dans le Protocole relatif à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples portant création d’une Cour africaine des droits de l’homme et des peuples  

3.2 La pratique de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples en matière d’interprétation et d’application du DIH  

4 Perspectives de mise en œuvre du DIH par la future Cour africaine de justice, des droits de l’homme et des peuples justice, des droits de l’homme et des peuples 

5 Conclusion  

1 INTRODUCTION

L’Afrique est généralement présentée comme le continent où les con-flits armés sont permanents. Ces derniers, dans la plupart de cas, remettent en question le droit censé être d’application, le droit inter-national humanitaire (DIH). Ceci devait normalement conduire à une certaine judiciarisation desdites situations devant les instances régionales ou internationales.

Dans le cadre de son système régional de protection des droits de l’homme, l’Afrique s’est dotée notamment de la Commission et de la Cour africaines des droits de l’homme et des peuples. Celles-ci sont habilitées à se prononcer sur des différends ou questions impliquant principalement l’interprétation et l’application des droits de l’homme sous cet angle. C’est aussi le cas du Comité africain d’experts sur les droits et le bien-être de l’enfant (CAEDBE) qui se charge notamment de la promotion, de la protection et de l’interprétation des droits de l’enfant consacrés par la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant.1 Bien plus, le DIH ne se trouve pas moins concerné par ces mécanismes.

En effet, la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (Charte) indique en ses articles 60 et 61 respectivement les « « sources » du droit dont la « Commission s’inspire » dans l’accomplissement de sa mission, [et les] « sources » du droit qu’elle « prend aussi en considération comme moyens auxiliaires de détermination des règles de droit » ».2 « En réalité ce cadre de référence est plus large encore puisqu’à titre de moyens auxiliaires de détermination des règles de droit, est pris en compte tout le droit international pertinent ».3 Tout ceci dans le but de donner une meilleure protection des droits humains.4 Et tenant compte des Conventions de Genève de 1949 et de leurs Protocoles additionnels dans l’examen des questions du DIH dans le cadre de sa première communication interétatique - Communication 227/99, République Démocratique du Congo c. Burundi, Rwanda, Ouganda - la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples a ainsi considéré en vertu des articles 605 et 616 précités, ces instruments du DIH comme « principes généraux du droit reconnus par les Etats africains ».7

Par ailleurs, le DIH peut également être au cœur de débats non à titre subsidiaire ou d’inspiration comme c’est le cas au niveau de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (ci-après la Commission africaine) mais à titre principal, précisément au niveau de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (ci-après la Cour africaine). En effet, s’il est admis que la Cour africaine peut être saisie notamment pour des questions juridiques concernant l’interprétation ou l’application de « [...] tout autre instrument pertinent relatif aux droits de l’homme et ratifié par les Etats concernés »8 (nous soulignons), il y a lieu d’admettre donc que la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples peut être confrontée directement aux questions du DIH. Cela peut être dans le cadre des « instruments pertinents des droits de l’homme » ou encore dans le sens de sa compétence matérielle. Cette dernière se rapporte spécifiquement aux instruments des droits de l’homme qui font expressément référence aux « règles du droit international humanitaire » notamment la Convention relative aux droits de l’enfant (art 38), la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant (art 22) ou le Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes (art 11(1)).

Dans le même sens, le CAEDBE, composante du système africain de protection des droits de l’homme, dans sa mission d’« [i]nterpréter les dispositions de la [Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant] à la demande des Etats parties [...] »,9 se verra directement confronté au DIH par l’interprétation précisément de l’article 22 précité.

Toutefois dans les faits, la pratique régionale africaine - tout comme celle internationale d’ailleurs - atteste que « les Etats sont peu enclins à engager des affaires contentieuses contre d’autres Etats ».10 Essentiellement au niveau africain, une telle attitude trouve son origine ou sa justification dans une approche centrée sur la communauté en démarcation du système occidental axé sur l’individu.11 En effet, la « solidarité au sein de l’entité communautaire »12 est donc la base dans le système africain des droits de l’homme. Ceci « exclut donc tout individualisme tout en incorporant l’individualité de chacun des membres de la communauté ».13 Ce communautarisme privilégiera donc l’harmonie au point d’exclure le règlement judiciaire. Ainsi, l’Afrique - notamment celle traditionnelle - sera marquée par un droit « essentiellement conciliatoire et non contentieux ».14 Néanmoins, tout en se démarquant en même temps du cadre universel en prenant en considération et en affirmant ses spécificités régionales,15 le système africain de protection des droits de l’homme s’inscrit dans la continuité de l’universalité des droits de l’homme. Il est d’ailleurs vu « comme un moyen de renforcer [cette] universalité ».16

Bien plus, dans le cadre de la Cour africaine notamment, les Etats sont peu enthousiasmés à accepter la compétence de celle-ci pour recevoir des requêtes des ONG et des individus contre eux, conformément à l’article 34(6) du Protocole de Ouagadougou. Seul un petit nombre d’Etats17 parties au Protocole de Ouagadougou ont accepté cette compétence. Le Rwanda, par exemple, avait fait ladite déclaration pour finir par son retrait.18 Cette clause, « verrou juridique à l’exercice de l’actio popularis » compromet gravement le système africain de protection des droits de l’homme.19

Pour tout dire, les décisions de la Commission ou de la Cour africaines des droits de l’homme et des peuples en rapport avec le DIH demeurent très rares. Pour celles qui existent, l’absence d’interprétation des dispositions du DIH voire leur simple citation reste remarquable. Il va sans dire que ces deux instances africaines des droits de l’homme n’offrent pas toujours l’occasion de laisser entendre leurs points de vue sur le contenu du DIH.

Ainsi, mettant de côté le travail du CAEDBE, la présente réflexion s’efforce d’examiner essentiellement la manière dont la Commission ou la Cour africaines appréhendent le DIH sur ces rares décisions ou résistent à l’aborder. Elle tente d’évoquer également les raisons de telles attitudes. En outre, elle s’efforce d’épingler les décisions devant en principe bénéficier d’une lumière en DIH. Et en perspective de la nouvelle Cour africaine de justice, des droits de l’homme et des peuples, le présent article s’interroge sur l’avenir de l’interprétation et de l’application du DIH.

Pour ce faire, il sera d’abord question d’analyser comment la Commission africaine appréhende le DIH, avant d’étudier la même problématique sous l’angle de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples. Enfin, en perspective de la nouvelle Cour, la Cour africaine de justice, des droits de l’homme et des peuples, cet article se propose également de cerner l’avenir du DIH au sein de cette nouvelle juridiction.

2 LA COMMISSION AFRICAINE DES DROITS DE L’HOMME ET DES PEUPLES ET LA MISE EN ŒUVRE DU DIH

La mission de la Commission africaine consiste à la promotion et à la protection des droits de l’homme et des peuples tels que consacrés par la Charte; interpréter les dispositions de la Charte et exécuter toutes les autres tâches qui pourront lui être confiées par la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement20 (cf. art 45 de la Charte). Et dans sa démarche, se fondant sur les articles 60 et 61 de la Charte, la Commission africaine est ouverte au système international de protection des droits de l’homme. Elle s’inspire des instruments des droits de l’homme dudit système. Ce qui vaut de même pour tout le système africain de protection des droits de l’homme dont la Cour africaine.21 Ainsi, « [d]e façon générale, la Commission [africaine] utilise intensivement le droit international des droits de l’Homme extérieur à l’Afrique et en particulier la jurisprudence de la Cour [européenne des droits de l’homme], de la Commission et de la Cour interaméricaines des droits de l’Homme et, au plan universel, celle du Comité des droits de l’Homme et divers textes adoptés par les Nations Unies [...] sans qu’il s’agisse nécessairement de conventions au sens propre du terme ».22 Et dans l’accomplissement de cette mission, le DIH n’est pas absent.

En effet, dans ses activités de « promotion des droits de l’homme et des peuples », la Commission africaine a pris en compte la réalité des conflits armés qui sévissent sur le continent pour se préoccuper de la diffusion du DIH. Lors de sa 12e session ordinaire tenue en octobre 1992 à Banjul (Gambie), la Commission africaine soulignait la nécessité de diffuser et d’appliquer le DIH en période de conflits armés. Consciente des liens qui existent entre les droits de l’homme et le DIH, elle invitait donc les Etats parties aux instruments du DIH à prendre des mesures nécessaires pour la mise en œuvre de celui-ci en période de conflits armés.23 Et dans une résolution ultérieure entièrement dédiée à la promotion et au respect du DIH et des droits de l’homme et des peuples,24 la Commission africaine invitera les Etats parties à la Charte à adopter des mesures idoines pour la diffusion du DIH et des droits de l’homme et des peuples (art 1) et soulignera la nécessité de former des militaires, policiers et autres agents de l’ordre au DIH et aux droits de l’homme et des peuples (art 2). La Commission fera désormais de la promotion du DIH également son cheval de bataille sur le continent. C’est dans ce sens qu’elle insistera sur sa coopération avec le CICR (art 4) et l’échange régulier d’informations entre acteurs du DIH dont le CICR sur les enseignements et la diffusion du DIH (art 3).

La promotion du DIH sera également marquée dans certaines de ses décisions. C’est notamment le cas de l’affaire Constitutional Rights Project et autres c. Nigeria où la Commission affirme que le « gouvernement [Nigeria] doit [...] attacher une attention spéciale [...] aux droits garantis par le droit international humanitaire ».25 Ou encore dans l’affaire Amnesty International et autres c. Soudan où la Commission demande au gouvernement soudanais de prendre toutes les dispositions pour que les populations civiles « soient traitées conformément au droit international humanitaire ».26 Et dans une mission d’enquête déployée au Soudan, au sujet de la situation humanitaire et des droits de l’homme dans la région du Darfour, la Commission africaine recommandait au « gouvernement [soudanais d’] entreprendre des programmes de formation des forces de police et de sécurité aux principes de droits de l’homme et de droit international humanitaire »,27 d’enquêter notamment sur les violations du DIH et de traduire leurs auteurs en justice.28

Par son observation générale 3 qui « entend guider l’interprétation et l’application du droit à la vie »29 considéré par sa jurisprudence comme un « droit fondamental, sans lequel les autres droits ne peuvent être mis en œuvre [...] »,30 la Commission africaine a également appréhendé cette question sous l’angle du DIH. Il ressort de ses analyses que la privation « arbitraire » de la vie en temps de conflits armés s’apprécie suivant les règles du DIH. Pour la Commission africaine « [t]oute violation du droit international humanitaire aboutissant à la mort, y compris les crimes de guerre, sera une privation arbitraire de la vie ».31 Bien que non signifié, ce raisonnement de la Commission africaine a été longtemps développé par la Cour internationale de justice, voire d’autres,32 notamment dans son avis consultatif sur la Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaire, du 8 juillet 199633 ou encore dans son avis consultatif sur les Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif du 9 juillet 2004.34

De ce qui précède, s’il est admis que la Commission africaine tient à la promotion des dispositions liées au DIH notamment au plan national, le plus grand problème demeure dans l’interprétation qu’elle donne aux dispositions des conventions de DIH.

Sur le plan de l’exercice de la « fonction contentieuse », mieux au niveau de la protection des droits de l’hommes et des peuples (art 45(1) de la Charte), la Commission ignore presque le DIH alors qu’elle a la possibilité d’y recourir comme « moyen auxiliaire de détermination des règles de droit » (cf. art 61 de la Charte), mieux encore comme « principes généraux du droit reconnus par les Etats africains ».35

En effet, dans ses différentes décisions impliquant les questions du DIH, la Commission africaine se remarque par une certaine prise de distance, mieux une réticence, au sujet de l’interprétation des dispositions du DIH. Elle recommande généralement aux parties d’observer les règles idoines du DIH sans dire exactement le contenu et la portée de celles-ci. En d’autres termes, la Commission africaine renvoie aux parties d’interpréter elles-mêmes les règles du DIH car « [i]l n’y a pas d’application sans interprétation ».36 A titre illustratif, la réticence d’ « application » du DIH a été expressément affirmée à la Cour européenne des droits de l’homme « [p]endant des décennies et jusqu’à récemment ».37 C’est donc la vision stricte de la compétence de la Cour sauf application de la clause dérogatoire qui y prévalait. Toutefois, même dans le cas d’invocation de la clause de dérogation par le défendeur, il arrivait que la « Cour évite soigneusement de se référer au [DIH] ».38 Et c’est cette même vision stricte qu’adoptait la Cour interaméricaine des droits de l’homme notamment dans l’affaire Las Palmeras, « et ce de manière tranchée et unanime ».39 Justement dans cette dernière affaire, « la Cour a bien marqué la différence entre « appliquer » et « interpréter » le DIH, en précisant que, bien qu’elle ne soit pas compétente pour appliquer ce dernier, elle l’est pour interpréter la Convention américaine à la lumière de celui-ci ».40 Attitude que devait adopter la Commission africaine au regard de l’article 61 de la Charte.

A propos de la Commission africaine, l’examen de deux communications précédemment citées atteste cette position. Et la plus remarquable reste l’analyse de sa première communication interétatique - Communication 227/99, République Démocratique du Congo c. Burundi, Rwanda, Ouganda.

Rappelons préalablement qu’il s’agit d’une première communication étatique. En effet, plusieurs années devraient donc être observées avant qu’une première communication interétatique ne soit introduite auprès de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples.41 A la base, le règne de la tradition juridique africaine de conciliation sur le règlement judiciaire. Et cette même attitude conciliatoire associée à la crainte des Etats africains de voir leur responsabilité engagée par une cour supranationale régionale du fait de leurs diverses violations des droits de l’homme, ou mieux l’attachement de ces Etats à leur souveraineté chèrement et fraîchement acquise, justifieront le rejet ou le ralentissement du processus de création de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples.42

En effet, cette communication a soulevé d’importantes questions de DIH sans une interprétation sérieuse de la part de la Commission africaine.

Au regard de son exposé des faits présentant divers cas des crimes de masse indicibles et de pillages commis sur son territoire et attribués aux forces armées du Burundi, de l’Ouganda et du Rwanda,43 le gouvernement congolais estime qu’il y a eu violations des dispositions des Conventions de Genève du 12 août 1949 et du Protocole additionnel I relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux44 et requiert leur condamnation.

Après avoir soutenu sur la base des articles 60 et 61 de la Charte africaine que les Conventions de Genève et les deux Protocoles additionnels « font partie des principes généraux du droit reconnus par les Etats africains et qu’elle en tient compte dans l’examen de cette affaire »45, la Commission africaine ne fera qu’énumérer le libellé de ces dispositions et aboutir à des condamnations globales sans aucune analyse sérieuse. C’est donc le cas de l’article 75(2) du Protocole additionnel I,46 du Titre III de la Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre,47 de l’article 56 du Protocole additionnel I,48 de l’article 23 de la Convention de La Haye (II) relative aux lois et coutumes de guerre,49 de l’article 76 du Protocole additionnel I,50 etc. D’importantes questions d’occupation soulevées dans le cadre de cette affaire n’ont pas non reçu un sérieux examen.51 Il est également remarquable que la Commission n’ait pas précisé la relation entre le droit international humanitaire, qui constitue la lex specialis en l’espèce, et le droit des droits de l’homme incorporés dans la Charte africaine.52

Toutefois, la Commission africaine fait semblant d’analyse lorsqu’elle fait intervenir l’extrait d’un jugement du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie - l’affaire Procureur c. Zejnil Delalic, Zdravko Mucic, Hazim Delic et Esad Landzo (Jugement Celebici, 16 novembre 1998, paragraphe 587) - pour soutenir l’article 23 de la Convention de La Haye (II) précitée qui se rapporte à l’interdiction de destruction des propriétés ennemies. En clair, la Commission africaine n’y mène aucune analyse sérieuse si ce n’est qu’un simple exercice de « copier-coller ».

De ce qui précède, il importe de rappeler qu’ « [i]l n’y a pas d’application sans interprétation ».53 Une règle de droit même claire mérite interprétation. Ainsi, la Commission africaine n’offre pas l’occasion de laisser entendre son point de vue sur les contenus de ces différentes dispositions du DIH. En clair, l’idée reste de voir comment cette institution se sert du DIH ou manipule celui-ci afin d’assurer une interprétation adéquate aux dispositions de la Charte et améliorer ainsi sa mission de promouvoir et de protéger les droits de l’homme sur le continent. Il ne lui est pas aussi impossible à travers une interprétation audacieuse, comme le font d’autres juridictions régionales, de se prononcer directement et explicitement sur le DIH. Ainsi, la position de la Commission africaine ne semble donc pas claire. Il y a lieu de se demander le pourquoi d’une telle situation.

En effet, à première vue, on pourrait se permettre d’arguer que contrairement aux Conventions européenne des droits de l’homme et américaine relative aux droits de l’homme contenant les clauses de dérogation respectivement au niveau des articles 15 et 27, « « fenêtre ouverte » sur l’application contingente du droit international humanitaire »,54 la Charte africaine ne contient et ne permet donc pas de clauses de dérogation en situations d’urgence.55 Cette absence ne permettrait donc pas à la Commission de s’étendre, comme le font les Cours régionales européenne et américaine des droits de l’homme, sur le DIH à travers « les autres obligations imposées par le droit international ». Mais cette thèse ne saurait être soutenue s’il l’on estime qu’il y a lieu pour la Commission de développer son « pouvoir implicite » en vertu des dispositions dont elle s’inspire pour rechercher une protection efficace aux individus en situation de conflit armé. Et surtout qu’il existe incontestablement dans tous les cas la « clause de sauvegarde » en droit international général auquel s’inscrit non moins la Commission africaine. C’est aussi le sens à réserver aux articles 60 et 61 de la Charte africaine.

D’un autre côté, les prétentions ou argumentations des parties peu développées en DIH, le manque d’expertise dans ce domaine, mieux le manque d’intérêt sur les questions du DIH voire du droit international en général56 au sein de la composition de cet organe pourraient justifier une telle attitude. Logiquement ceci ne semble pas faire progresser le droit international des droits de l’homme et le DIH dans la sphère africaine voire internationale notamment dans leur interaction. D’où, la proposition d’intégrer l’aspect du DIH comme critère de recrutement des Commissaires pour une intégration et une mise en œuvre efficace du DIH dans le système africain de protection des droits de l’homme.57 Ce qui irait également pour la Cour africaine (cf. infra).

Bien plus, le manque d’opportunité pour l’examen des questions liées au DIH par la Commission africaine justifierait aussi le silence de celle-ci. C’est le cas de la Communication 133/94 impliquant l’Association pour la défense des Droits de l’Homme et des Libertés c. Djibouti. Cette dernière faisait état des abus dont seraient victimes les membres d’un groupe ethnique de la part des troupes gouverne-mentales. Cette communication qui aboutissait à un règlement amiable aurait permis à la Commission africaine de faire un développement sur les dispositions du DIH applicables aux civils ne participant pas aux hostilités dans le cadre d’un Conflit armé non-international.58

Pour tout dire, il n’y a donc pas une raison juridiquement valable pour la Commission africaine de ne point interpréter le DIH.

3 LA COUR AFRICAINE DES DROITS DE L’HOMME ET DES PEUPLES ET LA MISE EN ŒUVRE DU DIH

L’interaction entre les droits de l’homme et le DIH est l’un des sujets qui ont fait couler beaucoup d’encre.59 Si la convergence entre les deux disciplines au niveau de la protection de la dignité de la personne humaine ne fait l’objet d’aucun doute au sein de la jurisprudence des cours régionales européenne60 et interaméricaine61 des droits de l’homme (cf. supra), sa consécration par la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (« la Cour africaine ») apparaît encore timide.62 A la question de savoir si la Cour africaine fait une application complémentaire des droits de l’homme et du droit international humanitaire, deux principaux points méritent d’être discutés. Si le premier en recherche le fondement dans la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (3.1), le second analyse la pratique de la Cour africaine sur l’interaction de ces deux corps de règles (3.2).

3.1 Fondement de l’application complémentaire des droits de l’homme et du droit international humanitaire dans le Protocole relatif à la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples portant création d’une Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples

Si l’article 60 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples est plus explicite sur les règles de droit dont s’inspire la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples,63 une disposition de cette nature est, en revanche, introuvable en ce qui concerne la Cour africaine créée pour compléter et renforcer la mission de la Commission.64 Les compétences de la Cour africaine sont en effet régies par les articles 3 et 4 du Protocole portant création d’une Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples.65 Relativement au droit que la Cour applique, la lecture combinée de ces deux dispositions enseigne qu’en matière contentieuse66 et consultative,67 la Cour applique la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, le Protocole à la Charte africaine portant sa création et tout autre instrument pertinent relatif aux droits de l’homme. En claire, la compétence de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples n’est pas limitée aux seuls instruments régionaux des droits de l’homme intervenus dans le cadre de l’Union africaine ou de son prédécesseur, l’OUA. Cette compétence s’étend à tous autres instruments relatifs aux droits humains qui s’avèrent pertinents. A ce titre, pour déterminer si les questions relatives au droit international humanitaire pourraient faire partie des compétences de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, il faut préalablement dire si le droit international humanitaire peut être considéré comme un instrument des droits de l’homme. L’exercice n’est en effet pas fameux tant il est généralement considéré que les droits de l’homme sont « des prérogatives, gouvernées par des règles, que la personne (physique ou morale) détient en propre dans ses relations avec les particuliers et le Pouvoir ».68 Sous cette lecture, il devient difficile de considérer le droit international humanitaire comme un instrument des droits de l’homme et partant, étendre la compétence de la Cour africaine à l’application ou à l’interprétation des règles y relatives.

Dans la pratique de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, deux cas permettent de comprendre l’interprétation que celle-ci fait de « tout instrument pertinent relatif aux droits de l’homme ». D’une part, par la demande d’avis consultatif N°001/2015 introduite par la Coalition pour la Cour pénale et autres, il était notamment demandé à la Cour de dire qu’elle est l’obligation prépondérante entre l’obligation découlant du Statut de Rome en matière de coopération avec la CPI et celle dérivant des résolutions de l’Union africaine qui prescrivent à ses États de ne pas coopérer avec la CPI.69 Il est clair que cette requête invitait préalablement la Cour africaine, s’elle devait exercer sa compétence sur le fondement de l’article 4 de son Protocole, de dire si le Statut de Rome est un instrument des droits de l’homme. Sa réponse est restée ambiguë. Elle ne permet pas de dire quels sont les critères pour qu’un instrument juridique donné soit considéré comme relevant des droits de l’homme. En effet, la Cour n’a pas abordé le fond de la question qui lui était soumise. Elle a préféré adopter une attitude formaliste en considérant que la demande d’avis consultatif ne remplit pas les conditions énoncées à l’article 68(2) du Règlement intérieur de la Cour.70 De l’avis de la Cour, les auteurs de la demande « n’ont pas précisé les dispositions de la Charte ou de tout autre instrument relatif aux droits de l’homme à propos desquels l’avis est demandé » et les « questions soulevées par les auteurs de la demande sont plutôt de l’ordre du droit international public général et ne touchent pas aux questions des droits de l’homme ».71 La Cour a précisé ensuite que « les points soulevés concernent la hiérarchie des normes en droit international public ».72 La Cour n’est pas allée jusqu’au bout de son raisonnement en disant clairement quels sont les éléments qui permettaient d’affirmer que les questions qui lui étaient posées relèvent du droit international public que des droits de l’homme. Pourtant, les auteurs ont indiqué s’appuyer en particulier sur les articles 1, 4, 5, 12, 13 et 86 du Statut de Rome portant création de la Cour pénale internationale et ont également précisé les circonstances à l’origine de leur demande. La question se posait donc de savoir si le statut de Rome peut être ou non considéré comme un « instrument relatif aux droits de l’homme » aux termes de l’article 4 du Protocole et la Cour aurait dû dès lors y répondre clairement.73 Le Juge Fatsah Ouguergouz qui s’est départi de l’opinion majoritaire regrette que la Cour n’ait pu élaborer son affirmation selon laquelle les questions soulevées dans la demande d’avis consultatif relèvent du droit international public général et non des droits de l’homme et qu’elles concernent la hiérarchie des normes en droit international public. Pour le Juge Fatsah Ouguergouz, le fait que les questions soulevées touchent au droit international public général et à la hiérarchie des normes en droit international public en particulier, ne signifie pas nécessairement que ces questions soient étrangères aux droits de l’homme.74 Il considère par ailleurs que « la protection des droits de l’homme que la Cour est chargée d’assurer sur la base du Protocole, est prévue par le droit international et est par définition irriguée par ce droit. De manière générale, toute la question des droits de l’homme est de plus en plus appréhendée par le droit international que ce soit au niveau des sujets, des sources, de la responsabilité internationale ou du règlement pacifique des différends. La matière des droits de l’homme, comme toute autre matière régie par le droit international, est donc susceptible de soulever des questions touchant au droit des traités en général et à la hiérarchie des normes internationales en particulier ».75 La Cour a donc raté l’opportunité de donner une interprétation de ce que le Protocole qualifie de « tout autre instrument pertinent relatif aux droits de l’homme ».

D’autre part, dans une procédure contentieuse, la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples a rendu sa décision dans l’affaire Actions pour la Protection des Droits de l’Homme (APDH) c. la République de Côte d’Ivoire, le 18 Novembre 2016. C’est finalement par cette affaire que la définition de ce qu’il convient d’appeler « instrument des droits de l’homme » en rapport avec l’article 3 du Protocole s’est cristallisée. En effet, la requérante APDH qui est une Organisation non gouvernementale basée à Abidjan, Côte d’Ivoire estimait que la loi ivoirienne n°2014-335 portant composition, organisation, attributions et fonctionnement de la Commission Électorale Indépendante (CEI) n’est pas conforme aux instruments internationaux des droits de l’homme ratifiés par l’État défendeur, plus particulièrement l’article 17(1) de la Charte africaine sur la démocratie, des élections et de gouvernance (« la Charte africaine sur la démocratie) et l’article 3 du Protocole de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance additionnel au Protocole relatif au mécanisme de prévention, de gestion, de règlement des conflits (« Protocol de la CEDEAO sur la démocratie »). La Cour était donc invitée à examiner sa propre compétence et plus spécialement la question cruciale de savoir si les traités prétendument considérés par la requérante comme ayant été violés, en l’occurrence la Charte Africaine sur la démocratie et le Protocole de la CEDEAO sur la démocratie, sont des « instruments de droits de l’homme » au sens de l’article 3 de son Protocole. Pour répondre à cette question, la Cour a dû solliciter, conformément aux articles 45(2) de son Règlement76 et du paragraphe 45 des instructions de procédure de la Cour,77 des avis juridiques à la Commission de l’Union africaine et à l’Institut africain de droit international sur la question de savoir si la Charte africaine sur la démocratique est un instrument relatif aux droits de l’homme au sens de l’article 3 de l’article 3 du Protocole. Les deux institutions ont répondu à cette question en examinant l’objet et le but de ces traités et ont affirmé que, comme ils confèrent des droits et libertés fondamentaux aux individus que les États sont obligés de protéger et de respecter, ils peuvent être qualifiés d’instruments relatifs aux droits de l’homme.78

Dans sa décision, la Cour a choisi d’aborder la question de manière presque identique, estimant que pour déterminer si une convention est instrument des droits de l’homme, il convient de se rapporter principalement à son objet. Celui-ci est décliné soit par une énonciation expresse des droits subjectifs au profit des individus ou groupes d’individus, soit par la prescription à l’égard des États d’obligations impliquant la jouissance conséquente de mêmes droits.79 En l’espèce, la Cour a estimé que l’exigence de la Charte africaine sur la démocratie et le Protocole de la CEDEAO sur la démocratie établissant des organes électoraux nationaux indépendants et impartiaux visait, même indirectement, à mettre en œuvre un certain nombre de droits civils et politiques tels que le droit de participer librement à la direction des affaires publiques de son pays, soit directement, soit par l’intermédiaire de représentants librement choisis (article 13). Les États étant tenus de respecter ces droits, la Cour a conclu que la Charte africaine sur la démocratie et le Protocole de la CEDEAO sur la démocratie sont des instruments relatifs aux droits de l’homme au sens de l’article 3 du Protocole portant sa création, et qu’elle a, en conséquence, compétence pour les interpréter et les faire appliquer. 80

Ceci dit, il importe maintenant de dire si le même raisonnement juridique s’applique aux traités de droit international humanitaire et si, par conséquent la Cour africaine des droits de l’homme a compétence pour les interpréter et les faire appliquer. En effet, suivant une interprétation téléologique conforme à celle développer par la Cour dans l’affaire  Actions pour la Protection des Droits de l’Homme (APDH) c. République de Côte d’Ivoire, un instrument des droits de l’homme est tout instrument visant à protéger la dignité humaine. Selon cette lecture, les traités de droit international humanitaire peuvent être qualifiés d’instruments relatifs aux droits de l’homme. Quoi qu’il en soit, il n’est pas nécessaire que l’intégralité du traité soit considérée pour qu’il soit qualifié d’instrument des droits de l’homme. Cette qualification peut se rapporter à certaines dispositions qui se limitent à reconnaître des droits et imposer des obligations au sein d’un traité. Suivant cette perspective, les conventions de Genève, par exemple, même s’elles ne sont pas considérées comme des traités des droits de l’homme en tant que tels, contiennent certaines dispositions, à l’instar de leur article 3 commun,81 qui pourraient tomber sous la juridiction de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples.

Bien plus, certaines conventions des droits de l’homme qui font partie de la compétence matérielle de la Cour africaine contiennent des dispositions référant expressément au DIH. Il en est notamment de la Convention relative aux droits de l’enfant (art 38), de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant (art 22) ou du Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes (art 11(1)), lesquelles font indication expresse de « règles du droit international humanitaire ». En pareilles situations, l’interprétation et l’application du DIH tombe dans la compétence matérielle de la Cour africaine. 82

3.2 La pratique de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples en matière d’interprétation et d’application du DIH

A ce jour, seulement deux affaires soumises à la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples ont soulevé des questions de DIH: L’affaire Commission africaine des droits de l’homme et des peuples c. la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste et l’affaire Georgia J. Penessis représentant Robert J. Penessis c. République-Unie de Tanzanie.

L’affaire Commission africaine des droits de l’homme et des peuples c. la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste

Dans cette affaire, la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples a ordonné de mesures provisoires dans une situation de conflit armé.83 En l’espèce, les faits de l’affaire sur lesquels la Cour a statué remonte au début du conflit libyen et se rapportent aux événements survenus à l’occasion des bombardements aériens et autres types d’attaques de la population civile à Benghazi du 16 au 20 février 2011.84 C’est dans ce contexte la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples a été saisie de plaintes successives contre la Libye au cours de sa neuvième session extraordinaire tenue à Banjul (Gambie) du 23 février au 3 mars 2011 et a conclu que ces actes constituent des violations graves et massives des droits consacrés par les articles 1, 2, 4, 5, 9, 11, 12, 13 et 23 de la Charte.85 C’est en date du 3 mars 2011 que la Commission a décidé de saisir la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples en accusant les autorités libyennes d’avoir engagé des hostilités armées ayant conduit à des « violations graves et massives des droits de l’homme » garantis par la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples notamment, les violations du droit à la vie et à l’intégrité physique de la personne.

La Cour a estimé que les violations alléguées avaient eu lieu et se poursuivaient au moment de l’examen de la requête et, qu’il existait un risque imminent de pertes en vies humaines. En conséquence, elle a d’office ordonné,86 sans présentation de pièces de procédure écrite par les parties ni tenue d’une procédure orale, des mesures provisoires demandant aux autorités libyennes de s’abstenir de toute autre action contraire à la Charte africaine. 87

L’examen de l’affaire révèle que bien qu’il n’existe aucun doute concernant le caractère de DIH d’un certain nombre de violations identifiées par la Cour,88 celle-ci a choisi de s’écarter de tout langage relatif au DIH préférant n’appliquer que la Charte africaine. La Cour n’a pas jugé nécessaire de distinguer entre les actes constituant des violations de la Charte africaine et ceux qui constituent des violations du DIH. La seule référence au DIH ressort du paragraphe 21 de son ordonnance en indication des mesures provisoires. Dans ce paragraphe, la Cour s’est limitée à noter que les organisations internationales, tant universelles que régionales, en l’occurrence le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine, la Ligue des Etats arabes et le Conseil de sécurité des Nations Unies ont considéré notamment que les attaques perpétrées par les forces libyennes contre la population civile ont été commises en violation des droits de l’homme et du DIH et pourraient constituer des crimes contre l’humanité. Aucun autre développement n’a été fait sur ce point. La Cour a, à cet effet, manqué une bonne occasion d’élaborer sur le statut du DIH dans l’architecture africaine des droits de l’homme89 comme c’est également le cas pour la Commission.

L’affaire n’a hélas pas connu de décision quant au fond parce qu’elle a été rayée du rôle.90 Ceci laisse sans réponse la question de savoir si le DIH pourrait être utilisé dans le traitement ultérieur de l’affaire compte tenu de l’évolution des faits qui, entre février 2011 - date de l’introduction de la requête - et mars 2013, date à laquelle elle a été rayée du rôle, avaient déjà atteint le niveau d’un véritable conflit armé. 91

L’affaire Georgia J. Penessis représentant Robert J. Penessis c. République-Unie de Tanzanie

Cette intéressante affaire92 est encore pendante. La Cour africaine des droits de l’homme a conduit des auditions publiques en cette affaire du 19 au 20 mars 2018. La décision n’est pas encore intervenue. En l’espèce, la Requérante Georgia J. Penessis est une ressortissante de la République-Unie de Tanzanie résidant en Grèce. Elle a saisi la Cour le 10 mai 2015, au nom de son petit-fils, M. Robert John Penessis, qui avait été arrêté et détenu dans une prison tanzanienne pour « présence illégale » en Tanzanie. Selon elle, son petit-fils Robert J. Penessis qui est tanzanien de naissance et de descendance comme elle et tous leurs parents, est détenu depuis le 7 janvier 2013 pour absence de visa d’entrée et est toujours en détention en prison.

La requérante allègue que l’arrestation et la détention de son petit-fils sont illégales et contraires à la Constitution tanzanienne, au Protocole additionnel 1 aux Conventions de Genève la Convention de Genève (article 59(1)) et aux quatre Conventions de Genève (article 1 à 4).

La spécificité de cette affaire concerne les instruments sur lesquels la requérante a choisi de fonder ses prétentions juridiques, à savoir les quatre conventions de Genève de 1949 et leur premier Protocole additionnel de 1977. L’affaire étant probablement en délibéré, il ne sera pas discuté de la véracité ou non des prétentions juridiques de la requérante. Il y a lieu, toutefois, de noter que cette affaire est une bonne opportunité pour la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples de dire, à l’examen de sa compétence, si les conventions de Genève et le Protocole additionnel invoqués pourraient être considérés comme des « instruments relatifs aux droits de l’homme » conformément à l’article 3 du Protocole portant création d’une Cour africaine des droits de l’homme et des peuples. L’affaire  Actions pour la Protection des Droits de l’Homme (APDH) c. République de Côte d’Ivoire précédemment examinée est très instructive à ce sujet. Si la Cour conclut que ces conventions sont des instruments relatifs aux droits de l’homme, elle sera, par ailleurs, invitée à dire si les faits exposés par la requérante rentrent dans le contexte d’un conflit armé qu’elle sera aussi appelée à qualifier juridiquement afin de se convaincre du droit applicable aux violations alléguées. Si la Cour se livre à cet exercice, il y a lieu d’espérer que sa décision à intervenir soit la porte d’entrée pour une meilleure interaction entre les droits de l’homme et le DIH au sein de sa jurisprudence.

4 PERSPECTIVES DE MISE EN ŒUVRE DU DIH PAR LA FUTURE COUR AFRICAINE DE JUSTICE, DES DROITS DE L’HOMME ET DES PEUPLES

La Cour africaine de justice, des droits de l’homme et des peuples (CAJDHP ) résulte d’une fusion de la Cour africaine des droits de l’homme, établie par le Protocole de Ouagadougou de 199893 et de la Cour de Justice de l’Union africaine, créée par le Protocole de Maputo de 2002.94 La fusion de ces deux Cours - en réponse au défi de la prolifération des institutions panafricaines aux coûts exorbitants95 - a donné lieu à la création de deux Sections: la Section des affaires générales et la Section des droits de l’homme. La première Section est chargée, d’une part, de régler les différends internationaux entre Etats africains et, d’autre part, du contentieux de l’Union africaine avec son personnel. La deuxième Section constitue une juridiction régionale des droits de l’homme. Plus tard en juin 2014, l’Union africaine a adopté le Protocole portant amendements au Protocole portant Statut de la Cour africaine de justice et des droits de l’homme (le Protocole de Malabo).96 Ce Protocole vient introduire au sein de la CAJDHP une nouvelle section. C’est la Section de droit international pénal (SDIP).

La SDIP est compétente pour connaître de crimes internationaux. Le Protocole de Malabo n’est pas cependant encore entré en vigueur. Il le sera au 30ème jour du dépôt du 15ème instrument de ratification (article 11). Il s’agira de la toute première cour pénale régionale permanente.97 Aux termes de l’article 28A du Protocole, la CAJDHP, en sa SDIP, est compétente, ratione materiae, pour connaître de quatorze crimes internationaux: génocide, crimes contre l’humanité, crime de guerre, crime relatif au changement anticonstitutionnel de gouverne-ment, piraterie, terrorisme, mercenariat, corruption, blanchiment d’argent, traite des personnes, trafic illicite de stupéfiants, trafic illicite de déchets dangereux, exploitation illicite des ressources naturelles et le crime d’agression.98 L’énumération de ces crimes n’est pas limitative. Elle est plutôt énonciative. L’alinéa 2 de l’article 28A stipule que la liste des crimes susmentionnés peut être actualisée à la lumière du développement du droit international.99

L’exercice de la compétence de la CAJDHP, en sa SDIP, à l’égard des crimes de guerre détaillés à l’article 28D l’invitera sûrement à se pencher sur le DIH tant ces crimes ne se conçoivent que dans le contexte d’un conflit armé. Ainsi, la CAJDHP pourra connaître notamment des infractions graves aux Conventions de Genève du 12 août 1949;100 infractions graves au Premier Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 8 juin 1977 et les autres violations graves des lois et coutumes applicables aux conflits armés internationaux;101  violations graves de l’article 3 commun aux quatre Conventions de Genève du 12 août 1949;102 les autres violations graves des lois et coutumes applicables aux conflits armés ne présentant pas un caractère international, dans le cadre établi par le droit international.103

5 CONCLUSION

La présente réflexion a eu pour mission d’examiner la manière dont le système africain de protection des droits de l’homme appréhende le DIH, essentiellement la Commission et la Cour africaines des droits de l’homme et des peuples. Et dans le cadre de mutation dudit système, cette étude a pu également analyser la question sous l’angle de la nouvelle Cour, la CAJDHP.

En effet, l’examen de différents rapports d’activités de la Commission atteste que celle-ci incorpore la promotion du DIH dans son champ d’action. Ceci est remarquable dans ses missions d’enquêtes, résolutions ou décisions, etc. Cependant, dans ses différentes décisions impliquant les questions du DIH, la Commission africaine se remarque par une certaine prise de distance, mieux une réticence, au sujet de l’interprétation des dispositions du DIH. Ceci est sans raison dans la mesure où la Commission a la possibilité d’y recourir comme « moyen auxiliaire de détermination des règles de droit » (cf. art 61 de la Charte), mieux encore comme « principes généraux du droit reconnus par les Etats africains » (articles 60 et 61 de la Charte). Dans l’examen de différentes communications dont la première communication interétatique - Communication 227/99, République Démocratique du Congo c. Burundi, Rwanda, Ouganda - la Commission africaine s’est illustrée par des simples énumérations ou citations des dispositions conventionnelles sans analyses sérieuses d’importantes questions de DIH soulevées. Ceci ne devait donc pas permettre une mise en œuvre efficace de la Charte africaine en période de conflits armés, mieux encore du DIH dans la sphère continentale.

Au niveau de la Cour africaine, ce que l’on peut tirer de l’analyse précédente est que la mise en application du droit international humanitaire n’est pas expressément envisagée dans la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples. C’est à l’aune de l’interprétation des articles 3 et 4 du Protocole portant création de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples qu’il convient de rechercher si ces conventions en matière de DIH peuvent être interprétées comme « tout autre instrument relatif aux droits de l’homme » pour rentrer dans la compétence contentieuse et consultative de la Cour. Dans les rares cas où l’opportunité a été donnée à la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples d’élaborer sur les questions de DIH, elle s’est gardée de la faire comme cela est relevée par l’affaire Commission africaine c. la Libye. Bien que sa portée juridictionnelle soit sans doute assez large pour couvrir les normes du droit international humanitaire, la Cour ne s’y est pas appuyée dans son ordonnance en indication de mesures provisoires. Dans l’affaire Georgia J. Penessis représentant Robert J. Penessis c. République-Unie de Tanzanie, les normes de DIH sont directement invoquées comme fondement des prétentions juridiques du requérant. Il y a lieu d’espérer que la Cour se départisse de sa réticence à l’égard du droit international humanitaire dans sa décision à intervenir.

Avec les amendements successifs intervenus au sein du système africain de protection des droits de l’homme jusqu’à l’institution de la future Cour africaine de justice, des droits de l’homme et des peuples, la nouvelle CAJDHP, en sa SDPI, a une compétence ratione materiae bien établie à l’égard de l’interprétation et l’application du DIH. La Cour n’aura pas de choix entre l’applications des normes des droits de l’homme et du DIH. Ces dernières s’imposent tant l’existence d’un conflit armé est un des éléments constitutifs du crime de guerre et ce dernier ne se rapporte qu’aux violations du DIH.


1. Lire l’article 42 de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant.

2. M Kamto ‘Article 61’ in M Kamto (dir) La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et le protocole y relatif portant création de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples. Commentaire article par article (2011) 1117.

3. H Gherari ‘La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples’ in P Tavernier (dir) Regards sur les droits de l’homme en Afrique (2008) 148.

4. E A Ankumah The African Commission on Human and Peoples’ Rights. Practices and procedures (1996) 182.

5. Lire pour approfondissement E Decaux ‘Article 60’ in Kamto (n 2) 1105-1116.

6. Lire pour approfondissement M Kamto ‘Article 61’ in Kamto (n 2) 1117-1140.

7. Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, Communication 227/99, République Démocratique du Congo c. Burundi, Rwanda, Ouganda, paras 70 et 78, voir aussi les paras 83, 84 et 86.

8. Lire l’article 3(1) du Protocole relatif à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples portant création d’une Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, Ouagadougou (Burkina Faso), le 9 juin 1998. Voir aussi l’article 7 au sujet du ‘droit applicable’ et T Ondo ‘La jurisprudence de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples: entre particularisme et universalité’ (2017) 1 Annuaire africain des droits de l’homme 245-246.

9. Lire l’article 42 de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant.

10. G Niyungeko ‘La Cour africaine des droits de l’homme et des peuples: défis et perspectives’ (2009) 79 Revue trimestrielle des droits de l’homme 736.

11. M Kamto ‘Charte africaine, instruments internationaux de protection des droits de l’homme, constitutions nationales: Articulations respectives’ in J-F Flauss & E Lambert-Abdelgawad (dirs) L’application nationale de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (2004) 11.

12. K Mbaye Les droits de l’homme en Afrique (2002) 71.

13. J Matringe Tradition et modernité dans la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples. Etude du contenu normatif de la Charte et de son apport à la théorie du droit international des droits de l’homme (1996) 69-70.

14. Mbaye (n 12) 72.

15. Lire M Kamto ‘Charte africaine, instruments internationaux de protection des droits de l’homme, constitutions nationales: Articulations respectives’ in J-F Flauss & E Lambert-Abdelgawad (n 11) 11-13 & 25.

16. A Dieng ‘La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples: point d’arrivée d’un processus historique’ in G M Palmieri (dir) La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, Actes du Colloque, Trieste, 30-31 octobre 1987, Institut international d’études des droits de l’homme (1990) 22. Lire aussi K Mbaye ‘Les droits protégés et les procédures prévues par la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples’ in G M Palmieri (dir) La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, Actes du Colloque, Trieste, 30-31 octobre 1987, Institut international d’études des droits de l’homme (1990) 33. Lire aussi T Ondo ‘La jurisprudence de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples: entre particularisme et universalité’ (2017) 1 Annuaire africain des droits de l’homme 255-262. Dans le même sens, l’article 6 de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance du 30 janvier 2007, entrée en vigueur le 15 février 2012, dispose: ‘Les Etats parties s’assurent que les citoyens jouissent effectivement des libertés et droits fondamentaux de l’homme en prenant en compte leur universalité, leur interdépendance et leur indivisibilité’ (nous soulignons).

18. En février 2016, le Rwanda déposait son instrument de retrait de sa déclaration en vertu de l’article 34(6) du Protocole de Ouagadougou. Voir Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, affaire Kayumba Nyamwasa et autres c. République du Rwanda, Requête n°016/2015, Ordonnance du 3 juin 2016, 3, paras 3-4.

19. Lire G-F Ntwari ‘La Cour africaine des droits de l’homme et des peuples à la croisée des chemins - Bilan des cinq premières années d’activités judiciaires’ (2015) 102 375-376.

20. Ainsi dans l’exécution de “toutes autres tâches” qui pourront lui être confiées, la Commission africaine peut se voir attribuer la mission de déterminer si la conduite d’un Etat dans un conflit armé est contraire à l’esprit de la Charte. Ce qui ferait logiquement intervenir des questions de DIH. Voir F Z Ntoubandi ‘Comment - enforcement of international humanitarian law through the human rights organs of the African Union’ in H Krieger (dir) Inducing compliance with international humanitarian law. Lessons from the African Great Lakes Region (2015) 302.

21. Lire par exemple l’article 46 de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant (11 juillet 1990) et le 4e considérant du Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique (11 juillet 2003).

22. H Gherari ‘La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples’ in P Tavernier (dir) Regards sur les droits de l’homme en Afrique (2008) 148.

23. Lire les paragraphes 11 et 12 de l’Annexe VII - Conclusions et recommandations du Séminaire sur la mise en oeuvre au Plan national de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, 26-30 octobre 1992 à Banjul, Gambie, in Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, Sixième Rapport annuel d’activités de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples 1992-1993, http://www.achpr.org/fr/activity-reports/6/ (source consul-tée le 9 août 2018).

24. Résolution sur la promotion et le respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme et des peuples, Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, réunie en sa 14eme Session Ordinaire, à Addis Abéba, Ethiopie, du 1er au 10 décembre 1993 in http://www.achpr.org/fr/sessions/14th/resolutions/7/ (source consultée le 6 juin 2018).

25. Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, Communication 102/93, Constitutional Rights project et autres c Nigeria, in http://www.achpr.org/fr/communications/decisions/?c=55&o=845 (source consultée le 9 août 2018).

26. Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, Communication 48/90, 50/91, 89/93, Amnesty International, Comité Loosli Bachelard, Lawyers Committee for human Rights, Association des membres de la Conférence épiscopale de l’Afrique de l’Est c. Soudan, 26e session ordinaire, novembre 1999, 13e Rapport annuel d’activités, in http://www.achpr.org/fr/communications/decisions/?o=845&p=4 (source consultée le 9 août 2018).

27. Rapport de la mission d’enquête de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples dans la Région du Darfour, République du Soudan, para 143, in http://www.achpr.org/fr/states/sudan/missions/fact-finding-2004/ (source consultée le 10 août 2018).

28. Ibid, para 138, a et b.

29. Lire le Résumé, Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, Observation générale 3 sur la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples: le droit à la vie (article 4), http://www.achpr.org/fr/instruments/general-comments-right-to-life/ (source consultée le 8 août 2018).

30. Lire le Résumé, Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, Observation générale 3 sur la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples: le droit à la vie (article 4), http://www.achpr.org/fr/instruments/general-comments-right-to-life/ (source consultée le 8 août 2018).

31. Lire le Résumé, Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, Observation générale 3 sur la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples: le droit à la vie (Article 4), p. 16. http://www.achpr.org/fr/instruments/general-comments -right-to-life/ (source consultée le 8 août 2018)

32. Lire F Martin ‘Application du droit international humanitaire par la Cour interaméricaine des droits de l’homme’ (2001) 83(844) Revue internationale de la Croix-Rouge 1046.

33. Lire CIJ, Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaire, Avis consultatif du 8 juillet 1996, Recueil 1996, 240, para 25.

34. Lire CIJ, Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif du 9 juillet 2004, Recueil 2004, 177-178, para 105.

35. Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, Communication n°227/99 République Démocratique du Congo/ Burundi, Rwanda, Ouganda, paras 70 et 78, voir aussi les paras 83, 84 et 86.

36. J-M Sorel ‘Convention de Vienne de 1969, article 31 Règle générale d’interprétation’ in O Corten & P Klein (dirs) Les Conventions de Vienne sur le droit des traités. Commentaire article par article, Vol. II (2006)1292.

37. L-A Sicilianos ‘L’articulation entre droit international humanitaire et droits de l’homme dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme’ (2017) 27 Revue suisse de droit international et européen 5.

38. L-A Sicilianos ‘L’articulation entre droit international humanitaire et droits de l’homme dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme’ (2017) 27 Revue suisse de droit international et européen 5.

39. F Martin ‘Application du droit international humanitaire par la Cour interaméricaine des droits de l’homme’ (2001) 83(844) Revue internationale de la Croix-Rouge 1038.

40. Juana María Ibáñez Rivas ‘Le droit international humanitaire au sein de la jurisprudence de la Cour interaméricaine des droits de l’Homme’ (2017) 11 Revue des droits de l’homme 2 http://revdh.revues.org/2799 (source consultée le 9 août 2018).

41. Voir Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, Communication 227/99 République Démocratique du Congo/ Burundi, Rwanda, Ouganda, in http://www. achpr.org/fr/communications/decision/227.99/ (source consultée le 12 juillet 2017).

42. T Barsac (2012) La Cour africaine de justice et des droits de l’homme 19-21; M Mubiala ‘La Cour africaine des droits de l’homme et des peuples: mimétisme institutionnel ou avancée judiciaire’ (1998) 3 Revue générale de droit international public 765.

43. Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, Communication 227/99, République Démocratique du Congo c. Burundi, Rwanda, Ouganda, paras 2-7 in http://www.achpr.org/fr/communications/decision/227.99/ (source consultée le 10 août 2018).

44. Para 9.

45. Paras 70 et 78.

46. Para 71.

47. Paras 79 et 89.

48. Para 82.

49. Para 84.

50. Para 86.

51. Paras 72, 76, 87 et 88.

52. F Z Ntoubandi ‘Comment - enforcement of international humanitarian law through the human rights organs of the African Union’ in H Krieger (dir) Inducing compliance with international humanitarian law. Lessons from the African Great Lakes Region (2015) 305-306.

53. J-M Sorel ‘Convention de Vienne de 1969, article 31 Règle générale d’interprétation’ in O Corten & P Klein (dir) Les Conventions de Vienne sur le droit des traités. Commentaire article par article, Vol. II (2006) 1292.

54. F Martin ‘Application du droit international humanitaire par la Cour interaméricaine des droits de l’homme’ (2001) 83(844) Revue internationale de la Croix-Rouge 1055.

55. Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, 9e Rapport annuel d’activités, octobre 1995, Communication 74/92, Commission Nationale des Droits de l’Homme et Libertés c. Tchad, para 36; ou Commission Nationale des Droits de l’Homme et des Libertés c. Tchad RADH 2000 343 (CADHP 1995); Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, 13e Rapport annuel d’activités, novembre 1999, Communications 140/94, 141/94 et 145/95, Constitutional Rights project et autres c. Nigeria, para 41, in http://www.achpr. org/fr/communications/decisions/?c=55&o= 845 (source consultée le 9 août 2018), ou Constitutional Rights Project et Autres c. Nigeria RADH 2000 234 (CADHP 1999).

56. Lire l’article 31 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.

57. F Z Ntoubandi ‘Comment - enforcement of international humanitarian law through the human rights organs of the African Union’ in H Krieger (ed) Inducing compliance with international humanitarian law. Lessons from the African Great Lakes Region (2015) 311.

58. Lire Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, 13e Rapport annuel d’activités, novembre 1999, Communications 140/94, 141/94 et 145/95, Constitutional Rights project et autres c. Nigeria, §41, in http://www.achpr.org/fr/communications/decisions/?c=55&o=845 (source consultée le 09 août 2018), ou in F Viljoen (dir) Recueil africain des décisions des droits humains 2000 (2005) 72-75.

59. Voir notamment R Kolb et G Gaggioli (éd) Research Handbook on Human Rights and Humanitarian Law, Cheltenham and Northampton (2013); A Orakhelashvili ‘The interaction between human rights and humanitarian law: Fragmentation, conflict, parallelism, or convergence?’ (2008) 19 European Journal of International Law 161-182; M Sassòli et L M Olson ‘The relationship between international humanitarian and human rights law where it matters: admissible killing and internment of fighters in non-international armed conflicts’ (2008) 90(871) International Review of the Red Cross 608; H P Gasser ‘International humanitarian law and human rights law in non-international armed conflict: joint venture or mutual exclusion?’ (2002) 45 German Yearbook of International Law 149-162; C Droege ‘The interplay between international humanitarian law and international human rights law in situations of armed conflict’ (2007) 40 Israel Law Review 310-355; lain Scobbie ‘Principle or pragmatics? The relationship between human rights law and the law of armed conflict’ (2010) 14 Journal of Conflict & Security Law 449-457.

60. Voir L-A Sicilianos ‘L’articulation entre droit international humanitaire et droits de l’homme dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme’ (2017) 27 Revue suisse de droit international et européen 3-17.

61. Juana María Ibáñez Rivas ‘Le droit international humanitaire au sein de la jurisprudence de la Cour interaméricaine des droits de l’Homme’ (2017) 11 Revue des droits de l’homme [En ligne], http://revdh.revues.org/2799 , (consulté le 11 août 2018).

62. Voir F Viljoen ‘The relationship between international human rights and humanitarian law in the African system: an institutional approach’ in E de Wet & J Kleffner (dir) Convergence and conflicts of human rights and international humanitarian law in military operations (2014) 303-332.

63. Article 60: ‘La Commission s’inspire du droit international relatif aux droits de l’homme et des peuples, notamment des dispositions des divers instruments africains relatifs aux droits de l’homme et des peuples, des dispositions de la Charte des Nations Unies, de la Charte de l’Organisation de l’Unité Africaine, de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, des dispositions des autres instruments adoptés par les Nations Unies et par les pays africains dans le domaine des droits de l’homme et des peuples ainsi que des dispositions de divers instruments adoptés au sein d’institutions spécialisées des Nations Unies dont sont membres les parties à la présente Charte’.

64. Voir 8(e) considérant du Préambule du Protocole relatif à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples portant création d’une Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples: ‘Fermement convaincus que la réalisation des objectifs de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples nécessite la création d’une Cour africaine des droits de l’homme et des peuples pour compléter et renforcer la mission de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples’.

66. Article: Compétences de la Cour

La Cour a compétence pour connaître de toutes les affaires et de tous les différends dont elle est saisie concernant l’interprétation et l’application de la Charte, du présent Protocole, et de tout autre instrument pertinent relatif aux droits de l’homme et ratifié par les États concernés.

67. Article 4: Avis Consultatif

A la demande d’un État membre de l’OUA, de l’OUA, de tout organe de l’OUA ou d’une organisation africaine reconnue par l’OUA, la Cour peut donner un avis sur toute question juridique concernant la Charte ou tout autre instrument pertinent relatif aux droits de l’homme, à condition que l’objet de l’avis consultatif ne se rapporte pas à une requête pendante devant la Commission.

68. J Mourgeon (1997) Les droits de l’homme 7.

69 Voir Demande d’avis consultatif introduite par ‘the Coalition on international criminal court LTD/GTE(CICCN), the Legal defense & assistance project LTD/GTE (LEDAP), the Civil resource development & documentation center (CIRDDOC), the

69. Women advocate documentation center LTD/GTE (WARDC)’. Ordonnance n°001/2015.

70. ‘Toute demande d’avis consultatif précisera les dispositions de la Charte ou de tout autre instrument international relatif aux droits de l’homme à propos desquels l’avis est demandé, les circonstances à l’origine de la demande, ainsi que les noms et adresses de représentants des entités ayant introduit la demande’.

71. Voir Paragraphe 18 de l’Ordonnance.

72. Ibid.

73. Voir Opinion dissidente du Juge Fatsah Ouguergouz jointe à l’Ordonnance de la Cour, para 17.

74. Voir Opinion dissidente du Juge Fatsah Ouguergouz, para18.

75. Ibid, para. 19.

76. La Cour peut demander à toute personne ou institution de son choix de recueillir des informations, exprimer un avis ou lui faire un rapport sur un point déterminé.

77. La Cour peut, de sa propre initiative, inviter un individu ou une organisation à intervenir en qualité d’amicus curiae dans le cadre d’une affaire pendante devant elle.

79. Ibid, para 57.

80. Ibid.

81. L’article 3-1 commun aux quatre Convention de Genève dispose: ‘En cas de conflit armé ne présentant pas un caractère international et surgissant sur le territoire de l’une des Hautes Parties contractantes, chacune des Parties au conflit sera tenue d’appliquer au moins les dispositions suivantes: (...) [l]es personnes qui ne participent pas directement aux hostilités, y compris les membres de forces armées qui ont déposé les armes et les personnes qui ont été mises hors de combat par maladie, blessure, détention, ou pour toute autre cause, seront, en toutes circonstances, traitées avec humanité, sans aucune distinction de caractère défavorable basée sur la race, la couleur, la religion ou la croyance, le sexe, la naissance ou la fortune, ou tout autre critère analogue. A cet effet, sont et demeurent prohibées, en tout temps et en tout lieu, à l’égard des personnes mentionnées ci-dessus: (a) les atteintes portées à la vie et à l’intégrité corporelle, notamment le meurtre sous toutes ses formes, les mutilations, les traitements cruels, tortures et supplices  (b) les prises d’otages; (c) les atteintes à la dignité des personnes, notamment les traitements humiliants et dégradants  (d) les condamnations prononcées et les exécutions effectuées sans un jugement préalable, rendu par un tribunal régulièrement constitué, assorti des garanties judiciaires reconnues comme indispensables par les peuples civilisés ’.

82. Voir Viljoen (n 62) 324.

83. Voir African Commission on Human and Peoples’ Rights v Great Socialist People’s Libyan Arab Jamahiriya (Application 004/2011, Order for Provisional Measures), 25 March 2011.

84. Para 2.

85. Para 3.

86. Le Paragraphe 2 de l’article 27 du Protocole et le Paragraphe 1 de l’article 51 du Règlement de la Cour confèrent à celle-ci le pouvoir d’ordonner d’office, ‘dans les cas d’extrême gravité ou d’urgence et lorsqu’il s’avère nécessaire d’éviter des dommages irréparables à des personnes’, des mesures provisoires ‘qu’elle estime devoir être adoptées dans l’intérêt des parties ou de la justice’.

87. African Commission on Human and Peoples’ Rights v Great Socialist People’s Libyan Arab Jamahiriya (n 83).

88. Voir aussi les termes des Résolutions du Conseil de sécurité des nations unies 1970 du 26 février 2011 et 1973 du 17 mars 2011.

89. Dans le même sens, voir F Z Ntounbandi ‘Comment - Enforcement of international humanitarian law through the human rights organs of the African Union’ in H Krieger (dir) Inducing compliance with international humanitarian law: Lessons from the African Great Lakes Region (2015) 308.

90. Voir affaire Commission africaine des droits de l’homme et des peuples c. Grande Jamahiriya Arabe Libyenne Populaire et Socialiste (requête n° 004/2011), Décision du 15 mars 2013.

91. Voir Viljoen (n 62) 325.

92. Requête n° 013/2015, Georgia J. Penessis représentant Robert J. Penessis c. République-Unie de Tanzanie.

95. En ce sens, M Mubiala ‘Chronique de droit pénal de l’Union Africaine. L’élargissement du mandat de la Cour africaine de Justice et des droits de l’homme aux affaires de droit international pénal’ 750.

97. Voir E A Cirimwami & S Smis ‘Repenser la création fragmentée des juridictions pénales internationalisées en Afrique au profit de la Cour africaine de justice et des droits de l’homme’ (2017) 2 Revue belge de droit international 313-336.

98. Pour une vue analytique de chacun de ces crimes, K Ambos ‘Genocide (Article 28B), Crimes Against Humanity (Article 28C), War Crimes (Article 28D) and the Crime of Agression (Article 28M) in G Werle et V Moritz (dir.) The African Criminal Court. A commentary on the Malabo Protocol (2016) 31-55; G Kemp et S Kinyunyu ‘The Crime of Unconstitutional Change of Governement (Article 28E)’, ibid, pp. 57-70; F Jebberer ‘Piracy (Article 28F), Terrorism (Article 28G) and Mercenarism (Article 28H)’, ibid, 71- 87; Lovell D Fernandez ‘Corruption (Article 28I) and Money Laundering (Article 28Ibis)’, ibid, 89-107; F M-Silingwe ‘Trafficking in Persons (Article 28J) and Trafficking in Drugs (Article 28K)’ ibid, pp. 109-123; M Heger ‘Trafficking in Hazardous Wastes (Article 28L) and Illicit Exploitation of Natural Resources (Article 28Lbis)’, ibid, pp. 125-136.

99. Cirimwami & Smis (n 97) 321.

100. Article 28D(a).

101. Article 28D(b).

102. Article 28D(c).

103. Article 28D(e).